Hughes-Kircher Special 1953
En 1945 Charles Hughes déboule d’Europe, il est enfin de retour aux USA, déphasé de ses années de guerre, il est resté entier, il toujours ses bras et jambes quoiqu’il n’a plus toute sa tête, ce qui l’a amené à vouloir devenir un grand pilote de courses automobiles, parce qu’il avait été le champion de la conduite des Jeep dans les pires terrains minés sous le feu de l’ennemi nazi.
A la recherche d’une automobile en adéquation à ses rêves, il tombe par hasard sur la Jaguar XK120 de Kurt Kircher, garagiste, propriétaire de Denver Import Motors, spécialisé dans les autos sportives européennes… d’un seul coup il réadapte son rêve en imaginant cette Jaguar mixée à une Jeep Willys et s’incruste dans la vie de Kurt Kircher afin de réaliser ensemble le Roadster sportif le plus extraordinaire jamais réalisé.
Kurt Kircher n’est pas qu’un vendeur d’automobiles d’occasions, il possède un bagage technique hérité du temps où il bossait pour GM sur la mise au point de la transmission Powerglide… c’est quasi nul pour imaginer la fabrication d’un châssis ultra performant, mais c’est le point de départ d’une aventure aventureuse…
La Hughes-Kircher Special apparaît en 1953, ce n’est en réalité qu’un châssis roulant “allégé” selon des normes empiriques, mais les trains roulants sont assez élaborés : roues indépendantes à l’avant provenant d’une XK120 accidentée… et pont de Dion avec freins inbord à l’arrière… la direction provenant d’une MG TC… pour le moteur les deux compères ont pioché également du côté de la XK120, c’est son moteur 3L8 6cyl en ligne qui est gavé par six carburateurs SU, lui permettant d’espérer de sortir 250 chevaux au lieu des 160 de base !
La carrosserie est l’œuvre de Charles Lyon… extrêmement racée et épurée, elle est construite en aluminium et constituée de deux pièces en sandwich, celle du dessus pouvant s’enlever pour accéder à la mécanique.
Quand la Hughes-Kircher Special apparaît en course début 1954 à Fort Sumner, elle gagne… rebelote à Los Alamos Hill… et l’année se poursuit et les podiums et autres bons résultats augurent du meilleur pour la belle auto… mais en 1955 la concurrence est plus rude, les constructeurs et préparateurs ont fourbi leurs armes et les résultats ne suivent plus, alors les pères de la Hughes-Kircher Special ont une idée : lui offrir un moteur plus performant !
Où l’ont-ils récupéré ? C’est la grande question ! Mais à la fin de l’année 1955 le duo enlève le moteur XK pour le remplacer par un moteur de Mercedes 300 SL…. un 6 cylindres en ligne à injection de 240 chevaux qui avait été préparé en vue des Mille Miglia…. la voiture y gagne un logo Mercedes sur le capot et un autre sur le volant… Mercedes n’y est pour rien, le public croit que les deux compères font partie du “Team-Usine-Mercedes”… mais le châssis ne supporte pas cette puissance… les freins en particulier n’arrivent plus à stopper l’auto… on la retrouve cependant en 1957, gagnante d’une course à La Junta, pilotée par Kircher….
Après son retrait des circuits, c’est Charles Lyon qui se porte acquéreur de la Hughes-Kircher Special… Carlton Coolridge, grand collectionneur de Bugatti et LE Blackhawk Museum suivront… enfin Court Whitlock achète l’auto et la remet sur les circuits en catégorie “historique” ce qui lui permet de voyager à travers le monde.
Arrive alors un certain Jack Gallivan, propriétaire d’une 300SL “non-matching-number” qui cherche le moteur d’origine de son auto… c’est sous le capot de la Hughes-Kircher Special qu’il le retrouve…. il contacte Whitlock qui lui répond que le moteur ne sera vendu qu’avec le reste de l’auto !
Au final Gallivan achète l’auto… il remet le moteur dans sa 300SL ce qui double sa valeur car elle redevient 100% originale (Matching-number) et il en utilise un autre pour faire rouler cette auto en participant au prestigieux rallye “Colorado Grand” puis en l’inscrivant au Concours d’Elégance d’Amelia Island en suite duquel est organisé une vente aux enchères Bonhams ou elle est annoncée dans une fourchette de prix entre 300 et 400.000 $…. c’est à cette occasion que je me suis offert un petit plaisir en l’utilisant pour un test soi-disant en vue d’un achat…
Toutes les grosses pointures ont maintenant une électronique de pointe capable de faire pâlir un ingénieur de la NASA… enfin, toutes ou presque, car si certaines ont plus de puces qu’un chien errant, les anciennes gloires accusent le poids des années et se contentent de paraître… et… c’est tout… il faut draguer des vieilles beautés et s’ingénier à maîtriser avec elles quelques HopHopHop sexuels en n’ayant pas l’air apitoyé par leurs chairs flasques et leurs seins E-mouvants (en tous sens) pour comprendre !
Mais pour cette Hughes-Kircher Special ,son moteur Mercedes 300SL légèrement cliquetant la rendait tout de même joueuse : un 6 en ligne traditionnel avec lequel on n’a généralement aucune mauvaise surprise… linéaire en bas et la puissance qui arrive plus haut dans les tours dans une sonorité propre à la marque ; le tout dans une ambiance rassurante pour son pilote, un état d’esprit relativement marqué face à l’équipement riquiqui de la belle qui se pavane pourtant avec sa ligne de diva… ce n’est pas compliqué, elle donne l’impression d’avoir tout pour elle et s’exprime dans un râle magistral qui laisse imaginer que la piloter rendra n’importe quelle route une aventure épique.
Côté bémol, la direction floue demande un peu de temps d’adaptation… la sensation de tenir toute la largeur de la route entre ses mains est tellement marquée qu’on en arrive à être surpris… vient ensuite la réalité… ce vieux moulin offre un couple de débile, le genre de truc qui file la banane à chaque tentative d’appuyer à “donf”… on se dit qu’enquiller les kilomètres tout en étant conscient que ça ne sera pas raisonnable vu l’engin d’une autre époque, donne un certain malaise, c’est surtout au freinage qu’on peste, un freinage long et mou… àmon sens, elle ne rivalise avec aucune machine de son époque, tout simplement parce qu’elle a créé une catégorie à part !
Vous l’avez compris, pour moi, la Hughes-Kircher Special est un coup de cœur qui dépote carrément. Un truc bien sale… le moteur râcle et cogne à bas régimes et il faut se blinder pour résister à l’expérience d’une vraie bête sauvage qui gigote dans tous les sens à cause de suspensions très approximative… c’est un bestiau qu’on se plaît à malmener !
Personnellement, je lui ai tout pardonné au moment d’aller faire des “8” en Drift sur la terre… elle a profité de la moindre bosse pour me proposer à chaque fois un petit numéro de déséquilibre… hmmm ! Sale bête ! Vous l’aurez compris, elle m’a filé la banane et a réveillé l’imbécile heureux qui sommeille en moi.
Rhâââââ ce vieux roadster !!! Aujourd’hui c’est une boîte à rêves tout autant que les autres sportives de ma prime jeunesse, je vous le concède, un peu lointaine… il faut dire que les bougresses ont fait un sacré bond en avant… et dégagent autant de testostérone que les nageuses de l’équipe de natation est-allemande dans la plus grande période du régime soviétique…
Mais quel bonheur de pourvoir arsouiller à son volant, elle m’a filé la banane en me rappelant par moment des planches du Joe Bar Team, surtout que mon périple s’est terminé dans un bar devant une bonne mousse avec beaucoup d’amitié et de mauvaise foi.