L’extatique solitude dérélictoire bénie du naufragé d’une Ford GT !
Salut mon Popu…, tu vas bien ? Tu aurais préféré être attiré par une photo d’accroche comportant une fille quasi-nue, une autre fantomatique extraite d’une scène BDSM… et une Ford GT rouge… Waouawww ! Le corps de la belle est dans le corps de texte ! je te l’écris avant : ici, pas d’histoire, pas de scénario, tu vas lire ce qui pourrait être le script d’un film inscrit au prochain Festival de Cannes, sans vedettes, ni cascades, ni explosions… une nouveauté…
Il n’y a rien à raconter, ni en fond, ni en surface… et pourtant il y a beaucoup à lire entre les photos volontairement sombres qui illustrent ce texte qui l’est tout autant, mais ça, tu ne le sais pas encore…
Voici donc le script d’une histoire inintéressante, sans péripéties, sans happy-end, sans rien d’autre que les photos d’une femme dénudée posant sur et dans une Ford GT rouge…, je pourrais aller jusqu’à dire : “sans protagonistes”… tant il va pour toi, être difficile de croire en ta propre inexistence autant qu’en celle des quelques individus qui peuplent cet ersatz de vie qu’est le web que tu fréquentes.
Cette vie de pixellisation à outrance, tu n’as même plus la force de la vomir…, tout juste assez de volonté pour lire une nième texticulerie, qui, cette fois, ne sera même pas couillue.
Tu es dans une semi-pénombre, planté au fond d’une pièce, devant l’écran de ton ordi, comme souvent…, ta chaîne hi-fi débite un air indéfinissable et lancinant, mille fois entendu, la lumière artificielle est encore trop intense pour tes yeux fatigués…, tu as essayé de trouver une activité, en vain ; ton corps avachi sur ton fauteuil pèse bien plus lourd que ta volonté, c’est la seule chose qui t’empêche d’éteindre ton ordinateur pour en finir…, ce serait si simple, mais c’est encore au-delà de tes forces…, inutile de tenter de fermer les yeux, le sommeil ne viendra pas.
Tu n’as d’autres choix que d’attendre, attendre qu’on te vienne en aide, qu’on vienne te sortir de ta torpeur.., attendre la fin, sans cesse reportée, de ton calvaire domestique…, attendre, encore et toujours.
Tu ne fais rien, n’as envie de rien, tu tournes vaguement en rond comme un lion en cage…, l’inaction précède l’ennui, l’ennui conduit à l’apathie…, tu aimerais être motivé pour quelque chose…, mais tu ne parviens plus à t’en donner un…, tu ne parviens pas à croire à cette mascarade.
Tout t’apparaît si vain et inutile que ça en devient un handicap, un frein à la moindre initiative…, quoique tu fasses, cela ne servira à rien…, qui que tu sois, tu n’es qu’un des rouages interchangeables au sein de l’humanité…, que l’un d’entre nous disparaisse : il sera remplacé.
Avoir un objectif dans la vie n’est qu’un artifice destiné à détourner ton attention du vide…, mais tu n’es pas dupe.., tu dis refuser ce compromis tout en sachant qu’il n’y en a pas d’autre possible.
Tu passes ton temps à attendre quelque chose, n’importe quoi…, mais il ne se passe plus jamais rien…, tu devrais agir d’une manière ou d’une autre pour obtenir un résultat, sortir, te battre, faire des efforts qui seraient peut-être récompensés…, tu devrais faire tout cela, certainement…, tu vas d’ailleurs faire quelque chose dès ce soir…, partir une semaine…, partir loin…, tel un aventurier baroudeur en quète de trésors !
En attente, tu subis la ronde interminable des minutes qui défilent trop lentement, le temps qui s’échappe d’un robinet mal fermé…, ton existence est temporairement coincée dans une boucle sans fin…, du lever au coucher, toujours les mêmes gestes, les mêmes attentes vaines, le même ennui… et le bordel qui s’entasse.
Quelque part, un jour, au fond des chiottes de je ne sais ou, une nouvelle forme de vie bactérienne apparaîtra…, peut-être que ce nouveau microbe sera le germe d’une maladie qui éradiquera l’humanité, ce qui tu en conviens, sera tout de même un changement dans ton quotidien.
Tu n’en peux plus d’attendre, mais tu n’as pas le choix…, c’est un peu comme si toute l’histoire tournait en boucle…, tu as l’impression d’avoir déjà vécu ça, plus d’une fois…, c’est toujours la même histoire, un cercle vicieux…, ennui, flemme, attente, inaction : les quatre composantes de ta vie se succèdent les unes aux autres en une ronde sans fin…, les jours se suivent et se ressemblent…, tu en déduis généralement que ça le sera jusqu’à la fin…, tu sens bien à me lire que tu es à coté de la plaque, que je t’y pousse également, mais que tu n’as pas toutes les cartes en main…, en conséquence de quoi tu déambule dans ta petite cellule en désordre, sans pouvoir t’arrêter…, quelque chose ne tourne pas rond, tu le sens confusément, mais tu es incapable de comprendre quoi…, il y a quelque chose d’anormal dans cette histoire que je te débite en grosses tranche de gras, ça te semble évident.
C’est comme si je jouais avec tes nerfs, comme si je me servais de ta propre apathie contre toi-même…, je te cache une partie de la vérité, je te manipule, c’est évident…, pourtant, ce n’est pas si compliqué à comprendre…, cesse de te voiler la face et tu verras…, ouvre les yeux.
Il fut un temps où tu comptais la présence constante de copines ou d’inconnues en ta compagnie…, ton univers était un carrefour où se croisaient des jolies de tous horizons, passionnantes, énergiques, bruyantes : en un mot, vivantes.
La nuit comme le jour ton environnement direct bruissait d’une activité débordante…, tu baisais jours et nuits, nuits et jours…, tu avais sciemment sacrifié ton intimité et ta quiétude pour le bien de la communauté humaine, tu te contentais humblement du prestige qu’on accorde aux bienfaiteurs…, autour de toi se nouaient intrigues, confrontations, interactions, pour ton plus grand plaisir…, tu étais le rouage vital, mais secret, de toute une machinerie…, la clé de voûte.
Tu as oublié depuis quand cette période est révolue…, petit à petit le mouvement s’est ralenti, l’activité s’est éteinte, sans que tu ne t’en rende vraiment compte…, tu as retrouvé ton silence et ta solitude, les visites se sont raréfiées.., tu as compris que tous ces jolies se passaient très bien de toi, que la plupart n’étaient que des inconnues parmi d’autres et qu’elles n’avaient d’intéressantes que l’apparence.
Aujourd’hui tu n’existes plus que pour toi et ton home n’est plus que le pôle de ton ennui…, ces derniers temps, graduellement, le répertoire de ton téléphone portable s’est vidé, tu vas bientôt vivre un soulagement puis un flottement quelques minutes après une torpeur soudaine, les yeux mi-clos et le regard dans le vague…. et tu vas te rendre compte que l’ensemble de l’histoire d’une vie qui n’en est pas une, n’entraine que le désintérêt des autres…
Le vide…, tu le sens, n’est-ce pas ?
Tu voudrais te lever et sortir un peu…, peut-être aller voir des amis, des amies, pour peu qu’il t’en reste, ou faire quelques menus achats…, une petite ballade, prendre un peu l’air, voir du monde…, où n’importe quoi d’un tant soit peu créatif, pour te sentir exister…, mais tu ne parviens pas à décoller de ton fauteuil et ton regard reste lamentablement attaché à l’écran depuis des heures…, continue donc à attendre qu’il se passe quelque chose, puisque tu ne sais rien faire d’autre…, je suis comme toi, mon Popu, 4,000.000 millions de visiteurs et visiteuses par an et seulement moins d’une dizaine répondent…, attendre, toujours attendre.
Chaque matin (ou chaque lever), c’est pour toi la même journée qui recommence, si semblable à la précédente que c’en devient écœurant ; l’impression de sécurité que tu tires de cette routine a fini par te rendre nauséeux…, tout se passe toujours de la même manière, strictement…, joie, ennui, sérénité masturbatoire ou crise de nerfs, tout finit par passer, il suffit d’en avoir la patience…, les heures passent, interminables… et avant d’avoir eu le temps de réaliser ce qui se passait, tu te rends compte qu’il ne se passe rien !
Tu attends en vain de l’action, des événements, un quelconque retournement de situation, n’importe quoi pour ne plus subir cette attente léthargique interminable…, tu n’aimes guère être bousculé, mais tu n’en peut plus…., en fait, surprise, mon Popu…, c’est un piège…, il n’y aura ni action, ni bouleversement…, une story désabusée ne se lance jamais, elle ne peut que s’éteindre lamentablement…, de plus, toute péripétie t’es définitivement refusée…, il y a moins d’une heure, l’absence d’espoir, la frustration et la douleur d’exister te semblaient infinies ; maintenant et seulement quelques instants plus tard que tu as débuté la lecture de ce texte, ce sont pas du tout la satisfaction, la sérénité, la joie sans autre cause qu’elle-même, qui semblent n’avoir plus de bornes…, en fait tu commences à en avoir ras-le-bol.
La réalité n’existe pas, c’est un lointain épouvantail…, le temps s’allonge sans fin…, ça n’aura pas de fin, laisse-toi aller Popu…, accepte une fois pour toutes le fait que tu ne vis que pour et par l’apathie…, toutes les explications, les causes et les conséquences de cette apathie sont désuètes, il n’y a plus qu’elle qui compte…, mais, es-tu bien certain de comprendre ce que je t’écris ?
Le démon invoqué finit toujours par réclamer son dû, il y a un ratio plaisir/souffrance à respecter…, chaque incursion dans le monde des rêveries, équivaut à faire un emprunt à 100 % : si tu montes au septième ciel, tu redescends jusqu’au quatorzième sous-sol où tu restes bloqué deux fois plus longtemps, parfois davantage…, torture mentale et psychologique…, à la béatitude succède l’abattement le plus extrême…, tu te perds dans un dédale de raisonnements de plus en plus alambiqués, de constats désabusés et amers, de regrets et de frustrations…, ton ennui devient palpable, tu restes à végéter en ressassant des idées noires.
Le temps recommence à passer trop lentement, ta colère recommence à enfler sans trouver le moyen de s’exprimer…, à ce stade, ce n’est plus de la déprime mais du désespoir…, c’est toujours la même histoire, tu croyais trouver une issue, mais tu es à nouveau coincé dans la même impasse…., ça te saoule…, toute cette histoire te saoule, ça tourne en rond, c’est répétitif, lassant, ça n’avance pas.
Ce scénario est piégé, il n’y a plus d’espoir, il ne tereste plus qu’à quitter l’histoire dès maintenant : 4…3…2…1…, rien…, rien de rien de rien…, trop tard…, tu n’as pas eu le courage de t’enfuir, tu t’es une fois de plus laissé porter par l’apathie, l’inertie a eu raison de toi…, entend-moi, car je suis ta conscience : tu n’es plus en mesure de t’échapper…, désormais plus rien n’aura de sens
Plus rien n’a de sens.
Plus rien n’aura de sens.
Rien n’a jamais eu de sens…, rien.
Tu as envie d’être arrivé à la fin.
Sois rassuré : la fin est proche…
Comme prévu, la conclusion sera décevante et ne t’apportera rien.
Eternel recommencement et aucun espoir à l’horizon.
Sache-le et accepte-le : tu as tout simplement perdu ton temps….
Cette histoire ne te servira à rien, c’est ta vie qui est passée…, ta loose story…
Il n’y a plus rien à raconter.
Plus d’histoire, plus de scénario.
Désormais, tout est vrai…