Franck Sinatra & Ava Gardner…
Quand Frank Sinatra et Ava Gardner se rencontrèrent, ils étaient tous employés par les studios de la M.G.M…
Frank avait sa carrière de crooner derrière lui, la trentaine a peine dépassée pourtant, et son étoile de star ne commençait pas à pâlir parce qu’elle n’avait jamais brillé.
Par contre, Ava était l’actrice sur laquelle le patron, Mayer, pariait.
Les Tueurs avait lancé la comédienne vers les étoiles en 1946.
Nous sommes à la fin des années ’40, dans une atmosphère de polar, gangsters, boissons, jeux, parties fines de Los Angeles à Las Vegas.
Frank et Ava sont d’anciens gosses des rues, qui se souviennent des coups reçus et donnés, deux artistes géniaux mais fonctionnant à l’instinct.
Gene Kelly, copain et partenaire de Frankie, lui dit de se méfier d’Ava, qu’elle boit beaucoup de whisky et qu’elle est en mains avec le milliardaire Howard Hugues après avoir épousé et quitté le comique Mickey Rooney et le musicien Artie Shaw.
Les paroles de Gene poussent plutôt Sinatra à aller de l’avant.
L’alcool, il aime et Ava est la plus belle fille de la ville, celle qu’il faut posséder pour être le coq de la cité.
Quant à Howard Hughes…, le chanteur adorait jouer à qui avait la plus longue… et une bonne compétition virile n’était pas pour lui déplaire.
Lorsqu’un fils de pauvres pique une fille à un fils de riches, n’est-ce pas une bonne action bénie par le ciel d’Italie ?
Envois de roses à Ava…, un brin de cour au pas de course…, ils deviennent amants.
Le 7 novembre 1951, pour éliminer définitivement Howard de la mémoire de la belle, Sinatra loue un bimoteur pour Philadelphie où un autel de mariage est dressé dans la maison d’un ami mafieux.
Gardner n’avait avec elle qu’un simple sac à main.
Elle dort dans le pyjama de son nouvel époux.
Non, en fait, elle ne dort pas beaucoup, même si tous deux ont fameusement picolé.
Ils partent en lune de miel pour La Havane.
Ivre morte, Ava grimpe sur un haut portail de la salle de jeux et parie avec Frank qu’elle va se suicider.
Fureur du chanteur.
Rentrés à New York, il lui reproche cette scène et lui annonce qu’il va voir les putes dans la rue : “ce qui ne me changera guère de ce que j’ai à la maison”, lui dit-il.
C’est la foire !
Mais avec un inattendu : alors qu’ils croyaient jouer, Ava et Frank étaient tombés profondément amoureux l’un de l’autre.
Une passion indomptable, qu’ils ne pouvaient dompter parce que la vie leur avait appris que c’est toujours le plus sauvage, le plus friqué ou le chef de bande qui gagne… et qu’ils voulaient être tous les deux le chef de la bande Avasinatra !
Sinatra devient fou de jalousie lorsqu’il apprend que son aimée va être la partenaire du beau Gregory Peck, en Afrique, dans Les neiges du Kilimandjaro.
En plus, il ne pourra la surveiller car il a un film sur le feu qui pourrait relancer sa carrière : Tant qu’il y aura des hommes.
Engueulades, coups échangés, réconciliations torrides sur l’oreiller.
Le problème est qu’il y a deux mecs à la maison : Frank et Ava… et que Frank a des fragilités féminines et un complexe de mal-aimé malgré la fausse assurance qu’il affiche.
Le mec Ava se révèle vite le plus fort.
Elle le fait tourner en bourrique.
Ils passent des soirées de mélodrame à grand spectacle à côté duquel le comique du vaudeville à la française tient de la bluette…
Un soir, excédée, Gardner flanque Sinatra à la porte du domicile conjugal.
Il hurle : D’accord. Et si tu as envie de savoir où je suis, je vais à Palm Springs pour y baiser avec Lana Turner !.
Ce qu’il fit.
Jusqu’à ce que Ava pénètre comme une furie dans la chambre où Lana et Frank se donnaient du bon temps !
Quelques mois plus tard, l’actrice est enceinte.
Ils décident de ne pas laisser naître le bébé…
La même année, Frank reçoit un Oscar pour son rôle dans Tant qu’il y aura des hommes.
Le cinéma le regarde à nouveau avec des yeux chauds.
Son ego gonfle, explose…, il ne supporte plus qu’Ava Gardner aille tourner des films, Mogambo ou Le soleil se lève aussi, au Congo et en Espagne.
En Espagne, surtout, où Ava a un faible pour les fesses des matadors.
Le chanteur-acteur la rejoint en Europe.
Ils font une halte en Belgique, pays plat qui devrait arrêter les plats qu’ils se jettent à la tête.
Sinatra chante au casino de Knokke-le-Zoute…
Nellens, le directeur, les invite à un repas en terrasse…, qui deviendra vite l’attraction principale de la cité balnéaire tant le couple s’insulte…
Lors du tournage de la comédie musicale Blanches colombes et vilains messieurs, Marlon Brando devient l’amant d’Ava Gardner…, mais quelques jours plus tard il fait la connaissance des hommes de main de Frank Sinatra, son partenaire dans le film, lequel n’a pas apprécié : Les gars à chapeau mou qui l’ont embarqué de force dans une voiture l’ont menacé de castration. Il n’a plus jamais approché Ava Gardner.
Le 29 octobre 1953 leur divorce est rendu public.
Leur attaché de presse dira ce qui était sans doute la vérité : Ava et Frank ont déclaré qu’après avoir mis tout en oeuvre pour sauver leur sincère amour, pour réconcilier leurs différences, ils regrettent de devoir se séparer. Ils tiennent à ce qu’on sache qu’ils se respecteront mutuellement jusqu’à la fin de leurs jours.
Frank tiendra cette promesse et protégera, parfois secrètement, son ex-femme minée par l’alcool et des rôles peu valorisants.
Le feu et l’incendie s’étaient épousés.
Cela provoqua un formidable brasier…, mais on peut croire que cela en valait la peine.·
Si la passion entre Gardner et Sinatra fut bruits et fureurs, attractions charnelles et de coeur, elle fut sincère, mais foira parce qu’ils avaient les mêmes défauts et les mêmes qualités : du talent et des complexes venus du fond d’une enfance difficile.
On en veut pour preuve une lettre qu’Ava Gardner, vivant alors en recluse à Londres, envoya, peu avant sa mort, en 1990, à une amie : Je crois n’avoir jamais pris la décision consciente de quitter Frank ou de le tromper. Comme d’habitude, je n’ai agi que sous le coup de l’impulsion en laissant les événements me submerger. J’aimais d’amour Frank, mais nous n’étions pas faits pour le mariage. J’ai été glacée d’effroi quand notre divorce a été prononcé. J’ai cru que j’avais atteint un point de non-retour et, comme d’habitude, idiote, j’ai été me noyer dans une bouteille. J’ai souffert, je souffre toujours de son absence. Même si nous sommes restés de vrais amis et que je puis compter sur lui… Je dois avouer une chose : nous étions jaloux, surtout, du succès de l’autre. Un jour, à Naples, je présentais le film Mogambo. Pour me faire plaisir, Frank chanta quelques airs. Le public le chassa presque de scène en me réclamant à cor et à cris. Il en a été mortifié. Comme je l’ai été le jour où il reçut l’Oscar pour Tant qu’il y aura des hommes. Le harcèlement des feux de la rampe a séparé deux êtres qui avaient besoin l’un de l’autre.