Une soirée pourrie, j’ai le choix entre du foot et du foot, même pas une petite confession intime à me mettre sous la dent… comme chaque soir, j’ai un besoin consumériste d’images de gens en souffrance quasi boulimique, alors, je fais quoi ?
Je regarde TF1, le journal, c’est bien, un chouette reportage sur un centre de cancérologie, je regarde les images au ralenti de gens en train de mourir… bref je me démerde pour me remonter le moral.
J’ai calculé qu’en moyenne, pour être à peu près normal, sans avaler plus de 4 antidépresseurs j’entends, il me faut 47 morts, 3,6 cancers et un bel accident de la circulation, de préférence avec des jeunes et de l’alcool. Si on ajoute quelques couples de cas sociaux obligés d’acheter des yaourts périmés pour leurs gosses victime de pédophilie et une centaine de licenciement, là, on approche du méga pied… j’ai aussi une autre manière d’aller mieux : écrire des autos-conneries…
J’ai possédé une VW Cox Pick-Up Roadster en d’autres-temps, elle était jaune, pick-up, roadster… elle roulait comme une VW Cox, tenait toute la route et freinait au hasard…Elle perdait ses enjoliveurs sur les cassis, dos-d’ânes, gendarmes couchés et pavés… décapotée on n’entendait que l’échappement… capotée on ne voyait plus rien… s’il pleuvait, elle prenait l’eau… ne manquait qu’un orchestre dans la benne, façon Kustorica (Underground) pour profiter de la folie…
Qu’en dire d’autre, sinon rêver en cauchemardant d’un texte surréaliste, comme elle…Composer une histoire pour n’en rien dire, ou pour en venir a autre chose, ce dont je pensais en roulant à son volant…Les “zègles” de la route reviennent de l’enfer pour transformer les rampants en carpettes, carpaccio à tous les carrefours, pleins feux sur le bitume…, vive le cocktail essence-kéro nitreux pour effacer les miasmes du diesel colza !
Bottes de cuir renforcées titane, tee-shirt noir iron maiden, pantalon cuir, lunettes noires, casque rond, tatouages, piercings, cheveux longs, nana même look mais en plus dénudée, bande de copains aussi déjantés, et c’est parti pour semer la terreur et la désolation.
La horde sauvage des VéWétistes en Pick-up Cabrio bouffeurs de max fous… revient pour régler ses comptes avec les radars automatiques et les empêcheurs de rouler librement… derrière elle, les quat-quatreux, les truckers et les roadsters comptent bien éparpiller les restes.
On n’entend plus les moteurs, les pneus font cinquante mille kilomètres et les freins sans amiante ne chauffent même pas.
La route est devenue un long fleuve tranquille sur lequel on se déplace en fauteuil, avec une ceinture de sécurité, un coussin d’air, une direction assistée, un régulateur de vitesse, un ordinateur de bord, un radar anti-collision, et une chaîne hi-fi pour écouter les mièvreries tévé…
On roule avec un litre d’eau, deux cents grammes de sucre et quatre frites végétaline au cent tout en payant une taxe au kilomètre à l’état puisqu’on ne peut plus taxer le carburant… deux km/h de trop, une bière, ne pas avoir branché le pilote automatique, et c’est l’amende, l’emprisonnement, la perte des droits civiques, de son boulot et la confiscation du véhicule…, obligé ensuite d’utiliser les transports en commun avec le quatrième âge… et sans dire de gros-mots !
Quant à la bagnole, on paye une assurance pour les frais médicaux, mais le dégonflage des quarante-huit airbags au moindre choc est à notre charge… pour la bagatelle de dix ans d’économies, on a le droit de rouler à trente à l’heure dans une voiture jetable biodégradable dès le premier jour… mais on a la clim et on règle la vitesse de l’air sur son visage.
Sortis des âges sombres des premiers temps de la circulation, ils viennent venger leurs frères d’aujourd’hui, obligés de regarder de vieux films d’action bien truqués dans des fauteuils de simulation comme certains regardent des films X en cachette au lieu de proposer un truc bien sympa à Germaine…
Les moteurs rugissent, l’huile chaude suinte, l’air vrombit autour d’eux et remue les tripes… sous les capots, les pompes de reprise aspirent bruyamment leur ration de jaja… les culasses rougissent, les pistons cognent, les carrosseries vibrent, les freins couinent, les pneus hurlent… des vapeurs noirâtres troublent l’horizon derrière eux.
La couleur autorisée pour les particuliers est le jaune canari, c’est visible de loin, c’est rassurant… le châssis est réduit à sa plus simple expression et de nombreux silent-blocs en caoutchouc font oublier la présence du moteur à dépression nerveuse.
Ces rebelles à l’Ordre établi depuis deux-mille-dix, sont deux générations de veaux consommateurs encadrés par des gorilles… et la diffusion neuro-médias ne peut avoir engendré cette marée contestataire.
Les voitures essaient de fuir mais le demi-tour est interdit par d’autres fuyards…, certains préfèrent donc les profonds fossés qui bordent la route de chaque côté et qui n’offrent aucune échappatoire par les champs environnants aux lances perforatrices du premier rang, les conducteurs restent alors bloqués par leur ceinture et les airbags… ils assistent, effarés, au spectacle dantesque qui est en train de se monter devant leurs yeux incrédules et apeurés, car, dans l’autre sens, surmontés de gyrophares, les blindés gris des forces de sécurité écrasent sans hésitation les particuliers qui les gênent pour se porter au plus vite au contact des réfractaires…
Au sommet de chaque tourelle, un sous-officier scrute l’horizon avec ses jumelles, protégé derrière son bouclier en plexiglas… les blindés sont à deux de front et leur colonne est ininterrompue sur un bon kilomètre… entre les grosses roues, deux sinistres aiguilles noires, les canons de mitrailleuse 12,7 qui ressortent de la caisse par une sombre fente.
Les deux masses se rapprochent… à deux-cents mètres l’une de l’autre, les armes automatiques et les pots d’échappement crachent le feu… les deux premiers rangs sont décimés, le troisième rang s’écrase sur les deux premiers blindés et parvient à les stopper… puis les fourmis noires descendent des véhicules pour monter à l’assaut des pachydermes…
Les premiers rangs de blindés n’ont pas le temps de réagir que déjà leurs occupants sont tués avec des grenades lancées par les écoutilles… les roues sont bloquées par des X d’aciers en trois dimensions disposés au sol qui pénètrent dans le pneu, puis se coincent entre celui-ci et la carrosserie, ou entre deux pneus… Marre, ras-le bol… j’en arrête là mon rêve cauchemardé que mon cerveau construit en suite de la lobotomisation insidieuse des merdias…
À chaque seconde, nous sommes bombardés d’informations pour nous manipuler, ou du moins nous influencer, car c’est le phénomène de masse qui est recherché… vous savez bien que la publicité joue sur des “ressorts” du subconscient en plus du message avoué… elle joue aussi sur la frustration si on n’achète pas le produit présenté.
La publicité est partout… mais c’est à la télévision qu’elle est le plus agressive… il y a aussi la grand-messe des informations qui nous influence sur des faits réels… la personne peu avertie y croit dans le sens souhaité par le pouvoir et devient un vecteur du système biaisé auprès de ses proches, de ses contacts.
Celui qui doute peut trouver de l’assurance dans l’opinion des autres… mais souvent, les autres n’ont ni douté, ni réfléchi et ressortent un raisonnement primaire sur la base du peu d’éléments ressassés un grand nombre de fois dans la même journée par des vecteurs différents.
La pluralité de la presse s’est estompée sur l’essentiel… la concurrence ne porte plus que sur le choix des hommes de paille qui font une certaine actualité people ou politique… mais, les conflits qui déchirent certaines populations sur le globe sont mis en scène par ailleurs pour servir une vérité officielle qui nous désigne le mal, nous terrifie dans nos chaumières et nous rassure tout en cadenassant nos cœurs, nos maisons et en laissant les clés aux dirigeants.
Il ne nous reste donc qu’à consommer, au prix qu’ils veulent, des produits que nous pouvons acheter avec le fruit de notre travail… mais ces produits sont périssables et nous devons toujours travailler pour les remplacer. Le gaspillage de temps, d’argent, de matières premières profite aux élites qui dirigent, vendent, organisent et nous travaillons plus pour consommer de plus en plus de virtuel et du pas cher produit industriellement. Le citoyen en général, l’automobiliste en particulier est devenu une vache à lait à laquelle on demande en plus d’être une bête de somme.
Les vêtements ne sont pas aussi résistants qu’avant, les fruits et légumes sont gorgés d’insecticides et poussent sur le lisier de pauvres porcs piqués aux hormones… la qualité baisse plus vite que les prix et les marges pour les négociants (et non les petits producteurs) augmentent…
On a supprimé les grands auteurs classiques, les problèmes de philosophie afin que les gens soient culturellement pauvres… ainsi un américain obéira aux mêmes ressorts qu’un français ou un russe… il se passionnera pour du football ou du tennis ou du base-ball au lieu de s’intéresser aux fondements de la société ou à la politique… ainsi, il sera manœuvrable par les industriels qui veulent le faire travailler et consommer, aux politiques qui veulent le diriger et aux religions qui se font une sacrée concurrence… Les gouvernements s’attaquent aux programmes scolaires pour faire des gens compétents dans leur futur travail, mais surtout peu curieux et pas critiques…
C’est pourtant sous vos yeux… votre voiture, qui se jette au bout de dix ans, alors qu’elle passe la majeure partie de son temps dans un garage ou sur un parking… vous avez pourtant payé un an de salaire pour l’avoir, et vous dépensez en carburant, assurance, entretien, pneus… plus d’un mois de salaire par an…
Puis votre maison, dont les intérêts du crédit sont à peine inférieurs chaque mois à ce que vous paieriez en location… et pourtant, vous y êtes à peine dix heures par jour, et vous passez vos week-end à l’entretenir alors que vous y dormez les trois quarts du temps.
Et le pire, la musique… si vous écoutez les radios ou la télévision, vous subissez les goûts du plus grand nombre ou les nouveautés qu’on veut vous faire acheter, malgré leur médiocrité… payé au smic, vous devez travailler deux heures et demie pour vous acheter le droit d’écouter douze titres de trois minutes trente au maximum… et encore, bien chanceux si les douze titres vous plaisent.
Tous les objets que vous pensez indispensables, que vous n’utilisez en fait que quelques heures par an et que vous devez jeter au moindre dysfonctionnement car la réparation coûte plus cher que l’achat, entre le déplacement, la main-d’œuvre et le prix des pièces détachées.
Si vous n’achetez pas les douze titres sur une galette, vous devez les télécharger sur le Net, et au détail, ils sont plus chers, farcis de DRM et à la merci du moindre effacement accidentel alors qu’ils ont un nombre négligeable de copies sur support numérique risqué.
De plus, vous ne pouvez pas les transférer de l’ordinateur vers votre chaîne hi-fi… la musique gratuite est coupée par la pub…, vous ne pouvez pas vous reposer sans qu’on bouscule votre subconscient pour une marque de lessive ou la dernière stupidité à la mode… pffffffffff !
Une phrase de Vladimir Jankélévitch gravée dans un marbre pas encore totalement froid, l’étranger de Camus qui s’excuse de vouloir vivre et qui fait la manche dans la rue, un rendez-vous manqué avec Swan, le temps qui passe, les sondages bidonnés et bidonnants d’une future élection pestilentielle, un petit politicien déguisé en nain de jardin se prenant pour le géant Cronos regardant une Rolex en panne sèche, un islamiste qui joue de la scie musicale, un montreur d’ours volubile qui se gratte d’entre-jambe en bavardant avec un Raspoutine d’opéra, un insignifiant long comme un jour sans vin !
Des cacahouètes sur un comptoir en étain, un chasse spleen en pleine confusion, un messie qui plante un péno dans les cages à miel de Ramirez, un névropathe aveugle qui pose un lapin à un chinois coiffé d’un pancake au citron…
Un innocent cardinal qui danse sur un Snuff movie, une bulle du pape qui explose en vol, l’ignorance crasse dans les ovaires d’une ménagère de moins de 50 ans, la garde partagée des grands concepts de la psychologie clinique, l’illusion et la dérision comme outils de destruction massive… du plus profond de ma dernière jonction cérébrale, je rêve…
Michel Onfray qui enjambe Bombay en imitant Michel Leeb qui imite un gougeon, un contrôleur de gestion qui se parfume à la bière de noël, le trou du cul du monde qui fait face à l’origine du monde…
J’ai bien essayé de comprendre, de débroussailler les premiers rayonnages, mais je n’ai pas encore tout exploré, le travail est titanesque…
Elles sont bien noires, les pensées des nuits blanches, le sommeil n’est jamais un lieu sûr… et encore, ce n’est qu’une infime partie de mon patrimoine cliniquement transmissible…
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