Si un Dieu créa Saint-Tropez…, un diable à développé l’immobilier de Saint-Tropez…
Connaissez-vous les Parcs de Saint-Tropez ?
Non !
Et bien, tout comme le cap Ferrat, la villa Montmorency à Paris et d’autres endroits réservés aux milliardaires, le “Vulgum Pecus” ne passe pas…, c’est sélect…
Dans la presqu’île du cap Saint-Pierre à Saint-Tropez, lorsqu’on emprunte le chemin de la Fontaine-du-Pin, une barrière bloque les curieux au croisement de la corniche de l’Ay…, vingt-quatre heures sur vingt-quatre, des gardiens sortent de leur guérite pour contrôler l’identité des automobilistes : “Les Parcs de Saint-Tropez” sont une propriété privée. On ne reçoit pas les journalistes et on ne leur parle pas non plus”, m’a d’ailleurs d’emblée précisé Corinne Fabre, lobbyiste chez Burson-Masteller à Paris et présidente de la copropriété.
Quelques-uns des plus grands patrons français et étrangers prennent leurs quartiers d’été dans cette “gated community” tropézienne : le transporteur Norbert Dentressangle, Francis Holder, le fondateur des boulangeries Paul, l’homme d’affaires égyptien Mohamed Al-Fayed ou encore Bernard Arnault, le patron de LVMH…, tous ont élu domicile dans cet éden de poche, situé entre la baie des Canoubiers et le massif des Maures.
Les Parcs, ce sont près de 200 maisons avec piscines et plages privées au milieu de la pinède et des vignes…, un havre de quiétude, loin de l’agitation du port et de l’essaim des touristes.
Des agapes données jadis par Eddy Barclay aux récentes frasques de Neymar, venu fêter son arrivée au PSG dans la villa Octopussy…, le nom de Saint-Tropez est volontiers associé à des images de jet-set et d’excès nocturnes…, mais qu’ils soient propriétaires ou locataires, les estivants tropéziens seraient plutôt en quête de calme et de discrétion.
“La plupart de nos clients ne sont pas là pour la fête, mais cherchent des maisons de famille. S’ils veulent aller au barnum, ils peuvent, mais ils ne sont pas obligés”, m’explique Giorgio Imparato, directeur de l’agence immobilière Barnes.
Il est vrai qu’on n’a jamais vu Vincent Bolloré (qui a acheté au-dessus de la plage des Canoubiers) prendre des douches au champagne, ni François Pinault (propriétaire d’une maison près de la chapelle Sainte-Anne) exhiber des chaînes en or.
Bien sûr, Saint-Tropez regorge de lieux de sociabilité pour happy few, comme le Byblos ou le Club 55…, mais son attrait est ailleurs.
“Saint-Tropez, c’est un décor de campagne à la mer dans une ambiance à la fois chic et décontractée, vous en savez quelque chose”, me résume Laurence Chaleil, directrice Côte d’Azur au département immobilier de Sotheby’s.
Du producteur Stéphane Courbit à Nazek Hariri, la veuve de l’ancien Premier ministre libanais, en passant par le magnat américain Stephen Schwarzman, ces riches vacanciers raffolent du même farniente made in Saint-Trop.
Le matin, on rejoint le port au volant d’une Mini Moke, la vieille version balnéaire et snob de la Mini, voire pire avec une antique Méhari, ou plus baroudeur en Jeep Wrangler…, pour avaler un café chez Sénéquier…, puis on file vers une plage privée de Pampelonne, pour un déjeuner tardif, “à l’espagnole”.
Le soir, on reste chez soi, et les voisins sont reçus au milieu des pins parasols, un chef aux fourneaux.
Le village, comme les communes limitrophes de Gassin et de Ramatuelle, a échappé au béton grâce à des règles de construction particulièrement strictes…
D’ailleurs ; “Les clientèles moyen-orientales et indiennes n’achètent pas ici, car elles cherchent des maisons de plus de 1.000 m², ce que notre PLU interdit”, m’assure Giorgio Imparato.
Pour s’offrir ces vacances dorées, le ticket d’entrée se chiffre en millions.
Selon les dernières données notariales, le prix médian d’une maison est à Saint-Tropez de 2,3 millions, quand le mètre carré pour les appartements s’élève à 7.290 euros.
Les bâtisses d’exception dépassent allègrement les 10 millions d’euros… et une vue sur la mer (le type de bien le plus demandé), augmente le prix final de 40 %.
Pour une demeure “les pieds dans l’eau”, inutile de chercher au-dessous de 20 millions d’euros. (une villa de 500 m² vient d’être vendue pour cette somme dans le quartier du Capon à coté de celle de Brigitte Bardot).
Le cœur historique est aussi particulièrement prisé…, un 260 m² situé à quelques minutes de la place des Lices a trouvé preneur à 3 millions d’euros…, c’est l’emplacement idéal que cherchent avant tout les acheteurs, pas trop loin de la mer et du port.
“Le profil type de notre client est le capitaine d’industrie qui vient de vendre sa société plusieurs dizaines de millions d’euros”, me décrit Éric Raphaël, directeur de l’antenne locale de Michaël Zingraf.
À l’image de Gérard Mulliez, fondateur d’Auchan, ou du PDG de Clarins, Christian Courtin, les pontes du business représentent la majorité des propriétaires…, les acheteurs de ces biens hors normes sont à 80 % étrangers, et viennent d’Europe du Nord ou d’Allemagne… et certains n’hésitent pas à raser le bâti existant pour le reconstruire selon leurs goûts.
Entre le jardinier et le nettoyage de la piscine, la facture de l’entretien avoisine les 50.000 euros annuels….
Certains radins louent leur bien quelques mois dans l’année à des “ceusses” qui ont l’envie ou le besoin de paraître plus qu’ils ne sont déjà…, les prix de location à la semaine s’étalent de 10.000 à 350.000 euros…, les frais évoqués ci-avant sont rapidement couverts…
Les locataires, de plus en plus soucieux d’éviter la foule du port, demandent toujours davantage de services, les prestations d’un cuisinier, d’une lingerie et d’une conciergerie sont souvent compris.
Le marché immobilier tropézien n’a pas toujours été aussi inabordable.
Quand, dans les années 1950, Brigitte Bardot s’offre La Madrague (un ancien hangar à bateaux coiffé de bougainvillées), elle débourse 25 millions de francs, ce qui équivaut aujourd’hui à 375.000 euros.
Dans ce paysage qui a envoûté le peintre Signac, le premier amour de BB, Roger Vadim, tourne les scènes extérieures de Et Dieu créa la femme….
Grâce au succès du film, le village de 4.000 âmes accède à une notoriété internationale… et Saint-Tropez devient une cité balnéaire à la mode et l’immobilier prend de la valeur.
La copropriété des Parcs, créée en 1956 autour du château Borelli, attire les notables de la région…., un peu plus tard, ils seront rejoints par le milliardaire belge Albert Frère, un “historique” du lieu, tout comme Jean-Marie Nusse, le patron des papeteries Clairefontaine…., puis l’empereur indien de la sidérurgie Lakshmi Mittal ou le maroquinier Jean-Michel Signoles viendront faire leur nid dans la cité.
Les agences indépendantes, qui ont longtemps contrôlé le marché, sont peu à peu remplacées par des intermédiaires internationaux, tels que Barnes ou John Taylor.
C’est à partir des années 1990 que les tycoons étrangers, inconnus du grand public, se sont mis à acheter massivement sur la presqu’île…, certains clients sont alors encore des people comme George Michael, Johnny Depp ou Giorgio Armani.
La plupart des familles tropéziennes vendant leurs maisons…, Saint-Tropez devient une case recherchée sur le Monopoly des ultra-riches, à l’image de destinations comme Saint-Barthélemy, Courchevel et Gstaad.
Jusqu’en 2014, le marché a été dopé par l’arrivée d’oligarques russes qui paient cash des maisons à plus de 10 millions d’euros…., mais un premier coup de frein a lieu après la première crise financière de 2007.
Le marché continue à s’assoupir avec l’élection de François Hollande, dont le programme prévoyait de taxer à 75 % les hauts revenus. .., sur la période du précédent quinquennat, certains biens enregistrent une baisse de 10 à 20 %.
Le village fait aussi les frais de son image bling-bling :
“L’afflux important des milliardaires russes a conduit certains commerçants à augmenter leurs prix de façon excessive, sans améliorer la qualité de service”, déplore Laurence Chaleil.
La chute du cours du rouble, en 2014, raréfie cette clientèle voyante…., les prix chutent drastiquement… et une nouvelle clientèle en profite pour rafler ce qui peut l’être avec parfois 50% de rabais en cas de paiement cash…, ca ne va durer que 3 ans car depuis quelques mois, le marché tropézien retrouve des couleurs…, les professionnels pointent un “effet Macron”.
“Certains propriétaires attendent de voir ce que le gouvernement va faire avec l’ISF, mais nous sommes dans une dynamique positive avec un retour des acheteurs à 5-6 millions”, note Magali Masuy, de l’agence John Taylor.
Le nombre de ventes est en hausse, avec des prix moins stratosphériques et stabilisés…., l’image “probusiness” du nouveau président rassure les grandes fortunes.
Symbole de ce regain de dynamisme, la villa Octopussy, sur le marché depuis plusieurs mois.
Pour s’offrir cette propriété de 5.000 m² avec sa piste d’hélicoptère, son port privé et ses deux piscines chauffées, l’heureux élu (un homme d’affaires européen) a déboursé plus de 40 millions d’euros.
Au-delà des aléas de la conjoncture, le joyau varois reste un investissement sûr.
Si un Dieu créa Saint-Tropez…, un diable à développé l’immobilier de Saint-Tropez…