<< A vendre, Fairlane cabriolet, parfait état, part toutes distances, état exceptionnel, véritable voiture de collection pour amateur averti. Prix très intéressant à convenir et à discuter. Contactez Charly “O” au bureau du journal qui transmettra >>….
Phil, cinquante ans, le roi de l’occazz, venait en quête d’une bonne affaire.
Il a tiré la sonnette.
Charly “O”, ancienne star du porno lui a ouvert la porte.
Il avait maintenant plus de soixante-dix ans, mais gardait la même apparence crasse.
Jadis, à l’écran comme à la ville, Charly “O” se barbouillait les cheveux de vaseline et les peignait bien lisses en arrière, puis il se faisait une injection direct dans son pénis…
Il était prêt pour tourner quelques scènes hard.
Parfois son produit miracle le laissait en érection pour 12 heures de suite.
Il souffrait le martyre au bout de 3 heures, rien ne pouvait l’aider, pas même des bains glacés.
Les branlettes le faisaient gémir la mort, mais c’était ça ou crever de faim, alors il continuait à s’en injecter, jusqu’au jour ou, à cause de son gland violet, puant la putréfaction, aspiré goulument par Gigi-la-suceuse, à force, perdit toutes ses dents et lui un bout du gland.
Sa carrière cinématographique s’arrêta là, coupée net…
Celle de Gigi aussi !
Il se reconvertit dans le genre “directeur de salle” (comprenez videur-portier) dans un dancing pourrave et, pour arrondir ses fins de mois, se mit à proposer quelques voitures de collection à vendre…
Il plaçait ses annonces sur e-bay, il lui suffisait d’attendre, il était béni du dieu des tordus, il arrivait toujours à fourguer ses épaves à des rêveurs.
Tout événement similaire survenu dans la réalité et connu du public n’a absolument pas influencé l’auteur (moi, un soir de cuite) dans le choix de ses personnages.
Cette nouvelle est une histoire vécue…
Certains verront dans mon récit le fruit de cinquante-huit années passées en compagnie des inhumains.
Je n’ai copié aucun fait, aucune affaire précise, et n’ai pas cherché à blesser, à impliquer ou à condamner ceux de mes frères inhumains qui vécurent des événements analogues à l’histoire que voici…
Les dames défaillaient dès qu’elles le voyaient déambuler dans le dancing, souriant de toutes ses dents, les épaules en porte-manteau, la démarche chaloupée de celui qui savait…
Donc, poursuivons…
Personne ne savait ce qu’il était supposé savoir, mais dans les nuits noires et glauques il faisait illusion.
En fait, Charly “O” était homosexuel.
Il avait maintenant les cheveux blanc mais il se les teignait en noir jais, style corbeau…
C’était une fraîche soirée et la bicoque de Charly se dressait solitaire au milieu des champs.
Phill avait lu l’annonce concernant la Fairlane cabriolet et avait téléphoné, Charly avait juré que la voiture était comme neuve…
C’est Phill qui a parlé le premier :
– J’ai lu votre annonce, je suis garagiste spécialisé dans les vieilles voitures américaines des années ’60 et ’70 ; comme vous m’avez donné votre adresse et que je passais devant chez vous, je n’ai pas pu résister à l’envie de sonner….
– Fait froid dehors, hein mon gars ?
– Oui : plutôt…
– Vous voulez entrer cinq minutes ?
– Je ne veux pas vous déranger.
– Allez, entrez donc. Je vais vous montrer la Fairlane.
Phill est entré.
Il s’est planté au milieu de la pièce, un petit feu brûlait dans la cheminée.
– Je vais chercher de quoi vous réchauffer.
Charly “O” est revenu avec une bouteille de rhum blanc, il l’a ouverte et il est reparti prendre deux verres givrés et les a remplis
– Buvez un coup. C’est de l’excellente marchandise.
Phill a vidé son verre d’un trait.
Charly “O” a remis du rhum dans les verres.
– Venez voir la Fairlane, elle se trouve derrière.
A l’arrière de la bicoque trônaient deux horreurs : une vieille chevy avec des flammes peintes sur les ailes et…. une épave de Fairlane, pourrie…
– C’est ça la Fairlaine en état neuf qui part toutes distances ?… dit doucement Phill avec une pointe de cruauté dans la voix.
Juste la dose de cruauté qu’il fallait.
– Hmmm…!
Phill a pris la bouteille de rhum et a bu au goulot… Une bonne lampée… Puis une autre, et encore ! – J’imagine que les gens m’en veulent beaucoup parce que j’ai gagné de l’argent avec le porno avant que le fisc ne se mette à tout rafler, je n’ai jamais eu de cachets astronomiques, ça donne des rapports bizarres, les gens croient que je suis riche, alors que j’ai à peine de quoi payer mon loyer, c’est pour cela que je vend la voiture de mon père qui l’avait achetée neuve, un vrai bijou…, faut pas penser trop à l’argent, mais faites-moi une offre….
La bouteille était vide quand Charly “O” est revenu avec un album photo.
-J’ai lu ton annonce, je t’ai téléphoné, tu m’as dit que la Fairlaine était comme neuve…
– J’ignore où vous avez pêché ça, mais c’est faux.
– Dans la gazette locale d’hier et d’aujourd’hui matin, j’ai les numéros.
– C’est faux, ça doit être une erreur, écoutez, je vois que vous êtes un vrai connaisseur, je ne savais pas, si vous me l’aviez dit je ne vous aurai pas proposé de venir, comprenez-moi, c’est un truc pour arrondir mes fins de mois, ok ?, bon, je vais vous demander de partir, vous devenez vulgaire !
– Il reste du rhum ?
– Oui, oui, il reste du rhum, vous pouvez tout prendre, dix ou douze bouteilles, servez-vous et partez.
– Tu as peur d’avoir menti, de m’avoir pris pour un cave, tu as peur de ma réaction ?
– Je vous l’ai dit, m…., allez vous faire f…
Phill a sauté du divan, il a marché sur Charly “O” et l’a frappé au visage, de la paume, un coup très sec… et deux encore.
Il semblait pris d’une espèce de transe.
Charly “O” avait déjà l’expression d’un mannequin de cire.
Phill a soulevé Charly “O”, l’a balancé sur son épaule et l’a emporté dans la cave… ou il s’est remis à cogner, au hasard, sur le visage, son ventre, ses mains, son nez, sur le crane, tout…
Charly “O” avait la bouche ouverte et un filet de sang qui ruisselait de son nez et de son visage meurtri, lui tombait dans la bouche.
Il l’avalait, il se noyait dans son propre sang.
Puis il n’a plus bougé, alors Phill est sorti dans la rue, est grimpé dans sa bagnole.
Il a roulé plein Sud jusqu’au moment ou il a aperçu deux p’tites meufs en mini-jupes en train de faire du stop.
Il a freiné.
Un mot marrant, et les deux filles sont montées.
Il a allumé le poste.
– Ouais… a dit une des filles !
– Ouais…, a dit Phill !
Le camion est arrivé de pleine face, nana rien vu venir…