Les bagnoles de “Death Race 3″…
Toujours dans le Nevada, comme vous avez pu le lire dans l’épisode précédent, en suite d’un reportage-interview débile avec un réalisateur de merdes typiquement américaines, un rendez-vous m’avait été donné par ce réalisateur : Jeff Molighan, se présentant comme un adepte précurseur du style érotico-beauf…, je ne comptais pas m’y rendre…, mais, vicieusement, il m’a téléphoné alors que j’étais encore au motel, pour me raconter un tas de conneries au milieu desquelles il m’a dit (faute avouée est à moitié pardonnée) que son bureau, c’était aussi un club de stripteaseuses…, ça changeait tout…, pas besoin qu’il me fasse un dessin sur format A4, j’ai aussitôt rappliqué… et 20 minutes plus tard, j’étais sur place… Après des heures à échanger sur nos vies sentimentales désastreuses en cassant la gueule à des pintes de bière, il était temps de passer aux choses sérieuses, ça sonnait la fin d’un round et je savait pertinemment qu’il fallait me dégager sec si je ne voulait pas qu’on plante notre tente au milieu du bar-bureau…, l’alcool se tassait tranquillement pendant que mon triste faux-ami grillait sa dernière clope…, en le regardant inhaler sa fumée, je me disais que n’importe quel abruti aurait pu lui sortir à ce moment précis : “Eh bien vieux, tu peux aller te faire mettre à ton tour”…, quoique c’était une chose ignoble de lâcher une ânerie pareille…, il souffrait mais ça n’allait pas durer.
J’étais à ses côtés pour exploser mon verre contre le sien et nettoyer à coups de Swiffer ses pensées cisaillées par l’amour…, mais…, au moment où nous nous apprêtions à signer l’épilogue…, une ombre humaine à la démarche chaloupée s’est approchée de nous…, on a émis un tas d’hypothèses à la mords-moi le nœud histoire de faire planer le mystère et de pronostiquer un peu la rencontre : résultat des courses : le monsieur n’était absolument pas en train de jouer à la marelle… Posté à cinq centimètres de nos tronches, on pouvait facilement établir la liste de tous les alcools ingurgités par le bonhomme…, il tenait fermement un sac plastique rempli de canettes de bières qu’il plaquait de temps à autre sur le sol comme un yo-yo en omettant toute discrétion sonore…, à chaque fois qu’il en ouvrait une, c’était la roulette russe.
On retenait notre respiration en faisant un pas en arrière parce qu’une fois sur deux, la canette lui explosait à la figure…, toute la mousse dégoulinait sur son jogging noir intégral qui brillait…, sa barbe mal rasée et ses restes de chicots signaient un look destroy du mec qui avait clairement abusé sur la java et le free-fight…, on a ensuite compris qu’il voulait engager une conversation…, mais, une conversation que lui seul pouvait déchiffrer…, des mots sortaient de sa bouche en ayant tout simplement aucun sens…, son accent New-Yorkais et ses neurones houblonnés n’arrangeaient rien, nous étions complètement largués. On s’est concentré un max parce qu’il tenait absolument à communiquer avec nous…, comme on ne pigeait toujours rien, mon nouveau pote, Jeff Molighan lui a filé une cigarette…, mais il ne s’agissait pas de ça…, gênés, on ne savait plus comment s’y prendre…, l’intonation de sa voix commençait à prendre des allures inquiétantes alors on a décidé de jouer la carte de l’incompréhension mêlée à de l’ignorance…, c’est de cette manière qu’on lui a honteusement et stratégiquement tourné le dos en reprenant une conversation tout à fait ordinaire mais loin d’être spontanée.
Jeff m’a posé une série de questions et de relances : “Ça avance tes recherches de putes-poseuses ? Tu as des pistes ? Ton site-web, ça va ? Des nouvelles aventures ?”…, il avait beau enchaîner un tas de sujets à la suite, notre acolyte ne perdait pas le fil…, la tête baissée, les yeux rivés sur le sol, les jambes arquées pour maintenir le parfait équilibre, il donnait tout en se focalisant sur chaque syllabe…, il ne comptait pas rester sur le banc de touche. Jeff poursuivait sans que j’ai le temps de formuler mes réponses : “Tu fais quoi de beau ce week-end ? Il y a un show de bagnoles tunées à Vegas, on y va quand ?”… et à ce moment précis de la tirade, le temps s’est figé…, le gars a levé les yeux comme un aveugle qui retrouvait la vue et nous a sorti la première chose compréhensible de la soirée : “J’étais venu vous proposer un deal et pensais que vous n’en aviez rien à branler”…
Si un jour vous vous demandez qui sont les meilleurs reporters, n’allez pas chercher plus loin, ce sont les gens qui ont une bonne étoile comme moi…, des types qui passent plus de temps que n’importe qui au bord du puits sans fond de la bêtise humaine…, ils connassent tout ; ont trouvé “le” scoop avant tout le monde ; ils utilisent pourtant un matériel complètement dépassé et on sait tous que certains peuvent user de pratiques pas toujours homologuées par l’association des journaleux…, mais avec leur braquemar entre les mains, Harry Potter peut s’asseoir sur sa baguette magique, ces types produisent des purs miracles… Ce mec s’est mis à expliquer qu’il était le lascar ayant créé les bagnoles du nanar cosmique automobile : “The Death Race Inferno 3″…., il s’est ensuite appliqué à nous expliquer avec un florilège de mimiques très inspirés même si on aurait pas misé un boyard sur lui au Time’s Up, le résumé de la trilogie des “Death Race”…, mais une fois sa coulée logorrhéique terminée, j’étais encore sur ma faim…, j’ai donc tenté le tout pour le tout en me risquant à le relancer pendant qu’il se remettait de sa performance en s’ouvrant une canette, qui bien évidemment, lui a explosé à la gueule : “Alors comme ça vous…”…
À peine le temps de commencer ma phrase qu’il m’a violemment targué d’une expression super intrigante accompagnée d’un geste légendaire, il a entrepris le mouvement le plus discuté dans le monde…, celui qui fait parler; qui est exagéré; qui rend jaloux; qui surprend; qui donne des frissons; qui pose question mais illustre à la fois; qui ne se vérifie pas; qui est disproportionné; le roi de l’à peu près. Son sac soigneusement posé à terre, il s’est mis à lever les bras dans une parfaite coordination verticale, l’espace entre ses paluches définissait le seul ordre de grandeur existant en cet instant…, un trou noir où tout se mélangeait…, un magnétisme de l’au-delà…, il me fixait, cela commençait à prendre des proportions incontrôlables à mesure qu’il perdait son équilibre.
Je me suis dit qu’il fallait à tout prix capter son attention histoire qu’il crache un max d’informations : “C’est quoi votre histoire ?”…, je le flinguais de questions tellement il me tardait de savoir…, mais notre interlocuteur avait convenu d’une sieste intérieur à nos dépends…, impossible de soutirer quoi que ce soit de ce pauvre homme qui était à présent au bord du gouffre…., poussé par la fatigue et sans doute assommé par l’alcool, il nous a quitté sans dire un mot, comme si notre rencontre avait été inventée de toutes pièces…, Jeff et moi lui avons souhaité bon courage pour son retour qui s’annonçait assez difficile…
Les saga automobiles qui mettent des chevaux sous le capot, on en compte beaucoup dans le milieu du cinéma (les fast and furious et les Taxi doivent en être les plus beaux exemples)…, la saga “Death Race” vient aussi faire son petit trou dans le commerce du tuning décérébré…, ayant d’abord pour ambition d’être un ajournement spectaculaire de la sympathique “Course à la mort de l’an 2000”, le fumeux “Death Race” de Paul W. S. Anderson a été comme prévu un modeste succès, moyen sur la sortie ciné mais rattrapé avec le marché du DVD (le film n’ayant pas coûté beaucoup, seulement 45 millions de dollars).
Fort de ce filon facilement exploitable, les suites ont commencées à arriver, avec “Death Race 2”, mais sans le budget…, comment entretenir la formule alors ? Avec un préquel foireux qui n’a plus que la surenchère pour tenter de faire illusion…, le résultat sonde les abymes de la bêtise humaine, mais il se révèle globalement attachant justement pour cette débilité frondeuse, qui affirme crânement qu’il sombre dans l’immoralité beauf…, conséquence logique, “Death race 3” s’est révélé encore pire que le second, à tous les niveaux…, plus foireux, plus crétin, plus dégénéré, plus bourrin encore que son modèle, “Death race 3” grouille littéralement de défauts, rendant son visionnage aussi désespérant que jubilatoire. La connerie étant maintenant étalée au grand jour, on peut en rire au troisième degré, avec Death race, Paul W. S. Anderson voulait donner à la fois dans le petit film d’anticipation, mais surtout dans le défouloir viril…, les ambitions artistiques étant essentiellement centrées au niveau des courses, clairement les temps forts du film.
Du bitume fumant, des bagnoles ronflantes armées jusqu’aux dents, telles étaient les promesses, avec en star planétaire grotesque un fumeux Paulo entendant bien les honorer…, il s’est acquitté des origines de son personnage avec une intro expédiée comme pas permis (un piège expéditif au possible), et a injecté de la testostérone par litres : “Statham est le meilleur pilote de la prison, et on lui pose un flingue sur la tête pour faire la course. Ok, mais je vous baiserai d’ici la fin”…
Boum, voilà les enjeux…, mais une fois que les moteurs commencent à vrombir, la magie du procédé commence à fonctionner malgré la lourdeur incroyable des dialogues, c’est bourrin au premier degré et plutôt divertissant, en tout cas moins chiant que les courses de voitures habituelles, complètement jouissive…, les entre-courses marquent en tout cas le pas, ralentissant le rythme pour rien nous montrer, ou si peu (Statham qui tabasse des méchants avec une clef anglaise, la chef froide comme un hectolitre d’azote liquide, les ennemis de Frankenstein qui rient beaucoup)…, bref, on a même droit aux petits spots publicitaires pour la course, Verhoevenniens dans l’esprit, mais nous ne sommes pas vraiment
dupes de la supercherie…, “Death Race” n’est qu’une mécanique vrombissante inutilement bruyante qui fait des tours de pistes avec quelques explosions…
Si “La course à la mort 1” (Death Race 1) est un film américano-germano-britannique réalisé par Paul W. S. Anderson sorti le 22 août 2008 en Amérique du Nord et le 15 octobre 2008 en France…, il faut savoir que ce film est un remake de “La Course à la mort de l’an 2000”, réalisé par Paul Bartel en 1975, ou les rôles principaux étaient joués par David Carradine et Sylvester Stallone…, alors que dans ce remake, ces mêmes rôles sont tenus par les acteurs Jason Statham, Joan Allen et Tyrese Gibson.
Le film a reçu généralement de mauvaises critiques, il tient actuellement un 43 % au classement “Pourri” chez Rotten Tomatoes…, et un classement de 41 sur 100 sur Metacritic…
– Roger Ebert du Chicago Sun-Times a donné une demie étoile pour le film sur quatre possible, le qualifiant : d’assaut sur tous les sens, y compris commun…
– Keith Phipps de The Onion A.V.Club a écrit que le film était l’idéal pour ceux qui veulent voir un paquet d’explosion de voiture sans avoir à trop réfléchir…
– Marc Savlov du Austin Chronicle a dit de La course à la mort qu’il s’agissait de l’un des plus ennuyeux films de voiture de tous les temps…
– Peter Hartlaub du San Francisco Chronicle a considèré que le film était un remake mal-avisé et sévèrement affaibli de La course à la mort de l’an 2000…
– Elizabeth Weitzman du New York Daily News a donné au film une étoile et demie sur quatre possible… et commentant : Les courses-poursuite sont assez dynamiques, mais il y a absolument rien d’autre à voir…
– Une critique positive est venue de Nathan Lee du The New York Times qui a écrit : Le film est légitimement graisseux, authentiquement méchant, avec un bon sens à l’ancienne où l’on dévaste tout…
– James Berardinelli du ReelViews a par contre attribué un score d’un quart d’étoile sur quatre possible…
Le lendemain, je n’arrêtais pas de penser que je devais aller voir le show de tuning…, pour y accéder, j’ai dû parcourir un jardin public en slalomant entre les joggeurs et les poussettes pour ensuite atteindre des chemins plus reculés et arriver à lac artificiel pollué à souhait…, un parcours assez street…, une fois arrivé, ça n’avait rien du show extraordinaire…, j’étais plongé au cœur d’une flopée de nuisances classiques avec les promeneurs, les vélos, les ados qui se cachaient pour fumer des coulées vertes et des types qui faisaient des duels de voitures sauteuses sur un des parkings…, ces engins débiles qui faisaient un bruit de ferrailles disloquées en retombant…, je n’en pouvais plus.
Pour débusquer le mec de la veille, il fallait penser où tout beau pépère poserait sa graisse au frais, sans bouger, j’avais pensé juste, au bar de ce lieu de perdition mécanique, j’ai aperçu une silhouette connue, quand je me suis rapproché, la silhouette semblait de plus en plus imposante… et pour mettre fin au mystère, non seulement c’était vraiment lui qui avait créé les horreurs automobiles du film “troisième” de la saga, mais en plus il s’agissait d’un des co-organisateurs de la manifestation…, un sacré enfoiré hyper caractériel, méfiant, fainéant, bon-vivant, chenapan, crevard, malin, taciturne, gros casse-burne…, une vraie p’tite raclure de première avec un cœur gros comme ça (le geste des mains parallèles). C’était un vrai matou d’eau douce,certains jours, il pourrait aisément se laisser prendre par des imitations de Cobra tagada et d’autres fois, il a beau vider vos boîtes de bière, il en aura tout simplement rien à carrer…, en faisant des recherches sur divers blogs qui se contredisaient tous, j’ai récolté quelques tuyaux sur le comportement des tuneurs fans de la trilogie des “Death race”… et notamment la façon dont je pouvais mieux les énerver.
Mais lorsque dans le show, je me suis retrouvé nez à nez avec les voitures du dernier opus de la saga, avec des nananas bandantes presque nues…, impossible de bouger, il y avait même une sorte défilé de mode, les filles pointaient leurs seins et se déhanchaient habilement pour attiser encore plus les prédateurs…, c’était beau à voir et complètement efficace…, il semblait toutefois évident que ces bestioles bougeaient leur fion en échange de dollars…, j’étais dans la cour des gros… En repartant dans la frustration la plus totale, j’étais fou de rage, alors, j’ai appelé Jeff toute la soirée en espérant qu’il décroche…, mais je ne m’attendais pas à ce qu’au bout de ma soixante-quatrième tentative une voix improbable mette un terme en réponse à mes harcèlements téléphoniques : “Allô oui ? J’en ai rien à foutre ! Cessez de m’emmerder la vie et cassez-vous !”… Biiiiip…, ça avait aussitôt raccroché…
Si vous comptez un jour aller à Las Vegas faire un reportage sur des bagnoles spéciales ayant été vedettes de films, dites-vous bien que la tâche sera plus compliquée que vous l’imaginez…, non seulement parce qu’après mon acharnement les mecs qui les gèrent seront particulièrement méfiants, mais surtout parce qu’ils se seront fait passer le mot…, des gros loubards, ouais !