“Piting de piting…”
Toulouse… Chambre 13… Hôtel de passe “Le Toulouse-Lautrex”… [un bordel antique voué à une prochaine destruction, aussitôt que les promoteurs auraient jugé de l’assainissement suffisant de cette partie de Toulouse.] La Maîtresse péripatéticienne qui avait fouetté et torturé Pierre, l’Orang-outan lubrique, demandait son dû en lui agitant une dernière fois ses énormes roberts, les plus gros de toute la région Toulousaine… la chienne de Pierre, insensible à ce spectacle, reniflait les spermes qui tachaient le plancher. Elle était affalée et collée tout contre l’épais radiateur de fonte. Ses ronflements incessants couvraient sans peine les grincements pathétiques de la robinetterie à chaque fois qu’une prostituée lavait un client avant de lui enfiler sa capote. Son maître sifflait parfois, sans succès. La chienne n’aimait pas le froid. Dès les premiers frimas, elle se mettait à grelotter, à geindre et refusait rapidement d’effectuer le moindre mouvement qui aurait pu l’éloigner d’une source de chaleur.
Pierre, se foutait de la température. Il aurait tout aussi bien pu dormir dehors, même en cette saison, c’était un vrai animal lubrique, on le surnommait “Orang-outan” à cause de sa taille et de sa sexualité exacerbée. Il ne crachait pas sur un peu de confort mais ses finances lui permettaient tout juste de se nourrir, lui et sa chienne. Alors l’hôtel, Piting ! Il avait prêté son appartement, pas très loin de cet hôtel, à un ami du nord, quelqu’un de bien… Il avait résolu d’aller passer la semaine à l’hôtel pour pas trop déranger, de plus son ami avait été généreux… Il s’était dès-lors payé les sévices-services de la grosse Lulu… et surtout du Gros-Albert qui avait un chibre de 35cm !
200 euros qu’elle lui avait demandé ! Piting ! Le Gros Albert aidait pour le plaisir d’enculer et il offrait sa jeune cousine en prime ! Des dégénérés…
La chienne devait être ce qui se fait de plus lourd, épais, envahissant et musculeux en matière de canidé. Noire de poils, ras par ailleurs, des reflets bleus sur la truffe, une queue tout juste assez longue pour ne pas la déséquilibrer dans sa course, une mâchoire puissante et des yeux hallucinés.
Entre nous, les yeux de cette chienne terrifiaient tout le monde car, quelle que soit la source de lumière, ils reflétaient toujours une étrange flamme rougeâtre au centre d’un puits sans fond : un accès direct aux forges de Vulcain. On avait beau connaître son caractère, on avait toujours peur qu’elle chique la main si on condescendait à flatter son poil. Pierre, l’Orang-outan lubrique, profitait, avec un sentiment de parfaite béatitude, du spectacle profondément érotique de la copulation effrénée de deux mouches. Elles étaient installées confortablement sur le bouchon de la bouteille de pinard posée sur la table basse près de lui et, dédaignant le fait qu’on soit au début de l’hiver, elles vaquaient à leurs occupations comme si elles avaient été au plus fort de la canicule du mois d’août précédent.
En fait, Pierre s’emmerdait profondément. Bien que conscient de sa chance de n’être responsable de rien devant personne, il était écœuré par son ennui chronique. Ce fut la raison principale de son engagement dans ce qui suivit. À quatre heures du matin, il était clair qu’il ne fermerait pas les yeux de la nuit, encore une fois. Six jours de veille ininterrompue, entretenue à coup de pinard et d’amphétamines, de saucisses et de visites à la beautiful black aux yeux verts qui se pavanait sous les sunlights au sodium, offerts par les services techniques de la ville et la compagnie Electrohm aux troubadours de la nuit.
“Piting ! Tout ça pour des putes !” Mais à tout prendre, il préférait ça aux rêves désespérants qu’il avait tendance à faire.
Il se disait bien qu’il était temps qu’il aille voir ailleurs, mais il y avait toujours quelque chose pour le retenir : une baise dans un squat, une virée avec un carton de vinasse chez les cloches des halles désaffectées au sud de la ville. Les lueurs orangées, vertes, orangées, vertes, orangées des néons du pornshop d’en face n’arrivaient pas, cette nuit, à l’hypnotiser assez pour qu’il oublie son voisin dont les beuglements incessants et tragiques traversaient la cloison en plaqué de la piaule et dérangeaient sa chienne qui aboyait à la mort…
Latâche, son ex-voisin de son appartement, vidé, avait élu domicile dans cet hôtel borgne, ce claque-merde. Latâche était un vieux type, hypocondriaque, complètement parano et chantant faux des grivoiseries indignes du carabin le plus malchanceux, celui qui n’a qu’une couille.
Pierre tripotait son pénis et ses couilles depuis un bon moment, il s’amusait avec des cadenas, quelques chainettes et des ring’s que lui avait vendu sa Maîtresse péripatéticienne. Il se branlait tout en lisant avec dévotion un article illustré sur le self-bondage.
Le résultat était “couillu”, son pénis turgescent mesurait près de 25 centimètres grâce à tout ces accessoires. Il se risqua à déambuler dans la chambre, fit quelques petits sauts rien que pour le plaisir de regarder son sexe sauter, pensant aux seins pendouillant des Pony-Girls. Tout en sautillant, il se prit les pieds dans une des chaînettes et ne pû garder son équilibre. Il chuta sur la table passablement décorée par les insanités les plus délirantes et suggestives, les numéros de téléphone de dames et d’hommes disponibles pour aider un individu solitaire à tromper sa main droite et, incongrues en cet endroit, les meilleures citations du Livre des Révélations.
“Pitinggggg !”
Le grand dragon qui semblait sortir du bois, prêt à mordre, à avaler, à mâchouiller et à recracher le premier Saint-Georges qui oserait garder son armure en ce lieu respirant le stupre était face contre table, cul à l’air et couilles mollies…. De toute façon, il n’y avait plus guère de vierges à secourir et les dernières ne le seraient plus très longtemps, pas assez en tout cas pour que l’on puisse quoique ce soit pour elles.
Pierre se releva calmement. Disons, aussi calmement qu’un lion qui vient de finir sa sieste, qui veut tirer un coup avec la plus charmante de ses compagnes et qui s’aperçoit qu’un lionceau lui mordille le testicule gauche avec obstination depuis deux heures. C’était à peu près le temps durant lequel Pierre avait déjà dû supporter les hurlements de Latâche, son voisin glossolalique.
Pierre sortit totalement nu avec les chainettes, les cadenas et tout le bazar autour de ses testicules. Le couloir lépreux de l’hôtel était occupé par deux gamines trop jeunes pour sortir le soir, mais certainement déjà trop vieilles pour s’amuser dans le château magique de la Belle au bois dormant. Le Prince charmant, elles l’avaient déjà rencontré, il s’appelait Boparf et il attendait au bar-pmu qu’elles lui amènent la double recette de ce soir : celle de leur petit cul serré dans des robes de lamé noires un peu justes de trois tailles et celle des petites cocottes de papier transparent qu’elles devaient essayer de refiler à leurs michetons. Pour le moment, la blonde platine faisait un fix à la brune, juste sous la plante des pieds, histoire de supporter la fin d’une nuit trop triste et trop froide. Un petit baiser complice conclu l’opération et elles retournèrent à leurs affaires, non sans avoir jaugé d’un œil critique et connaisseur le vieux mâle aux cheveux rasés qui les croisait, totalement nu avec des chainettes autour de son sexe qui recommençait à être turgescent… C’était un spectacle dantesque. Pierre faisait un mètre soixante-dix et 100kgs de matières grasses qui roulaient sous un perfusé. Un sourire carnassier, peut-être à cause de la légère proéminence des canines supérieures et inférieures.
Pierre était étrange, certainement, inquiétant à coup sûr. Ses préférences vestimentaires et son goût pour le maquillage (khôl et henné sur fond blanc, paillettes argentées) intriguaient et rebutaient. Il avait vraiment l’air d’un matador espagnol sur le retour qui voulait jouer au dur à cuire. Personne, sauf son ami du nord, le “Grand” comme il le surnommait, n’aurait pourtant osé le lui dire en face. Ni dans son dos d’ailleurs. On sentait bien que son calme apparent n’était qu’un vernis trop frais pour qu’on puisse seulement poser les doigts dessus. Pierre s’arrêta devant la porte de son voisin. Il jeta un regard circulaire pour s’assurer qu’aucun de ses ennemis, vivants ou imaginaires, n’oseraient le braver au milieu de la racaille et des cafards. Sa porte était rongée par les mites et les termites. Au premier coup de latte de Pierre, le chambranle explosa, arrosant l’intérieur d’éclisses et soulevant un nuage de poussière de bois.
Quelques termites s’envolèrent immédiatement pour aller attaquer une hypothétique plinthe encore épargnée par leur appétit. La porte hésita un bon moment sous le choc, retrouvant son logement durant un court instant, avant d’aller s’écraser sur le tapis qui recouvrait le plancher pourri par des générations de clients trop saouls pour enlever leur fut’ avant de se pisser dessus. Pierre comprit rapidement la raison du vacarme en contemplant l’énorme armoire normande qui occupait quasiment la moitié de l’espace libre. Elle était assez grosse pour qu’on eut dû construire l’hôtel autour. Même démontée, elle ne passait pas dans l’escalier. A l’intérieur, Latâche hurlait des trucs incompréhensibles, d’une voix étouffée mais amplifié par la superbe caisse de résonance qu’était cette armoire. Pierre prit le temps d’admirer chacun des bibelots exposés sur des planches servant d’étagères. Une collection superbement inutile, née dans l’esprit d’un pervers tordu et déjanté.
Entre les reproductions en cire des plus calamiteuses inepties médicales, les bocaux emplis d’organes répugnants baignant dans le vinaigre ou le formol et les fœtus animaux et humains momifiés, il y avait là de quoi faire frémir Tussaud et Mengele et, en même temps, toute l’académie des docteurs en médecine et des gens du cirque réunis, ou l’inverse. Pierre eut un sourire amusé, secoua la tête avec commisération et reprit le cours de ses pensées et de ses actions, les deux étant le plus souvent simultanées. Il avait un ténor de l’appoggiature en forme de fausse note à faire taire. Pas étonnant qu’il préférât s’enfermer dans son armoire pour hurler plutôt que d’avoir à supporter un spectacle aussi réjouissant qu’une exposition tirée de la malle Barnum. La lueur d’une bougie filtrait entre les gonds, mince raie de lumière dansant dans l’obscurité du salon des horreurs. Pierre s’arrêta pour contempler le spectacle, puis arracha la porte brutalement. Latâche était harnaché comme un robot de cuir et métal dans le fond de la penderie, serrant entre ses mains son sexe prisonnier par un mécanisme diabolique. Un gros candélabre, taille Saint Pierre de Rome, diffusait une lueur vacillante sous le souffle extérieur. Ses décorations, jadis très pieuses, ressemblaient désormais à un tableau de Pollock. La cire gouttait aléatoirement sur l’accoutrement de Latâche, sans que celui-ci daigne faire un mouvement pour s’en protéger. Sa main droite en était recouverte d’une épaisse couche, stalagmite grumeleuse, maintenant durcie.
Le reste de l’armoire était pratiquement vide, à l’exception d’une photo de mariage et de celle d’une tombe fraîchement recouverte, pas d’inscription, pas de marbre, un simple trou creusé en pleine forêt. La photo de mariage était déchirée, ne laissant que le portrait d’une femme sans âge, sans laideur ni beauté, une certaine tristesse dans les yeux. L’interruption d’un élément étranger dans son domaine personnel força Latâche à lever les yeux. Il ne faisait plus que bredouiller doucement, essuyant d’un revers de manche la bave qui maculait son menton. Pierre se pencha sur lui avec l’air sérieux d’un médecin légiste qui contemple un type qui a la bite qui lui sort de la bouche… et Latâche lui donna des explications baveuses en pleurnichant !
“Piting ! Tais-toi donc, pauvre tâche de Latâche !“… Un rouleau de chatterton traînait sous le lit, résultat probable d’une coïncidence hasardeuse. Deux ou trois rubans sur la bouche de Latâche et Pierre put le “travailler” tout à son aise. Latâche ressemblait à un robot japonais qui aurait abusé de sushi avant de livrer son corps à la maestria de son tourmenteur. Pierre avait une grande force qu’il ne contrôlait pas toujours. Le résultat aurait fait hurler de bonheur les amateurs. Mais Pierre avait le goût pour la chose photographique et la recherche de la pérennité, il retourna chercher son appareil photo et filma la scène, Latâche suspendu à la barre de la penderie, les coucougnettes écrasées par l’appareillage diabolique.
“J’ai perdu les clés des cadenas” lui avait dit Latâche avant d’être bâillonné “pas moyen d’enlever le serre-couille et l’écraseur de pénis, de plus le plug vibrateur est coincé dans mon c… fixé par la ceinture“… Pierre n’oublia pas de refermer la porte de l’armoire, certes de guingois, certaines lattes fendues maintenant, afin de préserver la pudeur paranoïaque de son voisin saucissonné et semi inconscient…
Il retourna ensuite se masturber…
“Pitinggggggggggg !“