Il y a quelques années, en cause de l’affaire Strauss-Kahn, les vieux poncifs éculés féministes sur les prostituées en avaient pris un coup sous la ceinture avec la mise en avant de parties fines au Carlton de Lille…
La réalité est que, sans nul besoin de transiter par cet hôtel, certaines femmes du Grand-Nord de la Franchouille (ainsi d’ailleurs que de l’ensemble de l’Hexagone) se faisaient de 15 à 20.000 euros net d’impôts mensuels, souvent plus, parfois beaucoup plus, tout ça pour quelques parties de jambes en l’air tout frais payé.
Je ne suis pas sûr qu’on puisse les nommer “victimes”, la vraie victime ne serait elle pas la personne trimant dans un boulot difficile et ceci pour à peine quelques centaines d’euros/mois ?
Pour comprendre le phénomène des parties fines, mis en lumière dans l’affaire du Carlton de Lille, j’avais à l’époque rencontré les petites mains (sic !) qui permettent à ces soirées de débauche d’exister.
Après le Bunga-Bunga de Berlusconi et les mésaventures du footballeur Franck Ribéry, l’affaire du Carlton de Lille montrait que les parties fines n’avaient rien perdu de leur succès…, elles servent à favoriser un contrat, manifester son amitié envers une relation bien placée, s’arroger un marché public lorsque l’appel d’offres est disputé ou encore faire chanter une personnalité aux mœurs libérées : ces soirées à thème “champagne et filles faciles” ont de multiples fonctions… et les journalistes en sont également bénéficiaires, quelques privautés en échange de rédactionnels bien orientés, ce n’est pas cher payé…, c’est même un investissement !
Ou commence et se termine la prostitution ?
Sans doute eut-il fallu le demander à Carla Bruni avant son mariage avec Nicolas Sarkozy et surtout à Rachida Dati alors qu’elle était parvenue (sic !) à être nommée Garde des Sceaux…
À en croire Corinne, 28 ans, habituée des bars à hôtesses : “L’organisation de parties fines pour mettre de l’huile dans les rouages, c’est vieux comme le monde. J’ai connu ça dans les bars. Trois ou quatre flambeurs arrivent pour célébrer la vente d’un bien, le début ou la fin d’un chantier. Ils viennent assez souvent du milieu du BTP où se multiplient les travaux au noir, les commissions et les intermédiaires. La soirée revient de 300 à 500 euros par client, et ils trouvent sur place l’ambiance, le champagne et les filles. Ce genre d’extra permet de faire du lobbying en laissant moins de traces sur le compte en banque qu’un pot de vin. Parfois un habitué fait appel à une fille pour une soirée spéciale. Elle recommande quelques amies. Voilà, le tour est joué, par le bouche-à-oreilles. L’affaire de proxénétisme du Carlton de Lille reste néanmoins exceptionnelle par le profil des protagonistes présumés, le haut standing du lieu de passe, et par les retombées médiatiques de l’enquête. Je ne fus pas surprise de voir la police impliquée. La prostitution a toujours été bonne pourvoyeuse de renseignements et de récompenses pour les collaborateurs des services par le travail de fichage, les policiers savent à qui s’adresser, ils sont souvent en position de pouvoir jouer les intermédiaires. La célèbre Madame Claude organisait déjà ce genre de parties fines il y a plus d’un demi siècle… et ce avec l’accord et parfois même le concours des autorités. Dans le cas du Carlton, de hautes personnalités avaient été impliquées avec des escort-girls de luxe. Par courtoisie, le bénéficiaire de la passe n’est pas toujours informé du fait que la relation qu’il consomme est tarifée. Mais rares sont ceux qui se posent beaucoup de questions”…
Escort-girl, c’est être un bijou vivant dont se pare le client !
Bien que les généralités soient souvent hasardeuses en matière de prostitution, quelques indices révélés par l’enquête ont permis de brosser une typologie des filles impliquées dans des parties fines comme celles du Carlton.
Le journal télévisé de M6 évoquait le cas de Florence V.
L’escort-girl connaissait déjà personnellement Dominique Strauss-Kahn, mis en cause dans ce dossier, elle habitait un pavillon d’aspect cossu de la banlieue de Valenciennes et vivait en couple.
Un portrait différent de celui des victimes de l’esclavage sexuel pratiqué dans les bois de la banlieue parisienne.
“Ce n’est pas la pute du coin que l’on retrouve dans ces prestations très haut de gamme; ce sont plutôt les grandes dames de la prostitution”, m’a confirmé Sabrina, volubile dominatrice de 34 ans….
Il n’est donc pas rare qu’elles soient étudiantes ou diplômées du supérieur.
Ce type de prostituées doit offrir une prestation irréprochable, arborer une tenue classieuse mais discrète et maîtriser les codes de la haute société.
Les clés du succès : transcender les canons esthétiques du moment et afficher une culture soutenue.
Il s’agit de ne pas démériter dans les dîners mondains dans lesquels elles prospectent et se renseignent sur les goûts de chacun.
Elles travaillent souvent dans le cadre de GFE (Girlfriend Experience), cette prestation vise à donner l’illusion au client comme à son entourage qu’elles sont de vraies petites amies… et elles le font payer à prix d’or.
“Ces filles ont en général compris que l’habillage social valorise leur prestation, ce sont de véritables actrices”, m’a expliqué Sabrina.
L’escort-girl de luxe ne fraye pas avec le bas peuple et gagne bien sa vie : “Pour une soirée de ce genre, on tarife entre 1.500 et 2.000 euros sans problèmes”, m’a confirmé cette habituée du tapin chic.
Tous les frais subsidiaires hôtel, taxi, restaurant, pourboires sont en général à la charge du client.
Le principe de ces courtisanes modernes : leur prix n’a pour limite que l’ampleur du fantasme qu’elles génèrent.
Le bon tuyau, c’est la mise en relation avec ces clients aux demandes particulières, seuls ou en groupe et souvent prêt à débourser sans compter pour marquer le coup en bonne compagnie.
“C’est un marché aux bons tuyaux, ou n’importe quelle fille un peu dégourdie qui bosse à Paris sait qu”il suffit de fureter près des bars des hôtels de luxe très tôt le matin pour tenter d’échanger les tuyaux des employés contre un pourcentage sur la passe. Dans d’autres cas, une prestation sexuelle pourra servir l’échange, même si l’argent reste le moyen le plus courant et le plus intéressant”, a témoigné Sabrina, ajoutant que deux cent euros n’est pas incongru.
Par souci de standing et de discrétion, une société spécialisée dans l’événementiel, le coaching ou encore la communication couvre parfois ce genre de commerce sexuel.
Dans le cas du Carlton, il apparaît en effet qu’une organisatrice spécialisée : Virginie Dufour, a payé les billets d’avion, les frais divers et les prestations sexuelles des prostituées envoyées aux États-Unis.
“Mon concept : effectuer à votre place tout ce que vous ne voulez ou ne pouvez pas faire. Confiez-moi vos besoins, je vous consacre mon temps”, annonçait le slogan du site web de son agence de communication.
De l’autre coté du comptoir d’accueil le sujet est tabou, le personnel hôtelier risque gros.
Pas d’industrie de la partie fine dans l’hôtellerie de luxe !
On confirme l’existence du phénomène mais il reste marginal.
Pour Émeline, hôtesse d’accueil trentenaire dans un hôtel quatre étoiles proche des Champs Elysées, il n’y a pas d’industrie de la partie fine dans l’hôtellerie de luxe parisienne : “Un employé qui fait l’intermédiaire entre prostituées et clients risque de lourdes sanctions en plus des poursuites pénales. Par contre le silence s’achète plus facilement qu’une complicité active. Les agents de sécurité, par exemple, connaissent souvent les prostituées, au moins de visu. J’ai constaté que certaines sont éconduites moins vite que d’autres… Mais là encore, tout est informel. Cependant, signe que le problème se pose, la plupart des établissements prestigieux ont une politique déclarée ou non, au sujet de la prostitution. Des consignes implicites assez strictes sont transmises aux employés pour repérer et dissuader les prostituées. Dans le jargon de la maison on appelle ça des FNA (femmes non accompagnées). Nous devons leur poser un maximum de questions, demander un paiement comptant d’avance, prendre leur nom, noter la chambre, leur faire sentir qu’elles sont repérées. Il s’agit de mettre mal à l’aise aussi bien le client que la prostituée pour que la situation se dénoue d’elle-même. C’est très délicat, car il ne faut pas se tromper. Je me souviens d’une anecdote : une femme seule et habillée sexy s’est vu refuser l’entrée d’un salon VIP de l’hôtel, soupçonnée de racoler. Manque de chance, c’était la directrice commerciale d’un grand groupe de médias. Nous ne sommes pas encore habitués à voir beaucoup de businesswomen”…
Un groom d’un quatre étoiles du premier arrondissement de Paris m’a confirmé : “Il y a dix ans, tout le monde savait que le concierge de l’hôtel amassait une fortune en jouant les entremetteurs. Encore aujourd’hui les clients nous sollicitent tout le temps mais on ne fait plus ça, c’est trop risqué. En tout cas, ça ne se sait pas. Certaines filles viennent directement dans les halls ou au bar des hôtels pour racoler plus ou moins ouvertement. Il peut arriver que les employés d’un hôtel collaborent avec la Police pour mettre à bas un réseau de proxénétisme, ou à l’inverse qu’ils réclament une intervention pour chasser les racoleuses. Nous recevons une liste de personnes indésirables, mise à jour régulièrement. C’est un sujet sensible, il faut préserver l’image de l’établissement sans oublier la satisfaction du client, et notamment que ce qu’il fait dans sa chambre ne nous regarde pas”...