Je connais un homme, qui rêve de cauchemarder…, il rêve d’Argentine, la langue, les gens, la fiesta, les barbecues…, les femmes !
Il rêve, mais ne fait que se masturber en dialoguant avec des filles sur son écran d’ordi, nuits après nuits, pour rien d’autre que jouir de conneries.
Il ne mange même pas d’entrecôtes de là-bas.
Il s’est mis dernièrement à la Salsa, pour sans doute tournebouler fou autour de l’écran, nu, devant sa web-cam, sans entendre les rires gras de qui sait même pas…
J’y suis allé, moi, en Argentine, un temps d’avant, prétexte d’y fourbir un contrat avec un faussaire en Bugatti, un reconstructeur au départ de rien,à une époque ou tout était encore possible…
Bref, en débarquant à Buenos Aires, il ne pouvait m’arriver que des bonnes choses…
Je ne savais pas ce que j’allais y découvrir…
Pareil qu’ici, mais différent…
Souvenirs !
Ma chambre est une chiotte dans laquelle il y a un lit, un ventilateur et un téléviseur qui ne fonctionne pas.
La moquette soupire constamment sa mauvaise haleine qui oscille tantôt de l’odeur chaude du VRP qui a renversé sa boîte de thon à l’huile il y a deux mois, à celle, acide, du type qui en a vomit une (sauce escabèche) l’année dernière, le tout largement arrosé de whisky.
Bref, un endroit où l’on ne peut guère rester que le temps de faire ses besoins.
Non pas que la chambre m’ait coûté les yeux de la tête, mais pour le même effet un WC public m’aurait incontestablement coûté moins cher.
Pas moyen de faire une sieste.
Je pense à border l’insomniaque…, mais avec cette moquette suppurante ça revient un peu à s’astiquer au-dessus d’une vieille paella.
Tenter une telle aventure parmi ces relents bukowskiens équivaudrait à basculer de la jouissance à l’écoeurement, et de l’éjaculation au vomissement.
Mieux vaut ne pas risquer un tel traumatisme.
Défiant mon sens de l’orientation, je me mets à errer dans les rues.
Après plusieurs cuadras je finis par tomber sur une Whiskeria (bar à putes).
Les néons de l’enseigne commencent à baver sur la nuit débraillée.
C’est une fois arrivé dans ces endroits là qu’on sait qu’on s’est perdu.
Avant de pénétrer dans ce lieu de débauche, je décide d’aller me jeter un verre dans un bar fréquenté par des gens normaux.
Leurs visages, un striptease sans vêtement à ôter ; l’existence nue, pêle-mêle, éclairée au néon.
Quel spectacle terrifiant et magnifique que cette emprise du quotidien.
Je regarde ces gens comme on regarde agoniser des mouches collées à un serpentin adhésif.
En Argentine, un bordel se dit Quilombo, au sens propre et figuré du terme.
La vitrine teintée est plus épaisse que la nuit.
La porte s’ouvre.
Ce bar à tapins est encore plus dégueulasse que ma chambre d’hôtel.
A esta hora es solo para pasar, me fait une femme d’un geste réflexe, comme si sa main animait un petit piston ridicule dont la mécanique du mouvement transformait le foutre en dollars.
A ce moment là une branlette me parait plus appropriée et moins fastidieuse.
Il existe des femmes gratuites et beaucoup moins crotteuses pensai-je.
J’offre mon fond de bière à un clochard en échange de quelques infos.
Les taxis connaissent mieux la ville que quiconque.
Un taxi me dépose au deuxième tapin.
Je vais droit au bar et explique au petit vieux que je fais un reportage sur la nuit à Rosario.
Puedo sacar fotos ? No, pero podes tomar una cerveza, dit-il sans laisser de place à la négociation. Bueno…
La populace est obscène comme un œil trop ouvert.
C’est un repère à pouilleux et à MST, je peux voir des morpions faire une teuf’ dans mon bol à cacahuètes.
Je commence à regretter la moquette de ma chambre.
Une dizaine de putes trimballent leur cellulite d’une chaise à l’autre.
L’une d’entre elles, vient poser sa disgrâce à ma table.
Je ne la regarde même pas de peur d’attraper une conjonctivite, y’a pas moyen que je lui apostrophe le baveur.
Je pose l’appareil sur la table et décide de prendre des photos à l’aveuglette.
Un vigile se pointe aussi sec et m’invite à ranger mon appareil dans son étui, ou alors au choix à y laisser quelques dents…
Ok, je me tire, on va éviter les problèmes avec la Police Fédérale et autres organisations mafieuses cette fois-ci.
Tercer quilombo.
L’accueil est plus chaleureux.
La patronne gobe tout, et accessoirement mon histoire de journaliste, m’autorisant à prendre des photos, pero no de los clientes y del show.
Cool !
D’habitude quand je suis en présence de la gente féminine, j’essaie de censurer ma pensée, mais là il y a des écrans qui partout diffusent des pénétrations anales.
C’est comme si le lieu pensait pour moi, avec certes un peu plus de perversion.
Un Christ SM !
Encore le travail acharné de nos bons jésuites…
Y a pas à chier, on les a vraiment traumatisés avec cette histoire de chrétienté.
Aux WC, mon enfance privilégiée me revient à l’esprit alors que je regarde les boules de naphtalines multicolores rouler au fond de l’urinoir.
Bientôt je disparaîtrai, quelque part, comme un pet malodorant, pensai-je en m’ébrouant pour extraire la dernière goutte.
Sur l’estrade, l’oubli devant mes yeux se déhanche en porte-jarretelles.
Elle me regarde fixement en déboutonnant son sourire.
Ici on fait pas dans la dentelle, me dit-elle, l’amour c’est un truc pour pédés !
Tout aurait été pareil si nous n’avions pas renoncé à notre position de bipèdes en laissant cette chose (l’amour ?) entrer dans l’enceinte des rêves, à l’horizontale, dans l’obscurité d’une chambre et l’obscurité de l’intérieur de nos corps…
Argentina, piting !
J’ai joui…
Ne voulant pas déflorer la ligne éditoriale de ce site, j’ai moi-même pris le soin de ne pas envoyer certaines photos qui risqueraient de mettre au défi la bienséance, et de choquer les bonnes mœurs des plus pervertis.
Le terme “quilombo” est un mot exclusivement argentin.
Vous ne le retrouverez pas dans les autres pays d’Amérique Latine.
Il signifie plus ou moins “bazar“, “bordel“, au sens de désorganisation….: “Che, ayer habia piqueteros en toda la calle. Fue un quilombo !”