Swingo ou Twingo III : Tout sauf une…Twingo !
Par Marcel PIROTTE
Chez GatsbyOnline, nous aimons toutes les voitures…, mais de préférence, celles qui ont du caractère, une histoire ou qui ont marqué leur époque.
A l’instar de la Smart (ça va faire plaisir à « Quelqu’un »), la Renault Twingo n’a laissé personne indifférent…, lancée en 1993, elle s’est d’emblée et malgré ses 3,43 m de long, positionnée comme une « grande » faisant des miracles au niveau de l’habitabilité, de la modularité et de la « praticité »…
Bref, une incroyable réussite avec notamment 2,4 millions de versions vendues en 14 ans.
Après la Twingo II (2007 à 2014) et ses 900.000 unités au compteur, la troisième génération prend le relais, mais cette fois le numéro français a opéré un virage à 180 °.
Un bon choix ?
C’est ce que nous avons tenté de savoir …
Mais revenons à notre Twingo de la première génération : s’il y a bien une petite voiture qui a révolutionné le monde des « citadines », c’est bien elle…, avec son facies « souriant », ses yeux de « grenouille », une frimousse plutôt sympa ainsi que sa conception de « mini berline mono-corps », elle avait tout pour séduire de jeunes acheteurs…
Du moins, c’est ce que pensait le « marketing » de Renault…, mais dans les faits, la Twingo a surtout trouvé sa clientèle auprès des familles et des séniors…
Que de souvenirs personnels avec la Twingo, nous en avons usé quatre au sein de la famille ! Cette trois portes de seulement 3,43 m avec banquette arrière coulissante et rabattable en deux parties, offrait à peu de choses autant de place qu’à bord de la défunte Renault 25…, il fallait le voir pour le croire…
Présentée à Lanzarote en 1993, l’île aux volcans, la Twingo nous avait tout d’abord séduit par son incroyable surface vitrée mais également par son habitabilité… et pour en avoir le cœur net, je m’étais mis d’accord avec trois autres collègues qui, comme moi, n’avaient pas le profil d’un jockey (ça, c’était quand j’étais jeune, beau et mince…) pour véritablement mesurer l’espace disponible…, en ayant pris soin bien évidemment de reculer la banquette arrière au maximum.
Test particulièrement concluant avec même beaucoup d’espace pour les jambes et pas de problème non plus en « largeur » et même en hauteur au point que quatre « sumos » auraient eux aussi pu se loger dans cette mini tellement spacieuse et rigolote…, avec notamment le bouton de signalisation danger qui évoquait le nez rouge d’un clown !
Sympa au possible !
Les sièges de cette Twingo se prêtaient également à toutes les utilisations, ils pouvaient même se transformer en couchettes, il suffisait alors d’ouvrir le toit souple et d’avoir le ciel comme plafond de chambre à coucher…, tout cela pour l’équivalent d’un peu plus de 8.000 €…
Pratique, modulable à souhait, la Twingo était une réussite sauf son vieux moteur fonte de 1,2 l et 55 chevaux, très vite remplacé par un bloc plus moderne de 60 chevaux, un 16 soupapes de 75 chevaux viendra même coiffer la gamme…, comme mon épouse ne roulait qu’en automatique (c’est toujours vrai aujourd’hui), elle a d’emblée opté pour une version bien équipée avec boîte auto 3 vitesses, toit ouvrant en verre, direction assistée, vitres électriques…, le grand chic, il ne manquait que l’airco, indisponible sur cette version, pas assez de place en effet pour y loger l’ensemble du système.
Pendant trois ans, cette « Twingomatic » a fait les joies du ménage jusqu’au jour où sur la Chaussée Romaine du côté du Heysel à Bruxelles, mon épouse a été victime d’un malaise, provoquant une sacrée collision avec trois autres voitures qui en cette suite, seront déclarées hors d’usage…, tout comme la Twingo qui avait fait un splendide tonneau !
Heureusement, mon épouse avait bien suivi mes conseils et était attachée…, la structure a tellement bien résisté que la conductrice s’en est sortie avec une simple entaille au front et quelques jours d’observation à l’hôpital…, mais rien de plus.
Quinze jours plus tard grâce à Renault qui avait déniché dans le réseau une autre Twingo « Matic », (ça ne courait pas les rues …), mon épouse retrouvait sa voiture préférée…
En 2007, cette « surdouée » se voit remplacée…, la seconde génération est avancée.
Nettement plus grande (pas loin de 3,60 m en longueur et 3,69 m en 2010), elle reprend la plate-forme de Clio II…, elle se veut aussi nettement plus lourde ( 17 % en plus, pas loin de la tonne ) tout en étant entraînée par des moteurs essence nettement plus puissants, de 60 à 133 chevaux, elle succombe également au diesel avec le bloc 1,5 l livrant, 65, 75 et même 85 chevaux !
Malgré un habitacle vaste et polyvalent, une banquette arrière coulissante ou deux sièges individuels arrière ainsi qu’un coffre de plus grandes dimensions, la Twingo II ne rencontre pas le même succès que sa devancière, la faute à un look passe partout qui ne déclenche vraiment pas les passions et ce malgré un important relooking en fin de vie.
Bref, avec même pas un million d’unités au compteur, la production s’arrète au milieu de cette année-là, la Twingo II n’aura « tenu » que 7 ans (le cycle normal de vie d’une voiture, me direz-vous, oui, c’est vrai)…
Dès le début de cette décennie, il faut songer à la remplacer, Twingo III fait l‘objet de toutes les supputations jusqu’au jour, où l’on nous annonce que dans le cadre des accords de coopération avec le groupe allemand Daimler, cette troisième génération sera développée et assemblée en commun avec la future Smart Forfour quatre places…, la version deux places étant toujours fabriquée en France, les nouveaux moteurs essence trois cylindres ( fini le diesel ) proviennent de la banque d’organes du groupe Renault.
Et puis vint le salon de Genève 2014 avec la présentation en « grandes pompes » de cette troisième génération de 3,60 m de long.
Mes premiers commentaires sont assez dubitatifs…, car après avoir inventé la « citadine monovolume », aucun autre constructeur n’avait osé tenter ce pari un peu fou, Renault opère maintenant un revirement à 180°…, de la traction, elle passe à la propulsion avec moteur arrière, une technologie que « l’ancienne régie » maitrisait à merveille (Dauphine, R8, R10), mais que l’on pensait à jamais enfouie dans les tiroirs aux souvenirs.
Mais c’était sans compter avec les accords de coopération passés avec le géant allemand Daimler qui devait renouveler sa Smart et surtout réintroduire une ForFour, quatre portes, quatre places.
Du coup, Renault et Daimler vont se partager les coûts de développement et de fabrication (ce qui fait la joie des comptables ) et dans une moindre mesure celle des ingénieurs qui doivent tout repenser…
Quant aux gens du « Marketing », ils vont devoir s’arracher les cheveux et surtout trouver de nouveaux arguments afin de persuader le public que cette troisième mouture fait nettement mieux que les deux premières…, mettant en évidence le design très attrayant de cette quatre portes avec hayon, le très haut degré de personnalisation, le poste de conduite plutôt ludique, bref, un fameux « coup de jeune » pour une clientèle tout aussi jeune.
Autre performance, le choix des moteurs, uniquement des trois cylindres essence, 900 cm3 turbo de 90 chevaux ou le bloc un litre atmosphérique de 71 chevaux avec dans les deux cas une boîte mécanique 5 rapports…, un moteur pas très accessible, placé sous le coffre qui du coup devient un peu « riquiqui »…, sa contenance de 219 l peut grimper à environ 1000 l en rabattant les sièges arrière mais finie la banquette arrière modulable.
En revanche, une armoire de 2,30 m de long, pas trop haute et surtout pas très large peut être glissée à l’intérieur, du moins en rabattant le dossier du passager avant.
En s’installant à bord et surtout à l’arrière, finie cette impression d’espace comme par le passé, il se dégage une sorte de claustrophobie d’autant que la vue vers l’avant est masquée par les imposants appuie-têtes et que la place pour les jambes est plutôt mesurée…
Voilà pour les premières impressions que je me tardais de vérifier lors d’un essai d’une bonne semaine effectuée avec une version turbo TCe de 90 chevaux, la plus puissante, la plus chère également, 15.350 € ( la gamme démarre à 9.650 € pour une 70 chevaux Hello…, dont l’équipement correspond au minimum syndical (sans direction assistée) avec les quelques options présentes sur la voiture comme le pack sport ( jantes alu de 16 pouces, sellerie mixte tissu/cuir, pédalier en alu), le pack techno (média système, Bluetooth, GPS, radar et caméra de recul ), sans oublier le cool pack (airco automatique, allumage automatique des feux, et détecteur de pluie ), bref, une petite bien équipée mais pas donnée…
Et le coffre avant ?
Il n’y en a pas…, oubliez-le, on ne peut même pas y loger un simple attaché case, il sert uniquement de réceptacle pour le réservoir du lave-glace et du liquide de refroidissement, la batterie et le radiateur…, mais pour l’ouvrir, ce n’est pas évident du tout, laissez cette manœuvre au pompiste ou bien lors d’un entretien périodique…, lors de cette première rencontre, ce n’était pas le coup de foudre, autant l’avouer de suite…, et après cet essai, un peu de patience, chaque chose en son temps…
En 93, Twingo n’avait (pratiquement) pas de concurrente, aujourd’hui Twingo III va avoir du fil retordre avec des rivales qui au niveau de l’habitabilité, de la convivialité font souvent mieux pour moins cher.
Cette nouvelle « citadine » doit en effet composer avec le fameux duo coréen Kia Picanto/Hyundai i10, les triplés du groupe VW, Seat Mii/Skoda Citigo/VW Up, ainsi qu’un autre trio de choc franco-japonais Citroën C1/Peugeot 108 et Toyota Aygo… sans oublier sa demi-sœur Smart ForFour qui ne va pas se contenter de faire de la simple figuration, soyez-en certain…, bref, ce ne sera pas facile…
Et d’emblée de poser la question qui « fâche » : mais pourquoi diable avoir conservé ce nom de Twingo alors que ce nouveau modèle n’a plus grand-chose de commun avec la version originale ?
Comme si VW décidait que la prochaine Golf VIII serait une tout-à-l’arrière mais qu’elle s’appellerait toujours …Golf !
Un non sens… et c’est bien ce qui ne va pas…, il aurait fallu un peu de courage aux dirigeants de Renault pour oser changer de nom, car les qualités indissociables des deux premières Twingo : habitabilité, modularité et le fait de pouvoir déménager mais également transporter quatre adultes de manière très confortable (ainsi que leurs bagages) sur de longues distances…, on ne les retrouve pas sur la Twingo III !
Une nouvelle fois, il fallait oser le changement … et pourquoi pas l’appeler tout simplement : Swingo ?
Cela fait sourire, voyez plutôt les arguments en faveur de cette nouvelle appellation.
Swingo avec un S comme…
– S comme Smart : Cette demi-sœur de Smart Forfour partage avec cette dernière la même architecture, le tout-à-l’arrière, la plate-forme, les moteurs ainsi que les transmissions (en attendant une boîte robotisée à double embrayage 6 rapports), bref, ça reste dans la famille.
– S comme Slovénie : La Twingo III tout comme la Smart ForFour sont assemblées chez Renault Slovénie (c’était déjà le cas pour la Twingo II), sur les mêmes chaînes de fabrication… alors que la Smart ForTwo est toujours fabriquée sur son site historique à Hambach : en France !
– S comme Swing : Pas de cardans aux roues avant, cela permet de « swinguer » et de faire demi-tour dans un mouchoir de poche…, seulement, 8,70 m de diamètre de braquage entre trottoirs, c’est 1,40 m en moins que le modèle précédent, aucune autre citadine ne peut faire aussi bien, à part la Smart.
– S comme style : Le « chef designer » de Renault, Laurens Van den Acker, ainsi que son équipe, n’ont pas fait les choses à moitié, une véritable réussite même si certains voient dans la partie avant très courte une sorte de Fiat 500 à la française…, alors que pour la poupe, la forme du hayon noir fait un peu penser à la R5 Turbo 2, les grosses ailes en moins…, avec maintenant quatre portes, l’accès à toutes les places s’avère nettement plus aisé mais pourquoi ne pas avoir retenu la solution Smart Forfour où les portes arrière s’ouvrent presque à angle droit, sur la Twingo, elles sont assez étroites.
– S comme sécuritaire : Comme les grandes, cette citadine est bien équipée…, avec suffisamment d’airbags, elle peut aussi recevoir en option un système de surveillance de maintien de bande alors que l’ESP intervient très vite dès que l’on aborde une série de virages très rapidement. Ca ralentit la voiture et surtout l’ardeur du conducteur mais dans les ronds-points, on peut en sortir très vite…
– S comme Stabilité : On l’a dit le contrôle de stabilité (ESP) intervient de manière assez préventive, aucun problème dès lors pour inscrire la voiture mais par rapport à la traction précédente, la propulsion n’apporte pas grand-chose en plus au niveau du comportement…, en revanche, grande sensibilité au vent latéral, la tenue de cap n’étant pas le point fort, la faute à cette « mini » plutôt étroite ( 1,66 m ) et haute sur pattes.
– S comme sensations : Avec le bloc de 90 chevaux et des roues de 16 pouces, le confort s’avère assez ferme, mais comme l’auto s’avère plutôt sereine en toutes circonstances, elle peut être mise entre toutes les mains même sur revêtement humide (le comportement sur neige sera à vérifier dès qu’il y en aura)…
– S comme sympa : Sympa à l’extérieur mais également dans l’habitacle…, de la couleur à profusion, au choix, blanc, bleu ou rouge pour le cerclage de la planche de bord et des aérateurs ainsi que les inserts sur le volant, les couleurs du drapeau français, un toit ouvrant électrique en toile est également proposé, tout comme au bon vieux temps, 450 € de supplément…, nombreux espaces de rangement en tous genres, le sac « baroudeur » faisant office de boîte à gants, les plastiques durs font cependant bonne impression.
– S comme sexy : Pour la rendre encore pus sexy, Renault propose pas mal d’équipements de personnalisation…, cela va des stickers de carrosseries aux décors intérieurs ou extérieurs comme les coques de rétros de couleurs sans oublier des barres toit…, de quoi la différencier de celle du voisin.
– S comme suralimentation : Le bloc 900 cm3 turbo de 90 chevaux et 135 Nm déjà bien connu chez Renault/Dacia convient fort bien à cette Mini qui dépasse tout juste la barre de la tonne à la pesée…, bruit de fonctionnement assez amusant de ce « trois pattes » plutôt vaillant et performant dès les plus basses rotations, très bonnes reprises mais à condition de rétrograder afin de lui redonner du « peps »… et là, il n’en manque pas…, capable de pointer à plus de 160 km /h, ce trois cylindres donne « de la voix » dès 90 km/h, le sonomètre s’affole un peu, le bruit de fonctionnement étant nettement plus important que dans une Clio…, à l’avant, ça va mais pour les occupants de la banquette arrière, cette sonorité ambiante n’est pas toujours évidente.
– S comme Stop and Start : Grâce à ce dispositif pas trop dérangeant, le trois cylindres permet de limiter la consommation et surtout de s’éteindre dans les files ou aux feux rouges…, comptez néanmoins sur une dépense moyenne de 6,5 l/100 km, un peu plus de 500 km d’autonomie avec le réservoir de 35 litres.
– S comme spacieuse : Là, il y a à « boire et à manger»…, à l’avant, aucun problème, la petite se montre très accueillante… mais pour les places arrière, ce n’est pas évident…., plus de banquette arrière coulissante mais des dossiers qui s’inclinent (c’est mieux que rien même si ce dispositif réduit quelque peu la capacité du coffre à bagages dont le seuil assez élevé favorise les opérations de chargement et de déchargement)…, pour de longues étapes, ne demandez pas à vos voisins d’occuper les places arrière, ils risquent vous en vouloir à tout jamais…, c’est une citadine, ne l’oublions pas, même si avec son bloc de 90 chevaux, elle devient une « petite » routière…, quant au coffre, prière de ne pas y entreposer des surgelés et autres produits frais, la chaleur du moteur ne leur convient pas …
– S comme service : Un moteur arrière, cela engendre davantage de contrainte…, rien que pour contrôler le niveau d’huile, cela impose de vider le coffre, de dévisser la plaque de protection du moteur pour enfin découvrir la mécanique pas très accessible…, une jauge à huile au tableau de bord n’aurait pas été superflue.
– S comme Sport : Une Twingo sport ou RS est-elle envisageable ? Le prototype Twin Run présenté en 2013 esquissait dans les grandes lignes la future Twingo III, mais avec un V6 de 320 chevaux dans le dos…, de quoi donner des idées… et pourquoi pas avec le trois cylindres boosté à 110/120 chevaux tout en l’accouplant à la nouvelle boîte robotisée 6 rapports ? Mais prière de durcir un peu plus les suspensions déjà assez fermes, d’abaisser le centre de gravité et de prévoir des enveloppes encore plus généreuses (de 17 pouces par exemple).
A l’heure du verdict, je ne vais pas m’inspirer de la chanson de Michel Sardou à propos du paquebot France « Ne m’appelez plus jamais France, la France, elle m’a laissé tomber… ».
Renault n’a pas « laissé tomber Twingo »…, il aurait sans doute mieux valu tourner la page…, mais pour les responsables du marketing, pas question d’abandonner ce nom mythique…, vous savez ce que j’en pense…
Malgré ses indéniables qualités, son style, sa fraicheur, ses nombreuses possibilités de personnalisation, ses moteurs trois cylindres bien adaptés, la Twingo III va devoir batailler « ferme »…, d’autant que la concurrence, déjà bien étoffée, féroce et affutée, l’attend en sortie de virage…, en outre, le réseau Renault doit absolument convaincre une toute autre clientèle, jeune et branchée, à propos des qualités de cette « citadine, un rien péri-urbaine »…, car les anciens, ceux qui ne juraient que par les versions précédentes (surtout la première) ne vont plus retrouver cette habitabilité… et surtout cette modularité, qui faisaient le succès des premières Twingo…
Marcel PIROTTE pour www.GatsbyOnline.com
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