Essai – Renault 5 Turbo 3E : une “drifteuse” aux accélérations de dragster !
Publié le 31 mai 2023 à 11:57 Mis à jour le 5 juin 2023 à 13:31 Par La rédaction
Essai – Renault 5 Turbo 3E : une
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Essai – Renault 5 Turbo 3E : une “drifteuse” aux accélérations de dragster !
Essai N° 736 Renault 5 Turbo 3E 380 ch
Une ligne cartoonesque, des accélérations de dragster, une propulsion électrique et une sonorité stridente : la Renault 5 Turbo 3E semble échappée d’un circuit TCR pour têtes blondes. Un jeu d’enfant ?
Le monstre qui expose aujourd’hui ses muscles sur la voie des stands de la piste Club de Magny-Cours me rappelle celui qui trônait dans le showroom Renault des Champs-Elysées au printemps 1980.
Aux côtés de mon père, je me souviens comme si c’était hier de l’effet provoqué par ses hanches dodues, sa moquette intérieure bleue, sa planche de bord de vaisseau spatial, son allure de pitbull, sa livrée rouge pétante, son moteur turbo de 160 ch et ses 200 km/h.
Quarante-trois ans ont passé depuis, et de l’eau a coulé sous les ponts. Les références d’autrefois font sourire aujourd’hui, et le passage à l’âge adulte apporte une bonne dose de recul par rapport à la candeur de l’enfance.
Fascination, excitation, passion !
La vision de cette R5 Turbo 3E qui m’attend pour trois petits tours de piste me procure pourtant les mêmes symptômes que son inspiratrice devant cette fameuse vitrine : de la fascination, de l’excitation, de la passion et cette petite pointe de trouille qui rend la vie plus intense.
Il faut dire que ce joli clin d’œil à la plus déjantée des Renault 5 ne fait rien pour l’apaiser. D’abord, parce que ce concept roulant destiné au drift et doté d’un châssis tubulaire réalisé chez Ligier est une pièce unique, donc irremplaçable.
Ensuite, parce que les 380 ch et plus de 70 mkg de couple délivrés par ses deux moteurs électriques nichés sur le train arrière incitent à la retenue. Enfin, parce que l’aileron arrière échappé d’un prototype de la course de côte de Pikes Peak et les bas de caisse dignes d’une berline des grandes heures du championnat de tourisme DTM en font des tonnes.
ADN de drifteuse
Tout comme ses roues avant et arrière de respectivement 19 et 20 pouces qui débordent généreusement à grands coups de flasques. Son allongement de 34 cm par rapport à une R5 Turbo ne saute peut-être pas aux yeux, mais je peux vous garantir que ses hanches étirées de 27 cm relativement à un modèle originel déjà fort galbé génèrent un effet visuel spectaculaire.
En apposant le suffixe 3E à une des appellations les plus mythiques de la firme au losange, Renault joue avec son histoire pour mieux s’adresser à tous les publics. Le clin d’œil aux 50 ans de la R5 et à sa légendaire version Turbo apparue huit ans plus tard évoque le passé
La volonté de rendre l’électrification forcée amusante rappelle les enjeux du présent. Enfin, son aspect proche des jeux vidéo et son ADN de drifteuse viennent chercher les jeunes par la main pour les emmener vers l’avenir d’une Renault 5 silencieuse prévue pour 2024.
Une livrée cartoonesque
La ficelle est grosse et le coup marketing aussi fumant que les pneus arrière de la 3E après une bonne séance de contrebraquages, mais la démarche fait plaisir à voir. C’est à se demander si Sandeep Bhambra et son équipe de design ne se sont pas laissé aller à l’excès de quelques substances psychotropes au moment d’affûter leurs crayons.
La livrée cartoonesque noire et blanche relevée par quelques couches jaune fluo sur les entrées d’air excite les rétines. Les GoPro en guise de phares et de rétroviseurs les amusent autant que les fenêtres latérales roses par lesquelles la piste est censée défiler.
Ses concepteurs y voient davantage un clin d’œil à l’image de la France d’Edith Piaf. L’ouverture de la légère porte en carbone est un jeu d’enfant. Enjamber la forêt de tubes qui constitue le châssis pour se glisser à bord l’est en revanche beaucoup moins.
En route avec “Maître” Yvan Muller
Heureusement que le volant extractible facilite les choses. Le baquet décoré de tartans et monté sur glissières pour s’adapter aux diverses morphologies rassure avant de se faire ficeler comme un rôti par l’équipe qui doit resserrer le harnais.
La position de conduite devient vite évidente, même si les jambes à l’horizontale rappellent que la Turbo 3E abrite ses batteries d’une capacité de 42 kWh sous son châssis. Chargé de jouer les copilotes, Maître Yvan Muller est assis à la plus mauvaise place : celle de droite.
Monter avec un parfait inconnu quand on a gagné 10 Trophées Andros et 6 championnats de berlines fait certainement partie des pires moments de sa belle profession de pilote.
Une planche de bord mêlant “show car” et jeu vidéo
Il peut fort heureusement compter sur la présence de l’ours en peluche Drifty, censé « détendre et réconforter les passagers saisis par la puissance du show car »… ou par la maladresse du pilote assis à leur gauche, serait-on tenté d’ajouter.
Autour de moi, la décoration en tissu tartan, la console centrale jaune qui sépare le pilote de son passager et les dix petits compteurs digitaux qui constituent la planche de bord rappellent autant l’univers des show cars que celui des jeux vidéo.
C’est pourtant bien le grand levier vertical commandant le frein à main hydraulique et permettant de déclencher une dérive qui attire immédiatement l’attention, avec interdiction formelle de s’en servir lors de ces trois tours alloués. Sur un prototype unique, c’est plus prudent, non ?
Signaux de fumée
Mon prestigieux passager de droite enclenche la position Drive et me fait signe d’y aller. La manœuvre imposée avant de s’élancer sur la piste fait riper le train arrière, qui grogne sa désapprobation lorsque la direction est en butée : « C’est normal en l’absence de différentiel arrière », me glisse à l’oreille mon talentueux poisson pilote.
Avant de me faire comprendre qu’il faudra vite hausser le ton pour communiquer, en raison du niveau sonore important. De la part d’un véhicule électrique, cela peut étonner, mais quelques mètres suffisent à confirmer ses dires : quel raffut !
Le sifflement de plus en plus aigu au fur et à mesure que la vitesse augmente rend toute conversation impossible. Associé au volume élevé, le tintamarre peu flatteur comparable par certains côtés à celui d’un réacteur d’avion avant le décollage participe à l’ambiance course.
La première accélération franche sur cette piste encore un peu grasse par endroits fait frétiller le fessier. Les pneus arrière, dont la largeur est ici ramenée de 325 à 265 mm par rapport au modèle d’exposition, y contribuent certainement moins que les plus de 70 mkg de couple fournis par les deux moteurs électriques, d’autant plus qu’ils sont disponibles de façon immédiate.
Grip à volonté
Avec un tel punch, je m’attends logiquement à jouer du contrebraquage à la moindre sortie de virage un peu lente. A tort, puisqu’une fois à température, les Michelin Pilot Sport 4 S offrent un grip suffisant pour garantir une motricité tout à fait convenable.
Dieu sait si les accélérations et l’ardeur impressionnent lors des relances, avant de progressivement s’émousser avec la vitesse ! Avec une conduite bien en ligne, la R5 Turbo 3E s’avère plutôt efficace dans un exercice contraire à son cahier des charges.
Elle encaisse les gros appuis, verrouille ses mouvements de caisse avec talent mais finit par élargir la trajectoire en s’approchant des limites. La faute aux 520 kg de batteries qui s’ajoutent aux 980 kg de ce concept déjanté. 1 500 kg, cela commence à faire beaucoup pour une voiture de course, même si cela ne l’empêche pas de se montrer particulièrement stable au freinage.
Les pires facéties au volant
Ce dernier chipe l’ensemble disques et étriers 4 pistons montés à l’avant de la Mégane R.S. et installé ici aux quatre coins. L’absence d’assistance demande du muscle et un dosage suffisamment précis pour éviter tout blocage faute d’ABS. D’autant que la faible course de la pédale ne facilite pas les choses.
La voie arrière plus large que l’avant et l’absence de différentiel arrière imposent de garder les freins jusqu’au point de corde pour pallier cette paresse à l’inscription et alléger la poupe. Cela reste toutefois insuffisant pour la déséquilibrer, à moins bien sûr d’utiliser le fameux frein à main hydraulique.
Une fois maître Muller à sa vraie place, la R5 Turbo 3E montre sa véritable nature. Une simple pichenette sur le levier magique suffit à déclencher une dérive que notre expert maîtrise ensuite à l’accélérateur.
Le pied droit devient dès lors le second volant dans ce grand gauche parabolique de la piste Club de Magny‑Cours. Comme toujours, me direz‑vous, sauf qu’ici les angles affolants pris par le pilote donnent constamment l’impression de partir en tête‑à‑queue…
Même pas, puisque la direction, qui permet des contrebraquages allant jusqu’à 50°, autorise les pires facéties.
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La R5 Turbo 3E s’avère très aboutie pour un concept. Son comportement rigoureux et sa capacité à enchaîner les tours de piste avec des angles de dérive incroyables démontrent le sérieux de sa réalisation.
L’exercice de style entend prouver que propulsion électrique et plaisir ne sont pas incompatibles. Mais il manque une jolie bande-son et un lien direct avec la mécanique, qui rend l’ancienne R5 Turbo plus attachante.
Renault 5 Turbo 3E : fiche technique
Moteurs : 2 électriques à l’arrière
Puissance maxi : 380 ch
Couple maxi : 71,4 mkg
Batterie : lithium-ion, 42 kWh
Temps de recharge de 0 à 100 % : 2 h sur chargeur 12 kW (courant alternatif)
Puissance de recharge maxi : 22 kW (en continu)
Transmission : roues AR, réducteur
Auto-bloquant : permanent (pas de différentiel)
Anti-patinage : non Poids annoncé : 1 500 kg
Rapport poids/puissance : 3,9 kg/ch
L – l – h : 4 006 – 2 020 – 1 320 mm
Empattement : 2 540 mm
Pneus AV & AR : 225/35 R 19 & 325/25 R 20
Prix : modèle non commercialisé
V. max. : 200 km/h
0 à 100 km/h : 3”5