Les arbres ne montent pas jusqu’au ciel…
Les actions et les automobiles de collection non plus…
Paris aime les voitures, pas vraiment celles du quotidien, dont Anne Hidalgo tout comme Nathalie Kosciusko-Morizet se proposent de restreindre l’usage…, mais plutôt celles qui attirent l’élite mondiale des collectionneurs…
Du 5 au 8 février 2014, plus de 450 véhicules d’exception ont été proposés à la vente lors d’une série de ventes aux enchères comme Paris n’en avait jamais connu…, un événement qu’attendaient les esthètes mais aussi les investisseurs.
5 kilos de catalogues à trimbaler dans tout Rétromobile pour avoir l’autorisation d’entrer sur l’espace-vente Artcurial (coût 80 €)…
“Acheter des automobiles d’époque est devenu une façon de diversifier son portefeuille, comme l’or ou les tableaux de maître, car les cours flambent”…, m’a d’emblée assuré Philip Kantor, qui dirige le département automobile de la célèbre maison de ventes aux enchères britannique : Bonhams…
Selon l’indice HAGI, l’une des boussoles des collectionneurs, les Ferrari historiques ont vu leur valeur multipliée par 2,5 en cinq ans…, en 2013, la cote des Mercedes a grimpé de 15 %…, celle des Porsche de 19 %… et durant l’été 2013, la valeur moyenne des modèles vendus lors du concours d’élégance de Pebble Beach, en Californie, atteignait 965.000 dollars (700.000 euros)…, une Bugatti Atalante de 1937 s’y est négociée à 8,7 millions de dollars (6,3 millions d’euros)…, loin des 38,5 millions d’euros atteints il y a quelques mois pour une Ferrari GTO de 1963 (record mondial à battre).
Si vous mesurez plus d’1m50 et pesez plus de 50kg habillé… et n’êtes pas contorsioniste, impossible de vous mettre au volant !
Je sais pas pour vous, mais en ce qui me concerne, même si les automobiles dites “de collection” qui sont passées dans mes mains n’étaient pas des stars de telles valeurs, quoique…, elles ne valaient des fortunes que lorsqu’elles appartenaient à d’autres…
Dans mes mains, même via des compagnies de ventes aux enchères, soudainement elles valaient beaucoup moins…, les acquéreurs ne m’en proposaient que la moitié et certains Commissaire-Priseurs en ont vendu en dessous du prix de réserve sans m’en payer la totalité…
Lisez l’article sur ce lien, vous serez édifiés : http://www.gatsbyonline.com/main.aspx?page=text&id=1066&cat=auto
Pour 2.550.000 €uros, quel misérabilisme que ces double verrous chromés de capot à 6,50 €uros pièce chez Anglo-Parts !
– Le 5 février, RM Auctions, organisait “sa” première vente aux enchères parisiennes, proposant notamment une Jaguar Type D de 1955 estimée à 4,7 millions d’euros.
– Le 6 février, sous la verrière du Grand Palais (à deux pas du siège social d’Artcurial), Bonhams ouvrait des enchères qui visaient les 20 millions d’euros…, au programme de la maison britannique : quelques 150 modèles d’époque, dont une Delage de 1947 et une Mercedes 300SL.
– Les 7 et 8 février, la maison de ventes française Artcurial, dans le cadre du salon Rétromobile qui déroulait son faste du 5 au 9 février au Parc des expositions de la porte de Versailles, exposait au public éberlué, 177 véhicules estimés 30 millions d’euros…, parmi eux, dix étaient évalués au-dessus du million d’euros, dont une rarissime Ferrari 166MM de 1953 (estimée 3 millions d’euros) et une Bentley de 1931 (estimée 2,5 millions d’euros).
C’est bien “bourré” en automobiles, mais pas en public…
Finalement la guerre des maisons de ventes aux enchères aura été inégale, elles étaient trois à profiter du salon de la voiture ancienne Rétromobile, pour proposer leur propre rendez-vous, attirant les collectionneurs du monde entier.
Si l’Anglais Bonhams et l’Américain RM Auctions se sont talonné avec des ventes exceptionnelles tournant chacune autour des 17 millions d’euros, c’est la maison française Artcurial Motorcars qui est montée sur la plus haute marche du podium…, au terme de 11 heures de vente sur 2 jours, 87% des lots ont été vendus (objets Automobilia, voitures et motos confondues) pour quelques 25 millions d’euros…, une belle récompense pour maître Poulain qui fêtait ses 40 ans de marteau (n’y voyez aucun double sens) !
Matthieu Lamoure, directeur d’Artcurial Motors à gauche et rocker à droite, m’explique que la grille sur le capot n’est pas celle du claxon…
Comme attendue, la voiture “star” de la vente a été une Ferrari 166MM/53 de type barquette, carrossée par Oblin…, bien qu’estimée entre 2,9 et 3,5M€, elle n’est finalement partie que pour 2.550.000€ (le plus beau résultat de la vente quand même)…, les autres automobiles dépassant le million d’euros, furent : une Bentley 8 Litre coupé Sportsman Gurney-Nutting de 1931 vendue 2.190.400€…, une Isotta-Fraschini Tip 8A cabriolet Ramseier de 1924 vendue 1.287.200€ et une Hispano Suiza J12 Type 68 by Vanvoeren de 1934 vendue 1.127.200€.
Les suivantes, ayant marqué cette vente de leur empreinte furent : une Mercedes 300SL Gullwing de 1956 (964.000€)…, une Alfa Romeo 6C 1750 SS de 1929 (941.200€)…, une Lamborghini Miura S de 1969 (806.700€)…, une Pegaso Z 102 Serie II de 1954 (748.200€)… et une Ferrari F40 de 1991 (674.900€)…, une Maserati Ghibli Spyder 4.9L de 1969 a quant à elle battu un nouveau record du monde à 749.500€.
Il y a quelques années quasi plus personne n’en voulait, même pour presque rien, maintenant quasi plus personne ne peut s’en payer une !
Au cours de la vente Solo Alfa du 8 février, deux autres records du monde ont été battus, l’un par une Giulia TZ Coupé de 1965 adjugée 955.400€, l’autre par une 1750 GTAm de 1970 vendue 329.000€.
Côté voitures de stars, c’est une Rolls-Royce Silver Cloud cabriolet Mulliner de 1962 qui a remporté les suffrages, (elle avait appartenu à Brigitte Bardot et Charles Aznavour), vendue pour 286.100€…, la Chevrolet Bel Air customisée de Ringo Starr a elle trouvé preneur pour 48.900€ et la Fiat Shellete de 1972 de Philippe Starck pour 41.700€.
Je cite (enfin) le beau résultat de la collection Albert Prost, vendue à 100%, notamment des Delage D8 S Cabriolet Pourtout (1933) et Delahaye 135 MS cabriolet par Saoutchik vendues pour un total de 1,4M€.
C’est abominablement laid, mais elle devient belle parce qu’elle est hors de prix (nouveau critère pour reconnaître une oeuvre d’art)…
– Ce boom tient au fait qu’il y a de plus en plus de riches dans le monde, mais aussi au caractère plus prévisible du marché de la voiture ancienne comparé aux placements financiers ou au marché de l’art…, m’a dit, très fier, Matthieu Lamoure, directeur général d’Artcurial Motorcars.
– Il faut, en sus de ce cri de victoire, savoir que la fiscalité française est (encore) plutôt favorable à des plus-values réalisées sur un véhicule acheté depuis moins de douze ans, qui ne sont soumises qu’à un prélèvement de 5 %, unanimement considéré comme raisonnable. En outre, une voiture de collection n’est pas soumise à l’ISF…, m’a dit un industriel de 66 ans préfèrant rester anonyme et dont le parking privé compte une trentaine d’automobiles, dont une dizaine de Ferrari, des Corvette de 1957 à 1967 et une Jaguar Type E…, Ce fut d’abord une passion ; c’est aussi devenu un placement. Mes voitures, ce n’est pas de l’argent gaspillé…
Toutes les têtes de l’équipe d’Artcurial Motors sont soigneusement rangées sur les tables (il y a là, un coté “dernière cène”)…
– Confiantes, les maisons d’enchères écartent l’hypothèse d’un remake du scénario des années 1990 qui avait vu le marché flamber pendant plusieurs années avant de s’effondrer brutalement. Les principaux acheteurs sont européens ou américains ; les riches Chinois, par exemple, préfèrent encore acheter une Ferrari neuve mais bientôt ils s’intéresseront eux aussi aux modèles de collection et donneront une nouvelle impulsion au marché”…, a ajouté Matthieu Lamoure.
– On peut pourtant se demander combien de temps les enchères continueront sur une telle lancée…, ai-je rétorqué… “Les arbres ne montent pas jusqu’au ciel ; les actions non plus”…, ont coutume de dire les tradeurs, il n’y a pas de raison que les voitures anciennes y parviennent !…, ai-je répondu.
Toutes les têtes sont tombées, y a plus personne et y a l’téléphon qui son’…
– Bon, juste un commentaire plus personnel, “le fric, le fric”, c’est bel et bien parce que les autos de collection montent à des prix élevés qu’elles sont enfin regardées et considérées comme des objets d’art majeurs. Si la couverture originale de Tintin en Amérique avait été vendue 50.000€, personne ne regarderait la BD en tant qu’œuvre d’art…, or, elle a fait 1.300.000€ !!! Et là, l’intelligencia artistique la regarde d un autre œil…, m’a rétorqué Matthieu Lamoure.
– Je ne sais vous suivre dans votre raisonnement ou vous inversez tout…, vous considérez qu’un objet est une oeuvre d’art parce qu’il atteint une valeur monétaire très importante. L’urinoir que Marcel Duchamp à présenté en 1917 est effectivement devenu une oeuvre d’art sous l’appelation “Fontaine”, mais c’était justement une caricature… destinée à prendre à leur propre piège des artistes qui se voulaient libéraux et tolérants. D’en avoir possédé plusieurs, quoiqu’en fait c’est elles qui me possédaient…, je considère d’expériences vécues que les Ferrari sont comme l’urinoir de Marcel Duchamp… et qu’il faut être masochiste pour en vouloir lorsqu’on sait ce qu’elles réservent et coûtent en frais et réparations de pannes… L’art n’a rien à y voir, sinon l’art d’enrouler les gnous… Les Ferrari sont des objets spéculatifs qui se meuvent dans l’irrationnel…
– Précisez-moi…
– En 1917, à New York, Duchamp est membre du comité de direction de l’exposition organisée par la Society of Independant Artists, dont les règles, en ce point distinctes de celles des Salons officiels, affirment qu’il est ouvert à tous, sans prix ni jury. C’est pour tester cette ouverture d’esprit autoproclamée que Duchamp, sous le pseudonyme de Richard Mutt, présente son urinoir au comité d’accrochage. L’objet, évidemment, suscite polémiques et controverses, puis finit par être relégué hors des espaces d’exposition du Salon. Alfred Stieglitz l’expose alors dans sa galerie 291 où il le photographie. L’épisode de l’urinoir se doit d’être rapproché d’un autre rejet dont fut victime Duchamp, lors du Salon des Indépendants de 1912, à Paris : à la demande de ses “amis” cubistes, il avait dû lui-même décrocher son Nu descendant un escalier numéro 2, jugé hérétique par rapport à ce que ses pairs pensaient être la doxa cubiste. Qu’une censure puisse émaner d’artistes qui se disaient d’avant-garde avait ulcéré Duchamp. En 1917, il est maître du jeu. Il orchestre le scandale, assure la publicité à sa Fontaine, l’inscrit dans l’histoire de l’art, reproduit la photographie de Stieglitz dans le numéro 2 de sa revue The Blind Man (New York, mai 1917), y commente son aventure dans l’éditorial “The Richard Mutt Case”. Piégée par l’ironie duchampienne, l’histoire fait de Fontaine l’étendard de l’iconoclasme moderne.
Le célèbre urinoir de Marcel Duchamp, une oeuvre d’art ?
– Oui, ah bon…
– Ahhh, Matthieu, Matthieu…, je suis votre frère tresamé (votre Carissime Frater)… Vous allez comprendre… Nous ne voyons pas “les choses” d’un même oeil… Déjà à St-Luc ou j’étudiais l’architecture, je bataillais avec mes professeurs en histoire de l’art (et dérivés), car je posais toujours la même question relative aux valeurs : Pourquoi Van Gogh meurt-il dans la misère alors que ses oeuvres parfois échangées contre un pain ou un bout de bidoche du temps ou il vivait encore et avait besoin d’argent pour survivre plus que de “reconnaissance”…, se revendent maintenant des centaines de millions… Manifestement cela ne rapporte qu’aux spéculateurs, donc ce n’est pas la valeur intrinsèque de l’oeuvre qui vaut cela, mais la valeur spéculative… Or, les vendeurs jouent sur la valeur de l’oeuvre, ce qui est une tromperie…. En ce sens Artcurial porte bien son nom, mais cela échappe aux gnous fortunés qui se précipitent dans la fosse aux lions : “Le Curial” (c’est-à-dire “le courtisan”) est un texte de la littérature française du XVe siècle, un traité moral en forme de lettre faisant la satire de la vie de cour, existant à la fois en latin (De vita curiali detestanda tamquam miseriis plena) et en moyen français… Le texte se présente comme une lettre à un destinataire désigné au début par l’apostrophe “carissime frater” (mon frere tresamé), que l’auteur s’efforce de dissuader de venir le rejoindre à la cour, où la vie est présentée comme un véritable esclavage, incompatible avec la pratique de la vertu, exposant aux compromissions et aux aléas de la fortune… et n’offrant que des satisfactions illusoires et mensongères. Le thème des misères de la vie de courtisan est un lieu commun de la littérature du XVe siècle, qu’on retrouve entre autres dans la De curialium miseriis epistola d’Æneas Sylvius Piccolomini (1444) et dans le roman en moyen français intitulé “L’Abuzé en court” (milieu du siècle, longtemps attribué à René d’Anjou)…
Une Courtisane de l’art…
– Ou voulez-vous en venir ?
– Donc, mis à part que vous m’avez mis sur la touche en temps que votre “Carissime Frater”…, il vous faut noter qu’Artcurial signifie “le courtisan de l’art”… qui se situe dans un monde (celui de vos clients fortunés)… Nous sommes donc les “Carissimes Fraters” d’autres qui le sont à leur tour… Le thème de la misère de la vie d’une courtisane de Cour… ou d’un courtisan de l’art tel que les éminents Commissaires-Priseurs d’Artcurial…, ne peut qu’être égratigné au second degré sous le principe dévoyé que toute misère mérite sa peine…, un double sens eut égard aux sommes récoltées (quoique tout le monde a ses petits frais)… Notre grand philosophe qu’est Eric Cantona a dit : “Quand les mouettes suivent le chalutier, c’est qu’elles pensent qu’on va leur donner des sardines”…, je trouve cela en rapport avec les suiveurs qui s’extasient des résultats affichés et croient qu’il vont en bénéficier avec leurs voitures de loin moins prestigieuses…
Pour en savoir plus :
– Rétromobile 2014 : Machine à rêves, machine à fric… Par Marcel PIROTTE
– Monaco 2010, le rocher abandonné…
http://www.gatsbyonline.com/main.aspx?page=text&id=183&cat=voyages
– L’urinoir “Fontaine” de Marcel Duchamp, le point extrême de l’imbécillité convulsive !
http://www.gatsbyonline.com/main.aspx?page=text&id=410&cat=ataraxie
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