Cannibal Holocaust…
Il y a quelques jours, j’avais voulu célébrer la fin de ma trilogie “Mes aventures en Géorgie” en regardant un film de l’Est : Nightwatch…
Je dois être dans une période particulière puisque le fait de critiquer Bernard Henry Levy dans la partie 1 ajouté au souvenir de la mort plus ou moins récente de Claude Levi-Strauss, me prit l’envie de regarder Cannibal Holocaust.
Le grand homme se serait certainement bien passé de cet hommage puisqu’il est au cinéma ce que Marc Levy est à la littérature.
Toutefois, s’étant déjà rendu en Amazonie à la rencontre des tribus indigènes, il aurait pu reconnaître un ou deux figurants avant qu’ils ne trépassent sous l’effet conjugué de l’occidentalisation de leur comportement et d’un bon coup de pioche dans la gueule.
Quel illustre bonhomme tout de même, ce Lévi-Strauss !
Quelle intelligence admirable !
Je l’écoutais hier dans la folie de rétrospectives télévisées tardives et malgré mon incompréhension totale face à ce qu’il racontait, je n’avais pas l’habituel sentiment de culpabilité que tout être normalement constitué éprouve devant son poste de TV allumé.
Dire que je ne retiens de Tristes Tropiques que les étuis péniens plus ou moins sophistiqués des Bororos…
Mais foin de ces émois et de la découverte que ma sexualité pouvait être ambigüe, je voulais vous entretenir d’un des plus gros scandales de l’histoire du cinéma : Cannibal Holocaust, la version non censurée de la précédente version non censurée.
Le film est sorti en France le 21 avril 1981, juste avant l’élection de François Mitterrand comme président de la république.
Il n’y a probablement aucun lien entre les deux événements si ce n’est l’attachement de Jacques Chirac à l’art primitif.
Cannibal Holocaust arrivait en France auréolé d’un parfum de scandale savamment entretenu par une rumeur grandissante de meurtres d’acteurs devant la caméra.
Même si le réalisateur, Ruggero Deodato, réussit à prouver son innocence, le film ne se départira jamais d’une suspicion de snuff movie qui fait encore son succès.
Il faut dire que la mise en abyme est particulièrement soignée, de la réalisation caméra à l’épaule au recrutement d’autochtones bariolés et parfois bien membrés, pour la figuration.
N’était-ce le casting issu tout droit d’un porno graveleux des années ’70, ainsi que l’outrance charcutière de certaines séquences, on se croirait véritablement plongé dans un documentaire sur les tribus cannibales et incestueuses.
L’histoire se découpe en deux parties, la première consacrée à une expédition en charge de retrouver les traces d’un groupe de reporters disparus dans la jungle, la seconde au visionnage des rushs réalisés par ce même groupe.
Evidemment ce visionnage donne les clés de leur disparition, émasculation, décapitation, défénestration, constipation et ronpetitpatafion.
Le tout montré avec force détails, l’allusion étant a piori un concept aussi étranger au bon vieux Ruggero que la nuance à Michael Bay.
On assistera donc à la torture d’une tortue, aux viols répétés et répétitifs d’orifices divers et variés, à un empalement anussolabiale de toute beauté et à quelques dîners “dont vous êtes le héros”.
On notera d’ailleurs à ce sujet que les primitifs préfèrent le cru au cuit…, d’où le développement d’épidémies meurtrières dans leurs rangs.
Avec le fait que la coupe Mireille Matthieu soit étrangement à la mode dans les tribus amazonienne, il s’agira là de la seule remarque ethnographique de ce post.
Toujours est-il qu’il est préférable d’être à jeun pour voir le film.
Ruggero se défendra de toute complaisance en indiquant qu’il souhaitait dénoncer les effets d’un sensationnalisme de plus en plus exacerbé dans le journalisme de l’époque.
La dénonciation passe donc par la démonstration.
Je ne viendrai pas le titiller là-dessus mais je ferai appel à son sens de la mesure en invoquant Demis Roussos : “Quand je t’aime, j’ai l’impression d’être un roi, un chevalier d’autrefois, le seul homme sur la terre”.
Il me semble en revanche important de souligner que son film soulève deux interrogations essentielles, à savoir : “Peut-on rire de tout ?” et “Peut-on manger tous les abats ?”.
Ruggero, bon vivant, répond évidemment par l’affirmative à ces deux questions en violation complète des règles sanitaires à l’oeuvre dans notre pays.
Je m’inscris donc en faux car si le visionnage du film confirme que tout est bon dans le cochon, il confirme également qu’on ne peut pas rire de tout ou, en tout les cas, pas avec tout le monde.
A l’instar des Inconnus, il faut au minimum le faire avec brio.
Or, excepté certaines qualifications de maquilleurs, Ruggero n’a aucun talent et ses efforts ne sont même pas risibles tant il ne prend jamais conscience de leur prétention.
Le film est donc empreint d’une stupidité crasse révoltante à force d’outrages.
Seul mon chat ricanait bêtement de temps à autres.
Il est très con.
J’étais décidément aux antipodes de Levi-Strauss.