Magic -Pan & Super-Van by Georges Barris…
J’ai déjà traité/causé de Georges Barris… De Los-Angeles sur Pacifique… D’Hollywood… De Venice et de sa banlieue… Tout ça dans je ne sais plus quels chapitres de mon œuvre colossale dont Chromes&Flammes (devenu Gatsby) n’est qu’un épisode dont le retentissement fut énorme (également aux USA sous le nom de TopWheels) car il apportait enfin la solution à tous les problèmes que mes lecteurs n’avaient pas (encore). Si tu as oublié, mon Popu qui me lit avec la délectation d’un voyeur anonyme, cours acheter le dernier GatsbyMagazine au Kiosque le plus proche de ton fourbi (10€), et, pour le cas où tu ne le trouverais plus, envoie un émail de commande à GatsbyOnline ou se trouve en permanence mes “zœuvres” ! Bref, dans l’épisode que tu as commencé à lire, mon Popu, je “suisse” de retour dans la capitale du vice et du cinoche par un beau soleil capiteux. Le prestigieux mot “Hollywood” s’inscrit toujours en immenses caractères blancs sur le vert de la colline où l’on a tourné tant de conneries, plus quelques chefs-d’œuvre en black and white que la télé nous repasse parfois sur le coup (unique) d’une heure du matin !
Cette fois, je suis invité dans une villa sur le front de mer afin de discutailler d’un épisode presque inconnu des Français, avec un richissime ami qui n’a pas lésiné sur les dépenses. Non seulement il m’a fait voyager en First-class, mais de plus, à peine arrivé chez lui à Venice, il m’a installé dans la chambre d’ami(e)s vue Pacifique en compagnie d’une magnifique plante vénéneuse. Une fille qu’il m’avait décrite comme ayant les sens calmes, davantage tournée vers l’étude que vers “la chose”, qui n’avait connu que de brèves et décevantes expériences amoureuses et qui, me sachant débouler en Californie, était en effervescence d’entrer en relations privées avec moi suite aux bouffées de chaleur que lui prodiguaient mes texticules publiés dans “GatsbyOnline”, section “SecretsInterdits”… Chaud ! Dixit mon ami, rien que “Pour parler”... Je lui avais préalablement fait valoir que mon statut d’invité ne m’autorisait guère des réceptions impromptues, mais tu connasses l’adage, n’est-il pas mon Popu ! L’adage est primordial pour saisir la suite (ce qui est déjà un putain de double-sens) ! Ce que femme veut… Trente secondes plus tard, elle franchissait mon seuil de tolérance et, séance tenante, s’emparait de mon moi profond à l’insu de mon plein gré !
Je dois à la vérité de te dire, mon Popu, que la résistance que je lui ai opposé manquait d’énergie et que mes protestations de véhémence furent brèves. Mais, il restait de la pucelle en elle, aussi parvint-elle à ses fins assez rapidement après force exercices préliminaires dont je t’épargnerai les détails, toutes choses qui conduisent à l’écume du plaisir sans t’en accorder la félicité. Enfin, à force de louches bricolages, de manigances lubrifiées, cette admirable fille put se vanter d’une splendide victoire sur moi (c’est un double sens d’autant que je préfère, vu mon âge, jouir par dessous), ardemment et chèrement acquise. Elle m’a ainsi à l’insu de mon plein gré, dispensé/distillé une période de vrais bonheurs, m’assurant que, “malgré notre énorme différence d’âge de presque 50 ans” (Glup !), je resterais à jamais l’homme de sa vie et qu’elle ne m’oublierait plus…
J’ai découvert au petit matin naissant un paysage qui en ferait mouiller plus d’une, mais qui cependant m’a laissé tiède, car je hais les chromos (ils stéréotypent les rêves des gens, leur insufflant des désirs d’évasion qui deviennent pacotilles, passés au filtre de leur sottise). De part et d’autre sur la route de bord d’océan, n’existent que des somptueuses propriétés hors de prix, d’immenses piscines aux architectures bizarres faisant appel à tous les bleus et tous les verts jamais conçus par la nature ou par l’homme. Aux pieds, l’océan, dit Pacifique, avec des voiles, des bateaux à moteur, des véliplanchistes, des carcasses bronzées, des nuages au loin, des lutins, des butins, des hutins, des mutins, des putains grouillant. Je me suis alors décidé d’appeler Jimmy Smith, l’homme qui devait me conter toute l’histoire du “Magic Pan” et du “Super Van” de Georges Barris… Il m’a répondu : “Wouahhhh, c’est vous ? C’est bien vous ? Le fumeux et fameux Patrice De Bruyne ?”, sachant que j’étais forcément moi-même, il s’est sur-exclamé de satisfaction parce que j’étais à Los Angeles et il m’a paru fortement impressionné d’apprendre que je logeait en compagnie d’une superbe plante vénéneuse chez Douglas T.C.Levy, l’empereur d’Hollywood.
-“Je viens tout de suite” ! m’a-t-il annoncé en produisant déjà un bruit de moteur d’auto avec la bouche…
Je me suis alors après avoir raccroché, attardé un instant devant une poupée gonflable installée à mon attention sexuelle, dans un fauteuil, par la plante vénéneuse qui s’était mise en sommeil en espérant vraisemblablement ne pas devoir subir mes assauts (impétueux). Sur le guéridon posé près d’elle, se trouvait une sorte de tableau constellé d’une série de touches dont chacune comportait une indication. Sur la première, était écrit “voice”. Je l’ai enfoncé. Le mannequin s’est alors mis à jacter avec la voix de Marilyn Monroe (c’est d’ailleurs le prénom de la poupée). T’ai-je informé mon Popu qu’elle portait des bas, un porte-jarretelles, une culotte noire fendue et un boléro d’hermine ? Typique du mauvais goût Yankee, d’autant plus que sa chevelure était d’un blond pétasse très platiné. Elle m’a dit : “Bonjour, beau gosse. Je m’appelle Marilyn et tu me fais mouiller de désir. Si tu veux que je te commence par une pipe, enclenche la touche numéro deux. Si tu veux me bouffer la chatte, use de la touche numéro trois. Pour baiser, il faut me porter sur le lit et revenir enclencher la numéro quatre. En ce qui concerne l’étreinte anale, enduis ton sexe de vaseline (le pot est près des commandes) car je suis neuve et mon anus est encore en rodage. Pour d’autres fantaisies, reporte-toi à la notice qui se trouve sous mon bas de la jambe droite. Terminé”.
N’ayant pas la perversité robotique, j’ai délaissé cette compagne des temps futurs et suis allé me “faire foutre” tout en me servant un verre de Château-Yquem en attente de la visite de Jimmy Smith, mon informateur, qui finit par arriver une heure pluche tard pour me révéler des détails sordides :
-“La mort de Dorothy Stratten aux mains de son mari, Paul Snider, a été le couronnement d’une histoire unique des années ’70 et d’Hollywood. Cette histoire va être ensuite utilisée dans un film Hollywoodien nommé “Death of a Centerfold ; The Dorothy Stratten Story” avec Jamie Lee Curtis dans le rôle de Stratten et Bruce Weitz dans le rôle de Snider. Mais également dans le long métrage “Star 80” de Bob Fosse, avec Mariel Hemingway et Eric Roberts. Près de deux décennies plus tard, le “E Channel” local a décidé de diffuser un reportage sur la tragédie une fois de plus. Ils m’ont contacté pour une interview, car je connaissais Snider avant sa mort. Nous devrions aller discuter de tout cela avec Bob O’Neil Junior, un de mes amis”...
Et nous sommes parti, mon bien cher Popu ! Parti sur l’interminable Sunset Boulevard (100 km) qui se déroulait à l’infini. La voie était large, bordée de luxueuses propriétés cachées derrière des frondaisons luxuriantes (où se pratiquait la luxure locale). Après quarante minutes, on s’est pointé à la villa Tequila, extrêmement ravissante, avec une grille peinte en vert bronze, une large pelouse sur laquelle des soldats rouges et bleus, de je ne sais quelle armée d’opérette, étaient figés dans une manœuvre qui aurait pu être britannique. Au-delà, se découvrait une grande maison cubique, blanche, avec des briques vernissées autour des ouvertures. C’est là que l’ultime élément-réponse de ma quête journalistique, Bob O’Neil Junior, coulait ses bronzes ainsi que ses heures de repos ! Il y avait de la lumière plein l’intérieur. J’ai actionné le timbre de l’entrée et la grille s’est majestueusement ouverte, j’ai alors aperçu l’ami de Jimmy Smith sur la terrasse, qui nous attendait. A mesure que nous avancions, j’ai constaté qu’il était dans un fichu état (en pyjama de soie blanc à revers gansés de noir), lorsqu’il a été agressé. Sa gueule était en compote et son vêtement plein de sang.
—”Merci d’être venu” s’est-il écrié ! “Ne vous formalisez pas de mon état j’ai glissé sur un savon”…
J’ai demandé illico à Jimmy Smith le pourquoi du comment de toute cette affaire ! Passe le temps, sonne l’heure : l’ennui s’enfuit, je demeure… “Je ne crois pas à son histoire de savon ! Qui lui a cassé la gueule ? Et Pourquoi ? Qu’est ce que cette histoire ? Dans quoi m’entrainez-vous ?”…
-“Comment l’ai-je connu ? De la façon dont la plupart des gens se rencontrent, bien sûr : en utilisant le “Super Van” de George Barris pour promouvoir un concours de sosies de Farrah Fawcett. Cette histoire aventureuse a commencé au milieu des années ’70, lorsqu’on pouvait acheter une toute nouvelle BMW 320i pour 7.990 $ et la remplir d’essence pour 69 cents le gallon. Je conduisais alors un VW bus rouge et blanc avec un toit ouvrant à manivelle et un levier de vitesses à bouton “pax” que j’ai maintenant sur ma Karmann Ghia’71, dans le cadre de mon arsenal photo en tant que photographe de studio et de localisation dans la région d’Hollywood. J’avais fièrement obtenu mon diplôme de l’Art Center College of Design en filmant des nananas à poils car à cette époque elles ne se rasaient pas la chatte. Un certain nombre d’années auparavant j’avais travaillé avec Charles Lange de “Media Technique”, une importante société de production à Hollywood qui s’occupait de présentation de diapositives multimédias (extrapolées de film 35 mm), c’était le “L.A. Prime time Arts Award Show”, des publicités télévisées et des événements à grande échelle pour voitures/motos et camions au “Los Angeles Convention Center” et à la “Long Beach Arena”.
-“Qu’est ce que ces conneries ?”… que j’ai rétorqué d’un air mauvais !
-“Snider était un ex promoteur de Vancouver qui s’était ainsi enrichit rapidement. Il avait organisé des expositions automobiles dans sa ville natale canadienne avant de se lancer sur la scène de Los Angeles en 1978 avec deux de ses idées d’extravagances automobiles : le “C.A. Truckin’ & Cycle Show” au “L.A. Convention Center” et le “Motorcycle U.S.A. Show” au “Long Beach Arena”. Snider avait également affirmé avoir inventé les concours de t-shirts mouillés pendant son séjour à Vancouver. Naturellement, cet événement particulier a trouvé son chemin vers les États-Unis lors de divers événements et rassemblements automobiles à travers le pays”…
-“Mais… C’est un total foutage de gueule” !
-“J’ai été présenté à Snider et amené à bord pour gérer toutes les photographies de promotion impliquant les efforts de Snider, y compris la création et la photographie de l’affiche du “C.A. Truckin’ & Cycle Show”. Pendant ce temps, Snider a commencé à traîner autour de George Barris, l’un des principaux personnalisateurs-kustomiseur de voitures de la ville, qui était surtout connu pour ses voitures de télévision et de cinéma hollywoodiennes comme la Batmobile, la Black Munster, et la Green Hornet (frelon vert). Sa création la plus connue a été sa ’51 Hirohata Mercury qu’il a construit avec son frère Sam. Evel Knievel a également participé à la série. À cette époque, Snider a organisé un concours de sosies de Farah Fawcett que j’ai photographié dans mon studio et organisé un affichage à Hollywood. Ce n’était pas une idée terriblement originale, car de tels concours avaient lieu dans tout le pays depuis quelques années, mais l’idée de faire un panneau d’affichage après coup pour promouvoir un autre événement l’était certainement”.
-“Quoi d’autre” ?
-“L’idée de l’affiche était de créer un visuel accrocheur qui attirerait les geeks du cycle hard-core et les personnalisateurs de camions macho. En outre, Mr De Bruyne, vous devez réaliser que les années ’70 étaient une époque de “têtes de pot”, hippies, radios CB, mauvaise musique, stagflation, fourgonnettes super personnalisées, lits d’eau, sexe ouvert, licornes peintes, fonds de cloche et de chiottes, Corvettes vert pistache et Hot-Rods fluos, la guerre du Vietnam et les tapis shag. J’ai décidé de faire poser quelques Pin-Up’s chaudasses au milieu du désert sur le lit asséché du lac de la base aérienne d’Edwards en Californie, avec la moto la plus célèbre de son époque, la “Magic Pan”, aux côtés d’une création de George Barris appelée à l’origine “Love Machine”, puis rebaptisée “Super Van”.
-“Cela a commencé surement par des illuminations sexuelles” ?
-“Naturellement, dont, au jour, je n’avais pas vu l’infrastructure. Des guirlandes d’ampoules de couleur rose cernaient chaque demeure et des cœurs immenses, percés de flèches symboliques, étaient tendus en travers de la rue. Des haut-parleurs brailleurs diffusaient des musiques fanfaresques qui meurtrissaient les tympans. Des tréteaux étaient sortis, sur les planches desquels on amenait des boissons variées, toutes alcoolisées. On trouvait là du whisky, du punch, de la tequila, et même du vin californien”.
-“Un cauchemar que tout ça” ?
–“Il y a de ça Monsieur De Bruyne, il y a de ça ! Plus tard, les majorettes ont déboulé : cul-cul-jupe-ras-de-touffe, corselets rouges semés de cœurs dorés, fanfare que dominait ce pachyderme de cuivre qu’est l’hélicon basse. Les baguettes des tambours frappaient en cadence et se relevaient pour monter au ras des moustaches. Venait ensuite la horde travestie, puis les autres, les vioques, les pattemouilles déguisés d’un nez rouge et trait de crayon blanc sur la gueule. Drapeaux américain aussi, bien sur ! Mêlées à toutes les sauces, qu’étaient les cinquante étoiles : burlingue présidentiel, la Lune, mon prose-sur-la-commode” !
-“Charmant et burlesque “!
-“Quand le défilé parvient au fameux banc, du moins, le banc avant qu’il ne devienne célèbre, un hurluberlu a stoppé le cortège et entonné l’hymne à l’amour d’un compositeur de l’Utah nommé Charlaz Navour, d’origine argentine, donc doué pour le rythme. Ces voix ! De toute beauté ; les larmes m’en salaient les joues. Les amoureux faisaient la bite (pardon : la queue) pour s’asseoir côte à côte sur ce siège de fonte légendaire, pour s’y rouler une pelle sous les applaudissements de la foule. Après quoi, le défilé est reparti pour un tour, mais en marquant des stations devant les marchands de boissons. Et c’est alors que les libations ont commencé et ça a dégénéré vite, au fil de ce chemin de croix, en ivresse collective, puis en noire beuverie. mecs, femelles, vioques, tout le monde lichetrognait. Ma copine Ivy, embusquée derrière moi, regardait déferler la cohorte poivrée. Elle m’a expliqué qu’elle ne supportait pas l’alcool, trouvait son usage nocif et son abus dégradant. Elle le tolérait mal, mais se devait pour moi d’un devoir de se mêler à l’ivresse publique, sinon elle aurait été mise en quarantaine” !
-“Thérapie de choc : café noir additionné d’ammoniaque, puis un bourbon et deux jus de citron mélangés. Après cette double ingurgitance, une douche froide et c’est reparti à la pêche” !.
J’en oubliais le connard plein de sang en peignoir blanc ! Un type plutôt neutre, au teint blafard, aux gros sourcils bruns, à l’air méthodique (c’était d’ailleurs un méthodiste). Il avait laissé pousser ses cheveux sur la droite, et les ramenait sur le front où il les maintenait fixés à la gomina. Détail : il était affublé d’un bec-de-lièvre mal opéré qui donnait à sa bouche l’aspect d’un glaïeul. Cela dit, c’était un homme de bonne taille, surtout du côté gauche où son épaule dominait la droite de vingt bons centimètres. Il était encore sonné par son agression et ma présence chez lui l’indifférait ! J’ai alors croisé le regard de sa copine ! Putain ! J’avais le temps pour entreprendre cette femme de bonne rencontre, si suave dans sa mélancolie résignée. Les femmes frustrées sont les meilleures à prendre, j’ai donc poussé un soupir capable de gonfler un pneu de bulldozer.
—”Je vais baisser les rideaux”, a-t-elle dit, “l’histoire de votre ami est insoutenable. Comment pouvait-il participer à ce triste carnaval ? Les gens sont des enfants, et des enfants demeurés” !
M’étant assis dans le canapé, je lui ai tendu la main. Docile, elle me la pris, est venue s’asseoir à mon côté, s’est laissée renverser de manière à avoir la tête sur mes genoux. Moment de douce félicité. Baiser, toujours baiser. Je caresse doucement son visage.
—”C’est bon, la France”, a t’elle murmuré, les paupières baissées.
En geste de reconnaissance, je l’ai fourvoyée dessous sa robe. Elle était nue, sa peau satinée, douce… Renaissance ! Puis j’ai expédié fissa car le temps m’était compté ! Et sur ce, Jimmy Smith était de retour, face au canapé et continuait son histoire !
-“Le “Magic Pan” de Syd DeSoto a été transporté par camion dans le désert pour faire son grand spectacle. C’était un véritable coup de théâtre et on disait qu’il s’agissait d’une combinaison mystique d’une Harley-Davidson turbocompressée plaquée or, gravée à la main et à l’acide avec des accessoires “orbitants” tels que des roues en magnésium gravées à la main, des jauges de lecture numériques et des freins à disque avant et arrière. DeSoto avait conçu, et construit la moto tandis que Ken Puccio avait façonné le collecteur turbo et fait le travail de la machine. Ce n’était pas exactement une fusée à l’entrejambe, dotée de commandes d’embrayage et d’accélérateur à distance, d’une courroie d’entraînement à dents Gilmer, ainsi que d’une magnéto et d’un générateur plaqués or. Plus tard, Hot-Rod Magazine a été tellement intrigué par cette lubricité cosmique qu’il a publié une double page dans un numéro de 1977. Avec le “Magic Pan” au premier plan du lit du lac asséché et fissuré, les trois “playmates chaudasses comme des braises” vêtues de bikinis minuscules ont posé derrière la bête avec le Super Van de George Barris de 1966 en arrière plan !
–“Il était Le summum du confort de roulement, comme Barris l’a dit un jour, il l’avait construit à la fin des années ’60 à partir d’une Dodge A-108 Sportsman de 1966″. –“Oui, le changement de nom de “Love Machine” à “Super Van” est venu grâce à son rôle de véhicule principal dans le film éponyme de “Vansploitation” de 1977. C’était le nec plus ultra de l’automobile futuriste destinée aux pires crétins et imbéciles, avec le toit recouvert de panneaux solaires, l’engin était motorisé par un V8 318cu-in couplé à une transmission manuelle à trois vitesses. Le train de roulement était équipé d’amortisseurs Bilstein. La fourgonnette était personnalisée de manière symétrique dotée d’une paire d’arches de roues géantes avec arcs de sécurité intégrés et de feux à quartz K.C. pour un éclairage routier large. Barris avait équipé l’intérieur tel un bordel roulant pour des plaisirs de luxe tels qu’un lit circulaire rotatif chauffant, un canapé boudoir en forme de U, une télévision couleur Panasonic avec cassettes Betamax, un téléphone de style Français, un magnétophone à bande, un lustre en cristal, une peinture orange brûlée nacrée (40 couches de laque), une chaîne stéréo Craig avec quatre haut-parleurs, un système d’éclairage informatisé et des portes-fenêtres en ailes de mouette, le tout (théoriquement) alimenté par des cellules solaires. L’ensemble de l’opulent ensemble de luxe était assis sur des pneus G60 Formula montés sur des roues de 10 pouces. La camionnette apparaîtra plus tard dans le feuilleton Hill Valley et dans le classique des années ’80 “Retour vers le futur II”. Le Van est même sorti en kit de maquette à l’échelle 1/25, avec les portes-fenêtres à ailes de mouette, des pneus super larges et un intérieur très détaillé. Voilà, je vous ai tout avoué, je ne suis donc pour rien et 100% innocent ! C’était la fin de mon implication avec Snider, qui va mourir de mort violente treize mois plus tard, un suicide, car ayant échoué dans à peu près toutes ses entreprises avant de tuer sa femme puis lui-même”.
-“Attendez, là ! Tout ça pour me raconter ça ? C’est un foutage de gueule ! Salopard” !
-“Ben oui, avec le tournant de la décennie, l’engouement pour les Van’s fourgonnettes personnalisées s’est estompé alors même que Farrah Fawcett abandonnait ses rôles de stars sexy pour se tourner vers des rôles dramatiques. Mon affiche a été reproduite sans mon autorisation. J’espère que vous l’écrirez dans votre article…
-“El le Magic Pan” ? Et le Super Van , Que sont-ils devenus ? Pourquoi m’avoir amené ici, vous pouviez me raconter ça chez mon ami le long du Pacifique ! Merde quoi !
-“Personne ne semble savoir ce qui est arrivé au “Magic Pan”, mais le sort du “Super Van” est bien connu. En 2016, lors de la vente aux enchères de Scottsdale, l’expert automobile et historien Donald Osborn a déclaré: “Lorsqu’un créatif décède [il causait de Georges Barris], les choses qu’il a fabriqué prennent de la valeur en flèche”. Pas toujours, il s’est trompé et a raconté n’importe quoi puisque le Super Van qu’il avait évalué à 100.000 $ de cette époque a été vendu dans la vente aux enchères de Barrett-Jackson pour 62.700 $”.
-“Au moins, il est toujours là, un survivant d’une époque qui semble irréelle dans le rétroviseur !”.
Dehors la nuit était tombée et soudain tonnait un feu d’artifice ! Rien que je trouve plus con au monde, ni plus décevant, que ces fugaces embrasements minutieusement élaborés et si vite anéantis. N’en subsiste qu’un peu de fumée entre les étoiles et nous, également une odeur de poudre et de carton brûlé. Je regardais monter et exploser en gerbes d’or ces configurations artificiaires, essayant de comprendre quel plaisir passager elles pouvaient bien donner à ces gens qui payaient cette séance de feu d’un torticolis mérité. Malgré tout, j’ai décidé d’aller marcher un peu, histoire de me dégourdir les flûtes ; un spectacle pyrotechnique ne dure jamais très longtemps. Y avait de la viande soûle partout. L’alcool avait déjà accompli une partie de son boulot. Les Ricains avaient alors cela de commun avec leurs amis russes, qu’ils buvaient sans discernement ; rapidos et en quantité. On voyait des hommes et des femmes, assis sur les trottoirs, dos aux façades, cuvant, accrochant les wagons, débloquant ou ronflant, tout respect humain banni. Ceux qui se trouvaient dans la phase intermédiaire, faisaient des embardées dans la rue, flacon en main, flacon en poches (les prévoyants). Ça hurlait, ça chantait, ça célèbrait la picole. Des couples faisaient l’amour dans des bagnoles, presque au vu et “suce” de la foule.
Des groupes entouraient ces bagnoles-alcôves en tapant dans leurs mains pour encourager les protagonistes. J’ai même vu un grand diable rouquin lancer à la foule, par la portière, la petite culotte de sa partenaire, tel un trophée durement acquis. Des garçons se battaient en riant pour s’en emparer. Ils la reniflaient en yodlant ; l’un d’eux a même sorti son chibre pour en faire une hampe à ce délicat drapeau de l’amour. !Je pigeais que ces nuits de fête dégénéraient en orgies crapuleuses. Il n’existait plus de limites. C’était l’abandon total, la dégradation systématique. Dans les pays où les gens s’emmerdent, le vice devient toujours ministre des loisirs. On m’a soudain bousculé. Trois gonzesses en goguette, plutôt jeunes, me prenant à partie et me demandant de leur payer à boire. J’ai eu grand mal à me dégriffer de ces pétasses. J’ai longé toute la rue, jusqu’au très fameux banc… Mais bien sur, ce fut soudain l’illumination… Ca s’était passé ici même cette affaire ! Une foule plus épaisse qu’ailleurs y était rassemblée, qui s’auto malaxait et tournait comme de la pâte à pain dans un pétrin. J’ai fureté dans les coins sombres, et ce fut une plainte de chienne sans abri qui m’alerta. Cri d’une souffrance que l’on souhaiterait contrôler mais qui s’échappait comme la vapeur d’une marmite norvégienne. Je me suis approché à pas lents et ai découvert la tronche de méduse d’une vieille gravelure pas racontable, dont les longs cheveux déteints pendaient jusqu’à terre. Elle se tenait penchée en avant, tandis qu’un balaise était occupé à la chausser en levrette.
La dame hurlait donc, non de plaisir, mais de douleur. Quand elle parvint à suspendre sa plainte, elle s’auto fustigea, gémit qu’il fallait être la dernière des vieilles putes pour se risquer à dérouiller un pareil tronc de baobab dans le frifri ! Mais qu’est-ce qui lui avait pris, bordel ! C’était bien de l’orgueil, vous me direz pas ? Sous prétexte que sa vie mouvementée lui avait défoncé le dargeot, elle a cru, la téméraire, qu’elle parviendrait à jouir ! Certes, elle est arrivée à ses fins ; seulement, à présent, le zob géant, du malabar ne pouvait plus ressortir. Déjà, il n’en était rentré que trente-cinq centimètres (sinon on allait droit à une explosion de l’estomac) ! Maintenant, impossible de se désunir. Pis que des chiens ! Mais elle voulait rentrer chez elle, la pauvrette. Avec deux pieds, pas avec quatre ! Ce monstre, y avait qu’à lui sectionner le poireau ; n’ensuite de quoi, il se trouverait bien un toubib capable de lui dégager le bassin, ne serait-ce qu’avec une mèche de charpentier ! Je passe sur les manigances prodiguées par la respectable femme pour réaliser l’intromission. Vous savez qu’elle devait avoir le fondement en caoutchouc ! Quelle énergie ! Quelle obstination ! Ah ! qu’elles sont pugnaces, les chères âmes, lorsqu’elles se trouvent en rut.
Partis d’un Los Angeles ruisselant de soleil, je suis arrivé dans un New York pluvassieux, couleur de coliques de plomb. Pourtant, je préfèrais N.Y. à L.A. La Californie n’a pas l’air vraie. Là-bas, les gens sont en toc, comme leurs maisons rivalisant d’époustoufle. Vie de guingois, je dis. Mi-vacancière, mi-businessarde. Pour l’Européen qui débarque, c’est une sorte de planète pas finie. La lumière n’y est pas joyeuse, et quoi de plus démoralisant qu’un soleil morose ? A New York, au contraire, on trouve une sorte d’allégresse grondante. C’est sombre, souvent cradoche, mais le pittoresque succède à la poésie, et tous les gratte-ciel reflètent les nuages… De là, autre avion vers Paris puis Nice et Saint-Tropez en finale. On passait un film dans l’avion, mais je n’ai pas pris les écouteurs. On voit assez de conneries sur terre, pas la peine de s’en infliger quand on vadrouille au-dessus des nuages océaniques. Je me sentais bien. Que faisais-je de ma retraite ? Devenir vieux, c’est voir des portes qui se verrouillent. Des plaisirs qui s’anéantissent. Des désirs qui ferment leur gueule. Vieux, c’est un jour de moins chaque soir. Voilà, cette pensée m’a réveillé. Le film était fini depuis longtemps. L’éclairage de nuit mettait du ouaté dans l’avion. Les hôtesses commençaient à être fatiguées, on aurait dit qu’elles avaient toutes leurs règles en même temps. J’en ai aperçu une, fantomatique, qui circulait en tenant un verre d’eau sur un petit plateau, pour les cachets d’un voyageur insomniaque.
L’avion tournait doux. Le grand frisson des réacteurs était une glissade vers l’infini. Tout baignait. Je ressentais une étrange griserie, et pourtant je n’avais bu que deux vodkas en bouffant le caviar. Quand à table, j’éclusais ma Moscowskaïa d’élection, je ne prenais aucun pinard ensuite. Alors ? D’où me venaitt cette euphorie capiteuse ? C’est parce que j’avais réussi mon enquête ? Perdu mon temps pour une histoire de Van ? Le contentement qui m’habitait était presque voluptueux. Comme si j’atteignais à une perfection, à quelque chose d’absolument rond, de parfaitement bouclé, et ce avec la complicité du destin…