La nature, quelle fumisterie !
On les entend souvent, les écolo-bobos de tous bords, vanter les mérites de la biodiversité, se prosterner devant les labels bio et se masturber la cervelle avec de la philosophie de comptoir !
Pour ma part, devant le ciel immaculé, encombré de volatiles stupides, devant les sommets acérés telles des lames rouillées… et face aux étendues verdâtres abritant toutes les saloperies de ce monde…, je pense souvent que tout cela mériterait d’être anéanti.
L’écosystème n’est qu’un ensemble de cycles sans origine, sans fin, sans but, l’incarnation même de la connerie de l’existence…, voilà la seule philosophie que l’expérience m’a enseigné : la nature est une vaste étendue de vide, habitée par des créatures puantes, idiotes et inutiles : ça naît, ça se reproduit, ça se bouffe !
La nature est pleine de boîtes de thon, de barquettes de jambon, de sachets de chips, de pots de yaourt, de cannettes de bière préalablement brisées, de mégots de clopes à peine éteints, de nudistes souvent très moches… et les merdes humaines sont étalées au milieu de ces amoncellements…, voilà ce qu’est le monde, le vrai monde…
Un jour, d’il y a quelques temps, alors que j’étais à l’insu de mon plein gré, embrigadé dans la quête d’une épave d’un vieux bus VW Samba qu’on m’avait renseigné comme étant caché dans un endroit dont je tairais le nom pour que n’y alliez pas, je me suis arrêté dans une station-sévices pour faire un plein des sens… et mis en tête de manger un jambon beurre pour apaiser ma faim de loup, je l’ai trouvé dans un conditionnement plastique transparent, censé préserver la fraîcheur du produit vendu à prix d’or, tellement que j’ai jeté l’étiquette !
La caissière était une vieille peau toute fripée qui s’est mise à beugler que l’étiquette-codebarre de cette bouffe avait disparu…, puis elle s’est levée et est partie vers le rayon ad-hoc en jurant d’une voix aiguë, tandis que les talons de ses grolles claquaient sur le carrelage…
Elle était petite, trapue, affublée d’une choucroute hirsute et désordonnée, vêtue d’une jupe courte et de bas résille…, j’ai tout de suite été sexuellement interloqué en observant ses cuisses riches en couenne…, devinant mes pensées, elle m’a interpellé, d’un tutoiement qui m’a paru déplacé…, car ce n’est pas parce qu’on exerce un métier peu honorable, qu’on peut se spermettre d’être mal polie…, mais, je m’ennuyais trop pour m’offusquer.
Les clients ne se bousculaient pas et la météo annonçait de la pluie pour l’heure qui venait, ce qui s’est d’ailleurs confirmé…, elle avait la cinquantaine hideuse, des traits pétris de mauvaise humeur et d’agressivité, un regard sévère, des mains osseuses aux ongles acérés…, le tableau n’était vraiment pas reluisant…, comment pouvait-on prendre son pied dans cette masse adipeuse ?
Il n’y avait rien de séduisant dans son corps…, elle n’exhalait aucune grâce, aucune séduction…, elle était à vomir…. et je n’avais aucune envie de l’aider à assouvir ses fantasmes, mais j’ai ressenti quelque chose… et, avec cette idée lubrique en tête qui m’épouvantait, je me suis enfui sans écouter ce que cette vieille peau cramoisie me racontait.
Un quart d’heure plus tard et plus loin en bordure d’un bois…, assis dans ma Jeep Grand-Cherokee grise, intérieur gris (je tiens à être précis, au cas ou…), portière ouverte pour évacuer les miettes, j’observais la nature…, le pain du sandwich était caoutchouteux, sans saveur, mais comparé à la garniture, une sorte de feuille de viande trop salée et cartilagineuse, c’aurait bien pu être de l’ambroisie…
Soudain une jeune Pimbèche a surgit de je ne sais où et s’est mise à me supplier de la prendre…, pour la déposer plus loin…, mais elle n’avait pas le bon look au moment où je n’avais pas envie d’une si piteuse et pathétique gamine…
Pendant qu’elle se dandinait en attente de mon bon vouloir, l’atmosphère se troublait… et tout en inspirant/expirant l’air pur à pleins poumons, j’avalais mon mauvais sandwich…, c’est ça aussi, la liberté : se gaver de substances toxiques, en toute connaissance de cause…, d’autant qu’il était épouvantablement immonde….
La pétasse moulinait des fesses dans son jean’s troué, près de la voiture, espérant que je la dépose plus loin…, trop jeune, la minette…, mais soudain, tout de go, elle m’a dit qu’elle avait découvert plus loin dans le bois, une épave de VW Kombi Samba…
“Le Saint-Graal” pour les nazis nostalgiques” ai-je pensé, sachant que des fous payent des fortunes pour en avoir un exemplaire, même en pourriture…, j’ai jeté au diable le reste du sandwich immonde et sommes alors partis-nazis, j’étais comme un fou… et après vingt minutes nous étions devant un véritable VW Kombi Samba version camping-car du quart-monde…
J’étais en extase extatique devant cet engin, lorsqu’un nazi a déboulé de je ne sais où…, il m’a quasi assommé en gesticulant…, et nous forcé à nous asseoir dans un canapé délabré à coté du VW Kombi-Samba…, le temps se couvrait, j’ai toujours détesté la pluie…, sans cérémonie le type m’a demandé : “Quel matériel serait le plus adapté ? La hache ? Le sécateur ? Le couteau de randonneur ?”…
Puis, il a eu comme une révélation et s’est écrié : “Le rasoir !”…
Il allait sûrement passer à l’acte, cœur battant, pupille dilatée… en disant : “Bon sang, ce que j’aime ce moment ultime : la seconde qui précède la mise à mort”…, dans sa hâte à en finir, il a fait tomber le rasoir… et il s’est accroupi pour le ramasser…, j’ai vite compris qu’il fallait faire quelque chose… même n’importe quoi…, il s’est relevé en regardant la pimbèche d’un air qui ne trompe pas…, il devait bander fort, le bougre, j’en avais pitié…, c’était le moment où jamais…, mais quoi faire ?…
Puis il a brandi une seringue de sédatif (acquit certainement en toute illégalité)…, à tiré sur une corde au bout de laquelle était attachée une truie… et il l’a piquée…, elle a hurlé, a essayé de s’enfuir, un coup sec sur la tempe a été nécessaire pour la calmer…, puis le produit a fait effet.., pensez-vous…! Du Rémifentanyl !
Emu, tremblant, il l’a ouverte en deux, puis il l’a égorgée… et c’est à cet instant qu’elle a rouvert les yeux…, ce fut un moment intense…, elle crachait du sang, se contorsionnait… et chaque mouvement faisait déborder ses viscères de la plaie qui la déchirait… et elle s’est définitivement immobilisée aux premières gouttes de l’averse.
Il s’est présenté comme étant chasseur de sangliers…, son VW Kombi Samba lui servant de pavillon de chasse…, je l’ai félicité, nous avons échangé nos numéros pour remettre ça, à l’occasion.
J’étais heureux, une telle émotion ça ne m’était pas arrivé depuis bien longtemps…, j’espérais malgré tout que la prochaine fois, le sandwich serait meilleur…
Il s’est assis, rayonnant de bonheur…, nos regards se sont croisés…, j’ai pensé que nous vivions “tousses” dans un pays d’enfoirés !
De nouveau au volant de ma Jeep, je suis reviendou vers Saint-Tropez…, j’ai effectué un détour au Grand-Frais de Cogolin ou j’ai acheté un jambon entier…, on me l’a enroulé dans un linge et je suis rentré chez moi avec ce jambon de premier choix, du pain frais au levain, un beurre AOC, ce fut certainement l’un des meilleurs sandwichs que j’aie jamais mangé.
Et mon coin de village face à la merde-iterranée, malgré le calme fantomatique qui suintait au fond des ruelles encombrées de poubelles, me parût plus beau que jamais…, après avoir vécu tout cela, j’avais besoin de me détendre, car ma vie devenait une véritable épreuve.
J’avais besoin de rencontrer quelqu’un d’autre…
, je suis allé m’encanailler au Sube…, à peine étais-je assis sur l’un des hauts tabourets qui longeaient le comptoir, qu’une créature presqu’habillée tellement elle était nue, est venue à côté de moi ; elle avait déjà un verre à la main, je n’ai même pas eu besoin de lui en proposer un…, elle le sirotait sans me regarder…, je l’observais du coin de l’œil.
C’était une blonde, mal coiffée, avec un visage bête, des lèvres quelconques, des épaules tombantes, comme ses seins, qui de plus étaient rabougris… sans oublier ses fesses particulièrement flasques…, sentir si près de moi cette chair même pas bonne à pétrir, tout en sachant qu’elle était à ma disposition, ne me faisait qu’à moitié bander.
Comme elle jouait l’indifférence, je me suis senti obligé de dire quelque chose…, rien que de très banal, à vrai dire, je n’ai fait qu’exprimer une vérité :– Je suis crevé…!
Elle s’est tournée vers moi et m’a dit son nom “Milleuros”…
Je n’avais aucune envie d’en savoir plus sur elle, elle m’a ennuyé avec sa piètre existence, les visites impromptues auprès de personnes qui ne s’attendent pas à ce qu’elle leur débite son nom “Milleuros”…et ne sont jamais ravies de devoir supporter sa misérable vie privée, son absence totale de foi en l’avenir… et sa haine de la nature…, “Putain”… ai-je dit “C’est comme moi…”
Elle m’a écouté longtemps, presque une heure…, j’ai dû vider la moitié d’une bouteille de whisky pendant mes complaintes… et je ne parle pas de ce que ça m’a coûté !
Elle m’a ensuite raconté qu’elle était cadre dans un cabinet d’audit, un boulot bien payé mais ennuyeux au possible, elle comprenait ma fatigue, physique et morale, elle ressentait la même chose…, je m’en fichais…, j’étais tétanisé par le tapis bleu sous le sofa brun posé à coté d’une carpette verte…, à cette heure de la soirée, j’avais envie de me coucher et dormir.
J’étais sur le point de piquer du nez et de renverser le reste de mon verre sur le moche sofa brun moiré…, lorsqu’elle est revenue avec deux sandwichs en main, qui cachaient bien heureusement ses seins en gants de toilettes…
Je pensais ne pas avoir faim, pourtant en les voyant, mon estomac s’est réveillé en sursaut…, je me suis emparé de ce qu’elle m’offrait, avec une certaine reconnaissance…, nous avons mâchouillé en symbiose, cote à cote, ce fut un moment très particulier…, mais pas une grande extase gastronomique, le jambon mouillé était sous vide, le pain industriel sous cellophane, pas de musique, pas de paroles, jusque des respirations et du pain qui croustille.
J’ai toujours eu du mal à m’extérioriser…, j’ai besoin de solitude, de calme, de silence…, ne me demandez pas pourquoi, je n’en sais rien…, j’espère que vous serez compréhensif…, à quoi bon revenir à une forme primitive de vie, comme un simple animal ?
J’espère qu’au comble de l’agonie, je ne sais quand, même si c’est le plus tard possible…, je me déciderai enfin à apporter une réponse à l’humanité, mes yeux s’entrouvriront, je vous ferais signe d’approcher votre oreille… et je marmonnerai en expirant mes derniers mots : P’tits cons ! La nature, quelle fumisterie… Le bonheur, c’est un jambon-beurre…