Hydroplane Lucini Lamborghini V12 8L2 850cv
Tu me lis, mais tu ne sais pas, tu ne sais rien… Que peux-tu en savoir mon Popu ? Viens… Je vais te causer de la folie ! Elle aplatit le temps, allonge et distord le visible, bâillonne les cris, décoiffe les chagrins ! Tu as beau être fou d’amour, en vain, tu l’es moins à 200 km/h sur la crète des vagues. Ton sang ne se coagule plus au niveau du cœur, le sang gicle jusqu’à l’extrémité de tes mains, de tes pieds, de tes paupières alors devenues les sentinelles fatales et inexorables de ta vie. C’est fou comme le corps, les nerfs, les sens tirent vers l’existence. Qui n’a pas cru sa vie inutile sans celle de l’autre et qui, en même temps, n’a pas amarré son âme, qui n’a pas senti son corps tout entier se mettre en garde, qui n’a pas ressenti le silence prestigieux et fascinant d’une mort prochaine, ce mélange de refus et de provocation, n’a jamais aimé la folie, n’a jamais aimé la vie, ou alors, peut-être, n’a jamais aimé personne.
Contrairement à ce qu’on pourrait croire, lorsque tu es en folie, le tempo du cœur qui bat la chamade n’est pas celui de la musique. Dans une symphonie, ce n’est pas l’allegro, le vivace ou le furioso qui y correspond, mais l’andante, mouvement lent, majestueux, sorte de plage où l’on rêve de parvenir et où rien ne se débattra plus, tout au contraire, se laissera aller, en même temps que le corps, à une sorte de vertige éveillé, attentif. Cela se passe à un moment où la mort ne veut plus rien dire, annulée par un cri, utilisé par les hommes à toutes les époques, à l’instant où quelque chose en soi dépasse quelque chose d’extérieur à soi, cet instant où les violences incontrôlées s’échappent et que l’intelligence et la sensibilité, l’adresse, la sensualité aussi, contrôlent à peine, insuffisamment en tout cas pour ne pas en faire un plaisir, insuffisamment pour ne pas lui laisser la possibilité d’être un plaisir mortel. Odieuse époque que la nôtre, celle où le risque, l’imprévu, l’irraisonnable sont perpétuellement rejetés, confrontés à des chiffres, des déficits ou des calculs ; époque misérable où l’on interdit aux gens de se tuer non pour la valeur incalculable de leur âme mais pour le prix d’ores et déjà calculé de leur carcasse.
En fait la folie du dépassement donne à son dompteur et son esclave la sensation paradoxale d’être enfin libre, revenu à la solitude originelle, loin, très loin de tout regard étranger. Et si, en plus, les flots s’écartent se raréfient, disparaissent, et si le temps se met à osciller, si le vent devient un torrent, si chaque lame de mer est une menace et une surprise et si chaque creux est une petite victoire, alors étonne-toi, mon Popu, de préférer une belle pirouette dans un dernier élan vers l’infini dans une subite, insoupçonnable et irrésistible rencontre d’un corps et de son esprit, l’adhésion d’une existence à l’idée brusquement fulgurante de cette existence : “Comment, qui suis-je ? Je suis moi, je vis et je vis ça à 1.000 à l’heure dans ma tête. Ouaihhhhhh ! Putain, que c’est bon !”… Quand tu fonces en folie, il y a un moment où tout se met à flotter dans ce bateau où l’on atteint le haut de la lame, le haut de la vague, et où l’on espère retomber du bon côté. Cela n’a rien à voir avec le sport. Cela rejoint le bonheur de vivre et, par conséquent, le confus espoir de mourir qui traîne toujours dans ledit bonheur de vivre.
C’est là tout ce que je crois vrai, finalement : la folie de vivre intensément n’est ni un signe, ni une preuve, ni une provocation, ni un défi, mais un élan de bonheur. Le moment présent est comme la proue d’un navire qui fonce dans l’océan du temps et transforme le futur incertain en un présent devenant sitôt après un passé immuable. Le passé contient tout ce qu’on connait de l’histoire. Tout ce qu’on sait du temps, c’est qu’on vit toutes et tous dans le même temps qui passe. J’en viens pourtant, vieillissant à parfois vouloir profiter plus lentement. C’est la folie d’évolution de mon cadre de vie, avec tous les outils technologiques et Internet, qui me donne actuellement l’impression que tout s’accélère. Mais si on me questionne sur la période dans laquelle je vis, je sais que je n’en changerai pas. Je suis dans dans un “certain” temps ! Toi dans le tient, mon Popu ! L’univers engendre la complexité, la complexité engendre l’efficacité, mais l’efficacité n’engendre pas nécessairement le sens. Tout ce foutoir peut aussi conduire au non-sens. “Je ne comprends pas. Comment cela est-il possible ?” dit l’homme de bon sens tel que toi… La réponse, c’est qu’il n’y a rien à comprendre. C’est comme ça ! A fond ! Putain, A fond ! Merde ! Soit fou, soyez fous !
Un aspect clé des hydroplanes (hydro-outhunderboat) est qu’ils utilisent l’eau sur laquelle ils se trouvent pour la portance plutôt que pour la flottabilité ainsi que pour la propulsion et la direction. Lorsqu’ils se déplacent à grande vitesse, l’eau est forcée vers le bas par le fond de la coque du bateau. L’eau exerce donc une force égale et opposée vers le haut, soulevant la grande majorité de la coque hors de l’eau. Ce processus, qui se produit à la surface de l’eau, est connu sous le nom de “foiling”.
Les premières conceptions des années 1920 ont souvent été construites par des amateurs, qui utilisaient les matériaux les plus légers disponibles à l’époque, souvent des planches de bois en contreplaqué de 4 millimètres (0,16 po). La plupart avaient environ 4 mètres (13 pieds) de long et les coques à gradins (façon barques de pêcheurs) étaient utilisés avec des “marches” de 75 millimètres (3,0 pouces) pour induire de l’air sous la coque afin de permettre au bateau de flotter sur des bulles d’air. Ce principe du “rabotage” n’a pas été entièrement compris dès le départ où les coques étaient à fond plat avec une courbe ascendante à la proue.
Les premières conceptions des années 1920 étaient souvent construites par des amateurs, qui utilisaient les matériaux les plus légers disponibles à l’époque. Le poids d’un moteur de 100cv était suffisant pour empêcher la proue de “creuser”. L’un des premiers exemples fut le “No-Vac” de LeRoy F.Malrose et Fred W.McQuigg, l’illustrateur du magazine américain “Popular Mechanics”. La conception et la construction du “No-Vac” ont en fait commencé en 1933, lorsque LeRoy F.Malrose a conceptualisé une coque aérodynamique produisant beaucoup moins de traînée que les coques conventionnelles de l’époque. En juin 1933, le “No-Vac” barré par le pilote de course professionnel Jimmy Rodgers a établi le record du monde de vitesse sur l’eau pour un bateau à moteur hors-bord en atteignant 78 milles à l’heure (126 km/h).
La conception de base de la coque de la plupart des hydroplanes a peu évolué et est restée relativement inchangée depuis : avec la partie arrière soutenue dans l’eau par la moitié inférieure de l’hélice conçue pour fonctionner à tout moment semi-immergée, l’objectif étant de garder le moins possible le bateau en contact avec l’eau, car l’eau est beaucoup plus dense que l’air, exerçant plus de traînée. Essentiellement, le bateau survole la surface de l’eau plutôt que de la traverser.
Ces hydroplanes qui avaient principalement des surfaces planes, à l’exception de la proue et des flotteurs uniformément incurvés ont évolué dans les années cinquante avec une modification de l’arc incurvé qui a été remplacé par ce qu’on appelle “un arc à fourche à cornichon” (sic !), où un espace est laissé à l’avant des flotteurs et l’empennage vertical unique centré (semblable à ceux de la plupart des avions modernes) a été progressivement remplacé par un stabilisateur horizontal soutenu par des empennages verticaux de chaque côté du bateau. Plus tard, alors que le réglage fin de l’hydrodynamique devenait plus important, le fond de la coque a acquit des courbes subtiles pour donner une meilleure portance.
Avant 1977, chaque record officiel de vitesse sur l’eau avait été établi par un Américain, un Britannique, un Irlandais ou un Canadien. Le 20 novembre 1977, l’Australien Ken Warby a piloté son Spirit of Australia uniquement sur la poussée de son turboréacteur Westinghouse J34 à une vitesse de 464,5 km/h (290,313 mph) pour battre le record de Lee Taylor. Warby, qui avait construit son engin dans son arrière-cour et utilisait la publicité d’un parrainage pour payer les améliorations apportées à son Spirit . Le 8 octobre 1978, Warby s’est rendu à Blowering Dam , en Australie, et a atteint 510 km/h (318,75mp/h).
Tu imagines, mon Popu, plus de 500km/h au ras des flots ? L’adrénaline ! La mort qu’on touche, qui t touches, mon Popu, qui te touches presqu’à mort ! Merde de chienne de saloperie de vie… L’hydroplane Lucini Lamborghini a été construit beaucoup plus cool par le légendaire constructeur de bateaux italien Lucini en 1992 pour un homme d’affaires suisse qui voulait participer à la “Centomiglia del Lario” sur le lac de Côme dans le nord de l’Italie (l’équivalent “marine” des Mille Miglia d’antan). Non seulement pour gagner, mais aussi pour battre tous les records de vitesse existants dans sa catégorie. En fin de compte, cet hydroplane remportera l’épreuve à trois reprises 1992, 1993 et 1995 et incroyablement il détient encore à ce jour (10/12/2021) le record d’endurance de vitesse pour l’événement à 195,434 km/h. C’est dire qu’il est monté à bien plus que 200km/h… La mort, mon Popu, la mort qu’on touche, qui te touche… Mais au fond, qu’en connais-tu, toi de tout ça ? Rien où pas grand chose ?
Le moteur est un V12 “Marine-Lamborghini” de 8L2 et 850cv, donnant au bateau une vitesse de pointe de 230 km/h ou 143m/h. Fait inhabituel, Lucini a choisi de construire cet hydroplane à partir de plusieurs couches d’acajou stratifié, permettant d’obtenir une structure incroyablement solide et rigide, idéale pour une utilisation à grande vitesse. Cet hydroplane a admirablement réussi sa tâche en établissant 3 fois de suite le record de vitesse pour l’événement qui existe encore aujourd’hui, 28 ans plus tard. Marini Lamborghini S.p.A. est une ramification peu connue d’Automobili Lamborghini S.p.A. qui se concentre à 100% sur la construction de moteurs de course marine haut de gamme, en grande partie pour une utilisation dans les bateaux à moteur de classe 1 de la World Offshore Series.
Il est bien connu que Ferruccio Lamborghini a commencé à fabriquer des tracteurs avant qu’une dispute avec Enzo Ferrari au sujet d’un embrayage qui ne cessait de tomber en panne ne l’ait amené à lancer sa marque d’automobiles de luxe, devenant ainsi le plus grand rival de Ferrari. Quelques années après avoir démarré son entreprise automobile, Ferruccio a fait installer un moteur de Lamborghini Espada V12 sur un bateau conçu par Eugenio Molinari, un Riva Super Aquarama destiné à ses loisirs nautiques ainsi que pour participer personnellement dans une course “au grand large” sur la mer Adriatique, de Cervia à Pola. J’en ai causé ici : https://www.gatsbyonline.com/automobile/riva-aquarama-1968-ferrucio-lamborghini-395510/
Motori Marini Lamborghini S.p.A. produit maintenant des V12 hautement spécialisés de 8,2 litres avec double arbre à cames en tête par “banque de cylindres”, quatre soupapes par cylindre et plus de 950CV avec un coût unitaire à partir de 100.000 US$ ! Après ses victoires, cet hydroplane a été exposé dans une collection privée, et plus récemment, exposé lors d’événements de course historiques, y compris le “Sacca Racer Meeting” et la “Campione D’Italia Gran Premio Mondiale F2”. Voilà, c’est terminé…
2 commentaires
Mon cher Gatsby,
De votre expérience les hommes naissent-ils férus de nautisme à haute vitesse, ou bien s’agit-il d’une transition qui s’opère naturellement à partir d’autres activités plus lentes ? En somme, s’agit-il d’un glissement continu depuis des drogues douces vers des drogues de plus en plus dures ?
Vous pardonnerez bien entendu ma méconnaissance du milieu, mais les pilotes de ce genre d’engin sont-ils des jockeys interchangeables en cas de décès, façon pilote de formule 1 chez Enzo, ou des riches privilégiés qui s’ennuient et qui cherchent à jouir ?
Je vis dans un bled de pôvres pêcheurs en eaux troubles méditerranéennes, à force de ramer tous aspirent au bonheur d’un moteur…
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