La dernière aventure du Hot-Rod au Jo’Bar’Tartines…
C’était un premier vrai dimanche de soleil…, il n’y avait pas eu d’hiver, mais la zone Cote d’Azur (et surtout St-Trop’) avait été curieusement énormément arrosée ces derniers jours…, “impossible” pour les chics bikers du dimanche de sortir leurs Harley’s, toujours dévoreuses de temps en nettoyage , en lustrage (du latin “lux” lumière)…, les chromes n’aiment pas la pluie…, beaucoup de motards de weekend sont fatigués du chiffon et évitent les jours incertains, les jours gris…, pareil pour les fanas de grosses américaines et de hot-rod’s…
Ce dimanche, il y avait donc foule chez “Jo’Bar’Tartines”…, il n’y avait que des habitués de l’endroit, beaucoup trop de foule pour passer inaperçu…, un non sens pour qui s’organise un rendez-vous…, parcours plus que chaotique…, une voie sans issue pointant à l’horizon qui pouvait se boucher à tout moment…, tout avait failli d’ailleurs s’arrêter dès le premier weekend, deux jours seulement après l’avoir, pour la première fois, vu au port de St-Maxime…, il adorait ce hot-rod, il voulait l’acheter… et si possible prendre la nanana qui était dedans en prime…
Les motos encore fumantes étaient garées en éventail devant leurs propriétaires qui fumaient virilement tout autant, tout autour de la placette ou siégeait le bar, quelques voitures anciennes américaines formaient un mini vrac, avec pour seul critère qu’elles puissent être vues de leurs “propriétaires” depuis leurs places assises à se regarder en miroir : “Dis-moi qu’elle est la plus belle ?”…, autant dire de tout le monde…, Philippe Jeantot, vainqueur du Vendée globe en 1990 avait écrit sur son bateau : “La seule différence entre les enfants et les adultes, c’est la taille des jouets”…
Il avait rendez-vous, “Elle” et “Lui”, à onze heure dans cet endroit de “matuvus“…, il en était presque heureux, il avait prévu 30.000 euros “à discutailler”…, à onze heure pour l’apéritif pour ceux qui se lèveraient à une heure normale… et pour ceux qui sortiraient à peine du lit ce serait un café !
Il était arrivé presque une demie heure en avance, pour choisir sa place, pour gérer la convivialité, son Harley à lui, flambante, était garée, elle aussi en bordure du trottoir…, être amoureux n’évite pas d’échapper aux vanités ordinaires, bien au contraire…, il avait repéré une table à l’intérieur qui avait l’avantage de pouvoir s’agrandir à mesure que de nouveaux convives s’y présenteraient…, mais également d’offrir un dégagement sur tout l’environ, sur toutes les venues de personnes et de véhicules…, il pourrait ainsi avoir un œil sur les entrées et sorties…, il n’avait pas hésité à prévenir certains copains suffisamment surs, suffisamment complices qu’il serait au “Jo’bar’Tartines”… et qu’il allait acheter un hot-rod…, il voulait leur réserver la surprise, “la” découverte qui ferait forcement grand effet…, enfin c’était son idée à lui.
Installé derrière une bière, Harley oblige, la table commençait à se remplir, de copains, de blagues plus ou moins finaudes, de performances plus ou moins avérées, de vantardises vraiment ordinaires…, “Lui”, il n’était pas du genre à ramener des greluches…, plus de deux décennies de mariage, cela faisait de lui une référence… et une référence rare, un modèle même…, car derrière la quête de toujours… et de nouvelles blondes…, se cachait un célibat subit, une solitude…, multiplier les conquêtes, c’était multiplier les déceptions, multiplier les abandons…, s’il avait le contact très facile avec les dames, il ne leur soulevait pas pour autant toujours la jupe…, ce n’est pas qu’il avait plus de rectitude que les autres…, enfin si…, pas que du pénis, la rectitude…, parce que lui, avec son savoir-faire et ses signes matériels d’une vie bien plus aisée que la plupart, il attirait forcement les dames !
Sur le moment, cela pouvait paraître amusant, viril, prestigieux même…, mais le lendemain, il faisait quoi avec cette nouvelle prise, avec ses nouvelles prises ? Ses vrais amis le savaient…, ses vrais amis l’admiraient pour cela. Seulement voilà, le modèle avait sa faille… et cette faille, c’était qu’il rêvait d’avoir un hot-rod… et ils étaient impatients, tous, de connaître l’engin…, forcement exceptionnel…, et ce hot-rod lui permettrait d’élargir ses conquêtes…, des superbes femmes, que personne ne connaîtrait, elles regarderaient sa voiture, puis elles s’installeraient dedans, demi-nues, avec des cuisses fuselées sortant du véhicule, puis l’allure, leur allure de putes distinguées… qui surprendrait tout le monde… et elles viendraient se loger dans ses bras, se coller à ses lèvres, sans ne dire bonjour à personne de connu par elles… et elles joueraient son jeu, car être femme c’est séduire…, c’est aimer se voir aimée, se savoir aimée…
C‘est avoir le gout pour l’exhibition aussi…, la proportion de femmes actrices de porno est sans commune mesure sur celle des hommes…, sauf les gays bien sûr…, certes être proie est plus facile qu’être chasseur…, mais les proies ne sont rien sans les chasseurs et vice, puisque cela est du vice, vice-versa…
N’importe quel propriétaire de gros cube est scotché par une bourgeoise perdue au milieux des poilus…, avoir un gros cube est d’abord affaire de séduction et de complexe machiste…, “Lui” il avait le gros cube et le porte clef… et bientôt la voiture du porte clef qui allait avec…, misérable réalité, mais réalité tout de même.., comme un clip vidéo de rap…, il n’échappait pas aux vanités ordinaires…, mais lui savait les décrypter et donc s’en amuser, les mettre à distance pour ne pas en être prisonnier…, le décor étant planté…, bien installé à son poste d’observation, sa mise en scène étant callée…, il ne manquait que l’actrice principale, le meilleur rôle, l’ange blond du mal au volant de “la bête”, c’était le moment idéal pour qu’elles apparaissent.
Il lui envoya donc un texto, pour lui dire bonjour.., pour lui dire qu’il était prêt (à tout)…, pour lui dire qu’il l’attendait déjà, impatient…, pour vérifier éventuellement le timing, éventuellement seulement…, vu l’heure…, avec le temps de trajet important, elle était forcément en route depuis dix heure trente maximum, soit depuis déjà une douzaine de minutes…, dix heures trente du matin, c’était bien plus qu’il lui fallait…, pour faire une nuit complète et prendre son temps pour se parfaire…, elle savait l’importance de ce rendez-vous avec ses vrais amis à “Lui”…, ceux avec qui il partagerait de bons et futurs moments…
Elle allait mettre forcement le paquet, pour lui vendre le hot-rod de son amant, c’était une belle femme que beaucoup auraient voulu croquer, il espérait l’avoir en prime…, mais de son texto, il n’eut pas de retour…, c’était surprenant…, elle l’attendait forcement ce texto…, cela ne ressemblait pas à l’idée qu’il se faisait de la situation…, à ce qu’ils avaient convenu ensemble, “Elle” et “Lui”, la veille…, elle aurait dû être déjà dans sa voiture…, mais rien…, aucun signe de vie…, surprise.
Quelques minutes après, nouvel envoi de texto…, rien…, surprise puis angoisse…, pour patienter, autour de la table, il participait à toutes les conversations…, le temps passait démesurément lentement…, son smartphone rivé à sa main…, sentir les premières vibrations d’un appel, d’un texto, forcément le sien à “Elle”, le sien à “Elle” pour “Lui”…, mais rien…, les minutes passait et toujours rien…, elle allait arriver, forcement… elle était au bout de la rue, forcement…, elle cherchait à se garer, forcement…, forcement elle avait un problème de téléphone…, dix minutes plus tard, encore un texto et toujours aucune réponse…, elle serait en retard…, de combien de temps ?
Sa mise en scène à “Lui”, était mise à mal…, rien ne fonctionnait comme prévu… et pour qu’elle raison serait-elle en retard ? Pourquoi ne répondait elle pas ? Cela commençait à trotter dans sa tête, à trotter comme la trotteuse d’une montre mécanique qui arpente avec pugnacité le cadran…, ce retard, la raison de ce retard, c’était trop évident, pour qu’il ne puisse pas y penser maintenant…, c’était inscrit en filigrane dès le début du weekend .., c’était trop éclatant pour qu’il ne puisse pas le voir, le vivre, comme s’il avait été dans la pièce…, ce retard sautait aux yeux comme le fisc sur le commerçant…, comme la grève chez Air France… et “Lui”, il traversait à présent un trou d’air, une béance…, ce qui semblait être simplement supputé, était devenu une simple, une odieuse réalité.
Trop d’éléments avaient convergé pendant ses derniers jours, et la verge de son mec s’était forcément attardée dans “Elle”, pour la mettre autant en retard…, il avait eu d’abord son refus incompressible à “Elle” de le voir, “Lui”…, ensuite cette agression se sa part à “Elle”, à propos de son Harley à “Lui”… et maintenant ce retard démesuré…, tout cela en quelques heures seulement…, que du concentré de n’importe quoi !
C’était cela la véritable misère…, elle lui mentait autant qu’elle se mentait à elle-même…, les gros cubes pour faux virils et vrais machos, c’était du flan à côté d’une telle trahison.., il n’y avait pas d’autre explication possible…, c’était un adultère dans un autre adultère…, cette femme était prenable tout autant qu’elle était intenable, elle était l’amante du proprio du hot-rod et lui il rêvait d’avoir le hot-rod et l’amante, comme le beurre et la crémière…, il voulait les voir…, les avoir pour “Lui”…, la jalousie, s’était pour les faibles, les craintifs, pour ceux qui ne croyaient pas en l’avenir, les sans espoir d’arriver un jour… “Lui”, il dormait bien avec une autre femme, sa conjointe… et il l’a remplissait aussi… et il la remplirait encore pendant quelque temps, le temps d’être sûr qu’elle serait, “Elle”, la femme de sa prochaine vie en même temps que le hot-rod…, qu’elle couche avec son mec, mais au moins, qu’elle respecte les formes…, au-delà du corps, qu’elle respecte le cœur… “Lui”, il était sur de l’aimer, ce hot-rod… et “Elle” en prime…, les besoins du corps, c’est autre chose…, pourquoi agissait-elle ainsi ?
Elle savait que l’envie des mecs est fragile…, elle savait par de trop nombreuses expériences, qu’elle avait du mal à faire confiance…, alors pourquoi saper la confiance de celui avec qui pourtant elle voulait lui acheter le hot-rod de son amant ? Le complexe de l’échec inévitable…, sûr de ne pas réussir, donc autant provoquer cet échec quand cela arrange, puisque cet échec est une certitude…, la malédiction du perpétuel échec… et l’échec c’était ce trop d’envie pour le rod ET pour “Elle” maintenant…
Mais si elle était en retard parce qu’elle avait couché en matinale avec son mec…, elle était décidément bien misérable…, toujours prompte à juger les autres, mais qu’une misérable parmi les misérables, en fin de compte…, de toute façon, il n’était pas là pour les voir s’emmêler dans leur lit…, un forfait sans témoin…, il n’aurait aucune certitude…, il n’en saurait jamais rien…, alors le doute devrait lui être profitable… à “Elle”…, autant mettre son mouchoir dessus.
A onze et quart, enfin une réponse : “J’arrive !” …, si elle trouve du premier coup l’adresse du “Jo’Bar’Tartines” , elle aura au minimum, une heure de retard ! En fait elle arriva…, une heure et quart en retard…, mais juste avant qu’elle arrive, venait de s’installer à sa table à “Lui”, un ami, plus qu’un copain, un de ceux qu’il invitait chez lui, dans les diners sociaux…, son épouse et la sienne fréquentaient les mêmes conneries…, il était l’un de ceux qui ne mettaient jamais les pieds ici, pour un tas de bonnes raisons…, surtout parce que, intellectuellement, il ne s’y retrouvait pas avec cette masse gouailleuse et pittoresque…, mais exceptionnellement il était là, venu de nulle part…, comme s’il avait senti le coup… et il raconterait forcement à son épouse à lui , la rencontre, la découverte avec le hot-rod et l’amante de son propriétaire… et il serait déçu, lui, de cet ami, de ce libertinage potentiel à “Lui“…, cela rajoutait du compliqué au complexe…, pour “Lui”, inévitablement, son déjeuner dominical allait commencer dans moins de trois quart d’heure, avec le temps du trajet, moins d’une demie heure à attendre…, la totale…, une misérable !
Le hot-rod arriva sur les chapeaux de roue, elle le conduisait nerveusement…, “Lui”, il n’avait jamais eu le plaisir de la conduire cette voiture…, elle descendit du hot-rod si bas sur la route…, ses jambes nues apparurent, plus hautes que le siège, les talons plus sexy que jamais…, elle avait revêtu une robe de marque, fendue devant , genre hôtesse de l’air… elle était juste magnifique… elle traversait en grande enjambées les derniers mètres jusqu’au bar…, la matinée se terminait et beaucoup de clients étaient à leur deuxième, ou troisième bières…, l’ivresse commençait et peu de motards prêtèrent attention à la belle créature qui passait devant leur nez… Dans le bar, “Elle” le repéra très vite, “Lui”, et on lui fit place sur la banquette… Elle vint s’assoir à cote de lui… Sur son visage à “Elle”, c’était un visage qui venait de connaître plaisir et orgasme, et il y avait à peine une heure passée…, il fuit direct jaloux… mais se dit : “à moins que le déplaisir, le retour sur terre, l’ombre de la culpabilité, de toutes ses culpabilités à “Elle”, le retard, ses retards en général, l’ont emportés sur les doux instants des draps et des corps emmêlés”…
Cela, c’était tout à fait possible…, la grisaille maraudait toujours autour de sa vie, autour de son lit.., les gris étaient sa vie…, ils ne lui laissaient jamais longtemps de répit…, seuls ses vêtements souvent colorés camouflaient ce gris perpétuel…, ses draps était gris, sa maison était grise, sa production professionnelle l’était souvent aussi…, le gris, son gris à lui, ce n’était pas du noir et du blanc…, son gris, ce n’était pas le mélange des deux…, son gris, c’était un état d’esprit, une vie subie plus que vécue, une vie à conserver le carton plutôt que le papier cadeau, une vie ou aimer et être aimé est une perpétuelle douleur, une vie ou être aimé est juste impossible.
Dans le gris , l’homme est par essence, dès que les hormones ne réclament plus son corps, un salaud définitif…, alors autant rester dans les cartons d’une vie qui restera à déballer, d’une vie inutile…, le Mâle-acquit ne profite jamais…, l’amour s’était détournée de lui, pas la baise… et “Elle”, à peine arrivée, elle était déjà fermée… “Elle” avait gardé juste de l’espace pour quelques politesses envers des personnes qui lui montrerait quelque intérêt, elle était venue lui vendre le hot-rod, pas son corps…
–Tu veux boire quelque chose ?
– Café !
C’était à prévoir ! Il entendit ces mots comme celui d’une sentence. Il prenait “perpet”.., elle sortait du lit avec son amant… Elle sortait du lit sans avoir pris son petit déjeuner… C’est long de faire l’amour et trouver l’orgasme… Pas une excuse…. Pas une explication… Ni sur le retard, ni sur la réponse tardive aux textos…, la tablée faisait comme si rien ne s’était passé, comme si elle faisait partie depuis longtemps de la bande… “Elle” en robe couture et talons aiguilles, eux en blouson râpé de cuir noir et bottes poussiéreuses de moto…, les copains avaient senti que quelque chose ne tournait pas rond…, alors autant meubler…, seul l’ami imprévu, non prévenu, forcement lui, se sentit porté par cette belle et improbable venue…, ils parlèrent travail… et de suite connaissances en commun…, comme par hasard, ils avaient habités, il y avait encore peu de temps, un même village du Var, un de ces endroits quasiment fermés à toutes couches populaires, tant le prix au mètre carré constructible, les rendaient indésirables…, c’était juste épuisant pour “Lui”… “Lui”… Tout le monde voyait qu’ils étaient ailleurs… “Lui” ne voyait personne, que sa détresse.
Le malaise était total…, elle le sentit… “Elle” le ressentit, désœuvré, malheureux… “Elle” le plaignait maintenant… Il l’avait attendue avec le hot-rod… et elle pfffff… Et il se faisait une fête de les présenter à ses meilleurs amis, ceux qui comptaient pour lui dans sa vie… Ceux qui auraient du le ramasser à la petite cuillère quand elle l’aurait achevé…, péché d’orgueil…, acte de contrition…, pénitence… Mais quelle crème d’homme était-ce que son amant, cet homme, qui avait non seulement le hot-rod, mais “Elle” en plus, la crème et une crémière si légère, une crémière à zéro pour cent de matière grasse…, à zéro pourcent de matière en grâce…
Et il fallait en plus qu’il la plaigne ! Quel cynisme ! Quelle cruauté ! Et le pire, c’était qu’elle y croyait à ses mensonges de vouloir acheter le hot-rod…, en fait , il ne mentait même pas…, c’est sa conséquence de vivre dans plusieurs univers parallèles…, la vérité n’est qu’une fabrication poussée par les circonstances, prises sur plusieurs plateaux différents…, c’est une vérité sur laquelle est posée l’étiquette “vraisemblable”…, mais gouter le contenu du flacon vous en dégoute à jamais.
Elle devait se dégouter elle-même avant de se donner une auto-absolution de s’être laissée piéger à venir seule dans ce bar…, même avec la meilleure volonté, elle ne pouvait accepter cette explication…, il a alors compris… et lui a répondu par un pale sourire…, par un gris sourire, gris souris…, le gris, c’est contagieux… elle n’aurait aucune explication, elle ne pouvait en avoir d’autre…, d’explication…, rien d’autre ne tiendrait debout… et elle le savait…, elle qui anticipait tout, elle n‘avait pas anticipé cette montée d’hormones matinales… ou plutôt, n’avait pas anticipé les conséquences de cette montée d’hormones matinales…, si son explication bancale avait été la vraie vérité, elle lui aurait envoyé de suite un texto pour le prévenir de son retard…, ils se seraient appelés au téléphone…, la présence de sa voix aurait agi comme un pansement, toute la matinée, en l’attendant, en attendant… et il se serait adapté, de bon gré…, il aurait même pu changer son emploi du temps, mais rien…, que l’attente et la désillusion…
Elle voyait le malaise créé, un de plus, un de trop, comme les autres d’ailleurs…, décidément , elle n’y arriverait pas avec lui…, mais par fierté, elle voulait paraître avoir les mains propres… est-ce qu’il entendait seulement ce qu’elle disait… est-ce qu’elle se rendait compte de ce qu’il avançait…, oui, elle s’était faite belle et il allait la mener dans le restaurant le plus cher de la région…, une tête de veau et un café, sans passer par la case dessert…, trop d’accumulations pour que cela soit complétement fortuit.., cela sonnait creux, c’était faux…, cela puait le mensonge à plein nez, elle devait le planter là et s’en retourner vite-fait.
Une demi-heure plus tard, même quand on tire le temps , ça passe vite… il prit congé de tous… il culpabilisait…, elle n’avait pas envie de se faire tripoter…, de le branler… et de l’entendre couiner comme un porc…, pas facile de soutenir un regard dans lequel vous avez jeté de l’acide…, mais elle ne savait comment faire pour fiche-le-camp sans se faire violer…, le mauvais coup, le coup qui n’était pas du sort, le coup qui était de son sort et qui avait tout ses ressorts à “Elle“… Sa vie amoureuse à lui, c’était misère, grandiloquence et décadence ! Pas plus et c’est déjà beaucoup trop…, cela devenait compliqué…, trop pour que cela deviennent vraisemblable…, c’était trop cher !
C’était heureusement lui qui était affaibli…, c’était elle qu’il ménageait encore…”Elle”, “Elle”, “Elle” qui ne cessait de le broyer…, mais il fonctionnait encore sur le mode : “Le hot-rod et Elle”…, il a enfouché son Haley flamboyante et il est parti…
En roulant à toute allure, pour gommer ce qui était devenu son retard à lui, il réfléchissait sur ce qu’il était en train de faire…, sur ce qu’il était en train de vivre…, valait-elle la peine de rayer plus de vingt années de vie commune pour une femme insaisissable, pour une femme qui se jouait de lui, autant qu’elle se jouait d’elle-même d’ailleurs…, pour une femme qui ne lui offrait aucune certitude, sinon que celle d’aller de déconvenues en déceptions, de meurtrissures en abandons…, pour une femme qui allait le tromper autant qu’elle se trompait elle-même .. et il était meurtri une nouvelle fois… et “Elle”, forcément, cela ne serait pas de sa faute, puisqu’il n’avait pas de preuve… que des coïncidences… que de fortuites coïncidences… Non, ce n’était pas une femme perdue… “Elle” ne se tapait pas des types d’un soir…, juste des types d’un matin…, le dernier arrivage…, ils sont plus frais.
Qui était-il pour la juger ? C’était peut-être juste quelqu’un qui voulait prendre à la vie ce qu’elle lui a trop souvent refusée… et même si s’était au dépend des autres, de l’autre, de “Lui” à présent… et c’était cela qui était le plus critiquable… “Elle” n’avait sans doute pas de norme, plus de standard…, comme La génération Y : “Ce que je veux, quand je le veux”… Elle avait bien conscience qu’au fond d’elle-même, par son attitude à “Elle”, que l’avenir avec “Lui” serait un cauchemar…
Ce mec avait du plomb dans l’aile…, du plomb dans la cervelle…, du plomb dans les tuyaux en plomb…, il ne savait plus ou il en était…, il souffrait de saturnisme aigu… il installait le doute permanent, il disait vouloir acheter le hot-rod, mais en plus il la voulait en prime, puis il faisait le gamin frustré, beau gosse qui reçoit des claques et pense que les femmes lavent plus blanc…, que rien n’est jamais de leur faute…, qu’elles privent les hommes de penser à les baiser…, qu’elles font porter leur fardeau.., que la violence des femmes est psychologique…, aucune trace…, aucune preuve… et que les hommes se suicident pour les femmes…, zéro statistique…, qui a déjà entendu le témoignage d’un suicidé ?
C’était juste du “n’importe quoi”…, un concentré de n’importe quoi…, il était maintenant dans le dur…, la pente était raide.., il était devenu un samouraï , sans cause et sans maitre, prêt à se faire harakiri après cette nouvelle défaite…, harakiri pour “Elle”..
Soudain, le hot-rod l’a doublé…, “Elle” au volant…, quasi nue, un grand sourire, un sein découvert…, il a repris espoir…, tellement qu’en voyant son doigt d’honneur… qu’il a perdu la boule et a embouti un camion-poubelle, plein cul…, il est rentré dans les détritus comme une merde…, l’Harley aussi, qui l’a écrabouillé comme une galette…, la machinerie automatique du “poubelier” a fait son œuvre, il a été broyé, comme son cœur… et le hot-rod a filé au loin… “Elle” n’a rien vu : “De toute façon c’était une affaire stupide, sans suite, sans lendemain et son sperme devait avoir mauvais goût, suré”…, elle eut un haut-le-cœur rien que d’y penser… et se dit : “Faut que je rentre vite-fait et replace le hot-rod au parking avant que Patrice ne s’en rende compte”…