La Grande Casse
Ce fut un des articles “phares” et “emblématiques” de mon magazine “Calandres” des années’80, celui publié le 1er avril 1984, qui fut “Le Poisson/poison d’Avril” le plus mémorable réalisé si ce n’est l’article également “Poisson/poison d’Avril” paru dans mon magazine Chromes&Flammes, présentant les peintures de scènes de “Mural’s” en pots pour les Van’s (il suffisait selon l’article de tremper le pinceau et d’appliquer régulièrement)… Plus d’un millier de demandes ont déboulé sur les 500.000 magazines C&F publiés alors en 5 langues/éditions dans toute l’Europe… Et, au comble de la stupidité, chacun des gag’s furent repris par quelques cons-frères en quête de “scoops” qui n’avaient pas compris que c’étaient des poissons d’Avril…
L’affaire de “La Grande Casse” a généré des scènes surréalistes dont la plus épique fut un lecteur millionnaire de C&F qui a suivi, durant 5 jours, avec son hélicoptère, toutes les lignes haute-tensions qu’on voyait sur les photos, au départ de Paris (la Grande Casse était faussement indiquée comme étant à 40kms au sud de Paris, alors que les photos étaient celles d’une Casse en Californie)… Poisson d’Avril pour la France, ce n’en était pas un aux USA, car quasi toutes les épaves de voitures mythiques et incroyables se retrouvaient groupées en un même lieu, certaines dans un hangar, d’autres exposées aux éléments. Cet ensemble d’épave faisait le bonheur de quelques restaurateurs mais dans l’ensemble toutes ces carcasses n’intéressaient personne.
Derrière les clôtures de barbelés croupissaient des légendes comme la Mercedes-Benz la plus rare jamais construite, une Alloy Gullwing, longtemps considérée comme perdue, et d’autres voitures légendaires et rares. C’était un amoncellement d’épaves pourries que les esprits curieux n’avaient jamais imaginé pouvoir regrouper, mêmes totalement pourries, sauf un plus fou que les fous qui rachetait au prix de la mitraille… 50 ans plus tard le fou est décédé et les héritiers qui pensaient tout concasser en cubes de pourriture ont croisé les gens de RM Sotheby’s a qui ils ont avoué avoir tout essayé et échoué… RM Sotheby’s a concocté une histoire à dormir debout qui tenait des légendes urbaines et a créé une légende…
“La Grande Casse” est devenue “The Junkyard : The Rudi Klein Collection”, décrite par pubs et sur catalogues de grand luxe comme étant : “La collection la plus secrète du monde, cachée depuis des générations, qui sera vendue exclusivement à d’authentiques connaisseurs/collectionneurs du monde entier (et au delà) en octobre 2024″. Comme pour toute histoire destinée à faire du cinéma, il fallait avoir de l’imagination et le sens des affaires. Le nom “Rudi Klein” était au TOP parce qu’il ressemblait au nom d’un designer de la mode qu’on pouvait confondre avec le Klein propriétaire d’une casse automobile… En l’occurrence il a été re créé comme étant un immigrant arrivé en Amérique du Nord à la fin des années 1950 pour se consacrer aux vieilles autos…
L’histoire est un scénario bien imaginé : “Rudi Klein a commencé sa carrière comme boucher (un gag dans le scénario pour faire “pluche vrai”), mais s’est vite rendu compte qu’il pouvait gagner beaucoup mieux sa vie en récupérant pour rien des voitures accidentées quasi irréparables qu’on mettait à la casse et en les stockant dans un hangar pour en vendre des éléments qui étaient, quels qu’ils soient générateurs de profits sans aucun autre investissement que le hangar et son terrain… De là il a également versé dans le commerce d’automobiles classiques avec une prédilection pour les automobiles européennes dont les pièces étaient inexistantes aux USA”. Avouez que l’histoire est belle… Donc elle est vendable !
La suite est du même style : “Rudi Klein s’est entiché des Porsche’s, ce qui a donné lieu à la création de “Porsche Foreign Auto” en 1967. Au cours des décennies suivantes, Rudi Klein a amassé une collection d’épaves irréparables dont certaines, par hasard, étaient en voie de devenir les voitures de collection les plus importantes de tous les temps… L’astuce de Klein était d’attendre patiemment tout en exploitant la casse dans la banlieue de Los Angeles en vendant des pièces pourries mais introuvables. Non ouverte au public, la collection Klein est ainsi devenue un lieu mythique et légendaire (gag !), avec beaucoup de spéculations autour de son contenu, et très peu d’entrées autorisées”. Tout cela devait donc être retravaillé…
La casse automobile effectivement dénommée “Porsche Foreign autos” est celle qui avait servi de “poisson de 1er avril 1984” dans mon magazine Calandres, devait migrer dans un autre endroit pour cause de lotissements d’habitations avant début 2025 et cherchait un moyen de tout vendre rapidement, ce qui a fait germer l’idée géniale de ce scénario… Est donc arrivé en 2024 le moment de vendre ces carcasses et épaves majoritairement irréparables, sous forme d’une découverte archéologique exceptionnelle… Sont donc parus des articles alambiqués d’un crétinisme à faire peur à feu Louis de Funes lui-même… Tout n’était pas faux, mais tout n’était pas vrai…
Le scénario était basé sur ce qui précède avec diverses améliorations, du genre : “Aujourd’hui, pour la première fois, des automobiles remarquables, dont plusieurs récemment revenues d’Europe, seront disponibles aux enchères publiques, offrant un aperçu tant attendu de la collection que tant de personnes ont tenté de voir, d’acheter et de se procurer depuis plus d’un demi-siècle“… La suite était également totalement inventée mais en pire… Les ceusses d’Artcurial qui jusque là étaient les champions des histoires inventées (telle la Ferrari d’Alain Delon et diverses raretés d’une prétendue succession fiscale, recouvertes d’une tonne de mêmes journaux invendus encore sous liens plastiques), ont été dépassés…
Les commentaires imaginés par Sotheby’s étaient limites cinématographiques : “Après le décès de Rudi Klein en 2001, sa famille a conservé la collection telle qu’il l’avait laissée, les voitures étant restées intactes et conservant leur état d’origine ou tel quel. Au cours des 40 dernières années, notre équipe a mis sur le marché d’innombrables voitures historiques importantes, chacune spéciale à sa manière. Cependant, sortir de la clandestinité quelque chose dont l’existence n’a été que rumeur, comme la légendaire collection Klein, est vraiment spécial. Découvrir une Mercedes 500K ou une Alloy Gullwing est le genre d’histoire qui résonne chez tout le monde, pas seulement chez les passionnés d’automobiles”...
Le total délire continuait crescendo : “Ce que Rudi Klein a amassé est unique en son genre, et nous savons que beaucoup de ces voitures survivront pendant des générations, alimentant de nouveaux projets ou préservées dans leur état d’épaves. C’est une opportunité passionnante pour les collectionneurs, et les possibilités sont illimitées avec cette collection”... Voilà c’est tapoté et signé par Cary Ahl, spécialiste automobile de RM Sotheby’s… Waouwwwww ! Proposés dans une série d’enchères, en direct et en ligne, en octobre 2024, les points forts de “The Junkyard : The Rudi Klein Collection” ne comprennent que des épaves ramenées et mises en scène, telles quelques voitures “attrapes-mouches” sur-affublées de décorations …
-Mercedes-Benz 500 K ‘Caracciola’ Special Coupé de 1935 par Sindelfingen : L’une des voitures Mercedes-Benz d’avant-guerre les plus célèbres existantes, ce coupé unique est le seul exemplaire de son genre, livré à l’origine au légendaire pilote de Grand Prix Mercedes-Benz, Rudolf Caracciola.
-Mercedes-Benz 300 SL « Alloy » Gullwing de 1955 : l’une des 29 exemplaires « Alloy » Gullwing produits, ce fut le seul exemplaire livré en noir et appartenait autrefois au légendaire pilote de course Ferrari Luigi Chinetti. Il s’agit d’un exemplaire unique de la 300 SL la plus recherchée de toutes, pratiquement invisible depuis des décennies.
-Mercedes-Benz 300 SL Roadster 1957 : En attente d’une restauration bien méritée, cette 300 SL a quitté l’usine avec une finition rouge Fire Engine sur un intérieur crème et était équipée de roues Rudge d’usine, la configuration la plus souhaitable pour un Roadster des premiers temps.
-Horch 855 Special Roadster 1939 : célèbre pour son design élégant et son importance historique, il s’agit de la seule 855 encore existante, l’automobile Horch par excellence. Bénéficiant d’une riche provenance, son passé fascinant comprend une exposition dans les premiers musées routiers de Californie, ainsi qu’une utilisation pour des photographies publicitaires à Hollywood dans les années 1950.
-Prototype Iso Grifo A3/L Spider 1967 par Bertone : Le seul cabriolet Grifo construit en usine, utilisé pour les photographies publicitaires de l’usine, l’unique A3/L Spider a été acquis par Rudi Klein il y a de nombreuses années auprès du célèbre passionné et producteur hollywoodien, Greg Garrison.
-Porsche 356 « Twin-Grille » de 1961 par d’Ieteren : un modèle classique connu pour son design et ses performances distinctives, dans la configuration « Twin-Grille » recherchée, dans un état d’origine remarquable et dont on estime qu’il compte moins de 600 miles réels.
Voilà, je m’éclipse tel le soleil temporairement occulté par la lune, ce qui démontre que strictement rien ne dure… Une autre super extra giga histoire avait été montée il y a quelques temps avec Pininfarina sur le principe des cryptos-monnaies. Cela n’a pas fonctionné du tout, un flop monumental, le public n’étant pas encore suffisamment crédule… Ce fut un fiasco intégral et absolument tout a été effacé/détruit dans l’heure suivant la fin du délai de vente… Sauf que tout a été conservé sur GatsbyOnline… Faites l’expérience, cherchez… vous n’en trouverez ailleurs strictement aucune trace… Vous cliquez sur ce lien, vous y êtes téléporté… PININFARINA MODULO “NFT” /100.000.000$… – Gatsby Online
J’en reviens à ce Rudi Klein, un marchand d’épave propriétaire d’une casse automobile nommée “Porsche Foreign Auto Wrecking” situéeà Carson, en Californie, tristement célèbre pour acheter des principalement des Porsche’s et des Ferrari’s et les laisser pourrir en attente d’un acquéreur sous le soleil de Californie dans des parkings ou des hangars aux toits effondrés ! Parmi les figures les plus énigmatiques et mystérieuses impliquées dans le passe-temps de la voiture classique “à l’ancienne”, il est utile de savoir que Rudi Klein, né à Rüsselsheim, en Allemagne en 1936 a travaillé comme boucher dans son pays natal avant de déménager au Canada à l’âge de 25 ans, puis il a migré aux États-Unis et s’est finalement installé dans l’enclave de Palos Verdes, en Californie.
En 1967, Klein a commencé à acheter des voitures de sport et de luxe européennes mais uniquement si détruites, endommagées et usées, ce qui l’a amené à établir sa propre cour des miracles. Homme d’affaires astucieux avec un nez pour sentir tout accord potentiel, les relations de Klein dans le secteur des voitures en épaves lui ont permis d’amasser une importante masse de bagnoles exotiques exceptionnelles parmi les plus prosaïques qui ont alimenté son activité principale de pièces stockées dans un dépotoir en plein air contenait de nombreux exemples abandonnés de Mercedes et de Porsche’s, plusieurs hangars délabrés ouverts à tous les vents contenaient les trésors de Klein !
Plusieurs 300 SL Gullwing’s et Roadster’s, Lamborghini Miura’s et des prototypes Porsche’s de voitures de course, en ce compris des raretés obtenues pour rien que le prix du transport vers sa casse, telle une Iso Grifo A3 / L Spider, une Horch Special Roadster et un coupé Mercedes 500K unique ayant appartenu au pilote de course d’usine Rudolf Caracciola… C’est dans l’un de ces bâtiments que les passionnés de Ferrari Charles Betz et Fred Peters vont repérer pour la première fois #3099 GT vers 1970. Selon Betz, la California Spider semblait être en bon état et légèrement utilisée, ne remarquant sa roue et son rotor de frein endommagés qu’en y regardant de plus près. Comme Klein avait la réputation d’être un négociateur difficile, Betz et Peters se renseignaient poliment…
Ils visitaient chaque mois la casse pour acheter des pièces pour d’autres projets. Finalement, en octobre 1972, ils ont surpris Klein dans une bonne humeur de vente. Dans une correspondance Charles Betz m’a dit se souvenir du jour où il a réussi à acheter une Ferrari California à Rudi Klein pour 2.400 $ ! Charles Betz et Fred Peters ont confié cette Ferrari de 2.400$ à la société d’enchères Gooding & Company qui a établit le record de vente de la Ferrari la plus précieuse vendue dans toute l’histoire d’Amelia Island… Avec un chiffre d’affaires total de plus de 72 millions de dollars, la société est entrée dans l’histoire en vendant cette Ferrari 1962 GT SWB California Spider pour 18.045.000 $.
FERRARI 250 GT CALIFORNIA 1962 achetée 2.400$, vendue 18.045.000$ – Gatsby Online