Bien sûr, il y a d’un côté Frida Kahlo, devenue en quelques années une véritable icône de l’art mexicain.
Et de l’autre côté, les Alebrijes, ces étranges animaux colorés en papier mâché et en bois.
Mais pour le reste, le festival ¡ México ! ne propose que des découvertes, loin des clichés et souvenirs de vacances.
À travers 150 pièces, il interroge l’identité mexicaine au fil du temps.
Et celle-ci s’avère incroyablement complexe.
Dès l’entrée, au-delà de la réplique d’une tête olmèque géante, on découvre de petits personnages en terre cuite, réalisés à l’époque pré-hispanique.
Mais déjà, les choses se compliquent.
Entre Olmèques, Mayas, Aztèques, Mixtèques et autres civilisations voisines, on voit déjà apparaître des figures, des styles, des cultures, des sociétés différentes.
En quelques pièces, cette première section le montre bien, révélant notamment un étonnant personnage aux trois visages (jeune, vieux et mort) se déployant comme une poupée russe.
À peine est-on conquis par celui-ci qu’on nous annonce que certains spécialistes contestent son authenticité.
Et nous voilà plongés d’emblée dans toutes les interrogations autour de cette fameuse identité mexicaine.
Entre le vrai, le fabriqué, le copié, le décalqué, le rejeté, l’inventé, le mélangé, Imagenes del Mexicano nous entraîne dans un parcours où toute certitude doit être abandonnée.
Divisée en dix sections, l’exposition suit à fois une progression chronologique et thématique. Du monde pré-hispanique, on passe d’un coup à la Nouvelle Espagne pour s’intéresser aux races et aux classes de cet Eldorado supposé.
“Dans cette époque, nous explique Luis Adrian Vargas Santiago, co-commissaire de l’exposition avec Dafne Cruz Porchini, le statut de chacun était influencé par la race. Au sommet, on trouvait l’Espagnol de souche. Juste en dessous l’Espagnol né en Amérique, ensuite le Métis, puis l’Indien et enfin le Noir, esclave et donc tout en bas de l’échelle sociale. Celle-ci se compliquait dès qu’il y avait mélange : un mixte d’Indien et de Noir n’avait pas grand-chose à espérer tandis qu’un enfant né de père espagnol et de mère indienne allait se trouver au milieu de l’échelle sociale… Et tout cela était très et précisément codifié”.
Sous le regard de l’autre !
On le constate avec une série de tableaux montrant effectivement les différents types de cette Nouvelle Espagne où, par ailleurs, les Espagnols se divisaient également selon leur caste.
Chacun se faisant peindre le portrait pour bien montrer où il se situait.
Mais l’identité mexicaine se construit aussi par le biais du regard extérieur.
On découvre ici des séries sur les costumes mexicains, les différentes classes, les différents types indigènes, vus par Frederick Catherwood, Claudio Linati et bien d’autres visiteurs européens.
Dans la foulée, les Mexicains eux-mêmes se réapproprient ces images, les adaptent et entrent dans le cliché qu’ils combattront plus tard.
C’est notamment le cas avec l’empereur Maximilien (et son épouse, la Belge Charlotte) qui, en adaptant le costume charro pour se faire accepter de son peuple, transforme celui-ci et en fait un archétype adopté par les Mexicains eux-mêmes.
On voit ainsi se construire l’identité d’un peuple extrêmement mélangé, jusque dans les artistes qui lui tirent le portrait.
D’un côté les peintres académiques, de l’autre les autodidactes grâce auxquels on peut découvrir les nombreuses figures des Mexicains des campagnes.
Sans oublier les bouleversants portraits d’enfants morts du XIX, l’idéalisation de l’indigène dans la première moitié du XX et la vision moderne (peinture, photographie et extraits de films irrésistibles) d’un Mexique urbain, chahuté et plus complexe que jamais.
Un parcours passionnant permettant de comprendre un peu mieux ce pays fascinant et insaisissable.