Un dimanche au château Sainte-Roseline…
Après le désastre et le misérabilisme des irresponsables du dimanche “Vintage” de Solliès Pont amplement décrit dans une chronique voisine, malheureusement assassine…, Valérie, Blacky et moi avons décidé de changer d’atmosphère, d’en revenir au bonheur de la gastronomie française en lieu des hamburgers gras et coulant…, à la joie de déguster un excellent vin plutôt que du Coca-Cola chaud et non pétillant… et de goûter au plaisir du doux ronronnement feutré de belles automobiles classieuses dont les propriétaires s’adonnaient aux joies d’un concours d’élégance…
Au début du XXe siècle, la France disposait de deux savoir-faire uniques et incontestés, la carrosserie automobile et la haute couture, elles furent judicieusement associées en début des années ’20, offrant aux constructeurs automobiles et aux grands couturiers l’opportunité de présenter leurs derniers modèles.
On venait de loin pour assister à ces concours et on ne logeait pas en camping, mais dans de somptueux hôtels que proposaient les organisateurs.., ainsi, se sont côtoyées des personnalités du monde des arts, de l’automobile, de la mode et de l’aristocratie, diversifiant l’offre culturelle du siècle passé très tournée vers la musique classique et de proposer une autre vision de la Belle Epoque, c’était ce qui allait devenir l’âge d’or des concours d’élégance qui allaient par la suite jouer le rôle de passeur de mémoire entre histoire, patrimoine et culture.
Autrefois, dans les châteaux, toute la vie de la cour tournait autour du châtelain…, celui-ci donnait des ordres que ses valets et autres serviteurs se devaient d’exécuter pour assurer son bien-être et son confort permanents…, sa richesse lui donnait donc le pouvoir, mais également l’aisance matérielle…, aujourd’hui, on dit d’une personne qu’elle mène la vie de château lorsqu’elle semble vivre aisément et facilement.
Au Château règne l’attente, aux fenêtres, des regards, des gestes suspendus, immobiles…, dans les couloirs, des ombres passent, milles langues résonnent…, le temps peut s’y filer en invitant à l’infinité des possibles.
– Comment trouver pour chacun la singularité d’un récit qui se déroule un dimanche de fin avril 2019 en Provence ?
– Comment vous mouvoir au-delà des photographies et passer ensemble un pacte de fiction, de jeu, de folie ?
– Comment vous pousser à prendre une certaine distance avec vous-même, vos désirs, vos rêves, vos illusions ?
– Comment peupler votre esprit, peu à peu, d’une douce princesse, d’un roi magnanime, de gens aimables…, sans que des fantômes hantant les couloirs, viennent vous tourmenter l’âme ?…
La vie de château est un véritable art de vivre, typiquement français, qui a toujours su séduire toutes les cultures, d’Est en Ouest, de l’Atlantique jusqu’à l’Oural…, le château français est synonyme d’élégance et d’intemporalité…, ce ne serait donc pas un hasard si le château Louis XIV situé à Louveciennes (Yvelines) a été acheté pour 275 millions d’euros par le prince héritier d’Arabie Saoudite…, à ce jour, il s’agit de l’acquisition la plus spectaculaire sur le sol français…
– “Quand on acquiert un château, on acquiert bien plus qu’une propriété, on adopte un style de vie, un espace à vivre avec des jardins, savamment dessinés selon des courbes parfaites ou des exploitations viticoles”, m’a-t-il dit en réponse.
Pour les acheteurs venus du monde entier, acquérir un château, c’est adopter une manière d’habiter, plus originale, souvent décalée mais toujours grandiose, tout en appréciant les espaces, tant intérieurs qu’extérieurs où depuis un salon d’honneur on peut contempler l’entièreté d’une région, ses couleurs et son intime beauté.
– “Adopter un château, c’est adopter l’Histoire de France ! Si les murs ont toujours une histoire, ceux des châteaux en ont des siècles, souvent rocambolesques de Rois, de Reines ou même de favorites. Choisir un château c’est aussi choisir le style de ses précédents occupants ! On aime un Château avec la même tendresse qu’on peut aimer ses anciens propriétaires. L’architecture ne laisse jamais rien au hasard, tout à un sens”…!
– “Oui, certes, Messire Prince héritier d’Arabie Saoudite, la France est le pays des châteaux, on en compte 6.500 qui sont classés, la plupart appartiennent à des particuliers qui se battent, chaque jour, pour les maintenir en état”…
– “Qu’y puis-je mon ami si leur vie de château relève du sacerdoce ?”…
– “Qu’il s’agisse de petits ou de grands édifices, d’un coup de cœur ou d’un héritage, ne vous tourmentez pas, tous consacrent leur vie à entretenir ces lieux d’exception…, pas de vacances, une vie de famille compliquée, des tracas quotidiens”…
– “Qu’importe, mon ami, ils vivent le plaisir de savourer la vie de château” !…
Si les Français sont toujours autant attachés à leur patrimoine, c’est qu’ils aiment leurs Châteaux en bord de Loire, en région parisienne ou en terre provençale…, mais la vie de château n’est plus exclusivement française, elle est aujourd’hui russe, américaine ou chinoise, les acquéreurs étrangers rythment “la vie de château” en adoptant les plus belles propriétés, d’Est en Ouest, du Nord au sud, en entreprenant souvent d’importants travaux pour redonner à ces écrins d’histoire leurs véritables lettres de noblesse.
Par chance, il y en a pour tous les goûts, certains préfèreront la rusticité médiévale et les longs murs infranchissables donnant l’impression de forteresses où toute intimité est préservée des regards…, d’autres préfèreront le style Renaissance pour l’élégance, le raffinement et les formes arrondies qui illustrent à merveille l’art de vivre à la française.
Le Château Sainte Roseline est idéalement situé, à trente minutes de la baie de Saint-Tropez et de la Croisette de Cannes, des Gorges du Verdon ou d’Aix-en-Provence, sur un même terroir millénaire, l’art ancien et contemporain… et l’art du vin s’y épanouissent en harmonie.
Tout a commencé autour d’une source… et l’on connaît, à travers les romans de Giono et de Pagnol, l’importance de l’eau en Provence…, la source abondante de ce site a en effet conduit au milieu du Xème siècle un ermite dénommé ROUBAUD à s’y retirer.
Petit à petit, d’un simple oratoire, une abbaye voit le jour et prend le nom de la CELLE-ROUBAUD…, Roseline, fille du Marquis de Villeneuve, Seigneur des Arcs, fut la Mère Prieure de l’Abbaye de 1300 à 1329…, très pieuse et généreuse, elle marqua fortement la population locale et c’est tout naturellement qu’on donna son nom au lieu…, elle fut sanctifiée au XIX siècle et son corps repose aujourd’hui sous une châsse de cristal dans la chapelle communale.
Au XIV siècle, le site devint un des premiers vignobles de Provence, créé à la même époque que celui du Châteauneuf du Pape.., sous l’impulsion de l’évêque de Fréjus et futur Jean XXII, Pape en Avignon…, il a toujours gardé son rôle de leader puisque Henri de Rasque de Laval, précédent propriétaire, fut le premier Président du Syndicat des Vignerons du Var.
En 1994, Bernard TEILLAUD reprend en mains les destinées de cette propriété avec pour objectif d’en faire un des fleurons de la viticulture méridionale et un haut lieu artistique…, pour mener à bien la rénovation complète de l’abbaye et afin de préserver la noblesse des lieux, Bernard TEILLAUD fait appel à l’architecte Jean-Michel Wilmotte…, sa mission étant de donner au Château une nouvelle distribution intérieure tout en respectant les contraintes de l’histoire.
En 2007, sa fille Aurélie BERTIN TEILLAUD, reprend la destinée de cette propriété, accompagnée par Christophe BERNARD…, ils ont pour objectif d’investir au maximum sur la qualité et la recherche d’une personnalité différente et authentique pour chacun des vins du domaine…, de plain-pied dans la culture de l’esprit et de la vigne, ce lieu est ainsi une invitation au recueillement et à la contemplation, mais aussi à la dégustation et à la convivialité autour d’une palette extrêmement raffinée de Côtes de Provence Crus Classés rouges, rosés et blancs.
Le Cloître du XIIème siècle déploie de belles ogives mi-gothiques, mi romanes…, au pied d’un des piliers décorés de nombreux rosiers, subsiste un pied de Carignan de près de cent quarante ans.., une somptueuse Allée de platanes bicentenaires conduit au parc privé où un vaste bassin bordé de séquoias laisse bruire l’eau de la source qui coule en cascade jusqu’à leurs racines géantes… et devant la façade du Château s’imposent deux gigantesques platanes du XVIIIè siècle et une pièce d’eau ovale ceinte par des haies de buis qui dessinent les motifs d’un jardin à la française.
Voilà pour le décor du Concours d’élégance…, ne reste pour vous qu’à faire le lien entre le texte et les photographies, imaginer et se laisser porter sous le soleil de fin avril.
Pour nous, c’est le retour à Saint-Tropez…