2014 Honda Super 90…
Dans les années ’60, Honda a décidé de viser le marché des motos légères afin de proposer aux gens simples (la majorité, ce qui signifiait du volume), des performances optimales dans les zones rurales…, les motorettes Honda devaient être moins chères que leurs concurrentes, plus fiables, plus belles, moins salissantes et offrir une moindre consommation d’essence par rapport aux motos européennes de plus fortes cylindrées.
En 1964, Soichiro Honda a bousculé les conventions européennes en commercialisant cette moto légère, élégante et consommant peu pour circuler dans les zones rurales…, la S90 (pour Super 90)…, avec son réservoir en chrome brillant et son cadre embouti, ne ressemblait en rien à la production de l’époque, le moteur était un monocylindre 89cc SOHC, 2 soupapes, 4 temps refroidi par air, pouvant atteindre une vitesse maximale de 120 km/h.
Je me souviens de cette époque, j’avais 15 ans, mon pépé vendait des Kreidler-Florett, des NSU, des Moto-bécane… et quand je lui parlais des motos japonaises Honda…, il se mettait à hurler que je n’étais qu’un sale gamin… et que mon copain un peu plus âgé qui travaillait comme apprenti boucher chez son paternel qui se pavanait au guidon d’une magnifique Honda S90 rouge et chrome…, n’était qu’un blouson noir comme Marlon Brando…
Johnny qu’il se faisait appeler…, avait fière allure sur sa “meule”, la plus belle de tout le quartier (sic !), il avait la veste la plus chère et le “cax” le plus cher aussi…, le tout acheté neuf par son papounet devait rester toujours neuf…, le moindre regard d’une nana était pour lui, prétexte à prendre la pause en guettant derrière ses lunettes d’autres regards convergents vers sa “meule” et lui…
Il était gonflant…, il ne savait pas parler d’autre chose que de sa “meule” dont il vantait souvent la super puissance, le super freinage, avec une super partie cycle, sa “meule” qui avait des supers arbres à came super-performants, une super peinture rouge… et qu’il confiait au meilleur super mécano de la région, de qui mon pépé disait le plus grand mal…
Il a fait, un jour, une sortie “à la foire”, garé sa Honda S90 devant les Autos-Skooters pour pouvoir en parler toute l’année, photos à l’appui…, mais quand il est revenu d’avoir été manger des beignets croustillons, sa “meule” avait disparu… et ses poulettes portant talons aiguilles et jupes tellement microscopiques qu’on les croyaient doublées en fourrure pour faire sac de sable (mais ça c’est une question de goûts), l’ont laissé tomber…
Il n’a plus jamais été le même par la suite, d’autant que son papounet n’a pas voulu lui acheter une autre Honda S90 en remplacement, mais l’ancien VéloSolex du curé de la paroisse… et, à force de le voir traîner au rayon des pièces détachées, aux urgences de l’hosto, au commissariat, chercher ses clés à minuit sur la Grand-Place à la lueur d’une allumette, plonger dans l’Escaut pour récupérer son “cax” qu’il avait fait tomber pendant qu’il voulait embrasser la Jeannette…, on a fini par ne plus le voir ni disparaitre à l’armée ou il est resté troupier durant les 18 mois alors obligatoires…
Aucune chance, à son retour, qu’un jour futur, la loi du pire emmerdement l’oublie…, même avec toute la bonne volonté du monde, une brêle neuve, des stations essences ouvertes partout, des routes impeccables, une météo radieuse…, il lui arrivait les pires trucs : visière qui ne tient pas fermée, flancs de carénages mal fixés qui s’envolent et atterrissent pile sur la voiture des flics qui le poursuivait parce qu’il avait paumé ses papiers qui avaient été utilisés par le chef de la mafia locale… etc, etc…
Je ne l’ai plus jamais revu…, par contre la Honda Super 90 fait son retour en 2014…, 50 ans plus tard…, l’étude de style faite par le designer russe Igor Chak rend hommage à cette machine qui était venue bousculer les conventions…, elle reprend la philosophie de la S90 pour proposer une moto électrique (!) dotée d’un cadre embouti en aluminium avec une coque extérieur en fibre de carbone afin de réduire au maximum le poids.
Plus qu’un simple moteur électrique, ce sont bien deux moteurs qui équipent le concept : un pour chaque roue, un dans chaque moyeu de roue…, la moto est ainsi capable de délivrer plus de 100 chevaux.
Le duo de moteurs est alimenté par une batterie au Lithium-Sulfide (Li2S) de 14 kWh à refroidissement par air…, disposant d’une autonomie supérieure de 4 fois à celle des Lithium-ion.
La batterie est située dans la partie inférieure pour offrir un centre de gravité plus bas et rompt au niveau design avec les emplacements des batteries électriques actuelles.
Dans la continuité, les freins sortent aussi de l’ordinaire puisqu’ils fonctionnent sur le principe de l’électromagnétisme.
A mon sens, c’est raté…, le brave Igor est resté enfermé dans un look conventionnel, avec les batteries à la place du moteur et du vent dans ce qui ressemble à un réservoir d’essence mais n’en est pas un…, c’est aussi crétin que les voitures électriques qui abordent une calandre et gardent la forme d’une automobile traditionnelle…, qui plus est, les jantes à rayon-hommage sont incongrues…
Pour encore bousculer les conventions, Igor plastronne que le freinage est électromagnétique, prend également place dans les moyeux et demande moins d’entretien qu’un système de freinage classique en éliminant la tuyauterie habituelle…, encore une fois, c’est crétin car le freinage est en réalité l’inversion des polarités des moteurs électriques… à se demander pourquoi les voitures électriques des “grands-constructeurs” sont équipées de freins classiques…
Comme déjà écrit plus avant…, les moteurs sont alimentés par des batteries au sulfure de lithium, quatre fois plus puissantes que des batteries Lithium-ion, qui sont logées dans la partie basse de la moto, ces batteries alimentent également toute l’électronique qui prend place sur cette S90 du 21ème siècle, dans le faux réservoir d’essence…,comme l’ABS, l’antipatinage, et le contrôle de stabilité entre autres inutilités (pourquoi faire simple quand on peut tout compliquer ?)…
Qui dit véhicule électrique, dit assistances électroniques…, là encore, Igor Chak a tout prévu (gag !) avec une batterie complète d’ABS, de Traction Control, de Stability Control ou encore de rechargement de la batterie au freinage…, oubliés les compteurs à aiguilles, ici c’est un écran tactile OLED qui prend la place du tableau de bord.
Pour terminer de décrire ce gag…, Igor affirme sans rire que cette Honda Super 90 d’un futur imaginaire est construite avec moitié moins de pièces qu’une moto thermique traditionnelle (sic !), et que la production serait donc plus rapide et moins chère…, bref, que ce concept est en quelque sorte la moto idéale qui pourrait bientôt être commercialisée…
Un moteur électrique est aussi simple qu’un alternateur…, il n’y a effectivement pas beaucoup de pièces comparativement à un moteur thermique (essence ou diesel), même pas besoin de boite de vitesse, ni même de freins conventionnels (puisqu’en inversant les polarité le moteur électrique freine car poussant à tourner dans l’autre sens)…, c’est dire que les grands constructeurs et même les plus petits comme Tesla…, nous prennent pour des imbéciles, des cons-sommateurs, nous vendant 4 fois plus cher ce qui coute 4 fois moins cher à fabriquer…, c’est toute la conclusion à tirer de cette pitrerie design…