Un anachorète, une andouillette et une Lamborghini sur le port de Saint-Tropez…
Comment cela a-t-il commencé déjà ?
Ah oui, une partie de boule matinale, Place des Lices à Saint-Tropez, en plein cagnard malgré les platanes…, deux jolies en jupettes, une discussion sur l’utilité des petites culottes et des strings, les cravates et les notaires, c’est à dire : les cravates de notaires…, ça aide à philosopher du genre : “La femme est un homme comme les autres… mais sans les couilles”, une sentence sexiste qui a eu le don de réveiller le vieux cénobite qui sommeille dans mon moi-profond…
Être une femme dans un monde d’hommes n’est pas quelque chose d’évident, c’est dur d’être une femme, sauf si elle possède deux avantages mammaires indiscutables…, tout le monde le sait, une belle paire de seins est une bénédiction pour les femmes qui en sont pourvues…, une belle paire de pêches permet de décrocher un boulot peinard, de boire de bons champagnes, de bouffer dans les meilleurs resto, dont les portes s’ouvrent toutes seules, comme par magie…, bref, une belle paire de miches sur la planche, ça ouvre des portes, ça attire les regards concupiscents quand ils sont masculins, envieux quand ils sont féminins…, les deux Roberts au balcon et la moitié de l’humanité se met au garde-à-vous, prête à servir…
Quand la sécu remboursera les implants mammaires, tous les hommes, sans exception, se changeront en gentlemen…, devant une femme équipée de deux obus et gaulée comme un tank, tous les hommes seront plongés dans une béatitude servile…, car le pouvoir du décolleté opulent est explosif…, les guerres cesseront, les tensions du quotidien s’en trouveront grandement apaisées, la paix sociale sera établie, les Israéliens et les palestiniens s’aimeront d’un amour véritable, les terroristes succomberont aux melons, le Bonheur National Brut augmentera à mesure que les poitrines s’appesantiront, les capitaines d’industries financeront ce bonheur et le monde tournera plus rond…, notre Président devrait prendre des mesures couillues en ce sens…, du pain, du vin et des gros seins… et faire gonfler le capital mammaire de toutes les Françaises, avec une telle mesure, il ne restera plus aux hommes qu’à pisser leur amertume, ranger leur bite, claquer comme des gibbon, serrer les miches et valser.
Après cette brillante démonstration, je suis certain que vous qui me lisez avec un air hébété et un regard absent, entre Homer Simpson, Enrico Maçias sous acide et une shampouineuse sous prosax vous vous disez : “C’est pas la taille ki compte,c’est comment kon s’en sert”…, mais cette vérité, même aussi mal argumentée, ne nous y trompons pas, n’en est pas moins une.
Bref, pour faire bref; brièvement…, aujourd’hui, je vais m’attaquer à un problème dur et épineux, pas les cactus, pas mon-ex, encore moins la libido des mâles Tropéziens…, mais les restaurants “pour touristes” de Saint-Tropez devant lesquels quelques friqués hurluberlus viennent frimer dans des bagnoles très chères…, l’andouillette est lancée dans la bagarre…
Quand je mets un pied (généralement les deux), dans un de ces restos…, ce qui me f… les miquettes, c’est de mal manger, car très souvent ça se passe mal, avec, en sus, l’angoissante perspective de plonger dans l’abîme d’une carte aux tarifs similaires aux Palaces de Dubaï…, tout en me noyant dans le médiocre…, avec la désagréable impression : qu’on me fouette avec des orties fraîches : qu’on m’oblige à mâcher “des choses pré-bouillies” et boire de l’urine de hyène en me faisant écouter en boucle l’intégrale d’un chanteur polonais ex-migrant du Sénégal qui confond “gueuler avec chanter”… tandis qu’en feu d’artifice final, ma carte de crédit se vide de sa substance vitale, car avec les restrictions légales et compte-tenu des tarifs pratiqués, le minimum de cash autorisé est insuffisant pour régler la note…
Le problème avec l’inconnu, c’est qu’on le connait très mal.
L’autre soir, j’avais envie d’un truc drôle, léger, pétillant.
Ok, ai-je opiné du chef, mais quoi ?
Je me suis dit qu’une andouillette présentée au menu au prix d’un plein d’essence d’une Lamborghini, ce serait bien.
Il y avait justement une Lamborghini sur le port, amenée par le larbin de sévices du propriétaire (ou locataire à la semaine) d’un yacht imposant devant lequel les touristes s’agglutinaient comme des mouches… en attente de son propriétaire (peut-être locataire saisonnier) et de “sa blonde”…
Pour certains, traumatisés par leurs phobies et terreurs infantiles, tout comme la Lamborghini, cette chose qu’est l’andouillette, grasse et oblongue qui baigne dans sa sauce, l’odeur, la forme…, c’est sûr, c’est de la merde.
Pour la plouquesque, la Lamborgini tout comme l’andouillette, c’est comme bouffer un cul, mais sale et sans prendre de plaisir…, aucun intérêt.., pourtant, on peut admirer l’anatomie de la bête, les détails, le plissé des boyaux, la belle couleur blanc rosé de la chair.
S’il est basique de situer l’origine de la Lamborghini, il est tout aussi difficile de situer l’origine de son propriétaire (ou de son loueur occasionnel) et c’est pareil pour l’andouillette.
On sait qu’en 1475 apparut dans la capitale historique de la Champagne la corporation des charcutiers, qui détenait le privilège du porc cuit…, certaines anecdotes attestent l’existence de l’andouillette, présente à la table des soldats de troupes comme à celle de François Ier…, quant à son nom, est-il rattaché à celui de l’abbé Saint-Loup, nommé Guillaume Andouillette, qui vécut au XV e siècle ?
Nul ne peut l’affirmer…, la recette de l’andouillette constitue un mystère, bien que l’on en connaisse les composants : chaudins et estomacs de porc coupés en lamelles et embossés (introduits) sous boyau de porc…, après ajout de sel, poivre et assaisonnement (herbes et épices), l’andouillette est cuite 5 heures dans un court-bouillon aux légumes.
La Lamborghini est par ailleurs comme une andouillette qui pue du cul et qu’on conduit avec un tablier de sapeur…, les tripes fumantes… et un rognon madère dans le cul qui pétarade à tout va…
La Lamborghini, comme l’andouillette, c’est comme une petite bouffée de vieux prouts, qu’on a gardé, pour le soir, à la fraiche, au-dessus des jonques…
La réaction basique de mon organisme après avoir subi le spectacle grotesque de cette Lamborghini tout en mâchant l’andouillette commandée (et mon Blacky était en plein accord avec moi vu que je lui ai laissé la moitié du plat)…, est que mon estomac s’est contracté, ma langue s’est cintrée, mon sourcil droit s’est froncé et que mes yeux se sont exorbités…, ça aurait pu être très dangereux, même si j’ai des années d’entrainement intensif…, bref, j’ai pensé : “Bof, c’est la même chose que chez Machin, mais en pire, toutes les médiocrités se ressemblent”…
Il y a plusieurs types de cartes des menus et des vins dans ces restaurants “à touristes”…, celles qui veulent impressionner, longues comme un jour sans pet, qui indiquent parfois des références inconnues et d’autres, bien trop connues, ce qui donne envie de fuir comme un anapeste…, des cartes truffées de bidules surfacturés de grandes surfaces…, des cartes qui ne proposent que des plats vus et revus… avec un livre dédicacé servant de carte des vins ou surnagent la présentation de quelques bouteilles qui se battent pour exister, sans références, sans vignerons, anonymes, orphelines.
Il y a également des cartes tellement pauvres qu’à côté la jungle de Nice-Nord peut paraitre accueillante…., il y a également des cartes bourrées de fautes d’orthographe, d’appellation, de classement, de goût… et pire que tout, les cartes muettes, sans queue ni tête, le désert des tartares…
Personnellement, c’est un grand mystère que de côtoyer des pros, non pas de la bonne chair, mais de la bonne chère (au deux sens du terme), qui attachent tellement peu d’importance au goût, à l’assiette, à la présentation, aux couleurs, voire même à l’ambiance musicale, qu’on se demande ce qu’on est venu faire dans ce fourbi…
Alors que je râlais ferme concernant l’andouillette…, le restaurateur (irresponsable) que j’avais mandé de venir s’expliquer, m’a dit : “De toute façon, la plupart des clients n’y connaissent rien. Comment voulez-vous que les étudiants qui servent fassent la différence entre des touristes d’un jour et des natifs du coin, ils ne peuvent donc pas prévenir le cuisto que le touriste qui commande n’en est pas un, d’ailleurs, perso, après saison je retourne à Lille”…
Soyons prosaïques, la plus belle assiette du monde ne nous sauvera pas d’une vinasse, servie trop chaud, dans un petit ballon de bistrot, par une serveuse qui a ouvert plus de braguettes que de grands crus, mais capable de vendre une paire de lunettes sur roulette à un aveugle paralytique…
Pourquoi je vous dis tout ça ?
Diabolicum, je crache encore des copeaux quarante-huit heures après…, bref, sans tambour, j’ai de plus en plus tendance à fuir avec ma trompette… et de devenir anachorète…, menant une vie ascétique consacrée à la prière et à l’Eucharistie… avec la volonté de me rapprocher des martyrs…