Lamborghini Miura P400 Bertone 1968
L’industrie automobile a une longue histoire d’évolution, interrompue par des explosions d’innovation. Il est difficile d’imaginer le monde sans les Supercars, qui représentent le summum de l’ingénierie automobile marié à un design extraordinaire. Depuis les années 1960, les Supercars ont toujours été les voitures les plus désirables et désirées sur les routes et la première Supercar moderne était la Lamborghini Miura…
Marcello Gandini n’avait que 27 ans et avait été récemment engagé comme employé par Bertone, lorsqu’il a dessiné les lignes de la Miura. Commandée pour produire quelque chose d’intransigeant disposant d’un châssis tout aussi radical, la carrosserie était une combinaison extraordinaire de lignes plongeantes mélangées à des prises d’air intelligemment intégrées.
L’art de Gandini était tel qu’il est presque impossible de s’inspirer des voitures précédentes, bien que l’influence soit certainement venue de l’animal spirituel de Lamborghini, avec des portes modelées sur des cornes de taureau, créant un profil avant caractéristique lorsqu’elles sont grandes ouvertes, plus pratiquement conventionnelles pour entrer et sortir de cette automobile inédite.
Le châssis monocoque surbaissé a été conçu par un ingénieur de 28 ans? Gian Paolo Dallara, qui allait créer ensuite sa société éponyme et développer certains des châssis les plus réussis du sport automobile. La Miura a été une partie importante de son développement personnel et sa décision de placer le moteur et la boîte-pont transversalement à l’arrière du châssis était une idée brillante.
Auparavant, la voiture la plus célèbre à utiliser un moteur transversal et une boîte de vitesses était la Mini, une voiture snob et populaire produite en série à moteur avant, et non comme la Miura, une voiture visant à être la plus rapide de la planète. Le châssis de la Miura a été complété par une suspension indépendante à double triangulation avec des amortisseurs hélicoïdaux aux quatre coins.
Une barre anti-roulis a été installée à l’arrière pour faciliter la maniabilité, et les freins à disque sur les deux essieux se sont révélés plus que capables de ralentir une voiture aussi férocement rapide. Un autre jeune ingénieur impliqué dans cette voiture révolutionnaire était Giotto Bizzarrini, encore à la fin de ses 30 ans qui avait conçu la Ferrari 250 GTO puis fondé son propre bureau de conseil en ingénierie et conçu le V-12 de la Lamborghini 350 GT.
La conception étant exceptionnelle, Lamborghini va utiliser le même bloc pour chaque V-12 jusqu’au lancement de la toute nouvelle Aventador. Pour la Miura, la conception du V-12 de Bizzarrini a été agrandie à 4,0 litres, alimentée par quatre Weber 40 IDL triples. Toutes ces caractéristiques de conception et d’ingénierie ont abouti à ce qui est devenu la voiture de production la plus rapide au monde et l’une des plus belles voitures jamais fabriquées.
La naissance de la Miura avait été non conventionnelle et sa sortie dans le monde l’était encore plus. La Miura a été présentée pour la première fois sans sa carrosserie sous forme de châssis roulant au Salon de l’auto de Turin en 1965 avec des acheteurs potentiels passant des commandes; ils ont eu une agréable surprise lorsqu’un prototype a finalement été révélé au Salon de l’automobile de Genève 1966 devant des foules étonnées.
Le développement ultérieur a été effectué par des personnes de 20 ans, Paolo Stanzani et Bob Wallace qui a mis des kilomètres de développement sur le prototype en le conduisant de Sant’Agata Bolognese au Grand Prix de Monaco 1966, arrêtant pratiquement la circulation en stationnant la Miura à l’extérieur du Casino pour que tout le monde puisse l’admirer.
Le succès de la Miura et de ses versions ultérieures a établi Lamborghini comme l’un des principaux constructeurs de supercars, et 762 Miura ont été produites au total. Le châssis numéro 3375 est l’un des premiers P400 incorporant des modifications de châssis pour améliorer la rigidité et la maniabilité. Sortie de l’usine le 4 mars 1968, cette Miura #135 a parcouru une courte distance jusqu’à Milan pour être livré à M. Bongiasca, son premier propriétaire.
En 1998, cette Miura résidait en Californie, sous la garde de son second propriétaire Donald Sullivan. En 2015, cette Miura a été vendue au propriétaire actuel qui a commandé une restauration à un atelier italien. Inclus dans ce processus était une repeinture entièrement en métal nu à sa couleur d’origine, Bianco Miura, avec un retrim intérieur en cuir bleu et gris clair. Le résultat de cette restauration est un exemple digne de tout concours d’élégance.
Présentée comme un exemple entièrement restauré de l’une des plus grandes supercars d’Italie, cette Miura P400 produit sur ses admirateurs un rare moment d’exubérance juvénile et d’innovation libre-pensante, cet effet de la Miura a été ressenti tout au long de l’histoire de cette Supercar, et il restera toujours sur les listes de souhaits des vrais petrolheads…
Haute de seulement 1,05 m, la Miura est aussi plate qu’une voiture de course et elle dispose de deux grands ouvrants en guise d’avant et d’arrière. Pour la première fois dans l’histoire de la marque, elle dispose d’un moteur placé en position transversale et centrale arrière, une solution technique que les principaux concurrents italiens n’avaient pas encore adoptée. Basé sur le 350 GT, V12 de 3,9 litres de 350 chevaux il permet d’atteindre 280 km/h.
La Lamborghini était presque surnaturelle par rapport à la concurrence ! Surpassant toutes les sportives de l’époque, elle va devenir tout de suite la coqueluche d’une clientèle fortunée qui n’hésite pas à passer commande sans même l’avoir essayée. Ce n’est qu’au printemps 1967 que les premiers exemplaires sont livrés après des modifications apportées à son refroidissement. Si la voiture tient ses promesses, elle déçoit pour sa finition indigne !
En 1968, Lamborghini présente au Salon de Turin une version corrigée : la Miura S. Son moteur développe désormais 370 chevaux et elle reçoit des améliorations comme les vitres électriques. D’autres nouveautés font leur apparition en cours de commercialisation comme les disques de freins ventilés ou les joints homocinétiques de transmission.
Dépourvue de toute assistance, violente, bruyante et dangereuse à grande vitesse à cause de sa mauvaise répartition des masses, la Miura n’est pas à mettre entre toutes les mains. Par contre, elle est très vite adoptée par de nombreuses personnalités du monde, de Johnny Hallyday au Chah d’Iran, en passant par Miles Davis. Lancée au salon de Genève de 1971, la P 400 SV remplace la S et devient son évolution la plus aboutie. La puissance grimpe à 385 chevaux !
La nouvelle venue dispose aussi d’une nouvelle suspension arrière composée de quadrilatères plus performants et la voie est élargie de treize centimètres. Extérieurement, elle se reconnaît à ses yeux sans cils, sa calandre élargie, et ses feux arrière redessinés. La Miura SV est produite jusqu’à la fin 1972 qui marque l’abandon du modèle. Parallèlement à la production de série, Lamborghini conçoit quelques voitures spéciales comme la Roadster de Bertone.
En 1969, Bob Wallace, pilote-essayeur de la marque, imagine une version encore plus développée de la Miura. Appliquant l’annexe J de la réglementation sportive internationale, la Jota est un laboratoire du savoir-faire de Lamborghini avec des trains roulants et un châssis, une carrosserie en matériaux composites et des voies élargies. Le V12 développe désormais 440 chevaux ce qui rend la voiture extrêmement compétitive avec un poids de 900 kg.
Posséder une Miura nécessite un compte en banque garni (1,2 million d’euros minimum pour une voiture roulante), beaucoup de patience compte tenu de sa maintenance exigeante (proche de l’aéronautique finalement !) et récurrente, ainsi qu’un gros budget à dépenser à l’atelier. Toutes les pièces sont rares et horriblement chères et la complexité de sa mécanique requiert une main d’œuvre hautement qualifiée.
Les 4 carburateurs Weber double-corps nécessitent d’être resynchronisés régulièrement ! Plutôt capricieuse, la bête n’est pas faite pour accumuler de gros kilométrage : tous les 30.000 km il faut ouvrir le moteur. Autre point fâcheux, les pointeaux des carburateurs ont tendance à se bloquer au démarrage, ce qui provoque un important écoulement d’essence. Si les échappements sont chauds, c’est l’incendie assuré, un désastre qui a déjà touché pas mal de Miura…