Sacrée salope ou salope sacrée ? Quelques réflexions…
Le concept de Salope Sacrée constitue un thème intéressant. Dans notre société, le terme “salope” est totalement péjoratif. Il désigne un être dénué de critères moraux, ayant un comportement licencieux. Qu’est-ce qu’il peut donc y avoir de sacré chez un tel être ? Nous, membres de la Communauté Païenne, savons que toute question, toute chose en fait, possède des homologues. Ceci étant le cas, on peut se demander ce qu’il y a de sacré chez un être considérant un autre être comme ne possédant pas de critères moraux. Si, comme nous l’affirment Platon et Jung, nous créons nos propres réalités, la vraie salope est alors la personne qui juge et non la personne jugée. Ceci étant dit, définissons les termes de manière plus précise.
Dans le cadre de notre vision traditionnelle, une salope est une fille qui baise de manière gratuite avec tous ceux qui viennent (excusez le calembour), ou au moins avec plus d’un partenaire, et souvent en même temps. Si tel est le cas, je propose qu’une bonne partie de notre population, à une période ou une autre, postule pour le statut de salope. Il y a énormément de personnes impliquées dans des relations polyamoureuses qui pourraient prendre ombrage d’un tel épithète. Il en est d’autres qui, à l’occasion, ont une sexualité très libre, récréative, et qui s’inquiéteraient un peu d’une telle étiquette. Il y a aussi les tarés et les connes qui ont des problèmes lorsqu’ils doivent mettre en équation les activités sexuelles d’une personne avec ses qualités et sa valeur en tant qu’individu. Ils pourraient dire, s’ils avaient quelque chose dans le citron, qu’octroyer gratuitement du plaisir à un grand nombre d’êtres est plus un signe de grande valeur que de peu de valeur.
Historiquement, le concept de Salope Sacrée a des précédents. Dans beaucoup de sociétés préchrétiennes et non chrétiennes, la prostitution était considérée comme une véritable et honorable profession. Chez les Romains et les Grecs, on allait dans un temple se payer les services d’une Vierge du Temple, moyennant une légère redevance (donation à la communauté religieuse) avant de passer au culte. L’idée en était que cela permettait à l’individu soulagé de se concentrer plus profondément sur la prière et les Divinités. L’union sexuelle, l’orgasme, ont souvent été associés, dans le monde païen, à un moyen de s’unir aux Divinités. Dans de nombreuses sociétés “primitives”, le partage des femmes était considéré comme une forme d’hospitalité juste et nécessaire. Une chose que l’on retrouve dans toutes ces sociétés, c’est l’absence de confusion entre le monde temporel et le monde spirituel. Le sexe était considéré par beaucoup d’entre elles comme une activité sacrée – dans le sens spirituel.
Ceci est tout à fait vrai dans notre communauté néo-païenne. La réalisation du Grand Rite, qu’elle soit symbolique ou véritable, est un acte résolument sacré. Ce n’est que dans l’univers chrétien-musulman-juif qu’on porte au sexe une telle importance, importance telle qu’elle supplante la valeur individuelle de la personne sous tous ses aspects, et qu’il est en même temps vu comme quelque chose de honteux. C’est une vision très merdique du sexe comme de la valeur individuelle. Il nous incombe donc d’examiner ce qui fait qu’une “salope” est une “salope”. On présume qu’une salope est une fille baisant avec un nombre considérable de personnes, qu’il s’agisse de son choix propre ou de celui d’un tiers. Il faut aussi se demander pourquoi un être s’engagerait dans de telles activités. Cette dernière question est d’une importance primordiale. Les raisons pour lesquelles on devient une salope relèvent de plusieurs catégories.
Tout d’abord : parce qu’on aime ça. Ca donne du plaisir à soi-même comme aux autres. Ca permet de se sentir bien. Ce n’est pas nécessairement une mauvaise chose!
Deuxièmement, c’est une forme de service. Il ne s’agit là d’une chose négative que si nous supposons que le service est, d’une manière ou d’une autre, dégradant pour l’individu et constitue une activité totalement involontaire.
Troisièmement, ce peut être une forme d’expression et d’exploration de soi-même. De même que les Grecs et les Romains baisaient avant de se livrer à leurs adorations, ou considéraient la baise comme une forme d’adoration, cette idée d’expression et d’exploration de soi s’incarne dans un comportement qui, de par son impact dans notre société, nous permet de regarder plus profondément en nous-mêmes ainsi que dans le monde qui nous entoure. Ce n’est pas une mauvaise chose non plus.
Il semblerait bien que les seuls aspects négatifs de la salope, provoquant une répression, ne soient que les étiquettes que nous, en tant que représentants de la société, plaçons sur elle. A quoi ressemble cette activité si nous ne plaçons dessus aucune étiquette ? Il y a des gens, beaucoup de gens à mon avis, qui aiment le sexe. Ils ont toujours une expression charmante sur le visage et semblent se sentir bien après un orgasme. Ca n’a pas l’air d’être pour eux une chose difficile ou douloureuse, et ils ne semblent pas être sujets à l’agitation ou à l’angoisse. Beaucoup de personnes trouvent très agréable de donner du plaisir aux autres, comme à elles-mêmes. Lorsqu’elles peuvent donner ou tirer ce plaisir de plus d’une personne, il semblerait que la satisfaction soit proportionnelle au nombre de personnes ayant pris leur pied. Je ne vois pas en quoi ce serait une mauvaise chose. De telles personnes, d’après ce que j’en ai appris dans le cadre de mon expérience personnelle et limitée, n’ont pas l’air d’être amochées ou d’avoir des raisons de se plaindre.
D’autres considèrent cette activité comme une forme de service. Au cours de ce service, un certain nombre de choses peuvent arriver. Si le couple vit une relation domination/soumission, cela implique, de la part de la fille, loyauté envers son Maître. Il s’agit d’un acte qui augmente la valeur de l’esclave comme du maître (là encore nous présumons que ce service n’est pas une expérience humiliante, mais une expérience gratifiante). Cela devient une expérience enrichissante. On peut tirer beaucoup de plaisir du fait d’effectuer correctement sa tâche, de savoir qu’on en est capable. D’autre part, il est triste le maître qui ne cherche pas à éduquer son esclave, à enrichir la vie de celle qui le sert. Triste aussi le maître qui ne cherche pas à ce que l’obéissance atteigne l’excellence. Personne ne veut mal servir, ou être mal servi. A vrai dire, de nombreux maîtres parlent avec fierté de celles qui les servent, et de nombreuses soumises parlent fièrement de leur capacité à bien servir.
Lorsqu’on peut dire : “Je suis la meilleure dans ce que je fais” ou “Je peux sincèrement dire que j’ai vraiment fait du mieux que je pouvais” (en sachant que c’est vrai), l’on se sent anoblie, élevée et vivifiée. Porter un collier en de telles circonstances relève de l’amour-propre. Ce n’est pas du tout négatif. Question expression et exploration de soi, les salopes sont importantes. Il est beaucoup de termes que notre société considère comme des insultes. “Salope” en fait partie. Si nous considérons nous-mêmes et notre société, nous devons faire en sorte d’être suffisamment libres pour considérer les choses de manière détachée. Très souvent, le maître s’adressera à son esclave d’une manière, ou dans des termes, qui sembleront choquants à des observateurs extérieurs. Il y a souvent une raison à cela (étant acquis que le Maître agit au mieux des intérêts de l’esclave). Une fois que l’on a l’habitude et que l’on accepte d’être une salope, une chienne, une pute ou un trou, peu importe le terme, cela vous met à part de la “norme” sociale. Dès lors, il est possible de se positionner par rapport à la manière dont on effectue correctement ses tâches et ce qu’on est, globalement, comme individu ; l’aspect sexuel de notre vie n’étant plus remis en question.
La soumise peut expérimenter dans la joie la totalité de l’expérience comme une expression physique, intellectuelle et émotionnelle de son être propre et de ses besoins propres. Cela lui permet également de s’affranchir du monde autour d’elle, de ses activités comme de ses pratiques, d’une manière très réelle, presque scientifique. Ce type d’examen clinique laisse peu de place à l’occultation de la vérité. La soumise peut franchement déclarer : “Oui, je suis une salope et une bonne. Je peux tout faire et le faire bien. J’aime ça, et puisque je ne saurais être intimidée ou gênée par ce que je fais, je vois le monde tel qu’il est. Je m’accepte telle que je suis et l’on m’accepte pour ce que je suis. Mon collier est le symbole de ma liberté.” On se demande combien de personnes peuvent parler de la sorte ?