Johnny Hallyday à St-Tropez…
Quelques minutes après l’annonce de son décès, aux gens effondrés qui m’informaient de cette épouvantable nouvelle, j’ai rétorqué avec le naturel et la nonchalance qui forment ma personnalité déjantée, caustique et désabusée : “Johnny qui ?”…
Ce qui s’ensuivit fut une tempête de vociférations outrées d’où émergeaient quelques noms d’oiseaux rares et autres cris exigeant ma pendaison, ainsi que diverses menaces physiques assorties d’un parapluie tourbillonnant…, j’ai réalisé soudain, par chance, m’évitant une castration précédée d’une sodomisation calquée sur la fin dantesque de Kadhafi qu’il s’agissait du fameux Johnny-Yeah-Yeah… et je me suis écrié : “Je me remets à peine de la mort de Beethoven, alors Johnny, en comparaison…, spermettez-moi…, mais…” !
Quelques jours et nuits plus tard, en sortant d’un Coma qui n’avait rien d’éthylique, une accorte jeune beauté, infirmière, m’a expliqué que j’avais été la pitoyable victime de divers fan’s de Johnny, dont le seul prénom suffisait à l’identifier comme étant la star n°1 de la chanson et du rock français, le chanteur le plus populaire de l’Hexagone franchouille…
Abasourdi par cette information, outre une pensée réellement émue pour Beethoven sur les partitions de qui j’avais appris le solfège et joué au piano, je n’ai pu m’enfuir de mon lit où j’étais attaché par des sangles de crainte que ma méconnaissance de ce… “Johnny”... soit annonciateur d’une démence liée à un subit Alzeimer…, j’ai donc été contraint d’écouter l’accorte jeune beauté, infirmière en section psychiatrique me narrer la vie de qui s’était affublé de ce grotesque prénom américain…
– Johnny, c’est Jean-Philippe SMET de son patronyme…, vous comprenez ?
– Non, du tout…
– Johnny c’est à dire Jean-Philippe Smet, est né le 15 juin 1943 à Paris… Il avait seulement huit mois lorsque son père a quitté mère et enfant…, le futur Johnny est alors recueilli par sa tante paternelle qui l’élève, aidée de ses deux filles. Ensuite, on ne sait rien de sa vie jusqu’à ses 15 ans ou il s’avère fan absolu d’Elvis Presley et débute sa carrière en se produisant dès 1958 sur la scène du Golf-Drouot.
– A 15 ans ?
– Oui… S’inspirant de son idole, il chante des reprises et adaptations françaises du répertoire américain et fait la rencontre de Jacques Dutronc et Eddy Mitchell…
– C’est préoccupant…
– Pourquoi ?
– Rien, une fulgurance…
– Deux ans plus tard, il décide de s’appeler Johnny Hallyday et signe un contrat avec le label Vogue…, son premier Super 45 tours sera une reprise de Dalida.
– Mon dieu, pourquoi moi ? Dalida…, un cauchemar !
– Mais le succès ne sera pas au rendez-vous…., toutefois il est parrainé par Line Renaud !
– Mon dieu, pourquoi m’as-tu abandonné ?
– Il lui faudra attendre la chanson “Laisse les filles” pour s’imposer, suivi par son premier 45 tours “Souvenirs, souvenirs”… Dès lors, le “phénomène Johnny Hallyday est en marche.
– Partir de rien pour n’aller nulle-part où aller…
– Johnny Hallyday traversera les années ’60, ’70 et ’80 en vendant de plus en plus de disques, collaborant notamment avec Michel Mallory, Long Chris, Philippe Labro, Etienne Roda-Gil, Michel Berger, Jean-Jacques Goldman en alignant des tubes en rafales.
– Des “tubes” ? Vous savez, Mademoiselle, la plomberie et moi, ce sont deux mondes, les tuyauteries, l’eau qui coule dans une baignoire à un certain débit contrarié par une fuite qui modifie la valeur du cubage…
– Vous le faites exprès ?
– Non, c’est un souvenir d’école, classe de mathématique… Mais si ce “Johnny” à un fils, c’est qu’il…
– Niveau vie privée, Johnny Hallyday se mariera à Sylvie Vartan en 1965, et verra la naissance de son fils David, en 1966.
– Ahhhhhhh !
– Puis, il épouse Élisabeth ETIENNE dite Babeth, en 1981. Leur union est éphémère, ils se sépareront deux mois plus tard.
– Un phénomène ce Johnny…
– En 1983, Johnny Hallyday rencontre Nathalie BAYE avec qui il donnera naissance à Laura SMET, en 1983…, mais le couple se séparera trois ans après.
– Il est instable…
– En 1990, Johnny Hallyday se marie à Adeline BLONDIEAU, qu’il quittera en 1992, pour se remarier avec elle en 1994… et leur nouvelle union s’achèvera en 1995, année durant laquelle Johnny Hallyday rencontre Laeticia Baudou, de 32 ans sa cadette.
– Compliqué…, surtout se marier pour divorcer deux ans plus tard et se remarier deux ans plus tard… Et cette Laeticia Baudou, c’était quasiment comme sa fille !!!
– Il l’épousera un an plus tard, et adoptera deux petites filles d’origines vietnamiennes, Jade en 2004 et Joy en 2008.
– Noble geste que d’adopter des enfants abandonnés !…
– Par ailleurs, Johnny Hallyday a souvent défrayé la chronique avec des accidents automobiles, des syncopes, des tentatives de suicides ou des démêlées avec le fisc…
– Vous m’en direz tant…
– En 2004, Johnny Halliday commence à rompre avec toute son ancienne équipe historique.., Universal d’abord, sa maison de disques, après 43 albums studios et 22 albums live…, et six ans plus tard avec Jean-Claude Camus. Il rejoindra la firme Warner début 2006, et s’octroiera les services de Gilbert Coullier pour ses spectacles.
– Abrégez, je n’en peux plus…
– Justement, la fin arrive… En été 2009, Johnny Hallyday est opéré à Paris d’un cancer sur le côlon, puis quelques mois plus tard d’une hernie discale. Le 1er décembre 2009, c’est à Los Angeles qu’il est une nouvelle fois hospitalisé d’urgence pour y être réopéré avant une longue convalescence aux Etats-Unis. Le 13 novembre 2015, Johnny Hallyday sort son 50ème album studio intitulé ‘De l’amour’. Et durant l’année 2015 et 2016, le rockeur sillonne les routes avec sa tournée ‘Rester Vivant Tour’.
– Il est optimiste…
– En mars 2017, Johnny Hallyday révèle qu’il se bat contre un cancer… et le 6 décembre 2017, Johnny Hallyday s’éteint à l’âge de 74 ans.
– Ca m’angoisse, là, tout à coup… !
– Pourquoi ?
– Je viens d’avoir 70 ans ce 16 mai 2019…
– Glup !
Deux jours plus tard, j’ai réussi à m’enfuir, décidé à en savoir plus sur ce Johnny…, en effet, quoique évoquant Beethoven, quoique le jouant au piano, ayant le sens de la rébellion et des réalités concernant l’aspect inhumain des humains…, dans les années ’50, avec l’arrivée du Rock’n’roll, je pensais que les nouveaux artistes sauraient rassembler toutes les classes sociales (et il y en a qui souffraient) et les inclure dans leurs joies artistiques pour que nous puissions tous vivre ensemble.
Je pensais que les artistes participaient à la paix…, qu’il n’y aurait plus de guerres parce que les individus de la planète se connaîtraient et n’auraient plus envie d’être belliqueux ni de f… une bombe sur la gueule de l’autre…
Puis est arrivé Johnny, que je feins, par pudeur, d’ignorer… et j’ai alors vu le monde changer, ce fut le nouvel ère de l’art de s’en f… de tout…, de toutes et tous…
Il était enfant de la balle, funambule, inscrit, selon ses proches, dans une “dynamique de l’irrationnel”…, il a eu un parcours éperdu, il n’a jamais su où il allait, il ne savait pas qui il était, d’où il sortait, ce qu’il devait faire d’un jour sur l’autre !
Qu’y avait-il avant Johnny ?
Un cas social ?
Un destin ?
Sa vraie vie a commencé quand il s’est auto-appelé Johnny Hallyday, il avait 16 ans…, avant, selon lui, il n’avait aucun souvenir heureux : à 6 ans, il s’est quasi arraché les doigts dans un escalier mécanique…, lors de ses premières vacances à la mer, il a attrapé un coup de soleil qui l’empêchait de dormir…, c’est tout…, c’est rien…, c’est du Jôôôôôhnny…, venir de rien, pour n’aller nulle part…, ça fait peur !
Il est né Jean-Philippe Smet, le 15 juin 1943 de Huguette, crémière rue Lepic, et de Léon, Belge, artiste, fugueur, aventurier, journaliste, homme de cirque, qui s’évanouit, huit mois plus tard…!
En pleine guerre, la mère confie l’enfant a Hélène Mar, sœur aînée de Léon, ancienne actrice du muet…, abandon voilé, difficulté passagère?
Jean-Philippe reste avec Hélène, qui reporte sur lui les ambitions que Léon a déçues…, mais Huguette capitule…, lancée par Eluard, elle devient mannequin.
Le gosse grandit entre Desta et Menen, ses deux cousines, danseuses de music-hall, et Lee Ketcham, un gars de l’Oklahoma, meneur de revue, de quinze ans son aîné…, la petite troupe sillonne l’Europe, de chapiteaux en cabarets, de succès en déboires…, le gamin apprendra l’italien et l’espagnol mais ne mettra jamais les pieds dans une école.
En guise d’éducation, il hante les cinémas, avec sa tante, il a 15 ans et découvre le nouveau profil de Hollywood, c’est-à-dire Marlon Brando, Monty Clift, James Dean…., des stars “intérieures” qui ont un regard perdu, une violence exprimée et des tendresses cachées.
Dans “La Fureur de vivre”, le petit Smet trouve une résonance, puise ses références, pose une équation : “Je suis un rebelle”…, venir de rien, pour n’aller nulle part…, toujours…
1960…, an 1 du mythe…, Albert Camus vient de mourir…, l’Occident, le pied sur la pédale de la croissance, communie dans l’urbanisation accélérée et les joies du Frigidaire…, sous la caméra de Godard, Jean Seberg pose la vraie question : “Dégueulasse ? Qu’est-ce que c’est, dégueulasse?”…
La France découvre l’Algérie algérienne (sic !) et la génération du baby-boom, ces moins de 20 ans que François Nourissier taxe de “cohorte dépolitisée, dédramatisée, immense, bien nourrie, ignorante en histoire, opulente, réaliste”...
La jeunesse se pose comme une tribu à part, une classe d’âge avec ses références, ses codes, son imaginaire…, elle a le pouvoir d’achat, pas encore la considération…, elle est gavée, gâtée, mais cloîtrée dans un monde adulte d’où suintent l’ennui bureaucratique, la répétition, le mensonge, la mort”.
La radio serine “Scoubidou”…, “Si tu vas à Rio”…, “Papa, maman, la bonne et moi”…
Débarque le rock, “une musique de nègres colonisée par des Blanc”.., un rythme né du blues, un truc de pauvres, adopté d’emblée par les enfants de la prospérité.
A la sortie de l’école, le gringalet Hallyday, porté par la vague dont il est né, adapte Elvis Presley, Eddie Cochran, Chuck Berry…, première télé : Line Renaud lui sert de marraine.
Fidèle, dès lors, à la devise du héros : “Vivons vite, la mort vient tôt”..., plutôt qu’en être heureux, il casse ses guitares, ses jouets, se coupe les veines, se muscle les biceps, cherche la castagne, cogne des flics, joue à la roulette russe, se noie dans le whisky, crie à la nuit, se consume, consomme “mille femmes, peut-être plus”… et vont valser les épouses et les compagnes.
C’est un autodestructeur…, un artisan des limites qui ne mènent à rien…, il suit un fil conducteur, un besoin d’être malheureux pour, ensuite, aller mieux.
Ce n’est pas sa démarche dans la vie qui fidélise son public, c’est le personnage que l’on devine derrière…, car il a dérouillé, payé, souffert…
Mais il va bientôt gagner des sommes gigantesques… et prétendre que l’argent n’est pour lui, pas un but en soi, mais le facilitateur de ses envies…, le moyen de s’offrir une guitare à l’adolescence, une Harley-Davidson à l’âge adulte, une villa aux Etats-Unis, un chalet à Gstaad plus tard…, et l’occasion de faire la fête avec ses amis, de partir à l’improviste avec ses proches en voyage ou d’acheter des voitures, par de fomenter une révolution !
Août à Saint-Tropez…, je viens en curieux…, il vient de rien pour n’aller nulle part…, mais il surgit, à pas de loup, pieds nus, en short : “Bonjour, je suis Johnny Hallyday”…
II a un regard qui n’a l’air de rien, un regard presque chinois…, un regard qui embrasse la mer : “Quand j’étais gosse, je rêvais de conquérir ça”…, avec un clin d’œil…, trois Harley veillent au garage…, avant, plus de trente ans avant, Johnny fut adolescent…, il grattait sa guitare sèche dans les caves du IXe arrondissement, avec Dutronc…, poussait la chanson au Marcadet-Palace, entre deux westerns de cinquième exclusivité…, agglutinait les minettes sur la scène du Golf Drouot.
Ses premières apparitions publiques lui avaient fait une réputation de dingue, les médias le traitaient de “cow-boy de pacotille, échappé d’un asile qui tient sa guitare comme un aspirateur”, et les “Ceusses-Tout-le-Monde” qui lisaient le “France-Soir” de l’époque, concluaient qu’on n’en parlerait plus dans six mois…
On l’a dit mort, submergé, fini…, il a résisté à tout…, le môme qui se roulait par terre, a l’Alhambra, va finir par peser 100 millions de disques, certains albums cartonnant entre 400.000 et 650.000 exemplaires.
Un consensus l’entourait, à faire pâlir “Dieu” soi-même…, les garnements de 14 ans ne juraient que par lui…, il faisait pleurer les papys du premier rang…, mais le vacancier de Saint-Tropez ne se prenait pas pour un héros…, il évoquait “Le Testament d’un poète”… l’une de ses prestations, sur un poème de Machado : “Je n’ai jamais poursuivi la gloire/Ni cherché a marquer la mémoire des hommes/De ma chanson”…
Sur la baie des nantis, un soir brumeux qui annonçait la nuit…, Johnny plissant les yeux, dans la fumée de sa gitane bleue, m’a dit : “Ce que je fais n’est pas important. J’ai des copains, je suis content. Mais je ne dirai pas la vérité, jamais ! Donc, je peux dire ce que je veux” !
Avant Johnny, il y avait eu les étincelles du jazz, qui ont détruit quelques fauteuils a l’Olympia, en 1955…, il y avait eu Bécaud et ses “100 000 volts”, qui jouait du piano avec les pieds, comme il avait vu faire Jerry Lee Lewis en Amérique…, mais Johnny va porter au paroxysme cette tradition du vandalisme immobilier… et avec ses déhanchements extrêmes, il va déniaiser l’Hexagone, bousculer toutes les audaces inavouées.
On va le sacrer “idole des jeunes”... alors qu’en radio on joue “Itsy Bitsy, petit Bikini” qui écœure les puristes… et le rock and roll, dans sa spontanéité des origines, meurt en 1962 : Johnny se perd en route, il arbore la moustache, des rouflaquettes, des jaquettes à fleurs, des cuirs déchirés…, il est comme ces cover-girls qui peuvent tout porter…, moins elles ont de personnalité, plus les métamorphoses sont spectaculaires !
“Flower power” avant l’heure…, Johnny proclame que Jésus-Christ est un hippie…, puis il négocie le virage de mai 68…, piqué au vif par le centralien Antoine, qui le verrait bien “en cage à Medrano” dans ses “Elucubrations”…,Johnny réplique un peu vite mais avec prophétie par “Cheveux longs, idées courtes”… et invente des spectacles baroques et excessifs, avec fumigènes et lasers !
Il boit la tasse en 1972, renaît loubard, routard, desperado, destroy…, il emprunte, copie, adapte, innove rarement, il est un produit de synthèse mais a une excuse : son contrat avec Philips l’oblige a sortir deux albums par an !
En 1977 s’éteint le roi Elvis, obèse.., Johnny signe sa filiation en faisant du lard, il chante : “J’ai fait de ma vie comme sa vie : une course folle”…
Sans aucune pesanteur psychologique, n’inventant rien, prenant tout à chaque frémissement du goût, à chaque mode…, dès que l’artiste sent un flottement, il retourne aux sources, se donne au rhythm and blues… et se rassure : “Toute la musique que j’aime/ Elle vient de là/ Elle vient du blues…” !
Frankie Jordan est dentiste, Frank Alamo bricole des moteurs de bagnoles…, Vince Taylor est chauffeur de taxi à Paris et Richard Anthony est devenu obèse…, que reste-t-il ?
La planète rock, sans roll : “Un style, un son, un esprit” dixit Johnny…, une façon de brûler sa vie, des histoires de révolte et de solitude, des motos, des perfectos et des mecs qui tombent des filles comme des quilles avant de clamer “l’amûûûûr toujûûûûûrs”…
Hallyday, 650 titres à ce jour, planté dans ses santiags, scande en 1985 : “Lutte pour écrire ton histoire/ Lutte pour garder ta mémoire/ Et pour garder en toi/ Une rock’n’roll attitude”…, crédible…, il rebondit… et voila que les “golden sixties” sont sacralisées…
Auparavant, on réhabilitait pour exclure, à présent, on garde tout…, résultat : nous vivons dans un musée, au rayon “60”, oubliées les inhibitions, les frustrations de l’époque…, triomphent la gaieté, l’optimisme, le progressisme et l’innocence.
Dans ce contexte revivaliste, Hallyday endosse l’habit de père fondateur et grimpe encore sur le piédestal…, rien d’étonnant, tout mythe raconte le récit des origines…, les années rock servent de modernité aux jeunes générations actuelles.
L’un des ressorts de la survie de Johnny Hallyday, c’est d’être à la fois contemporain d’une époque canonisée et archétype de cette période…, (comme moi avec le vieux Chromes&Flammes Magazine) !
Dans ce cadre-là, Johnny Hallyday joue le rôle d’une composante initiatique…, il a valeur de rupture, comme Sartre, qui, à sa manière, a su dire merde aux anciens combattants.., en fait, c’est le monde adulte qui se réclame des jeunes, qui les phagocyte.
Johnny Hallyday agit comme s’il percevait le malaise diffus qui pèse sur nos sociétés démocratiques, où les grandes révoltes ont plongé avec les grandes causes…, où le repliement sur soi ne satisfait personne…, il a certes raté le tournant idéologique sans être pour autant le beauf au carré que les gauchistes croyaient.
Au début, j’étais viscéralement contre lui.., j’étais étudiant, passionné de jazz, et la mythologie gaucho se partageait entre le free et le rock bluesy…, le yé-yé, c’était de la frime, de la roupie d’écoliers…, hormis Eddy Mitchell qui, au moins, écrivait lui-même ses chansons.., un Rocker, mais au deuxième degré, sans hystérie…
Avec Eddy, on aurait pu discuter…, mais pour Johnny j’ai rendu les armes, sans trop l’avouer, j’ai pardonné à Johnny les scories, les facilités, au nom de “Que je t’aime”, l’un des sommets du répertoire…, l’Hexagone s’est pacifié autour de la dernière “idole des jeunes”.
L’Hexagone préfère Hallyday démoli aux stars trop fabriquées…, jamais Mick Jagger n’a eu de chagrin d’amour à en mourir, il n’y connaît rien…, l’amour, c’est un truc insensé… et, ça… Hallyday le sait…, comparé à Presley, il a un côté tocard continental, copie d’Amerloque mal bricolé…, pas assez dingue pour tirer sur ses postes de télé, entre deux cuillerées de beurre de cacahouète… à sa manièrele il a le complexe provincial, face cachée de l’orgueil national…
Sa “grandeur” tient à ce paradoxe…, elle répond à celle d’un pays qui n’est plus ce qu’il était, sans pour autant l’avoir accepté…, elle lui suggère les bornes à ne pas franchir, au risque d’être rejeté…, c’est un fauve qui ne sort jamais complètement du “droit chemin”…, en ce sens, il se sépare de la mythologie classique de la rock star, celle qui vit l’expérience des limites, drogue et violence, jusqu’à la calcination.
En trois décennies, le succès d’Hallyday n’a jamais franchi l’Atlantique…, en 1962, deux albums enregistrés pour les Etats-Unis reçoivent un accueil polaire…, marché imprenable : ce pays libéral est aussi le plus protectionniste du monde…, il vaut mieux être roi en son pays plutôt qu’une guimauve internationale “à la Iglesias”...
Dans le civil, ce garçon est d’une grande pudeur, il lui arrive de rougir…, on lui prête une courtoisie insoupçonnée, une gentillesse intimidée…, il a quelque chose de gauche, d’un peu pataud, qui contraste avec son image de rocker bagarreur.. et Johnny a, dans le grain de la voix quelque chose d’incantatoire, que l’on retrouve dans le chant andalou…, on est touché, et le sens n’a plus d’importance…, c’est que dans les errances du voyage, il a croisé, à 12 ans, des Gitans espagnols, qui l’ont initié au flamenco.
Etait-il dupe ou opportuniste?
Etait-il un enfant du siècle qui nous a arnaqué avec talent ?
“Johnny était le rocker par excellence” entendons-nous partout, sauf que Johnny était rock comme John Wayne était cow-boy : en caricature…, parce que le rock, c’est la rédemption et l’anticonformisme…, c’est prendre la majorité à contre-pied pour aimer le singulier…, le succès de Johnny (et plus que tout : ce qu’il en a fait) prouve à lui seul qu’il ne l’était pas : rock…, yeahhhh, la mort d’Elvis est bien plus classe (mort sur ses chiottes) car foudroyé dans un lieu insolite…, même sa sortie, Johnny ne l’a pas réussie.
En cherchant bien, le rock se retrouve plus dans Dick que dans Hallyday (père et fils)…, en cherchant vraiment bien et en poursuivant sur cette voie (de garage) Brel, Mozart et mon Beethoven à moi…, sont des rockeurs.
Acheter une villa et l’appeler la Lorada, c’est moins anticonformiste que de prendre des cours de pilotage et de faire le facteur aux Marquises…, acheter un château “m’as-tu-vu” est un acte petit bourgeois de parvenu…, Sardou, lui, est rock…, Sardou déclare toujours l’inverse de la bienséance, il emmerde le monde et les gens, il peut se fâcher avec les pauvres et embrasser les riches…, il est réactionnaire alors que Smet…, c’est le mythe de Cendrillon suiveur et suivi plutôt que meneur et leader…, il aura passé sa vie à suivre les modes plutôt qu’à les créer, il aura pris les meilleurs plutôt que de les découvrir et enfin il aura fait de la moto plutôt que de la trottinette ou de la marche à pied.
Pour être rock, il ne faut jamais le signaler ou le porter sur soi…, le rock est une médaille invisible…, le rock n’est pas une musique sinon c’est de la variété…, le rock est là où l’on entend “non”…, “j’aime pas”…, ou “pas moi”…, le rock c’est casser, briser…, c’est faire autrement et pas forcement mieux…
Faire partir des pauvres gus sans le sou à Vegas pour un concert (raté), sortir dix-sept intégrales de ses chansons tous les ans pour payer ses impôts et encourager les prêts à la consommation, avoir Michel Drucker comme hagiographe, tout cela n’a rien de rock’n’roll…. et duoter avec Céline Dion ou Lara Fabian, c’est pas non plus l’acte le plus révolutionnaire de ces vingt dernières années.
Yeahhhhh ! Même dans son suicide, Johnny s’est loupé (vu qu’il s’est manqué)… Kurt Cobain, lui, a réussi…, johnny était un raté qui a tout réussi et c’est pour ça qu’on l’admirait. Malheureusement pour lui (parce que oui : la voix est belle et c’est gâché de l’avoir exploité ainsi), Johnny était une marque…, il était la représentation de la génération baby-boom et comme elle, il s’est rêvé en parangon de la contre-culture alors qu’il n’en avait… aucune.
En fait, Johnny était notre prisonnier…, il devait se faire à notre médiocrité quotidienne et il s’y est fondu comme personne…, rendons-lui hommage pour ça.
Après l’exposition consacrée, en 2017, à Brigitte Bardot, le Musée de la Gendarmerie et du Cinéma de Saint-Tropez, accueille début juin 2019, une exposition dédiée à une autre icône nationale, le rocker Johnny Hallyday
Johnny Hallyday a découvert Saint-Tropez dans les années 1960 où il vient passer des vacances festives avec ses amis Eddie Barclay et Eddy Mitchell…, dès son arrivée dans le Golfe de Saint-Tropez, il est fasciné par les sublimes villas et rêve d’en avoir une lui aussi… en 1989 Johnny Hallyday réalise son rêve et fait construire sa villa nommée Lorada. Johnny Hallyday a une réelle attache avec Saint-Tropez puisqu’il y passera plus de 40 ans…
Dans cette exposition, nous vous invitons à découvrir ou redécouvrir cette longue histoire qui lie Johnny Hallyday à Saint-Tropez à travers des souvenirs de Tropéziens !
Ce sont des photographies, des objets, une moto ayant appartenu à l’artiste, des extraits d’émissions de radio tournées sur la Place des Lices mais aussi une sculpture à taille réelle de Johnny Hallyday.
Johnny Hallyday et sa fille Laura à la Lorada, Janvier 1994
© Franz Chavaroche, droits réservés
Photographie de la fontaine du patio de la Lorada
© prêt/loan : Alain Morisse architecte de la Lorada
Johnny Hallyday devant la piscine de la Lorada avec le Tropézien Laurent Petit qui sera son coach sportif de 1995 à 1998
© Franz Chavaroche, droits réservés
Maquette du célèbre bateau offshore, la Cigarette 38 Top Gun « Wild Eagle », acquise par Johnny Hallyday auprès de la société Sportmer à Saint-Tropez en 1989
Prêt/loan : Philippe Bialès, Sportmer Saint-Tropez
Bouteille à huile d’olive et bouteille de rosé provenant du domaine Lorada
© prêt/loan : Alain Morisse architecte de la Lorada
Gants de boxe de Johnny Hallyday offerts à son coach sportif, le Tropézien, Laurent Petit
Johnny Hallyday et son ami Jo de Salerne dans les rues de Saint-Tropez, 2002
© Photographie Jean-Louis Chaix
Johnny Hallyday à la Lorada pour la sortie du gâteau «Le Gendarme de Saint-Tropez», juin 1994
© Michel Luccioni, droits réservés
Survol en hélicoptère de la Lorada, une magnifique Hacienda, août 1995
© Franz Chavaroche, droits réservés
Johnny Hallyday et Bernard Montiel lors de l’émission radio Le Club des Stars, Place des Lices, Saint-Tropez, 1994
© Eric Tognolli, droits réservés
Johnny Hallyday devant la Mairie de Saint-Tropez, juillet 1989
© Eric Tognolli, droits réservés
Sacha Distel et Johnny Hallyday plaisantant avec le patron du Gorille, Henri Guérin, années 1960
Prêt : Henri Guérin, droits réservés
Johnny Hallyday avec Charles Aznavour à la Lorada, juin 1994
© Franz Chavaroche, droits réservés
Johnny Hallyday et Eddie Barclay. Soirée Blanche, juillet 1992
© Franz Chavaroche, droits réservés
Johnny Hallyday au Byblos, Saint-Tropez
© Eric Tognolli, droits réservés
Plage de Tahiti à Pampelonne, un endroit que Johnny Hallyday affectionnait particulièrement, juillet 2009
© Luc Boutria et Franck Fernandès, droits réservés
Johnny Hallyday et Marie Palmari au restaurant de la plage de Tahiti, 2012
© Pierre Boullet, Saint-Tropez, droits réservés
Prêt : Felicia et Patrick Palmari, plage de Tahiti
Johnny Hallyday à la Brasserie du Luna Park avec le patron Tony Besi, Jo de Salernes et Louis Besi
© Collection privée, droits réservés
Johnny Hallyday arrive à la plage de Tahiti dans une Ford Mustang, juin 2002
© Luc Boutria, droits réservés
Johnny Hallyday et Adeline arrivent chez Eddie Barclay pour une Soirée Blanche, été 1993
© Franz Chavaroche, droits réservés
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Dans les années ’50, avec l’arrivée du Rock’n’roll, je pensais que les nouveaux artistes sauraient rassembler toutes les classes sociales (et il y en a qui souffraient) et les inclure dans leurs joies artistiques pour que nous puissions tous vivre ensemble.
Je pensais que les artistes participaient à la paix…, qu’il n’y aurait plus de guerres parce que les individus de la planète se connaîtraient et n’auraient plus envie d’être belliqueux ni de f… une bombe sur la gueule de l’autre.
Puis est arrivé Johnny, et ce fut l’art de s’en f… de tout…, de toutes et tous…
Venir de rien, pour n’aller nulle part…, ça fait peur !
Train de vie de star, dettes, démêlées fiscales : les questions d’argent ont poursuivi Johnny Hallyday toute sa vie…
“Dans ce monde, rien ne peut être considéré comme étant certain, à part la mort et les impôts”…
Américanophile convaincu, Johnny Hallyday, aurait pu faire sienne cette sentence de Benjamin Franklin.
Tout au long de sa carrière, Johnny Hallyday aura dépensé sans compter.
Avec des ventes records, des tournées lucratives et des exils loin du fisc français (une forme de mépris envers ses “fan’s” et un doigt d’honneur à la solidarité qui devraient relativiser un hommage national de la France via Macron), la star a amassé une fortune démesurée…
Pis…, Johnny n’a pas souvent payé ce qu’il commandait, les artisans et entrepreneurs de la Villa La Lorada de Saint-Tropez l’ont toujours en travers de la gorge…
Johnny s’en est maintenant définitivement allé…, Laetitia, sa veuve, et ses enfants David, Laura, Jade et Joy ne devraient pas souffrir de difficultés financières à venir, au vu des chiffres faramineux des ventes d’albums, des tournées à succès, des concerts à guichets fermés, des cachets de cinéma ou de l’intense merchandising qui a vu fleurir des produits dérivés à foison !
Avec Jean-Philippe Smet, né d’une mère coiffeuse puis employée de crèmerie et d’un père ayant fui, l’argent n’était toutefois pas un but en soi, mais le facilitateur de ses envies, le moyen de s’offrir une guitare à l’adolescence, une Harley-Davidson à l’âge adulte, une villa aux Etats-Unis, un chalet à Gstaad plus tard…, et l’occasion de faire la fête avec ses amis, de partir à l’improviste avec ses proches en voyage ou d’acheter des voitures.
Dès les premières années de sa carrière, Johnny Hallyday dépense, la star yéyé affiche un train de vie dispendieux… et Johnny ne sera jamais enclin à se serrer la ceinture.
En 2011, un ancien conseiller fiscal cité par Les Inrocks, affirme que ses dépenses se chiffrent entre 200’000 et 400’000 euros mensuels…. et encore, ce chiffre ne comprend pas le remboursement des maisons…, il couvre simplement les frais d’entretien, de personnel, les voitures, les déplacements en jet et les dépenses quotidiennes…, ce qui est confirmé par son ancien impresario, Jean Pons :
– L’argent, Johnny ne sait pas ce que c’est. Il est l’un des rares hommes de spectacle à se comporter aussi peu en homme d’affaires. Une forme d’insouciance qui le rapproche d’un Elvis Presley, l’icône des débuts. Comme le King, Johnny va battre les records. Mais comme la star américaine, il va brûler l’argent et se désintéresser de la gestion en la confiant à d’autres.
Si Elvis Presley laisse le Colonel Parker gérer ses contrats, Johnny Hallyday laisse un autre Johnny…, Stark, l’imprésario star des années 1950 à 1970 en France, aux commandes de l’intendance.
Or, Johnny Stark, qui va également gérer les affaires de Sylvie Vartan et Hugues Aufray notamment, va se soigner généreusement lors des signatures de contrat : à l’occasion de la signature de Johnny Hallyday avec Philips en 1961, il s’arroge 50% des revenus de son poulain à peine majeur… et oublie le fisc français.
Lorsque les impôts s’aperçoivent de cela et réclament leur dû, c’est le clash entre les deux Johnny.
Si Johnny Stark se promenait avec une valise contenant chèques et espèces qu’il distribuait à Johnny ou à ses amis selon les demandes du chanteur, son successeur Jean Pons se rend vite compte des difficultés et choisit de bluffer : pendant plusieurs années, il va affirmer au chanteur que les réserves sont épuisées et que les recettes des ventes de disques et des tournées suffisent à peine à rembourser impôts et dettes.
Le bluff fonctionne tant bien que mal et le bas de laine de Johnny enfle, alors même que certains albums et tournées rencontrent moins de succès qu’au début des années 1960.
Plus tard, les comptables du chanteur omettent la bagatelle de quatre millions de francs français sur les déclarations de revenus des années 1971 et 1972…, le fisc s’en aperçoit et engage une procédure : Johnny sera condamné le 1er avril 1977 par la 11e chambre correctionnelle de Paris à dix mois de prison avec sursis et 20’000 francs d’amende.
Difficile cependant d’enfouir longtemps l’envie de faire plaisir qui habite Johnny Hallyday…, avec ses amis, il ne compte pas : repas aux restaurants avec des notes s’élevant à 15’000 francs, juke-box de collection en cadeaux à chaque membre d’un groupe d’amis, voitures de prestige achetées sur un coup de tête ou investissements immobiliers…, ses diverses résidences vaudraient à elles seules un roman.
Saint-Barthelemy, Ramatuelle, Pacific Palissades à Los Angeles, Marnes-la-Coquette, Beverly Hills ou Gstaad : autant de choix motivés par des raisons diverses et qui vont souvent s’avérer plus boulets que havres de paix.
Au début des années 1990, sa villa de la Côte d’Azur, La Lorada, est à peine achevée (mais pas payée) qu’il prétend que ses investissements sur l’île de la Réunion ont causé des pertes… un “avis à tiers détenteur” ferait courir le risque au chanteur de se retrouver avec 3’000 francs français de l’époque pour vivre chaque mois…
Une fabulation bien orchestrée…, son comptable prétend alors que les dettes du chanteur s’élèveraient à 30 millions de francs…, l’affaire ainsi présentée émeut le ministre socialiste des finances de l’époque, Michel Charasse, qui permet d’éviter à la star de se retrouver sur la paille…, une tromperie…
Johnny fête cela avec une Rolls-Royce achetée sur un coup de tête alors que le chanteur, attendu pour un rendez-vous chez le médecin, avait choisi de se balader dans le quartier pour éviter de faire le pied-de-grue dans la salle d’attente…, puis avec une Ferrari choisie un jour où un ami lui rend visite avec ce même modèle et que Johnny craque pour cette voiture et file derechef chez le concessionnaire le plus proche…
La star aime le soleil, le climat fiscal de Monaco pourrait lui plaire…, mais les ressortissants français ne bénéficient pas des mêmes avantages que les étrangers…, alors, aiguillé par ses conseillers, il sollicite la nationalité belge, que détenait son père biologique…, avec ce passeport, il pourrait résider à Monaco et voir sa note fiscale s’alléger considérablement.
Mais la procédure s’éternise et l’issue n’est pas garantie, surtout une fois la demande médiatisée et les accusations d’exil fiscal sorties dans la presse !
En 2007, changement de cap: c’est à Gstaad que Johnny pose ses valises, alléché par la perspective d’un forfait fiscal de 607’000 euros annuellement.
Selon Les Inrocks, le chalet de Gstaad lui coûte 3 millions d’euros (achat et travaux) via deux emprunts “in fine”…
Johnny ne rembourse dans un premier temps que les intérêts, se réservant le règlement de la totalité du prêt pour une échéance ultérieure.
Le séjour suisse s’avèrera désastreux sur le plan financier : le forfait fiscal a beau être avantageux, Johnny Hallyday doit quand même s’acquitter en France de tous les revenus générés par les concerts, tournées et ventes d’albums…, de plus, après l’épisode du passeport belge, l’exil suisse nuit à son image et Optic 2000 résilie son contrat : entre 300’000 et un million d’euros de pertes par an.
Il finira par quitter le canton de Berne, direction la Californie.
Ces errances ne lui épargnent pas les mésaventures fiscales : le Canard Enchaîné annonce en 2012 que le fisc lui réclame la bagatelle de 9 millions d’euros pour des impayés sur plusieurs années.
Et les dépenses ne cessent pas, comme avec un jet acheté pendant sa période suisse, en copropriété avec Tony Scotti, mari de son ex-femme Sylvie Vartan.
En 2015, Gala affirme que le chanteur cherche à vendre plusieurs propriétés, dont la résidence de Marne-la-Coquette (estimée entre 14 et 25 millions d’euros selon les sources) et le chalet de Gstaad.
Finalement, c’est à Marne-la-Coquette que l’idole des jeunes aura rendu son dernier souffle…, après avoir brûlé la vie, vivant à se faire plaisir et à célébrer l’amitié avec des cadeaux tous plus fous les uns que les autres.
– Je suis complètement détaché des valeurs matérielles qui pourrissent et empoisonnent les individus. Mon argent me sert surtout à être libre et à vivre comme je veux…, expliqua-t-il un jour.
Amateur de grosses motos et de voitures de collection, le rocker national menait grand train…, il voyageait au gré des saisons entre ses résidences Marnes-la-Coquette (ouest de Paris), Gstaad (station huppée des Alpes suisses), Saint-Barthélémy dans les Antilles, et Los Angeles…, toute la panoplie de la star cousue d’or.
Surtout, il trustait régulièrement le classement des chanteurs français les mieux payés : en 2016, il est encore deuxième avec 16 millions d’euros de revenus annuels-nets, selon le magazine Capital.
Il a toujours dépensé sans compter pour ses proches et les nombreux « potes » invités à suivre ses virées aux quatre coins du monde…., il a même offert sur un coup de tête une toile d’Andy Warhol à un de ses amis.
Il en voulait toujours plus, en 2004, son divorce avec Universal jette une lumière crue sur ce côté peu reluisant…, Johnny a accusé sa maison de disques d’avoir mis en place un système pour l’asservir en profitant de sa situation financière désastreuse… c’était dans le but de recouvrer la propriété des bandes originales de ses chansons.
Conséquence : Procès…, les audiences furent l’occasion d’un grand déballage…, on y a découvert un rockeur couvert d’hypothèques, faisant appel à son label pour payer ses factures, éponger ses dettes et assouvir ses caprices… comme un prêt de 5 millions d’euros destiné à l’achat d’un yacht, jamais remboursé.
Au fil des années, Universal s’était porté garant auprès du fisc, avait racheté sa maison de Ramatuelle (la célèbre ‘Lorada’) et un hôtel particulier du XVIe arrondissement de Paris…, en contrepartie, Johnny avait régulièrement accepté des modifications de son contrat, lui avait cédé ses droits à l’image et ses droits sur le merchandising.
Ses démêlés avec le fisc ont aussi abondamment défrayé la chronique, au point de devenir un sujet politique.
Dès 1975, l’administration fiscale le fait condamner à de la prison avec sursis et exige le remboursement de 100 millions de francs d’arriérés, somme qu’il ne réglera que partiellement dans les années 1990.
Assujetti à l’impôt sur la fortune en France, il s’est régulièrement retrouvé au centre des polémiques sur les exilés fiscaux…, comme en 2006, lorsqu’il a demandé la nationalité belge… “en souvenir de son père”, disait-il, avant d’y renoncer…., puis à nouveau lorsqu’il a décidé de s’établir une partie de l’année en Suisse, expliquant “j’en ai marre, comme beaucoup de Français, de payer ce qu’on nous impose comme impôts”… des propos qui, quelques mois avant la présidentielle, avaient déclenché une tempête politique.
L’idole des jeunes qui ne paye pas ses impôts, qui n’agit pas de manière solidaire envers les défavorisés qui sont ses fan’s acheteurs de ses disques…, c’est glauque !
Ces dernières années, il était devenu résident fiscal aux Etats-Unis où ses plus jeunes filles étaient scolarisées.
– En France, la réussite, c’est louche, on trouve ça dégueulasse…, déplorait-il en 2013 dans son autobiographie ‘Dans mes yeux’.... alors qu’il a accumulé un patrimoine immobilier conséquent : à commencer par la “Savannah”, une imposante propriété à Marnes-la-Coquette (Hauts-de-Seine), où la star s’est éteinte.
Cette résidence située dans la commune la plus riche de France dispose d’un terrain verdoyant de près d’un hectare, avec piscine et terrain de tennis…, elle compte six chambres, ainsi qu’une salle de cinéma privée pouvant accueillir une vingtaine de personnes…, le tout dans 900 mètres carrés habitables.
Johnny et son épouse Laeticia cherchaient à s’en séparer depuis plusieurs années pour s’installer dans la capitale, mais ils n’ont jamais réussi à la vendre.
Selon Le Parisien, le couple avait espéré en tirer 35 millions d’euros en 2010, avant de revoir leurs prétentions à la baisse…, mais même en faisant passer le prix de vente à 26 millions, ils n’ont jamais trouvé preneur.
À l’époque, ce bien d’exception proposé avec ses meubles était plutôt estimé autour des 15-18 millions d’euros.
Amateur de voitures et de motos de collection, Johnny aimait voyager au gré des saisons entre ses différents pied-à-terre…, car celui qu’on surnommait “le taulier” était également propriétaire d’un chalet à Gstaad, une station chic et branchée des Alpes suisses…, il se l’était offerte en 2006…, il en avait alors fait son domicile fiscal…, mais cette luxueuse bâtisse de 320 mètres carrés habitables répartis sur trois étages est en vente depuis fin 2014.
Elle fut un temps proposée par l’agence immobilière Cardis Sotheby’s International Realty au prix de 9,5 millions d’euros…, depuis, l’annonce a disparu du site.
Interrogé, le réseau de prestige n’a pas souhaité commenter cette information pour des raisons de confidentialité.
Mais à en croire Le Figaro, elle est toujours sur le marché…, dotée d’une vue imprenable sur les montagnes, la propriété dispose de neuf pièces dont six chambres, de deux terrasses exposées plein sud, d’une grande pièce de vie avec cheminée et un jardin avec cabane pour enfants.
Entre deux tournées, “l’idole des jeunes” appréciait également se retrouver auprès des siens sur l’île de Saint-Barthélémy…, baptisée la “Villa Jade” (du nom de la deuxième fille de l’ex-chanteur), cette demeure de 500 m² comprend huit chambres et peut accueillir jusqu’à seize personnes.
Depuis 2015, ce bien haut de gamme est proposé à la location via l’agence St.Barth Properties, pour 50.000 euros la semaine.
L’ouragan Irma qui a dévasté les Antilles en septembre 2016 a épargné la propriété de Johnny Hallyday.
Johnny avait surtout un faible pour les États-Unis, où il était installé depuis une dizaine d’années.
Son histoire d’amour avec le nouveau monde a débuté dans les années ’60 lorsqu’il est parti pour Nashville (Tennessee), afin d’enregistrer son premier album exclusivement chanté en anglais, “Sings America’s Rockin’Hits”.
Mais ce n’est qu’au tournant des années 2010 que le rockeur français a décidé de s’installer définitivement à Los Angeles, dans le quartier huppé de Pacific Palisades.
Cette demeure de 650 m² dotée de sept chambres et de dix salles de bains est estimée à plus de 8,5 millions d’euros…, et parmi ses voisins, Johnny comptait quelques noms célèbres, parmi lesquels Tom Hanks, Ben Affleck, Reese Whiterspoon, Adam Sandler ou Katie Holmes…
En 2015, le fisc a mis au jour un montage complexe d’optimisation fiscale (fraude fiscale) empruntant des circuits exotiques.
Précisément, le chanteur faisait partir des dividendes vers une holding luxembourgeoise baptisée “Nerthus Invest”, qui appartenait elle-même à Gedar SA, une holding immatriculée dans un autre paradis fiscal, le Liberia, et contrôlée par Johnny lui-même.
Le but recherché par Johnny Halliday : “Ne payer d’impôts nulle part, merde aux pauvres et à la solidarité” !
Précisément, le redressement portait sur les dividendes distribués par la société française Pimiento Music SAS, qui exploite l’image de Johnny et détient les droits sur 93 de ses chansons.
En pratique, ce montage permettait que ces dividendes échappent à l’impôt en France, au Luxembourg, et au Liberia…, Johnny a utilisé une disposition du code des impôts français qui permet de ne pas payer d’impôts sur les dividendes si ces derniers sont envoyés vers un autre pays de l’Union européenne.
En théorie, ces dividendes doivent alors être taxés dans l’autre pays européen…, mais Johnny a ensuite utilisé une niche fiscale luxembourgeoise, celle des Soparfi (Sociétés de participations financières), pour éviter de payer des impôts dans le Grand duché…
Le fisc a jugé que ce montage avait été mis en place pour échapper à l’impôt…, il a donc estimé que Johnny n’avait pas droit à l’exonération des dividendes, qui devaient être taxés en France à hauteur de 15%, ce que les fiscalistes appellent la retenue à la source :
“Lorsque les dividendes sont distribués par une société française à une société européenne, puis sont redistribués à une société hors de l’Union européenne, le fisc français effectue souvent des redressements en arguant que la société européenne n’a pas de substance réelle et constitue un simple conduit vers un bénéficiaire non européen”…
Le chanteur ayant voulu délibérément échapper à l’impôt, cela lui a valu une majoration du redressement de 80% pour “abus de droit”.
Johnny a demandé un sursis pour le versement au fisc de 139.105 euros correspondant au redressement sur les dividendes versés en 2008 et 2009.
Il prétextait très sérieusement ne pas avoir de quoi payer cette modeste somme sous le fallacieux prétexte que ce paiement contraindrait Pimiento Music SAS à se déclarer en état de cessation de paiement à brève échéance en l’absence d’actifs susceptibles de couvrir la dette d’impôt réclamée.
Mais le chanteur a été débouté par la cour d’appel le 17 septembre 2016, puis par le Conseil d’État le 10 février 2017.
Historiquement, le propriétaire et président de Pimiento Music SAS était Johnny lui-même…, mais en 2007, il avait cédé le capital à la holding luxembourgeoise Nerthus Invest… et la présidence de la société à son comptable, Pierric Carbonneaux le Perdriel, mais celui-ci a pris ses distances avec Johnny en 2012.
Depuis lors, la société a pour présidente Elyette Boudou (81 ans), grand-mère de Laeticia.
Les comptes de Pimiento Music SAS étaient audités par l’avocat marseillais Olivier Belnet, parent de Renaud Belnet, l’avocat fiscaliste de Johnny.
Renaud Belnet a aussi été un des administrateurs de Nerthus de 2007 à 2009, date à laquelle il a été révoqué.
Enfin, Gedar SA avait pour représentant Raphaël Docquier, expert comptable travaillant chez PwC et auteur d’un mémoire sur le “blanchiment d’argent”.
Rappelons que l’ancienne idole des jeunes s’était exilée fiscalement en Suisse en 2006, mais devait toujours payer en France des impôts sur ses revenus générés dans l’Hexagone.
Contacté, l’avocat de Johnny Hallyday, Ardavan Amir-Aslani n’a jamais répondu.
Ce que le fisc reproche toujours à Johnny Hallyday et ses héritiers :
“L’administration fiscale a estimé que Pimiento Music SAS, en versant les dividendes à la société luxembourgeoise Nerthus Invest, a participé à un montage ayant pour seul but d’éluder l’impôt, à savoir, de faire échapper M. Jean-Philippe Smet [Ndlr: vrai nom de Johnny Hallyday], résident fiscal suisse, à l’application d’une retenue à la source de 15%. Selon l’administration, ce montage a consisté dans la mise en place d’une chaîne de participations par l’interposition de cette société Nerthus Invest, elle-même détenue par la société Gedar, contrôlée par M. Smet et ayant son siège au Libéria, et à laquelle, le 9 mai 2007, M. Smet a cédé tous les titres qu’il détenait dans Pimiento Music SAS. L’administration a relevé l’absence de toute substance de la société Nerthus Invest, dont les bilans ont révélé l’absence de moyen matériel et de salarié. Nerthus Invest ne détient de participations que Pimiento Music SAS et dans la société Artistes et Promotion, et notamment pas dans les sociétés ayant géré les tournées ultérieures de M. Smet. Nerthus Invest ne réalise aucun chiffre d’affaires, se borne à comptabiliser les remontées de dividendes de ses filiales, et ne dispose que d’une faible trésorerie. Il résulte des documents saisis que les dividendes versés par Pimiento Music SAS à la société Nerthus Investment étaient immédiatement reversés à M. Smet par la société Nerthus Invest, sous couvert de la société Gedar. L’administration en a conclu que M. Smet est le bénéficiaire réel des dividendes, seul un intérêt fiscal justifiant l’interposition de la société Nerthus Invest, qui constituée sous forme de Soparfi, n’était pas imposable au Luxembourg sur lesdits dividendes, ces dividences ayant par ailleurs été distribués en exonération d’impôt [en France] grâce à l’interposition des sociétés Nerthus Invest et Gedar. Ainsi, grâce à ce montage, les dividendes en cause ont été distribués par Pimiento Music SAS en franchise de retenue à la source, alors que celle-ci aurait, en l’absence de montage, été appliquée au taux de 15%” (extrait du jugement du tribunal administratif)
http://www.youscribe.com/catalogue/documents/les-jugements-administratifs-2808881