La mode Prada s’inspire de l’automobile des années ’50 !
Ce matin d’aujourd’hui…, je reçois l’é-mail d’une certaine Pénélope, qui habite en Bretagne :
“Bonjour cher Quelqu’un, je vous écris car je suis dans une détresse terrible : non pas seulement parce que j’habite en Bretagne, mais aussi parceque ma vie est aussi vide qu’un journal télévisé de David Pujadas. En effet, malgré mon doctorat en physique nucléaire et un poste au CNRS, j’ai l’impression qu’il manque quelque chose à ma vie. Je me pose de nombreuses questions, tout l’été j’ai réfléchi longuement tous les soirs en pensant à vous, nue sur ma terrasse, mes pieds froids réchauffés par la pierre encore tiède d’une chaude journée ; mais hélas, je ne pouvais sentir la chaleur véritable, celle de votre présence à mes côtés, et je restait donc longuement à sangloter, mes yeux rougis tournés vers les pâles lueurs émanant de la voûte céleste en espérant que vous daignerez enfin tourner votre regard vers moi. Depuis octobre c’est pire, je me suis blottie dans mon fauteuil en cuir, toujours nue et pensant à vous…, mais maintenant que les fêtes de fin d’année sont terminées, je passe mon temps nue sur la peau d’ours que j’ai reçue en cadeau d’un ami, devant mon feu ouvert, et je pense toujours à vous. Voilà, je me laisse aller à vous écrire quelques confidences. Je suis fan des bagnoles américaines et de la dernière collection de Prada printemps 2012 qui comprend des talons hauts et talons aiguilles dont les dessins ont été inspirés par les voitures classiques des années cinquante, lorsque l’automobile rugissante a changé le visage de la culture américaine. Les talons sont décorés avec des pièces inspirées de l’automobiles, y compris les feux arrière, avec quelques accents de chrome, et les flammes qui sont indicatives des Hot-Rod qui me donnent chaud au cœur…”
Attendez, je saute quelques lignes.
Tsss, ces pipelettes alors.
Voyons voir…, blablabla grande maison…, blablabla suis trop seule…, blablabla coeur torturé…, blablabla 95D…, blablabla me masturbe en pensant à vous…
Ah, voilà… “…goulûment. Aussi, je voulais vous demander : voudriez-vous m’épouser ? Et sinon, en attente, comment faire pour devenir une blogueuse mode éventuellement dans GatsbyOnline ? Ce n’est pas pour moi, c’est pour une amie. Moi j’ai du goût et des seins : deux choses incompatibles avec ce milieu. Bien cordialement, Pénélope, toute chaude et humide”…
Chère Pénélope, permettez-moi de me limiter (provisoirement) par répondre à votre seconde question : Comment devenir une blogueuse mode ?
Devenir une blogueuse mode, c’est facile : un peu de bonne volonté, un look, un speech et un blog ou un espace-temps dans GatsbyOnline… et ensuite vous partirez vers le succès.
Une petite trépanation pourrait vous aider aussi, mais tentons de faire sans : c’est tout le défi.
La mode est une théorie visant à expliquer que le moche est beau aujourd’hui mais ne le sera plus demain, aussi faut-il en acheter plein maintenant
Pour devenir une blogueuse mode, le secret réside avant tout dans l’apparence : si vous n’êtes pas capable de faire croire aux autres blogueuses que vous avez autant de mauvais goût qu’elles, elles risquent de se douter de quelque chose et de vous rejeter.
Dès lors, vous n’entrerez pas dans la communauté voulue, sentirez l’opprobre s’abattre sur vous et lorsque vous voudrez retourner dans le monde des humains, vous serez rejetée pour avoir tenté d’intégrer la Confrérie des Pintades (organisation regroupant les blogueuses-mode sous forme d’association (loi de 1901), afin d’organiser des réunions pour comploter le premier mardi de chaque mois !
Les membresses de cette confrérie poussent souvent des gloussements et des cris hystériques parce qu’elles ont trouvé un string à paillettes à 32€…, dès-lors, dans ce milieu, si vous n’êtes ni tout à fait blogueuse-mode ni tout à fait humaine, vous sombrerez dans la dépression et vous suiciderez en tentant d’ingurgiter le contenu de deux flacons de vernis à ongle Gemey-Maybelline.
Je rappelle pour la petite histoire que les blogueuses mode (ou apprenties) qui se suicident vont en Enfer (il n’y a pas de limbes dans leur monde, quelqu’un d’inexistant ne peut pas exister dans le néant, pour des raisons mathématiques évidentes), un endroit froid et aseptisé où n’y a rien à acheter et où il est interdit de pousser des cris de truie qu’on égorge.
Certains appellent ça une bibliothèque aussi, mais bon, ne nous étendons pas.
Bref, première étape : le “look” ; n’oubliez pas le principe : porter des trucs hideux (la blogueuse mode elle-même en est consciente, puisque 5 ans après avoir porté un truc “mode”, elle reconnait elle-même : “Haaan comment j’ai pu porter ça : c’est moooooche… mais c’était la mode à l’époque”…
Faux, c’est juste que la bougresse met 5 ans à réaliser des trucs basiques.
On va donc aller voir ce que nous proposent des expertes pour se vêtir cet été et être la Daphné Bürki de la plage.
1 – Une frange : Nul ne sait qui a inventé la frange qui descend le plus bas possible (de préférence qui gratte les sourcils), mais tout ce que l’on sait, c’est que ça donne l’air particulièrement bête. Bien que l’on puisse lui trouver une certaine utilité (durant la première guerre mondiale, les premiers prototypes de casques étaient constitués d’une coupe de cheveux hideuse et de résine durcie), elle n’en reste pas moins une manière évidente de signifier à son prochain que l’on est capable de faire des mauvais choix, et en répétant la dite erreur chaque matin avec son peigne. Ce qui est bien avec ça, c’est qu’en plus, en cas de situation vaguement décoiffante (coup de vent soudain, tour en décapotable, explosion nucléaire et autres choses communes), tout le monde pourra constater une formidable différence de bronzage entre votre front et votre visage, un peu comme si vous aviez passé la journée avec une chaussette sur la tête. Afin de camoufler cette immondice, vous devrez donc porter une frange, et un cercle vicieux débutera dont vous ne sortirez plus jamais (si vos cheveux ponctuent la fin de lecture de cette phrase d’un rire diabolique, faites attention et sévissez : couchez avec un allemand et obtenez une coupe gratuite qui vous débarrassera de ces impolis).
2 – Des Wayfarers : Recommandées par les experts, adopté par les blogueuses comme par les hipsters paumés, les Wayfarer, qui existent en version verre blanc ou fumé sont l’équivalent chez les opticiens d’un 4×4 : c’est gros, c’est laid, ça prend sept fois la place que ça devrait et ça coûte un rein (dans l’exemple présent, 144€ pour des lunettes qui en valent environ 14 fois moins et qui existaient déjà il y a bien trop longtemps). A vrai dire, tout comme pour la frange (mais nous verrons que les deux vont de paire), on ne saisit pas bien l’utilisation de lunettes si énormes que l’on pourrait cacher une famille de roumains derrière chaque verre, à part peut-être pour camoufler, là encore, quelque chose que l’on ne voudrait pas voir découvert (bouton de fièvre, griffure, parachutiste anglais, missile cubain). D’ailleurs, je me permets de rappeler à tout le monde la loi : le port de frange et de lunettes de soleil est interdit puisque avec ça, à part un bout de nez et votre bouche, il ne reste plus grand chose de votre visage (à peine plus qu’une burqa) ; or, comme chacun sait “nul ne peut, dans l’espace public, porter une tenue visant à dissimuler son visage”. Je rappelle la sanction : “contravention de deuxième classe, punie d’une amende d’un montant maximal de 150 euros, à laquelle peut s’ajouter ou se substituer l’obligation d’effectuer un stage de citoyenneté”. Bien, voilà pour le visage : ajoutez à cela des boucles d’oreilles et un maquillage voyant (c’est important : la mode, c’est avant tout être vu), et c’est un bon début.
3 – Le petit haut qui va bien : Nous parlions de plage, il nous faut donc évoquer le bikini : aucun problème avec ce modèle qui vous est proposé par les mêmes champions : je vous rappelle le principe, une vraie blogueuse mode évite au maximum d’avoir des seins ; comme pour les mannequins, plus vous ressemblez à un cintre, mieux c’est. Mais malgré tout, il faut vous couvrir : grâce à un bout de nappe coupé dans un restauroute (avec encore cette odeur de vin rouge renversé et l’impression d’avoir sur vous une sorte de souvenir de vacances) vous éviterez de payer la même chose 250€ chez Zaza.
4 – Le petit bas qui va mal, mais discret et beau selon les amies de la mode : Le short Iro vous permettra de couvrir votre fessier avec ce qui ressemble au calebute improvisé d’un clochard peintre de rue (d’où les taches de peinture dessus), faisant ainsi de tous vos compagnons de plage de gros jaloux qui se demanderont dans quelle ruelle obscure vous êtes allée dépouiller un pauvre SDF. “Nenni”, leur répondrez vous en éclatant d’un rire cristallin : “Il ne m’a coûté que 147€, trois fois rien !”. Les gens risquent alors de rire très fort à leur tour ou de vomir avec autant de puissance, on est pas bien sûr : mais rassurez-vous, sur votre short, ça ne se verra pas. Vous pouvez même le mettre en ayant une petite gastro : ses tons bruns vous couvrent ! C’est trop chic !
5 – Pas de sac sans sac : Enfin, pour la plage, inutile d’emmener votre sac à main préféré : un simple sac un peu large et solide vous permettra de transporter vos affaires de bain et quelques suppléments. Qu’avons-nous cette fois ? Un… sac orange ! Plus petit qu’un sac Carrefour, n’ayant même pas un petit dessin dessus contrairement à ce dernier et n’étant pas échangeable une fois usé, celui-ci vous est proposé au prix exclusif de 20€ ! Soit seulement 40 fois le prix du sac de grande surface précédemment évoqué : ça vaut le coup. En cas de plage nudiste, tout est à recommencer !
6 – Le Prada-look : Que propose cette marque pour la collection Printemps Eté 2012 ? Utilisant l’imagerie automobile américaine classique sur leurs sacs à main en cuir, chaussures, lunettes et beaucoup de leurs textiles, la nouvelle collection est présentée via d’assez laides illustrations payées à prix d’or au photographe Steven Meisel, qui sont illustrérs dans cet article. A mon sens, ça me parait réservé aux amoureux de l’automobile des années ’50 ; voilà qui est formidable : notez comme votre passion mixte pour l’automobile et la mode va bien se marier dans les tons kitschs ; vous ne pouviez rêver mieux que ces flammes “Hot-Rod” et les feux arrière façon Cadillac, vous ferez partie de l’histoire ! La collection entière est un “throw-back” aux années cinquante avec les maillots de bain, robes plissées, vestes et sacs à main en satin rétro. Les flammes, les ailerons, les dés, les feux arrière, décorent les sacs à main, lunettes, vestes, jupes, robes et tops.
La vraie blogueuse-mode a son propre langage : elle s’en sert pour communiquer secrètement avec ses amies de la Confrérie des Pintades.
Mélange de gloussements plus ou moins graves ou aigus, il repose sur plusieurs éléments essentiels :
1 – Les onomatopées : Connues aussi sous le terme d’International Stupid Chick Language, les onomatopées représentent une bonne part du langage de la blogueuse : elle glousse Huhuhuhu !, elle rit Hihihihi !, elle s’étonne Hoooo !, elle est surprise Hiiiiii !, contente Hiiiiiii !, excitée Hiiiiii !, apeurée Hiiiiiii !, ou face à un livre de Spinoza Heuuu ?. Si vous souhaitez les rejoindre, il est indispensable de les maîtriser un tant soit peu. Avec ça, vous pouvez déjà communiquer un minimum avec moult créatures de l’espèce.
Entraînez-vous devant un miroir s’il le faut : si même votre reflet a l’air dépité, c’est que vous êtes sur la bonne voie.
2 – L’inegliche, le français, c’est nul…, l’anglais, c’est cool : Pas d’hésitation : remplacez le maximum de mots dans vos phrases par des termes anglais : si vous voulez quelque chose, cela devient un must-have. Vous n’allez pas acheter des trucs mais faire du shopping. On ne dit pas Dragueur mais Serial lover.
Enfin, il ne faut pas oublier que vos amies sont désormais classées entre vos Friends , vos Best Friends, votre Best Friend Forever et le cercle proche de copines que vous appelez vos bitches parce qu’elles sont trop folles, faisant fi des conventions, utilisant des gros mots ! Par contre, méfiez-vous : si des ninjas en tenues verdâtres et sentant vaguement l’urine tentent de venir vous tuer, c’est normal ; ce sont les membres de l’Académie Française en colère. S’ils s’approchent trop, brandissez un exemplaire de Twilight en hurlant “C’est de la littérature !” ; ça devrait les faire fuir.
3 – L’insoumss… l’insossm.. l’insoms… le pas-respect des conventions : Vous devez déclarer en permanence que non, vous n’êtes pas une pintade, que la mode, ce n’est pas du tout une histoire de gens qui essaient de vous refourguer des fringues hideuses en vous expliquant que non, elles ne sont pas hideuses, elles sont juste conceptuelles (un peu comme l’art moderne), mais une histoire de tripes. Non, vous ne suivez pas les magazines ! Certes, vous les achetez, les lisez, en discutez, mais vous êtes contre parce qu’ils veulent vous imposer un style alors que vous êtes libre. Au final, vous achetez quand même ce que l’on vous a recommandé, mais vous avez CHOISI de le faire, ce qui n’est pas du tout pareil, it isn’t the same.Vous justifiez votre goût pour les fringues par le fait que c’est ainsi que vous vous exprimez (parce que avec la bouche, ça doit être trop dur), que vous dites qui vous êtes. Et si quelqu’un vous fait remarquer que le qui vous êtes semble varier tous les ans avec la mode, utilisez vos pouvoirs féminins de mauvaise foi. Puis, enfermez vous dans votre chambre avec un pot de crème glacée et un DVD de Titanic ; ça devrait suffire à faire disparaître cette incohérence de votre esprit.
4 – Time is money : Parler pognon est essentiel : Qui a acheté le truc le moins cher ? Qui a fait la meilleure affaire ? Et surtout, qui porte les trucs les plus dispendieux sur soi ? Parce que c’est connu : plus c’est inabordable mieux c’est. Si vous partez à l’étranger, ignorez les ruines grecques, conchiez le patrimoine inca et précipitez-vous vers les marchands ambulants : vos récits sur : comment vous avez négocié un petit pull Dior à un certain Mouloud…, feront votre gloire parmi vos semblables ; ça appuiera votre côté femme insoumise évoqué plus haut, puisque vous êtes dure en affaire et obtenez ce que vous voulez : inflexible qu’on vous dit.
Une fois que vous avez le look et le speech, si vos amis ne vous balancent pas dans l’Atlantique pour en finir avec vos souffrances (ils n’auront pas besoin de vous lester : vos lunettes vous entraîneront vers le fond), vous n’aurez plus qu’à ouvrir un blog.
Comme dans tout bon blog, n’oubliez pas : parlez de vous…, c’est une tribune sur internet : de quoi pourriez-vous bien traiter d’autre ?
Pour ce faire, n’hésitez pas : faites-vous modèle.
Prenez-vous en photo : pas une fois, pas deux, des dizaines de fois…, il faut que l’on vous voie, que l’on sache qui vous êtes, et que les gens vous complimentent.
Pour passer pour une blogueuse-mode parfaite, plusieurs règles sont à respecter :
– Mettez des pubs. Bon sang, vous imaginez un magazine féminin sans pubs ? Et bien un blog de mode, c’est pareil.
– Prenez des poses naturelles comme si vous étiez Francis Huster : vous devez être mauvaise sur la moindre photo et louper votre effet
– Regarder ailleurs sur les photos, genre pensive, est recommandé. Dans le même temps, faites semblant de ne pas faire exprès du tout de mettre en avant votre dernier sac hors-de-prix. Encore une fois, si vous ne savez pas faire, pensez Francis Huster. Vous pouvez aussi prendre l’air complètement drogué. J’imagine qu’avoir l’air de s’être fait 5 rails de coke en 3 minutes, ça fait modèle plus crédible.
– Mettez le maximum d’accessoires sur vous : 21 bracelets, 9 bagues, 4 colliers : vous êtes une sorte de rappeur US, vous devez montrer ce que vous avez, nom d’une pipe. N’est-ce pas d’ailleurs le but de votre blog, vous montrer avec vos prises de guerre ?
– Ah, mettez des coeurs. C’est bien, les coeurs. Ou d’autres trucs cucus, hein, l’important, c’est l’idée.
– La bouche en cul de poule (duckface on a dit bon sang !) est autorisée ; cela signifie : “7 foto c 1 D-lir avec ma besta Katy lol”…
– Faites plein de clins d’oeils à vos copines blogueuses genre Trop sympa ta tenue Choupi13 !
– Ensuite, faites courir le bruit comme quoi Choupi13 a pris du cul et devrait arrêter la Danette (vous êtes une femme, n’oubliez pas de le montrer)
– Faites des reportages en prenant de temps à autres des trucs en photo qui ne soient pas vous (mais dans ce cas, essayez de faire des trucs artistiques, genre effet de flou ou appareil pas droit, mais là encore, échouez) : dans cette situation, ne mettez pas ou peu de textes : ce serait quand même bête d’écrire quelque chose d’intéressant, même par erreur. Du coup, ne lésinez pas sur les termes qui vous décrédibilisent Trop choupi, Trop mignon, Mdr ou Rama Yade… Et avec ça, vous devriez être parée : votre blog mis en ligne, vous serez rapidement reconnue par la communauté des blogueuses mode, avec qui vous pourrez vous rencontrer pour échanger conseils, histoires, anecdotes, gloussements, et bien sûr, rumeurs sur les coutures de pantalon de Choupi13 qui auraient craqué lors de la dernière IRL à Paris.
A vous la gloire, la fortune, les contrats et probablement le suicide au vernis.
Si vous en doutez, je vous laisse taper “blog mode” sous google, et farfouiller un peu.
Ho… et pour votre première question : je passe vous voir pour en parler prochainement.
J’aimerais juste savoir : avez-vous un jardin ?
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