Quel hère suis-je ? Ou ère-je donc ?…
Il est je ne sais plus quelle heure, encore moins quelles minutes et sûrement pas quelles secondes. Même pas quel jour, à moins que ce ne soit la nuit et que penser de la date, semaine, mois ?… En quelle année suis-je ? … Ou hère suis-je ère-je donc ? … Piting ! Un Mojito de trop, si pas plus… Il va me falloir récupérer de mon overdose. La soirée avait pourtant commencé sous de bons auspices avec la découverte, sur l’ordinateur d’Anamary de “Stop Talking” en Klingon (BIjatlh ‘e’ VImev). J’en ai profité pour surfer sur Wikipedia. L’article “langues artificielles” m’a fait découvrir le ‘latino sine flexion”, un latin simplifié, inventé en 1903 par le célèbre mathématicien italien Giuseppe Peano. Dans les années 1950, le “Latino sine flexione” est devenu “l’Interlingua”. Imaginez-vous en train de discuter en latin ou que ce soit en dehors du Vatican, mais sans toutes ces déclinaisons de physique quantique ! En moins de 15 secondes j’étais capable de faire une phrase : “Illo es mi fillo”. La découverte est d’autant plus extraordinaire que j’étais nul en latin… Autant l’esperanto sent à plein nez le ’68-tard altermondialiste, que “l’interlingua” me fait penser au roman “Quicksilver” de Neal Stephenson. Le latin comme langue des flibustiers de la connaissance…, ça a de la gueule, n’est-ce pas ? Ces “Vaticanneries” me font soudainement penser au vaniteux Saint-Pépère, ce mécréant, que Dieu ait son âme !
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Au fond d’une impasse, une fête d’enfer vient de décoller. L’alcool coule à flot. Les verres ventrus comme des panses de moines paillards se tendent pareils à des bouches à feux d’un vaisseau pirate. Pieds de nez aux petits fours qu’on oublie au profit des liquides philosophiques. Débarquant d’une fête à Saint-Tropez, des “Renegados” déboulent dans la tanière de mon pote. Frédo, en viking buriné par des razzias mauresques, s’interloque devant une photo de fille torturée par un Master en plastique. Tout autour de nous de jolies filles s’écoulent selon une improbable mécanique des fluides : parfums, lèvres, chevelures, jambes, seins, croupes… C’est la chair liquide et sensuelle d’une nuit d’été Tropézienne avec décolletés plongeant ou on aimerait déclamer du Pessoa. Le DJ attise le feu. La bacchanale s’enhardit. Dans une pièce reculée un billard américain réunit des Bellâtres-friqués et des Dragueurs-aux-longs-cours sur le grand retour et de passage. Un groupe de jazz fait son boeuf pas loin d’eux. Une blonde vénus improvise une masturbation sur une gamme saturnienne, un déguisé lui arrache sa croix d’argent d’un geste inquisiteur. “Vade retro satanas”. Il ne manque plus que les possédées de Loudain et Emerich l’inquisiteur pour faire un opéra porno mystique. L’œuvre vire au rouge. La treizième heure revient.
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