Gratouilleries…
La croute de pizza est là, rassise, dans son carton sur la table basse, rien à faire, je n’ai goût à rien, un fond de Shiraz stagne dans un verre à pied, abandonné, tout comme moi…, il y a aussi une tache pas nette sur le canapé et une chaussette livrée à elle-même qui tire-bouchonne, peinarde…
Dans la salle de bains, une fine pellicule de savon s’est déposée sur l’émail de la baignoire, quelques poils délicatement recourbés patientent près de l’évacuation et prouvent, si besoin est, que je me suis lavé, preuve aussi que je n’ai même pas pensé à rincer, ben oui…
Hier soir, livré à moi-même, j’ai dîné allongé sur le canapé, presque nu, devant la version non censurée de “Caligula”, j’avais mal à mon genou, fichue bagnole de merde, position de conduite inconfortable, pédales trop hautes, volant trop grand…, mon ménisque en a pris un coup, je ne suis pas sorti, vu ce que je m’étais mis la veille…, ma chemise fushia traine encore sur une chaise et porte encore des traces !
Un faux cul d’ami m’appelle pour savoir si finalement je me décide à lui acheter une Rolls Royce Phantom d’occazzzz qui n’attend que moi…, ce serpent a l’art de flairer les moments ou mon laisser-aller pourrait être propice à des achats inutiles…, dans le combiné, sa voix siffle des joyeusetés…, pareil dix minutes plus tard avec un autre bien pire, le genre à qui il ne faut jamais tourner le dos et se baisser pour ramasser un billet de 500 euros qui semble perdu…, lui est plus sournois, avec sa voix douceâtre, il évoque un vernissage et des filles qu’il connaît…
– “Aie confiaaaaaance”… me susurre l’ami…
Je n’en crois rien… mais une demi heure plus tard il se pointe avec deux nanas, une blondââââsse et une brunââââsse qui rient un peu trop fort…, j’aurai dû me méfier, ces derniers temps j’attire à mon corps défendant une population de femmes disponibles, culturellement libérées et trop heureuses de pouvoir s’encanailler…
J’en ai ras-le-bol de sortir avec des femmes seules qui dardent leurs tétons sous leur petits haut blancs, se passent la main dans les cheveux et pianotent leur mobile compulsivement…, tout en regardant si j’érectionne…
– Alors en forme ! Non pas de suite, mais vers une heure du matin, tu sais moi et les orgies… Waouwww !
– Mm…, j’préfère les gratouillis de coucougnettes aux HopHopHop grotesques, c’est une pulsion intellectuelle…
Yes, cette petite brune a un corps à tourner dans des clips, je l’imagine nue au soleil, alors qu’elle me commente, inspirée, ses copines qui étaient occupées durant l’après midi à se muscler ensemble le périnée sous un parasol…, elle se passe les mains dans les cheveux ensuite on boit et re-boit…, il y a du bruit, je tend l’oreille pour mieux l’entendre, elle me dit un truc pas clair, son haleine est parfumée à la vodka cerise-verte, ça sent le péché aussi…
Qu’est-ce qui fait qu’un mec plante comme ça, une bouche à la cerise et deux gros seins pendouillant ?
La flemme…? La peur ? Un désamour…? Ou son regard narquois ?
Je laisse sa bouche entrouverte avaler de l’air, prétextant que je dois sortir mon Blacky pour son pipi/caca du soir…
Il fait lourd, j’ai les mains moites en les essuyant sur mon front mouillé, puis en prenant mon mouchoir pour me sécher les yeux tandis que je sanglote, je sent un papier dans ma poche, le ticket de vestiaire avec le numéro de téléphone de la nanana…, m…, la salope, manquent deux chiffres…