Mes aventures en Géorgie… #3
La philosophie relève parfois de la pathologique…, c’est terrifiant, cyclique, inévitable.
Il fut un temps d’il y a 10 ans, je me suis retrouvé harcelé de toutes ces questions qui ne servent à rien… D’où viens-je, ou vais-je, dans quelle étagère ?…
C’est donc baigné de la plus grande humilité que je me suis essayé via ce troisième (et dernier) épisode de mes élucubrations géorgiennes, à un Nième exercice de philosophie.
Respirez, avant de pénétrer sexuellement dans ce sujet qui n’attend que ça…, vous vivrez ainsi une immersion texticulaire dans un océan ontologique…
Ce fut comme un tic nerveux…, j’étais là allégrement affalé dans mon train-train… et soudain, sans prévenir, une obsédante réflexion philosophique débile ne m’a plus lâché : Toute lutte est vaine, mais ne pas lutter l’est aussi !
C’était “auto-anal-ytique” : je me suis réveillé en plein après-midi de joie et d’amour avec une sensation d’érectibilité immense, effet d’un questionnement mental stupide et cauchemardé : Comment se peut-il que l’Homme soit libre s’il vit dans un univers causal et donc déterministe ?
Vous voyez le genre…
A cette époque, j’en étais à un niveau relativement avancé de catatonie introspective…
Ne rigolez pas, il m’a fallu deux semaines pour trouver une réponse satisfaisante et, ainsi, une forme de repos…
Pour comprendre, il vous suffit de continuer à lire…
Mais avant…, petit plaisir sadique…, il est temps pour moi de faire une petite mise au point, suite aux 2 précédents épisodes narrant mes péripéties priapiques géorgiennes :
1° www.GatsbyOnline.com n’est pas un “blog-normal”…, personne ne sait pas trop ce que c’est en fait…, au départ c’était plutôt pour me la péter un peu, je ne cherchais pas à donner un point de vue de journaliste bridé par ses rédactions, non, d’autant que je n’ai jamais été bridé par quiconque, ayant toujours été mon propre maître…, c’était juste que ça m’amusait d’écrire sur le web…
2° www.GatsbyOnline.com n’est pas non plus un blog culinaire consacré aux diverses manières d’accomoder les restes…
Il y a 10 ans, les américains commençaient à puer le moisi du côté de Kandahar et du 11 septembre 2001.., tout démontrait peu à peu qu’ils avaient menti sur qui avait fait écrouler les tours, fait un trou dans le Pentagone, un autre trou dans un terrain vague… et prétendu que Saddam avait des armes de destruction massives…
Tout ça pour avoir le prétexte d’envahir l’Afghanistan, puis l’Irak et y piquer toutes les ressources énergétiques… qui représentent des centaines de milliards de dollars…
En 2010 plus besoin d’avions bourrés d’explosifs, clonés aux couleurs de la United Airlines…
5 dollars de poudre de perlinpinpin étalés sur une jambe, dans un vol Hollande/USA, à coté d’un agent de la CIA…, a suffit pour qu’Obama, le Nobel de la Paix…, menace sans rire d’envahir Yémen et Soudan…
C’était moins cher que le 11 septembre 2001 pour un résultat quasi identique !
C’était la crise…
En 2010, les armes secrètes inventées par Nicolas Tesla (telle la Pierce-Arrow électrique des années trente), héritées gratuitement par les USA et peaufinées par HAARP…, vont permettre : 1) de simplifier d’avantage les chutes d’avions (pour supprimer ceux et celles qui dérangeaient)… et 2) d’organiser des tsunamis et tremblements de terre pour envahir les pays susceptibles de rapporter très gros…
L’Afghanistan disposait de mille milliards de dollars de ressources énergétiques, sans compter le commerce des plans “agricoles”, bases de quantités de drogues, qui fut multiplié par 40 avec l’aval des USA… (la production de pavot à opium a été multipliée par plus de 40 en Afghanistan depuis que l’Otan y est présente, avait annoncé à Moscou, Viktor Ivanov, directeur du Service fédéral russe de contrôle des stupéfiants-FSKN).
L’Irak avait déjà rapporté des centaines de milliards de dollars et disposait toujours de dizaines de milliers de milliards de dollars de pétrole en attente d’être pompés…
Et Haïti via le tsunami qui avait ravagé le pays, allait rapporter mille milliards de dollars aux américains en pétrole…
Toute l’astuce était d’éviter les mêmes soucis qu’en Afghanistan et en Irak… et de pouvoir envoyer à Haïti 20.000 Marines et la Flotte Atlantique, avec porte-avions et sous-marins nucléaires, sous le prétexte d’une aide humanitaire…
Il n’y a pas de quoi rire, ce fut un massacre à grande échelle, un génocide ; 200.000 morts et tout autant d’handicapés graves…
Pour le Nouvel Ordre Mondial, c’était tout profit, on diminuait “naturellement” la densité de population (selon les recommandations du rapport pré-9/11 : Le Nouveau siècle Américain), on donnait du travail pour reconstruire avec 10% de la valeur pétrolière que les USA allaient voler sur 15 ans et plus… et on n’avait même pas besoin d’inventer que les Haïtiens avaient des armes de destruction massives…, donc pas d’utilité de demander la permission à l’ONU pour envahir Haïti…
Du cousu-main, passez muscade, pas-vu, pas-pris…
Le crime génocidaire parfait…
Et tout cela de la volonté d’un prix Nobel de la paix : Saint Obama !
Lors de son “introduction” (c’était une enculade de première, mais personne ne l’a senti passer), j’en ai vu qui pleuraient de bonheur en TV, comme Miss France, sans nul doute une déviante masochiste…
Tout le monde l’a cru : “Je vais fermer Guantanamo…, je vais retirer les troupes d’Irak et d’Afghanistan…, je vais interdire les “colonoscopiesisations” juives dans les territoires Palestiniens illégalement occupés…, je vais faire la paix avec l’Iran…, je vais instaurer la sécurité sociale aux USA” !
Vous y avez cru, vous aussi…, avouez !
Bien profond qu’il vous l’a mis, le Messie du renouveau !
Guantanamo n’est toujours pas prêt de fermer (alors qu’on sait que le terrorisme international n’existe pas, que c’est le gouvernement Bush qui a flingué les tours et le reste pour créer un prétexte à envahir l’Afghanistan, qui a créé Al-Qaïda, devenu Ei, puis Daech)…, 150.000 Marines en Afghanistan et en Irak (malgré qu’il est maintenant 100% officiel que les USA ont délibérément menti : Saddam n’a jamais eu d’armes de destruction massives)…, la colonisation juive s’intensifie en Palestine (toutes les résolutions de l’ONU sur ce sujet sont foulées du pied)…, Obama n’a pas osé “génocider” l’Iran et la planète ensuite, il avait trop à faire le ménage aux USA…, mais les larbins de sévices comme l’infâme et infect BHL a entrainé Sarko 1er à détruire la Libye et à préparer la guerre totale en Syrie…
Le suite est connue… et c’est écœurant !
Pendant ce temps, Carla Bruni Sarkozy qui avait baisé avec plus d’hommes (et femmes) que la totalité des épouses présidentielles depuis que cette fonction existe…, se dorait la pilule mais jouait la porte-serviette Elyséenne en venant perfidement raconter en radio-tv ce que son petit Nicolas n’osait pas dire de Villepin… à qui on n’arrêtera jamais de faire payer son audace d’avoir osé dire la vérité à l’ONU il y a quelques années : Saddam n’a pas d’armes de destruction massives, c’est un mensonge…
C’est que…, Sarkozy, un des deux laquais de Georges Bush, avait été chargé des basses-œuvres revanchardes en échange d’un appui électoraliste que même l’AIPAC envie encore…
L’autre laquais-larbin, c’était Tony Blair qui affirmait que c’était vrai, Saddam des armes de destruction massives…, pour peu il faisait publiquement un doigt d’honneur au public, lors d’une récente audition explicative en Angleterre… ou il a affirmé l’exact contraire !
Que faire, que dire ?
Les journaux, les télés, les radios ne sont d’aucun secours dans cette glissade vers le totalitarisme puisqu’ils en font partie…, à force de pisser dans le sens du vent…
Qui va venir nous délivrer ? Pour autant que le 6 juin ’44 ait jamais été une délivrance !
Un missile Israélien finira par tomber, par hasard et inadvertance, sur une centrale électrique Iranienne !
Ce sera un coup de théâtre en complément d’un bombardement intensif de la Syrie et de son invasion !
Un million de morts innocents, parce qu’Israël aura décidé d’agir “préventivement”, pour se défendre de n’avoir été attaqué que verbalement…
Tony Blair reviendra en première ligne !
Sarkozy ne sera pas loin, avec Macron et toute la clique !
Le pot de fer islamique frappé par une bouteille de coca…, car oui, les Américains sont derrière !
Tout rédacteur en chef digne de ce nom se devra de réagir immédiatement… et même s’il ne comprend rien à ce qui se passe, il commandera des papiers à tour de bras à de grands philosophes comme Bernard Henry Levy qui lui comprend toujours tout…
On organisera même une Druckérisation de l’évènement, Enrico Maçias en tête qui reviendra chanter “Enfants de tous pays”…, sauf les Iraniens, les Syriens et les Palestiniens…, bien sur !
En fait, cet acte d’une barbarie égoïste, ce nouveau génocide dont on ne sait encore trop rien… et dont on n’en saura jamais grand-chose… ne sera qu’un pet de plus d’une longue série nauséabonde, qui ne change rien à la situation et cette évidence immuable : on va tous mourir dans d’atroces souffrances, tandis que les pontifes vont se branler sur leurs milliards de dollars…
Quoique…
J’imagine plutôt que ce sera comme toujours, le pas de trop dans la casserole de soupe des autres…
Le monde, aimant les persécutés, va pleurer devant les photos d’enfants et de femmes affreusement mutilées par la ou les bombes atomiques…
Il va y avoir comme une réaction thermonucléaire mondiale…, mais ça, j’ai beau l’expliquer, les beaufs ne le comprendront qu’au bout de dix ans, quand le prochain tsunami se pointera, porteur d’une Nième pandémie grippale fabriquée par les mêmes sauveurs de l’humanité… qui brandiront encore un Nième vaccin breveté des années avant le virus…
Bon, ça donnera du boulot aux journaleux qui ne s’en plaindront pas.
Cette partie de chaises musicales à mort, comportera divers gags, par exemple que les USA possèdent une nouvelle arme qui crée des tremblements de terre, des tsunamis et parvient à faire tomber des avions sans les toucher et sans “terroristes”…, ce qui permettra aux “Forces de la paix du Nouvel Ordre Mondial” d’envahir confraternellement l’Iran victime d’une série ininterrompue de catastrophes naturelles…
Mais en fait, ça nous fait tous et toutes royalement “chier” de devoir supporter tant et tant de mensonges, donc, je ne vais surtout pas venir parler ici du p’tit dernier… : Les américains ne vont plus sur la lune, c’est trop cher !…
Vu qu’il y a des choses vachement plus importantes qui se passent en ce moment, comme les conséquences des mensonges du 11 septembre 2001 qui ont généré la crise économique qui n’arrête pas de finir… et comme les prochaines grandes catastrophes naturelles qui vont frapper l’Iran, la Chine, la Russie et tous les pays de l’axe du mal…
On va tous mourir…
Tous les “ceusses” qui ont vécu les “premiers faux pas de l’américastronaute dans le désert de Mojave sur la Lune”, (lisez Objectif Lune ! pour comprendre), ne sont pas encore morts…, ils seraient révoltés de constater que les “nouvelles” missions lunaires ne retrouvent strictement aucun vestige des soi-disant premiers pas là-haut…
En réalité, si les USA ne vont pas sur la lune…, c’est parce que c’est trop tôt !
Dans 20 ans, par contre…, ils…, c’est-à-dire NOUS…, seront morts, ou trop vieux pour dénoncer les mensonges lunaires et faire un parrallèle avec les mensonges du 11 septembre 2001 et autres !
Toute une vie pour quoi, en fait ?
Pour étudier des trucs inutiles afin d’être surdiplômé-lobotomisé pour accomplir des taches de robots humains afin que les Pontifes-pontifiants s’en mettent plein les poches ?
Pour se lever à 6h du mat’, afin de travailler à emmerder la moitié de l’inhumanité jusque 17h, puis retour pour manger dormir après avoir été lobotomisé par des infos pré-formatées et diverti sans questions par des clones de Drucker & co i
Pour payer des taxes et impôts, rembourser des crédits infinis de biens qui finalement n’appartiendront à personne… puis mourir, bêtement, en regrettant de ne pas pouvoir continuer d’être con un peu plus longtemps ?
Je ne sais pas : vous…, mais me concernant…, j’ai du mal à accepter que nos parents et grands-parents se sont crevés, certains finissant handicapés, d’autres morts… pour que vous acceptiez de vivre comme des beaufs…
Sans même oser pousser un coup de gueule…
Bande de lâches !
Conclusion : Il y a 10 ans, pressentant tout…, je suis parti comme aux putes…, aux Tbilissiennes et à leurs seins… dont la beauté allait embellir ma vie chaque jour que Wonderbra fait.
Alors que certains amis voyait déjà en moi le nouveau messie et m’engageaient à me lancer dans une carrière de journaliste culinaire (que je n’embrasserai pourtant que la centaine sonnée)…, au bord de l’explosion hépatique, quand j’aurai assez perdu d’illusions sur le vaste monde pour troquer ma plume acerbe pour du duvet de chapon de Bresse ; alors je m’interroge : Pourquoi pensé-je toujours à la bouffe et aux gros nichons pendouillants ?
A force d’être entouré par des Pantagruel de bazar qui m’expliquaient que : “pour comprendre la vie, il faut aller à table”, j’ai fini par les croire, d’autant plus que c’est vrai.
D’abord il y avait le contexte… et puis surtout, j’en parlais beaucoup parce que je croyais que ma fascination pour la cuisine se rapprochait de celle que j’avais pour l’écriture.
A bien y regarder, il s’agissait de la même chose : il y a des recettes, des dosages, des ingrédients…, il faut choisir les bons mots, apprendre à en juger la qualité…, mais aussi savoir innover, en chercher de nouveaux.
Un bon texte, c’est comme un bon plat : l’essentiel est de trouver ce qui va lier l’ensemble, faire prendre la sauce.
Il ne suffit pas d’avoir l’idée, il faut l’assaisonner, lui donner un aspect agréable à l’œil, le texte doit couler, provoquer des sensations au fur et à mesure, picoter dans la gorge, chatouiller l’hypophyse et flatter le cervelet.
Il ne faut pas hésiter à rectifier l’assaisonnement, à rajouter quelques paragraphes, ôter l’inutile pour que l’ensemble reste digeste : ne pas avoir la main trop lourde sur les adverbes, tailler dans la digression.
Eviter les répétitions.
Il y a des textes comme des soufflés : il faut les écrire vite, quand l’inspiration vous prend… et les servir immédiatement.
Sinon toute l’inspiration retombe.
D’autres se mijotent, doivent rester dans la marmite aux idées quelques jours, patienter jusqu’à ce que les mots expriment leur jus et leur joie d’être ensemble.
Parfois, il faut juste manger : leur intérêt n’est qu’utilitaire, ils ne disent bêtement que ce qu’ils veulent dire.
La seule différence est physique.
Un bon mot, vous pouvez le chercher pendant des jours.
Il sera toujours dans votre tête.
La courge du Panama, elle, vous attendra au marché.
L’important, c’est qu’au final, le beau texte, c’est celui qui provoque l’ivresse ou la jouissance.
Pas une jouissance physique, mais juste une espèce de jubilation incontrôlable, qui vous fait relire et remâcher une phrase sans cesse, tellement vous ne vous attendiez pas à une telle combinaison gustative.
Je ne sais pas si on peut cuisiner de la même manière qu’on écrit, mais j’y éprouve le même plaisir.
Mon petit plaisir quotidien…
Je voudrais maintenant vous parler d’un vrai miracle qui m’est tombé dessus en Géorgie…
D’un être que je n’ai fait qu’effleurer jusqu’à présent dans mes chroniques… et qui est pourtant le résultat d’une résurrection permanente.
Ce petit être tendre et fragile, c’est la Jigouli.
J’en ai palpé plusieurs en Géorgie, elles n’osaient pas dire leur âge.
Et pourtant, à voir leur pare-brise zébré de fissures ou l’état de leurs portières, je devinai les épreuves qu’elles avaient traversé.
A chaque instant, à chaque tour de volant, je craignait pour elles.
Leur boîte de vitesse craquait, leur direction grinçait, leurs vitres tremblaient et leurs suspensions parties aux fraises rendaient toutes les aspérités des terrains, le moindre pavé, le plus petit nid de poule…
A leur bord, on n’a pas vraiment peur pour soi, tellement on s’y sent étranger, géant, maladroit.
On aurait plutôt tendance à s’attendre à ce qu’elles s’effondrent, d’un instant à l’autre.
Chaque côte leur semble une épreuve, chaque dépassement une ordalie… et je ne parle pas des insertions sur voie rapide.
Et pourtant, bon an mal an, elles roulent, elles avancent, elles relèvent les défis un à un, en grande partie grâce à la dextérité de leur conducteur qui sait leur parler… et manie le starter comme un esthète la métaphore…
Car le chauffeur de Jigouli, lui aussi, est fragile.
Désespérément accroché au volant comme il se raccroche à la vie, il connaît tous les déboires de son véhicule et se précipite avant vous pour ouvrir d’une main leste la portière dont malgré toute leur bonne volonté, les non-initiés n’arriveront jamais à percer les secrets.
Les taxis en Jigouli sont les plus sympas – et les moins chers – que je connaisse.
En pénétrant dans un de ces petits vélociraptors métalliques de ces temps oubliés où le peuple s’occupait moins d’opium que de mécanique, j’ai été brusquement pris d’un élan d’amour fraternel sans bornes pour cet homme et sa machine, toujours sur la brèche.
Et devant la vision des innombrables brèches au centre du pare-brise, sagement disposées en croix, alors que les églises alentour étaient encore remplies de milliers de croyants en pack, je me suis dit, le cœur soulagé, que la vraie foi n’avait pas disparu.
God save the Jigouli…
En Géorgie, un samedi tard, alors qu’il était plutôt dimanche que samedi, mais c’était un point qui m’avait échappé à cette heure tardive…, un samedi tard donc, moi et mes amies avions fait une nouvelle rencontre inattendue.
Nous nous étions attablés dans un restaurant de Tbilissi pour manger le khachi, cette soupe de tripes et de pieds de porc que certains Géorgiens n’hésitent pas à qualifier de “réanimation” après une soirée trop arrosée…, c’est plutôt une soupe pour célibataires, je dirais, vu qu’on y met plein d’ail et qu’il serait plutôt galant de n’être pas dans un état nécessitant son ingurgitation lorsqu’on est en compagnie d’une demoiselle.
A côté de nous, quatre beaux spécimens géorgiens, francs et massifs, attroupés autour de leur vodka… et en survêtement.
Il ne nous a pas fallu un échange trop important de toasts et de paroles pour comprendre que nous avions affaire à des sportifs…
Le plus chétif d’entre eux, qui devait peser dans les cent trente kilos, a commencé à sucer ardemment le moignon turgescent de son voisin…, quand soudain, ses deux autres amis pingouins priapiques ont escaladé gaillardement l’escalope aux ministres, sans sushi ni whisky après rasage impromptu…
Ces deux hermaphrodites unijambistes crièrent : “Il sera, passionnément dindophile, son porte-bonheur en mousse comme jamais personne ne l’a jamais tamponné”… (Traduction libre et approximative).
Paradoxalement, jamais l’un des 4 Géorgiens n’aurait accomplit profondément une otarie aussi acariâtre et lunatique orchidée…
Il est vrai que l’apeuré homosexuel, ne permet pas d’arriver devant les andouillettes enrhumées de Géorgiens autodidactes-sexuels… dissimulant son anticonstitutionnelle bible martienne dans une poubelle rose !
Devant cette scène apocalyptique, Natacha décapuchonna sa capuche visqueuse en postillonnant vulgairement tel une chamelle furibonde, bégayant instinctivement ce que tout ascenseur colérique ne crapahute que par la pensée…
Pour visualiser la scène, imaginez Albert Einstein se promener la pince serrée contre ses enjolivures et danser gaiement la polka affublé d’une perruque dorée !
Et oui, c’est le résultat de plusieurs litres de Vodka…
Toujours convivial et dans l’optique de resserrer les liens franco-géorgiens, je leur ai proposé illico un bras de fer et ai disposé des tabourets pour former une table adéquate (ça aurait sûrement été trop simple sur la table directement).
Je me suis accoudé sur le tabouret, serrant la pogne de mon ami sportif.
Je jure que j’ai essayé de résister…, il a mis au moins trois secondes à m’aplatir le poignet par terre.
Et ce n’est qu’après m’avoir quasi éclaté les métacarpes, qu’il s’est redressé en rigolant : “En fait, dit-il, hilare, je suis champion de bras de fer du Caucase depuis deux ans !”
Ha ha !
C’est l’humour géorgien typique, là-bas, la vie est toujours plus drôle lorsqu’on arrache un bras ou deux aux personnes qui vous entourent.
Bref, dans le groupe, il y avait un sextuple champion de lutte, un autre de judo et le dernier, je ne m’en souviens plus, il devait faire du krav-maga ou un truc comme ça.
Heureusement que ne m’est pas venue l’idée saugrenue d’aller leur chatouiller l’o-soto-gari.
Parce qu’en plus, ces crétins étaient des militaires en permission.
Faut-il être con pour se gâcher la santé comme ça, quand même.
Je sais…
Vous vous attendiez à ce que je vous parle de mon reportage en Ossétie du Sud, que je raconte la tournée des checkpoints, mes embrouilles avec le KGB local, les gelures du conflit ?
Vous bouilliez d’impatience, mais vous vous êtes dit : Laissons le grand reporter lécher ses blessures dans son antre, digérer les drames et dégeler le conflit…
Et en fait, j’ai plutôt envie de démouler le confit et parler de cuisine, parce que ces derniers jours, profitant d’une situation financière soluble, j’ai décidé de mettre la main à la pâte.
C’est comme ça, les fringues je m’en fouette le lard, je préfère foncer au marché, mijoter dans les allées, renifler, tâter, emballer, et une fois revenu à la maison, tout cuisiner.
Je ne veux pas faire semblant d’être la crème des chefs, ni faire le faux modeste, disons juste que j’adore cuisiner et que souvent ça rend bien.
Pourtant il faut que je vous l’avoue : quand je suis arrivé en Géorgie, je me suis trouvé bien réduit…
J’ai dû réapprendre à cuisiner… et surtout, surtout à acheter.
Pour que vous saisissiez pourquoi, il faut que je vous explique le principal marché de Tbilissi, le Bazroba de la gare.
Le Bazroba de Tbilissi, c’est un peu les puces de Montreuil en quatre fois plus grand, où les gitans auraient troqué leurs teddys pour des courges et leurs faux Levi’s pour des truites.
Il y a deux halles principales, immenses : celle dédiée à tout ce qui se mange… et une autre réservée au reste : vêtements, vaisselle, papeterie…
Elles sont entrelardées d’une espèce de centre commercial à la manque, où des petites boutiques, de vêtements pour la plupart, sont embrochées dans un bâtiment divisé en allées bien découpées.
Pour le reste, c’est un peu le bordel.
Chaque halle est comme une pièce de rôti plongée dans une sauce indistincte d’échoppes miniatures et de vendeurs ambulants, qui vous offrent leurs citrons, leurs chaussettes ou leur sel svane.
Et dans ce coulis d’hommes et de femmes, saturé de centaines et de milliers de chalands pressés et lourdement chargés, on peut trouver son bonheur : vêtements comme nourriture, cigarettes ou lessive liquide.
En y ajoutant, un peu plus loin, le bazar d’Eliava dédié au bricolage, je ne sais pas sur combien d’hectares le Bazroba s’étend, mais il nappe tout un quartier, et pas des moindres.
Pour ceux qui connaissent, Wazemmes à Lille, c’est de la rigolade…
Je vais donc juste parler de la nourriture sur quelques lignes.
Le principal problème que j’ai rencontré au départ… c’est qu’il y a des produits qu’on ne trouve pas.
Malgré les dizaines d’épiceries que compte le marché, aucune ne vend de papier sulfurisé pour cuire les tartes.
Impossible de trouver du riz en sachet… et pour le papier alu, il faut se contenter d’un ersatz arménien douteux.
Une pâte brisée toute faite, par exemple, voilà qui fait gagner du temps quand vous avez plein de plats à préparer. Inconnue au bataillon, la toute faite.
Il faut donc la pétrir avec ses petites mains.
Les lardons, pour la quiche lorraine ?
Il faut se concentrer très fort pour imaginer à quoi ressemble un morceau de lard d’environ trois kilos, aviser un boucher qui en ait un… et négocier de pouvoir en acheter moins d’un kilo.
En fait non, il n’y a pas vraiment le choix : il faut en prendre un kilo et remercier le ciel d’avoir un congélateur.
Parce que le “rayon viande” au marché de Tbilissi, c’est tout sauf des étagères réfrigérées où la bidoche est bien détaillée…, classée : veau, mouton, porc…, emballée en portions individuelles (moins d’un kilo, donc)…, labellée pour vous informer que vous achetez du rumsteack, de la poitrine, ou de la souris de gigot.
Non !
La partie de la halle à la nourriture réservée à la viande, c’est quelques centaines de mètres d’étals crades où des pièces de cinq kilos de barbaque pendent à des crocs de boucher.
Quand ça n’est pas la carcasse ou la bête entière.
Et comme les vendeurs géorgiens sont du genre convaincant, si vous vous laissez faire, vous repartez bien vite bardé d’un vieux mouton dur de la semelle ou d’un kilo de viande rouge qui, vous a-t-on assuré, passe très bien à la poêle, mais se révèle être de la bidoche à carbonade dure comme le dentier de grand-maman.
Il faut expliquer en sus que, malgré leur grand amour pour la bouffe et leur cuisine riche et variée, les Géorgiens ne sont pas des gastronomes accomplis.
Par exemple, ils n’ont pas de science de la boucherie et du dépeçage des morceaux.
Avant d’essayer de faire comprendre ce que c’est que du gîte à la noix à un boucher de Tbilissi…, les mauvaises langues diront que je ne le sais pas non plus.
Certes, mais en France il y a des gens qui savent pour vous !
Une fois pourtant des types sont venus de l’Yonne, et ils ont fait une présentation du bœuf charolais au Sheraton de Tbilissi.
Pour marquer le coup, ils ont même édité une plaquette avec le découpage de la bête, en français et en géorgien.
Malheureusement mon bonheur fut de courte durée, quand j’ai vu que rumsteack se traduisait “steki” et faux-filet “po-pilé” (il n’y a pas de “F” en géorgien).
Pour conclure, quand on ne manie pas assez les nuances du géorgien ou même du russe pour essayer d’expliquer ce que votre interlocuteur ne pourra de toute façon pas comprendre…, c’est plutôt mal barré.
Donc il faut apprendre tout ce qu’on a pas besoin d’apprendre chez nous.
Faire la différence entre du porc et du mouton, déjà.
Après, trouver quelle partie (l’avant ou l’arrière ? ), est la plus indiquée pour des brochettes ou du sauté.
Deviner que le “carré d’agneau” c’est les côtes… et ainsi de suite.
Ensuite, vous pouvez finasser et chercher exactement le morceau qui est marqué dans la recette, mais c’est déjà le niveau supérieur.
Puis c’est pareil pour les fruits et les légumes.
Différencier le persil de la coriandre sans compter sur Ducros, reconnaître les bons épinards, apprécier la qualité des patates dont aucune étiquette ne vous dira qu’il s’agit de bintjes ou de roseval.
Le plus déroutant reste encore le fromage, qui à première vue n’existe qu’en trois versions, mais qui se subdivise en catégories plus variées que l’on ne l’imagine…
Enfin, il faut connaître les saisons pour savoir quand le kiwi est bon, à quelle époque le concombre est trop cher et jusqu’à quand les tomates ont encore du goût.
Le pire, c’est de ne pas pouvoir mettre la main sur des petits sachets de levure chimique genre Vahiné, quand le seul truc disponible, c’est un paquet turc de levure de boulanger qui porte le doux nom de PAKMAYA.
Alors, pas le choix, il faut dissoudre PAKMAYA dans de l’eau tiède.
Bien qu’attention, précise la notice traduite en qatari, ukrainien et portugais : “PAKMAYA peut être utilisé jusqu’à 2% de la farine”.
Bande d’enfoirés.
Déjà que je n’arrive pas à trouver ne serait-ce qu’un verre doseur, ces cons de boulangers me réclament de calculer des pourcentages pour un cake aux poivrons…
Sans doute lassée de se farcir mes lamentations, une amie m’a fait remarquer qu’à Goodwill, le seul hypermarché de Géorgie, à vingt bornes du centre environ, il y a tout ce qu’il faut, de la levure chimique, de la pâte toute faite et du carré d’agneau à gogo.
Sauf que moi, je suis un expatrié rebelle…, tout est dans l’attitude.
J’affiche ma liberté d’émincer.
Mon couteau dressé et mon Ginette Mathiot comme étendard, je suis débridé, l’univers de la gastronomie s’ouvre à moi.
Et puis c’est tellement bon.
Tellement bon d’acheter un kilo d’épinards, de couper les racines, guetter les jeunes pousses et faire craquer les tiges des grosses.
Voir l’or vert reluire dans l’évier, les gouttes d’eau froides qui frissonnent en emportant les derniers bouts de terre.
Quel paquet de mélange jeunes pousses La Belle maraîchère peut battre ça ?
Et puis le miel, les noisettes, les poules toutes fraîches, la crème onctueuse et les montagnes de fromage…
Oui, c’est le paradis.
Bien…, je m’égare…, j’en reviens donc à vous causer “bagnoles”… et, à tout saigneur tout honneur, après la Jigouli, je me devais de faire un article sur la Volga.
Tout bien réfléchi, c’est même incroyable que je n’en ai toujours pas parlé.
J’écris “saigneur” parce que c’est vrai que sous certains abords elle peut donner l’impression d’un char d’assaut et qu’à son volant on se sent comme invincible.
Mais en fait, pour un Russe et/ou un Géorgien, c’est la voiture la plus classe au monde.
Vous voyez les Castrolettes, ces voitures cubaines au capot bombé et à l’allure incroyablement élégante ?
Ou bien les Mercerdes, les Zil, les Volvo ?
La Volga surclasse tout cela.
Attention, je parle bien de la Volga premier modèle, la “GAZ 21” (quoique la 24 a ses charmes aussi, mais trop allemande à mon goût).
Large comme le fleuve dont elle porte le nom, avec sa calandre audacieuse et entreprenante, sa carrosserie immaculée, ses chromes rutilants et ses deux banquettes destinées à accueillir confortablement sept passagers (ou deux, pour d’autres activités, disons, plus confortables)…, elle est la reine des quatre-roues.
Construite sur un bloc d’acier, elle a une espérance de vie quasi-illimitée, pourvu bien sûr qu’on lui prodigue les soins réguliers et attentifs qu’elle mérite.
Amatrice de plaisirs simples, elle se contentera de la quinzaine de litres de super non raffiné dont vous l’abreuverez tous les jours.
Car c’est une grande gourmande.
Mais c’est aussi une sportive dès qu’un illuminé déjanté décide de lui greffer un V12 BMW….
Commande de boîte de vitesses “au plancher” et non plus “au volant”, accélérations taurines… et un ronronnement souple qui ne se compare qu’à celui d’un chat débordé de caresses.
La Volga n’est plus alors simplement une voiture, elle devient quelque chose de mythique.
Comme dans la Bible, les premières générations étaient plus belles et ont vécu plus longtemps.
Comme Mars, elle a recueilli les sacrifices innombrables de Soviétiques reconnaissants, immolant leurs pièces détachées dans l’huile de vidange sacrée qu’ils recueillaient de son réservoir.
Comme Aphrodite, elle a servi plus d’une fois de temple à l’amour… et comme elle, a fait rêver l’homo sovieticus de père en fils.
Les femmes la jalousaient mais rougissaient de fierté à l’idée de monter dans ce bolide lancé à tout allure vers le communisme total.
Il y a quinze ans, sa production a été totalement arrêtée et pour fêter l’évènement Igor Postajchek a fait modifier deux Volga Gaz 21, l’une en Coupé V12, l’autre en Cabriolet…, chacune sur base de BMW M6 V12…
Sur le bord des routes, certaines Volga agonisent, délaissées par des propriétaires indignes (ou pauvres), souillées par des pièces de Jigouli, la carrosserie râpée et les suspensions rouillées, les enjoliveurs aux fraises.
Mais bientôt, cette traversée du désert finira…, car, grâce à Igor Postajchek, nombre de Customizeurs et Tuneurs des pays de l’Est se mettent à transformer les Volga Gaz 21 en engins de cauchemars…
De leurs fais inavouables, les authentiques Volga Gaz 21 commencent déjà à prendre de la valeur sur les marchés d’occasions et redeviennent à nouveau les icônes qu’elles n’auraient jamais dû cesser d’être…
A bord de ces engins, on se sent comme un pionnier voguant à la découverte de l’ancien monde… et si à nouveau le déluge venait frapper les hommes, il n’y aurait qu’un seul refuge : l’Arche moderne, la Volga 21 V12
Des fois en Géorgie on fait des rencontres qui marquent…, par exemple un midi passé, alors que j’étais en Kakhétie et que je cherchais, avec ma traductrice sexuelle : Irma…, l’entrée d’une hypothétique meilleure cantine à khinkalis, au milieu d’un conglomérat de magasins faméliques, j’ai rencontré un homme saoul.
Ce n’est pas que ce soit inimaginable ici.
Mais des comme lui, fin rond au point de ne pas pouvoir articuler, j’en ai rarement vu dans le coin.
Et je dois lui rendre grâces de m’avoir fait découvrir une odeur que je ne connaissais pas encore : celle du vin rôti.
Oui, parce qu’en m’entendant parler français dans le magasin vide où il cuvait à côté du poêle, il a sursauté et renversé la moitié de son verre en plastique sur le tablier en fer brûlant et rouillé.
C’est d’ailleurs comme ça que j’ai su que c’était pas de la bière qu’il buvait, mais du vin blanc.
Grâce à ma traductrice, on a évité le parfum du plastique aviné rôti, parce que tout de suite après il a essayé de poser son verre sur le poêle qui n’avait pas bougé d’un degré.
J’aurais dû me limiter à cette expression de sagesse olfactive.
Mais quand il m’a posé la question, à peine audible, de savoir si je parlais russe, j’ai répondu bêtement “oui”, malgré les grands signes de bras d’Irma.
Une faiblesse passagère due à la faim, sans doute.
C’est là qu’il s’est mis à parler.
Enfin, à ânonner dans une sorte de convulsion gencivaire une sorte de monologue du tarin.
Avec des petites bulles.
Il faut l’admettre, le Géorgien bourré est lourd, il vous prend par l’épaule en vous racontant l’histoire géorgienne par le menu, enfin généralement ce que vous connaissez déjà par coeur.
La Géorgie ci, les Géorgiens ça, et le vin, et l’amitié sacrée…
Lui, il battait tous les records.
Parce qu’en plus de raconter des conneries, il n’en laissait deviner que ce qui s’échappait entre les bulles nauséabondes : Caucase… culture géorgienne… France… amis… Caucase.
Nous sommes partis en courant.
Erreur, grave erreur.
Malgré son élocution difficile, il était toujours capable de nous retrouver, tel un zombie en quête de cervelle fraîche.
Certes, nous n’avions parcouru que vingt mètres, mais nous pensions l’avoir semé en contournant le bâtiment.
Réfugiés dans une pharmacie vétérinaire, nous avons dû assister à son entrée magistrale, lacets défaits et sourire déboutonné.
Un quart d’heure durant : Caucase… France… haan…
Le cauchemar de ce type m’aurait poursuivi toute la journée si je n’étais pas venu dans ce village pour une seule et bonne raison : trouver le Graal du khinkali, qui en général réside dans la simplicité (Jésus était fils de charpentier, ne l’oublions pas), c’est-à-dire dans des boui-boui ne payant pas la moindre mine.
Et quel khinkali n’ai-je pas trouvé, mes amis ?
C’était presque christique.
Invités dans la cuisine de la cantine pour cause de congères dans la salle non chauffée, nous avons vu les cuisinières multiplier les petits pains à la viande.
Eclairés par un simple rayon de lumière descendant d’une lucarne isolée, nous les avons partagés en silence.
C’était beau, c’était bon.
La rédemption après la souffrance…
Ce même jour, à quinze heures, ma voisine du bordel ou je me reposais…, s’est pendue sexuellement.
Rassurez-vous, ce n’est pas ma gentille voisine qui me prépare des petits plats et m’engueule quand je ferme mal la porte.
Non, celle-là je ne la connaissais pas, ou presque, peut-être un bonjour une ou deux fois, et c’est tout.
Mais son suicide nous a rapprochés d’une manière dont je me serais bien passé.
C’est avec ma scie à métaux de ma trousse à outils qu’on a coupé la chaine qui la pendait à la poutre, puis, c’est moi qui l’ai transportée jusqu’à l’escalier en attendant que l’ambulance arrive.
C’est moi qui ai touché sa chair flasque et sa nuque brisée, pendant que l’autre voisine hurlait à travers la cour.
Moi qui ai dû transporter son cadavre, les bras ballants, deux étages au-dessus avec les trois hommes qui traînaient dans le coin, c’est-à-dire deux vieux et un jeune au chômage, après que les ambulanciers aient constaté sa mort.
Et j’ai la gerbe, le cafard et les jambes qui flageolent encore à m’en souvenir…
Mais ce sont ses amants-clients qui vont souffrir, car pour la totale BDSM, une heure de jouissances torturées, elle ne demandait que 4 dollars.
C’est un autre défi qui m’a poussé à reprendre la plume, après ces quelques jours passés loin de MON www.GatsbyOnline.com, pour cause de beau temps outrancier.
Le défi quotidien des hommes sans foi, des poètes bassement littéraires, incapables de voir dans les détails triviaux de la mécanique ornementale toute l’âme d’un peuple.
Le défi des incroyants qui ont copié les fameuses “concentrations-concentrationnaires-franchouillardes”, avec tentes de camping et linge qui pendouille…, qui beuglent des chansons racistes, hurlent des calembours grotesques et singent quelques poses licencieuses…, tentant accessoirement de faire vivre le mythe du Custom dans l’ancienne Union Soviétique…, ça fait flipper…
Plutôt que vous décrire l’engin, tout à la préhistoire d’un mouvement naissant et embryonnaire, je me contenterai de vous écrire que ce magnifique Pick-Up noir est de marque Volga…, qu’il est réellement fantastique, mais typique des pays de l’Est…
Un point commun, les Géorgiens (les Russes également) se refusent à s’afficher avec des plaques minéralogiques non-customizées…
L’étude quotidienne des plaques d’immatriculation géorgiennes est à la socio-pipologie ce que Bernard Henry Levy est au cinéma !
C’est dire son importance.
Décrivons d’abord la chose : trois lettres, trois chiffres, qui laissent place à l’imagination débordante des conducteurs.
Car contre quelques billets bien placés, vous avez une plaque en métal à l’image de votre moi profond… et en Géorgie, je crois que ça remplace un sacré paquet de séances de psy.
Avant, il fallait graisser la patte du fonctionnaire chargé des immatriculations.
Depuis la révolution c’est officiel, il y a des tarifs pour ça et la soif de gloriole des conducteurs géorgiens alimente directement le budget de l’Etat.
Pas con le gouvernement.
Bien souvent, il faut l’avouer, le résultat est fade.
Mais il en dit tellement long sur la fierté virile des conducteurs.
Il y a d’abord les égoïstes qui se contentent d’inscrire leur prénom sur ces trois lettres : GIO, OTO, VAX (pour Vaxo) DAT (pour Dato), pour ne citer que les plus courants.
Le nec plus ultra étant évidemment d’ouvrir la série, c’est-à-dire d’être le premier imbécile à acheter sa plaque perso : “GIO 001”, “OTO 007” pour les détenteurs de références culturelles.
Les vrais princes sont ceux qui roulent sous leurs initiales : LLK pour Levan Levanovitch K…, je ne cite pas le nom, je tiens à ma peau.
Autre classique, pour les romantiques : une voiture au nom de sa dame (ou de sa maîtresse), un petit coupé SL500 par exemple, répondant au doux nom d’EKA, TEA ou TAT (Tata).
On peut associer le NIN à une série commençant par 0, ce qui donne NIN0, le prénom le plus courant en Géorgie.
Il y a le style mafieux : BMW noire portant le doux nom de BOS(S) ou DON par exemple.
Ce genre de plaque étant d’autant plus révélateur si elle se porte sur une Jigouli noire (la deudeuche soviétique, mais en pire).
Certains pragmatiques font inscrire “BMW” sur leur BMW, sûrement pour qu’on soit bien certain qu’il ne s’agit pas d’une contrefaçon.
Bizarrement personne n’inscrit “LAD” sur sa Lada, allez savoir pourquoi.
Les plaques rappellent aussi l’origine géographique : les ABK sont souvent des réfugiés d’Abkhazie (souvent en Jigouli) qui vivent à présent à Tbilissi…., les KAX sont les Kakhétiens etc…
Certaines entreprises, comme le groupe pharmaceutique PSP, ont même royalement offert une plaque corporate à leurs employés : “Si tu veux faire l’Americano, tu peux choisir NBA, USA, ou FBI”….
Bref, un monde de possibilités infinies.
Enfin, il y a les plaques utiles : si vous avez une plaque AAA, ne la jetez pas.
Avant, elle était réservée aux hauts fonctionnaires et aux membres du gouvernement.
Le genre de voiture qu’aucun flic ne se risque à arrêter.
Même si la tendance est plus aux plaques SOD (Special Operations Department, les commandos du ministère de l’Intérieur) ou SPS (Special Protection Service, la garde présidentielle).
Surtout si elles sont plantées sur une Mercedes ML 4X4 avec kalachnikoviste encagoulé en option.
Mais finalement, les meilleures ce sont celles qui laissent vagabonder votre imagination à vous.
Le XOX, par exemple : ça ressemble tout à fait à une exclamation typiquement mingrèle.
Ou RAO qui veut dire Société Anonyme en russe et “Qu’est-ce qu’il a dit ?” en géorgien.
Les OXO ou TXT si fréquentes, on se demande bien ce qu’elles veulent dire…
Tous ces codes qui nous échappent encore, clés de la vanité d’un homme ou d’une société secrète, signes d’une nouvelle caste d’apparatchiks et d’innombrables dynasties de beaufs.
Y’a pas à dire, j’ai les plaques géorgiennes chevillées au corps.
Dans mes archives concernant mes périples en Géorgie, j’ai retrouvé un questionnaire dévoilant cinq choses sur moi-même…; qu’une amie m’avait fait remplir “pour un souvenir plus tard”…
Mais comme ce site est un thématique… et que je n’aime pas la blogosphère…et que parmi mes lecteurs se trouve l’ambassadeur de Suisse (si, si, c’est vrai), je vais vous raconter uniquement des choses en rapport avec la Géorgie.
Parce que bon, c’était ma meilleure amie de là-bas qui me l’avait refilé, ce questionnaire, je ne peux donc moralement pas le zapper totalement.
1° Je n’aime pas que les khinkalis. Le koutjmatji ou le poulet chkmerouli ont aussi mes faveurs.
2° Parfois, je rentre dans des églises orthodoxes. Il m’arrive même de brûler des cierges.
3° Je lutte en permanence en ce moment pour éviter que mon chien Blacky ne copule avec la chienne de ma voisine.
4° Je n’aime pas toujours le vin géorgien.
5° Un jour, je vais vraiment commencer à apprendre les danses traditionnelles.
Voilà, j’espère que vous êtes époustouflés.
Je suis supposé refiler le questionnaire à cinq blogueurs, mais comme je n’aime pas les chaînes non plus, ben je le laisse en libre service.
Ceux qui veulent se servent.
Mais attention, hein, ne soyez pas plus de cinq…
On ne me la fait plus !
Après avoir roulé ma bosse sur les routes de Géorgie, j’ai appris à ne pas faire confiance aux avertissements des locaux qui poussent des cris d’orfraie dès que l’on veut quitter Tbilissi : “N’allez pas par-ci, n’allez pas par-là, la route est bloquée par un sous-marin qui s’est échoué”…, etc.
Le coup du sous-marin échoué est assez minable, qui croirait une telle affaire ?
C’est dans cet esprit qu’avec trois amies, je suis parti pour le week-end à Chatili.
Chatili est la capitale, disons, le centre, enfin, la plus grosse agglomération, c’est-à-dire, le point le moins dépeuplé de la Khevsourétie, charmante région perdue entre la barrière du Caucase et la Tchétchénie.
Y vivent les derniers des Khevsours, de fiers guerriers chargés depuis des temps immémoriaux de défendre les marches de la Géorgie contre les vilains mahométans du nord.
La route vers Tbilissi est ouverte quatre mois dans l’année, le reste du temps, on ne passe pas.
En mai, aller là-bas, c’est une hérésie, la route n’est ouverte qu’en juillet, les castors vous avaleraient tout cru…
Autant dire que ce genre de discours, je me le plie dans la boîte à gants avec la carte Michelin.
Je suis allé à Ratcha, j’ai franchi le col de Rikoti… et en Svanétie j’ai perdu mon pucelage du bitume…
Puis il y a eu la Khevsourétie.
Au début, tout est normal, le chemin fleure bon la Géorgie moderne.
Autoroute quatre voies, avec panneaux de directions, glissière de sécurité et vraie sortie avec voie d’insertion, enfin, presque.
Les vaches se promènent encore sur la bande d’arrêt d’urgence et on vend des chiens caucasiens sur le bord des échangeurs, mais c’est moderne.
Puis ça bifurque vers le nord ; la route est bonne, le bitume lisse, tout roule.
Mais…, une fois passé le barrage d’Ananouri, le goudron se fait lépreux, la terre devient gourmande et veut reprendre ses droits.
Mais rien que de plus normal en Géorgie… et que diable, nous sommes en Niva !
Or, dans les pays de l’Est, la Niva est à la famille des 4×4 ce que la Volga est à la catégorie des voitures de classe, c’est-à-dire le nec plus ultra.
Les Géorgiens disent d’elle : “Niva miva”, ce que l’on peut traduire grosso-modo par : “La Niva y va”.
Du coup, j’en ai profité pour faire mon baptême du feu en Lada 4×4.
La route qui sépare Chatili du dernier village habité est dure, m’avait-on dit, oui, mais, on ne me la fait plus.
C’est parti.
On ne m’avait pas menti : ça secouait grââââââve.
Ca grimpait un peu, aussi.
Les premières rivières franchies, c’était l’aventure, pour un peu on se croyait dans le Camel Trophy.
Et puis le col a commencé.
Les virages en épingle à cheveux sur les cailloux, le capot à cheval sur les ornières….
Avec la pente, le terrain disparaîssait sous la voiture…
Au bout d’une heure, ce fut la délivrance, croyais-je naïvement : le col fut toutefois franchi, la croix réglementaire dépassée.
En fait, c’est là que tout a commencé.
Et que j’ai compris pourquoi, sur dix Géorgiens, seulement le cousin du dixième est allé en Khevsourétie, sachant que cousin en Géorgie, c’est comme frère en Afrique.
Gros trous, gros cailloux, ruisseaux à gogo, précipices offrant juste ce qu’il faut à la voiture pour passer, tout était au rendez-vous pour ménager une balade agréable.
Enfin, les épaules légèrement tendues, je suis arrivé dans la vallée.
Conclusion logique : Chatili, c’était pour bientôt.
Oui mais, la logique, je l’avais laissée en bas du col, et j’ai compris rapidement que pour le coup, je m’étais fourré le piston dans l’essieu.
Car il y avait encore quarante bornes à me taper… et pas plus vite qu’en seconde.
Il fallait passer dans une autre vallée…
Monter, descendre, monter, cahoter…, ce n’est qu’au bout de quelques kilomètres que les premiers picotements m’ont agité les méninges.
Chatili était là, juste derrière cette dernière pente, on me l’avait bien dit, je n’ai vu le village qu’au dernier moment.
Las, j’avais juste oublié un petit détail : le bulldozer que j’avais croisé dans le col, enfin, qui m’avait ménagé un passage en versant la moitié de la route dans le vide, n’était pas passé pour rien.
En fait, si les guides de l’OSCE m’avaient dit que ça n’était pas possible de venir, c’était que la route n’était pas ouverte, vraiment.
Mais ça, je ne l’ai compris qu’à la vue du premier névé, au fond de la vallée, éventré par le bulldozer, qui me narguait de sa pente à quinze pour cent et de sa glace glissante à souhait.
Je me suis rappelé : “Prendre de l’élan, accélèrer doucement, surtout ne pas s’arrêter… et quoi qu’il arrive, ne jamais freiner”.
Boum, boum, ça sautait, ça dérapait, ça glissait, la Niva hoquettait et escaladait bravement la pente.
Puis ça redescendait, ça glissait toujours autant, ça sautait, ça ripait.
C’était pas ce coup-ci que les sensations fortes allaient me poser un lapin.
Evidemment, quelques virages plus loin, un deuxième col m’attendait, puis un passage dans le torrent déchaîné… et quelques kilomètres de tape-cul sur la route fraîchement tourneboulée.
Et enfin, comme dans les livres.
Mieux, même.
Je n’y croyais plus, je ne voulais plus y croire, mais c’était là.
Comme une cité inca posée sur un piton rocheux, au milieu de la vallée.
Un bloc de pierres sèches vouées à l’édifice de foyers de géants, à la fois tours, remparts et étables.
Un village-forteresse dont le message, comme la route qui y menait, était sans équivoque : on ne passe pas !
En haut, dans des baraques de fortune où les sept dernières familles du coin se sont installées, l’énorme ours qui fait office de maire m’a accueillit.
J’étai suis le deuxième à avoir emprunté la route, cette année-là.
Son fils, qui avait passé l’hiver seul, n’avait pas vu de nouvelles têtes depuis huit mois… et les mots ne suffisaient pas à rendre l’étincelle de joie qui s’était allumée dans ses yeux à la vue de nos tomates…
Bienvenue en Khevsourétie.
Il est grand temps maintenant que je le dise, la Géorgie, j’en avais marre.
Marre de ne pas pouvoir trouver de vraies amies sans devoir me bourrer la gueule tout le temps.
Marre de rabâcher les mêmes thèmes, d’être l’éternel invité et d’écouter les mêmes toasts à la France.
Triste de voir un peuple se plaindre de l’impérialisme russe sans se rendre compte de sa propre tendance à l’impérialisme, pour les peuples encore plus petits.
Triste de voir un si beau pays se diriger à nouveau vers la guerre.
Mortifié de voir ma propre vésicule biliaire s’atrophier et refuser (peut-être à ma place) la bonne chaire géorgienne.
Comme l’a si justement dit notre grand poète Boby Lapointe, j’avais mal vers l’aine.
Je ne voulais donc plus rien écrire, je ne pouvais plus rien écrire, dans la veine tragicomique qui a toujours fait mon succès sur les moteurs de recherche.
Je trouvais simplement mes mots gris et aigris, à côté de la plaque.
L’humour a ses limites et l’on passe vite de l’ironie au sarcasme…
J’ai tout simplement décidé de soigner le mal par le mal.
Je suis parti en Khevsourétie, une nouvelle fois, pour faire un reportage sur une fête ancienne, à moitié païenne, où les montagnards égorgaient des cochons dont ils mangeaient la viande au cours de libations à la bière et au tord-boyaux.
J’ai bu, j’ai re-bu, et j’ai libu, aussi.
J’ai laissé ma vésicule au garage… et j’ai ressorti mes plus beaux toasts géorgiens.
Je me suis laissé embrasser par des inconnues en sachant que je ne les reverrais plus.
Et le bonheur, décuplé par celui d’être dans des montagnes sublimes, coupées de la civilisation, ne m’a pas quitté pendant ces quelques jours.
Rentrant à Tbilissi après avoir bu un pot avec une amie, j’ai entendu dans la rue des chansons.
De très belles chansons, de ces polyphonies qui vous figent le cœur.
J’ai hésité, puis, fort de ma connaissance de l’hospitalité géorgienne… et d’un peu de vin blanc dans les veines, je suis entré dans la cour, voisine de la maison, d’où provenaient les chants.
J’ai ouvert le portail, gravi l’escalier, et frappé à la porte.
L’homme qui m’a ouvert, je le connaissais, c’était Aleko, le neveu d’Irma, mon ancienne traductrice sexuelle.
Je savais qu’il habitait cette cour, mais parmi la trentaine de logements qu’elle compte, il fallait vraiment une sacrée chance…
Et cette chance je l’ai savourée d’autant plus que je savais très bien que n’importe quelle autre famille m’aurait ouvert sa porte et invité à sa table, à partager sa nourriture et son vin…
Voilà.
A Paris, ça n’arrive pas comme ça.
Et j’ai juste compris ce soir-là qu’il faut prendre les Géorgiens comme ils sont : vantards, possessifs, butés…, mais aussi formidablement spontanés et généreux.
Aleko me disait : Nous, les Géorgiens, savons faire deux choses : le vin et la guerre.
Eh bien, que voulez-vous que je dise…, moi je serai toujours là pour boire le vin avec vous !
Mais…, il ne faut pas oublier la vraie histoire…
En 2008, le régime de Saakachvili, encadré et armé par les États-Unis, le Royaume-Uni et Israël, bombardait l’Ossétie du Sud.
Protégeant ses ressortissants, la Russie intervenait et entrait en territoire géorgien.
Décontenancé par l’efficacité d’une armée russe que l’on disait obsolète, Washington dépêchait Nicolas Sarkozy auprès de Dmitry Medvedev pour négocier un cessez-le-feu.
Le 25 août 2008, à l’issue de l’agression militaire géorgienne, la Russie reconnaissait l’indépendance de l’Ossétie du Sud et de l’Abkhazie.
Cette décision répondait à une nécessité stratégique pour Moscou et offrait une réplique à la reconnaissance de l’indépendance du Kosovo par les USA et ses alliés.
Se réservant des cartes futures, la Russie laissait en suspend la question des États fantôme de Piednestrovie (Transnistrie) et du Haut-Karabagh, les positions se sont consolidées, mais n’ont pas évoluées.
Mes conclusions gastronomiques, sexuelles et politiques s’arrêtent là…, car le vin commence à présenter un niveau préoccupant.
La suite de mes aventures Géorgiennes dans une prochaine vie…