Patrick Henderickx en conférence à Bruxelles : Beyrouth 2006…
Patrick Henderickx a réalisé une extraordinaire performance lors de sa dernière conférence qui s’est déroulée à Bruxelles-Stockel jeudi soir dernier 30 avril 2006, sur le thème que tout part d’un bon sentiment mais que le destin décide et transforme parfois les bons sentiments en drames.
Patrick Henderickx, fasciné par l’écriture et la recherche des mots qui lui ont ouvert les portes de la connaissance, est l’opposé de Freud qu’il voue aux gémonies tout comme ses disciples et les professeurs qui se réfèrent à ses dires et écrits…, dès lors, sa quète l’a amené à une renaissance philosophique et humaine, dans le sens humanitaire, le faisant devenir un maître de l’analyse psychologique.
Il a raconté son initiatique plongée dans l’absurdité du monde, lorsqu’en 2006 il s’est retrouvé au centre du conflit Israélo-Libanais, à Beyrouth, sous les bombes Israéliennes à l’uranium enrichi… et les obus au phosphore… qui réalisaient les uns et les autres un véritable carnage au sein des populations civiles…, alors qu’il était là en mission humanitaire pour sauver des enfants ignominieusement arrachés à leur mère belge et envoyés à Beyrouth par leur père !
Se perdant quelque peu dans le plaisir des disgressions volontaires, Patrick Henderickx nous a également narré ses multiples et édifiantes aventures, démontrant qu’il demeure malgré tout un homme qui cherche, avec force (7), à amarrer sa vie.
La littérature comble son besoin d’idéal… et tout irait pour le mieux si ce n’était que sa recherche devient une passion, pour ne pas dire une monomanie que sa quète alimente.
Plus encore, il parvient à nous obnubiler par sa personnalité qui porte quelques terribles secrets qu’il nous révèle peu à peu.
Comme on le devine, Patrick Henderickx est un homme perpétuellement en crise…, se décrivant d’abord enfant puis adolescent à la croisée de moult sentiments, en cause des horreurs que des adultes lui ont fait subir…
“Tout partait sans nul doute de bons sentiments“…, aime-t-il à dire au solde de ses démonstrations époustouflantes, accentuées par différentes diapositives projetées sur grand écran…, semant des sentiments très forts dans la salle !
C’est un être en formation continue, en d’autres mots, un homme qui souligne les cotés vulnérables de chaque être humain.
Il décrit avec une maestria, les aspects troubles de l’humain, il démontre simplement et sobrement que nous sommes tous, consciemment ou non : impressionnables, neurasthéniques, perdus entre nos aspirations intellectuelles et nos attirances physiques… et que nous nous crèons un univers en retrait qui ne survit pas à l’épreuve de la réalité…
La force de la conférence de Patrick Henderickx tient à la finesse de sa description de nos travers psychologiques, une intelligence du propos sur la complexité de nos moments de vie.
Peut-être y trouve-t-on aussi une courte réflexion sur les relations maîtres-esclaves, car dit-il avec subtilité : “Celui qui n’est pas passionné devient tout au plus pédagogue“…
En finale de sa conférence, Patrick Henderickx entreprend de tracer un moment clef de sa vie, observé avec le recul des années.
Son récit est construit comme une marche en avant avec de longs retours en arrière, saupoudrés de divers décalages spatio-temporels qui expliquent que la confusion des sentiments qui l’anime, soit racontée avec tant de rigueur !
Un grand moment !
Si vous voulez en savoir plus, n’hésitez-pas à lire ci-après : Beyrouth 2006 !
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Beyrouth 2006…
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Parce que, c’est mon choix de vie !
Le 17 juillet 2006 une maman me contacte, paniquée.
Elle me demande d’aller immédiatement au Liban sauver ses enfants qui se trouvent dans la maison de leur père à Beyrouth, bombardé par Israël.
Elle me dit en pleurs : “Mes 6 enfants sont livrés à eux-mêmes dans un pays en guerre, car le père qui les a enlevé, est maintenant bloqué dans un pays voisin. J’attends depuis 3 ans que la justice fasse appliquer un jugement qui m’accorde la garde exclusive pour cause de rapt parental. Mes enfants sont seuls et livrés à eux-même dans cette maison qui a déjà été bombardée. Je crains pour leur vie“.
Par habitude, comme je l’ai fait plusieurs fois en Afghanistan ou au Kosovo, mais surtout pour des raisons de sécurité, j’agis seul.
J’accepte pourtant d’être accompagné de la maman, car le but premier de cette opération est de s’assurer que les enfants sont toujours vivants, de les mettre en sécurité, et de les rapatrier en Belgique sous le couvert du Jugement dont une copie m’est remise.
Je téléphone immédiatement à mon contact au Liban, un certain Jo, lui demandant de venir nous assister après que nous aurons franchi la frontière Libanaise.
Rendez-vous est pris, en cas de retard il repassera nous attendre au même lieu toutes les huit heures.
3 jours plus tard, le samedi 22 juillet, la maman et moi embarquons in-extrémis (ensuite les vols en direction de la Syrie, du Liban et d’Israël seront suspendus), dans un avion en direction de Damas (Syrie) avec 2 valises bourrées de médicaments divers tels qu’utilisés par la Croix Rouge dans des opérations sanitaires en période de conflits armés.
Ces médicaments s’avèrent souvent des “Sésame-ouvre-toi” aux postes frontières et aux barrages.
Arrivés sur place à 16 h locale, la première difficulté est de franchir la douane de l’aéroport.
La tension et la peur sont palpables, situation accentuée par la présence imposante de militaires en armes parmi la foule.
A partir de ce moment tout devient négociations financières pour obtenir un visa provisoire afin de rejoindre la frontière avec le Liban.
En arrivant près du premier poste frontalier, l’exode des libanais quittant leur pays est hallucinant à voir, des kilomètres de gens marchent lentement en direction de Damas, mais ce n’est qu’en arrivant au second poste (200 mètres à faire à pied) que la réalité devient surréaliste !
Des convois entiers, dans une cohue indescriptible, attendent “Le tampon” obligatoire pour franchir les barrières douanières Syriennes.
Après avoir passé ces deux barrages/postes-frontière, nous ne sommes toujours pas au Liban.
Nous sommes à pieds, avec nos bagages, en plein no-man’s-land, obligés de négocier à nouveau la possibilité de continuer vers Beyrouth.
Un Libanais qui avait attendu deux jours pour arriver en Syrie, moyenant finance (200 US$ cash), accepte de faire demi-tour et de nous déposer au troisième poste frontière situé à quelques kilomètres.
A peine arrivés, un missile israélien explose à une centaine de mètres, comme pour nous souhaiter la bienvenue…
Parce que nous transportons des médicaments, le militaire Libanais nous offre le visa de 250 US$ pour entrer au Liban.
Notre contact, Jo, nous attend déjà sur place. Il est passé déjà 3 fois, 24 heures de retard sur l’horaire prévu…
Sans plus perdre de temps on s’engouffre dans sa vieille Oldsmobile, direction la plaine de la Beeka à 20 km de Baalbek, le fief du Hezbollah !
Profitant du trajet, sur une route déconseillée car cible de l’armée israélienne, nous faisons un premier topo de la situation et de la stratégie adéquate pour retrouver les enfants…
La dernière adresse connue des enfants, celle de la maison de leur père, est Baabda dans la banlieue Est de Beyrouth et selon Jo il est fort probable que les enfants seraient avec les 500.000 Libanais en fuite sur les routes vers le nord du Liban…
Il nous dit que notre voyage risque peut-être d’être inutile…
Pour passer la nuit, notre première planque se situe à flanc de montagne avec vue sur la ville de Baalbek, cible de prédilection des israéliens.
Dès la nuit tombée, le bruit sournois des drônes survolant la zone à la recherche de cibles à faire bombarder, empêche tout sommeil.
Vient ensuite les bombardements qui nous soulèvent du sol.
La maman qui m’accompagne est exemplaire dans sa gestion du stress, mais je reste persuadé que c’est une mauvaise idée de l’avoir amenée dans le seul cadre de cette mission consistant à rapatrier les enfants en faisant valoir le Jugement belge exécutoire au Liban.
J’ai soudain le sentiment que la maman ne désire pas seulement m’accompagner pour “voir“, pour “superviser” et pour embrasser ses enfants…, mais à ce stade, je ne peux que continuer !
Le second jour commence à 6 heures du matin, pour profiter de la fraîcheur mais surtout pour re-planifier la route à prendre pour tenter d’éviter les bombardements Israéliens et ce, en fonction des nuages de fumée visibles dans la plaine à plus de 20 km…
Notre choix se porte sur une des voies principales traversant les montagnes et rejoignant Beyrouth.
Choix judicieux car nous ne subirons que 2 bombardements Israéliens visant des convois humanitaires aux couleurs de la Croix rouge, entre lesquels nous nous faufillions…
Arrivés à Beyrouth par le coté Nord (Chrétien), aucune trace de guerre ne défigure la ville et ce n’est qu’en se rapprochant du sud (Musulman), que la présence massive de l’armée, indique que nous sommes dans une zone de guerre.
Longeant la côte pour rejoindre un village à proximité de la ville de Tyr ou nous espèrons retrouver quelqu’un qui aurait des informations sur les enfants, nous remarquons très nettement les navires de guerre Israéliens se positionner pour bloquer le port de Beyrouth.
La maman, Jo notre chauffeur et sa fille (qui est venue pour traduire) restent d’un calme surprenant.
Après avoir dépassé la ville de Damour puis celle de Saïda et juste avant de rejoindre Tyr, l’apocalypse devient réalité.
Des quartiers musulmans entiers ne sont plus que ruines ou des gens cherchent dans les décombres des membres de leur famille (les images aux infos TV donnent une idée minime de l’ampleur des dégâts et de la détresse humaine).
La mort est à chaque coin de rue et les sirènes des ambulances brisent le silence qui suit tout bombardement.
L’envie d’aider est très forte mais notre objectif est avant tout de retrouver la personne qui pourra nous indiquer ou se trouvent les enfants, d’autant que les cartes ne servent quasi plus à rien puisque tout est bombardé, plus de panneaux indicateurs, parfois plus de routes, ou alors elles sont impraticables.
Grâce à Jo et sa connaissance quasi parfaite de la région nous retrouvons le quartier ou vit cette personne et par chance nous la localisons presque immédiatement.
Malgré les évènements elle semble lucide et s’avère très vite émue par la maman qui commence à craquer, elle nous indique que les enfants se trouvent toujours dans la maison de leur père, dans le village de Bzeedine.
La maman qui nous a un peu forcé à venir rencontrer cette personne, semble déçue que les enfants sont toujours dans la maison de leur père, elle laisse échapper que les récupérer aurait été plus simple s’ils étaient ailleurs…
J’ai le sentiment qu’elle en sait bien plus qu’elle ne m’a dit avant que je ne m’embarque dans cette aventure !
Tout un périple pour rien, si nous avions su, nous serions allés directement à l’adresse de la maison du père… et ce en restant dans les zones Libanaises Chrétiennes qui ne sont absolument pas touchées par le conflit qu’Israël a engagé contre le Hezbollah…
Les photos montrant les scènes de guerre et leurs conséquences sont en effet toutes prises en zones Musulmannes…
Au moment où nous reprenons la route, après lui avoir laissé en remerciement une boîte de médicaments et de premiers soins, les bombardements reprennent autour de nous…, mais nous réussissons à passer au travers sans être blessés.
De retour à Beyrouth, nous faisons une pause pour que je puisse juger de l’état psychologique de chacun avant de continuer.
Un mélange d’impatience pour la mère et d’inquiétude pour Jo et sa fille, squattent notre moment de calme tout relatif, pendant que je cherche sur la carte le village de Bzeedine.
C’est un village cossu (entendez que c’est un quartier Chrétien “riche“) à flanc de montagne avec pour seul accès une route qui se transforme parfois en sentier, le lieu semble à l’abri du conflit.
Mais très vite un constat me saute aux yeux !
Quand les 2 routes principales seront détruites par les bombardements israéliens pour empêcher l’acheminement des convois humanitaires, cette route sera le seul moyen de rejoindre Beyrouth avec les conséquences que cela pourrait engendrer : le pilonnage de Bzeedine !
Jo est dubitatif, il me rétorque que les Israéliens ne bombarderont jamais des secteurs Chrétiens… et que s’ils bombardent des convois, c’est parce que ce sont des ravitaillement d’armes venant de Syrie pour le Hezbollah, pas des convois humanitaires, et que dès lors Bzeedine restera un havre de paix !
Mais je ne l’écoute pas, pour moi, l’urgence est évidente et pour la maman qui en rajoute sur la guerre et ses enfants bombardés chaque heure qui passe réduit nos chances de retrouver ses enfants vivants…
Je décide alors, pour la première fois en 16 ans de terrain, de ne pas agir seul et de faire ce que j’appelle un “one-shot“, c’est-à-dire “trouver l’objectif, prendre contact et agir selon la situation“, de la pure tactique militaire façon “Seal’s“… (Les Marines US).
J’explique mon choix à la maman en lui faisant promettre d’appliquer sans discuter mes décisions, ce qu’elle accepte sans compromis.
En réalisant que, peut-être, elle va revoir ces enfants dans les heures qui suivent, la maman devient silencieuse comme si l’émotion la rendait amorphe…
Parfois, la sensation d’être perdus nous énerve, mais n’entame pas notre patience, puis soudain, au détour d’un virage la plaque indiquant Bzeedine apparaît !
Je peux sentir le cœur de la maman battre la chamade.
A vitesse modérée, sans faire d’arrêts, nous traversons le village pour repérer les lieux.
C’est la maman qui repère en premier la maison correspondant aux informations reçues.
Après avoir donné mes instructions pour préparer une éventuelle fuite en catastrophe, la maman et moi descendons de la voiture.
Un petit sentier donne accès a la maison qui s’avère être une grande villa cossue, je suis héberlué, mais je continue ma mission…
De la main gauche je re-positionne derrière moi celle qui va enfin revoir ses enfants depuis tant d’années…et de la main droite je carillone…
Une femme ouvre la porte et, coup de théâtre, il s’agit de la belle sœur de la maman !
Surprise et très mal-à-l’aise, elle nous dit que les enfants sont absents.
Quelques secondes plus tard, un second évènement va me faire perdre le contrôle de la situation, car une voiture arrive sur le parking-privé de la villa et la maman devine qu’il s’agit de ses enfants…
Devenue incontrôlable en cause de son émotion, la maman se précipite alors vers la voiture et plonge sur ses enfants, surpris de voir leur maman…
Un mélange de cris, de pleurs et d’insultes venant des enfants à destination de leur maman se font entendre alors que j’essaye de rassurer la belle sœur en lui disant que je ne suis pas venu faire un contre-enlèvement.
Des insultes !!!!
Pourquoi ?
La maman m’avait assuré que ses enfants avaient été enlevés, qu’ils étaient séquestrés dans une petite maison au milieu des bombardements et que leur vie était en danger !
Or, tout est calme, nous sommes en zone Chrétienne, la maison s’avère être une villa cossue, de grand luxe, absolument pas au milieu de quelconques bombardements et les enfants n’ont pas l’air d’apprécier ce qui se passe !!!
Dans quoi me suis-je fourré ?
Aurais-je été dupé malgré toutes les précautions prises et après les renseignements que j’avais obtenus ?
Débordé par la situation, je remarque qu’une des personnes qui accompagnait les enfants s’encourt vers la rue en appelant à l’aide…
Sans hésiter, je décide alors d’abréger ce moment non préparé et de privilégier notre sécurité.
Comme promis, la maman s’exécute au son de ma voix et sans courir, mais d’un pas pressé, nous rejoignons la voiture qui nous attend moteur tournant.
Discrètement, pour ne pas inquiéter sa fille et la maman, Jo me fait comprendre qu’il a vu courir des gens armés vers une voiture et s’engager dans le sentier de la maison dans le but de nous coincer !
Le sentiment d’une mission ratée, en sus du stress de notre fuite, fait que durant plus d’une demi-heure sur cette route de montagne, pas un mot ne sera dit dans la voiture.
Arrivés à un croisement ou à gauche on va vers une planque et a droite on retourne vers Beyrouth, je demande à la maman de prévenir, par GSM, l’ambassade Belge que nous avons localisé les enfants.
J’en profite pour m’assurer que personne nous suit, ce qui rassure Jo.
Surpris par notre présence sur place, l’ambassade nous explique qu’il n’y avait pas lieu de les localiser puisqu’ils ont toujours été dans la villa de leur père, on nous dit aussi que pour pouvoir rapatrier les enfants il reste à réaliser diverses formalités administratives, que ce n’est pas évident de valider au Liban un Jugement Belge, qu’en plus nous sommes dans un pays en guerre, que les enfants ne sont pas maltraités… et que selon les lois, ici, les enfants et l’épouse doivent suivre le père et ses décisions…
Je décide alors de prendre la route de Beyrouth pour rejoindre l’ambassade immédiatement afin d’avoir une explication plus approfondie.
Il est plus de 18 heures quand nous entrons dans l’ambassade ou la maman semble connaître le consul qui nous accueille, ce qui renforce mon sentiment d’avoir été grugé.
On en ressort une demie-heure heure plus tard avec l’aberrante conclusion pour moi que des motifs administratifs sont prioritaires à un état de guerre…et qu’un Jugement Belge réalisé au départ de Lois totalement différentes qu’au Liban n’a pas grande valeur éxécutoire ici !
Je comprend que la maman a cru profiter de la guerre au Liban pour tenter un “coup de force” sans me dévoiller toutes les réalités.
Je suis furieux !
La maman est démoralisée et fatiguée, c’est pour cette raison que je décide d’aller nous reposer chez Jo.
Sur le chemin, une bombe explose à moins de 50 mètres de nous sur une maison et la chance nous sourit à nouveau puisque nous ne sommes pas blessés.
Arrivés chez Jo pour notre seconde nuit, son cousin débarque en catastrophe dans la maison !
Il vient nous annoncer que le Hezbollah à découvert notre planque et a l’intention de venir nous enlever pour que nous servions d’otages. J’ai l’impression que le père des enfants à quelques relations aussi bien avec les Libanais officiels qu’avec le Hezbollah tout en vivant en zone Chrétienne !
Loin de chez nous, rien n’est sécurisant…
Pour tenter d’oublier d’avoir été grugé, je me dis qu’au moins la maman a pu voir ses enfants, mais le souvenir des insultes que ceux-ci proféraient à son encontre me rend de nouveau mal-à-l’aise…
Je me souviens des paroles de mon “brother” Patrice/Quelqu’un qui me demandait de ne pas venir à Beyrouth car il avait le préssentiment que c’était foireux…, que j’allais risquer ma vie et celle d’autres personnes innocentes pour rien que de la vanité….
Je lui avais rétorqué qu’il n’y connaissais rien en ce demaine…
Il m’avait souhaité bon vent…: “Tu verras, cette maman, je l’ai vue sanglotter des larmes de crocodile lorsqu’elle est passée sur RTL-TVi, je ne la sens pas, je suis certain qu’elle te cache des choses…” !
Parce que la nuit tombe et que les drônes reprennent leur ronde, je décide de rester sur place mais de partir à 5 heures du matin.
Je m’endors sur nos sacs de voyages déjà bouclés au cas ou…
Le lever du soleil accompagne notre fuite discrète vers la Syrie et nous découvrons les ravages des bombardements de la nuit.
Par prudence, nous changeons de route et traversons une ville qui nous semble trop déserte.
Une bombe ou un missile tombe alors juste derrière nous, à 50 mètres environ, ce qui explique pourquoi les habitants avaient quitté la ville…
La chance nous accompagne une nouvelle fois et nous en sortons indemnes pour la cinquième fois en 48 heures.
Le contexte de cette mission un tantinet surréaliste et la conviction que les enfants sont à l’abri, me pousse à opter pour l’option de rentrer en Belgique… et pour cette raison je décide de retourner à l’ambassade pour, si possible, être évacué et mettre la maman en sécurité.
Arrivés sur place et avant de rentrer dans l’ambassade, Jo me prends par le bras et me dit ; “Sauve mes enfants et prends-les avec toi” !
Malgré son accent et son mauvais français, l’émotion dans sa voix me touche énormément et pour toute réponse je lui dis / “Je vais essayer“…
Pour notre rapatriement directement du Liban sans devoir repasser par la Syrie, la réponse de l’Ambassade est “oui“…
Le lendemain à 6 heures du matin nous sommes dans le dernier convoi, mais pour les enfants de Jo une directive de Bruxelles n’autorise que le rapatriement de la famille directe…
Mon regard de désolation répond à Jo et la peine qui apparaît alors sur son visage me blesse énormément !
Un long moment de silence s’immisce alors entre nous pendant que Jo cherche un endroit ou passer la nuit en sécurité.
Le jour à attendre la nuit, la nuit à attendre le jour…, j’écoute les commentaires de quelques journalistes qui préparent leurs “papiers” ou les “flash” qui seront envoyés par satellite via leurs portables réliés “Bluetooth” à une antenne parabolique portable…
J’en profite également pour discuter avec l’un et l’autre…
Le temps est long à attendre !
“Depuis les raids aériens Israéliens, Beyrouth est coupé en deux. Le centre et le nord sont épargnés où la vie continue à peu près normalement, alors que les faubourgs sud, plus pauvres, contrôlés par le Hezbollah, sont réduits à l’état de ruine…
Le centre de Beyrouth continue à mener une vie normale. Les restaurants accueillent leurs clients, la vie nocturne bat son plein, les commerces sont ouverts. A quelques kms de là, dans les banlieues sud, contrôlées par le Hezbollah, les destructions provoquées par les raids aériens Israéliens, donnent une image de tremblement de terre.
Depuis le début des bombardements, la capitale du Liban est physiquement coupée en deux, d’un côté les quartiers contrôlés par le Hezbollah, détruits, de l’autre tout le reste de la ville, épargné et même juste un peu plus tranquille que d’habitude.
Le faubourg Hret Hraik qui abrite le quartier général du Hezbollah est complètement en ruine. Hadet, Baabda, Kfarchima et Chouaifate ont été également bombardés, mais moins intensément. Ce contraste révèle une profonde et croissante division entre le sud chiite, moins aisé, plus religieux, et le centre urbain, habité essentiellement de sunnites, de druses et de chrétiens, qui a construit et bénéficié du boom économique tant attendu.
Le pays va dans deux directions opposées. D’une part, le Hezbollah et la guerre. De l’autre, les Libannais libres qui veulent vivre, construire et aller avec le monde, où qu’il aille“, me déclare Ghassan Salhab, un cinéaste Libanais chiite laïque de la classe moyenne.
“Pour le sud, occupé par les Israéliens pendant plus de dix ans, le chef du Hezbollah, Sheik Hassan Nasrallah, est un héros populaire qui a chassé les Israéliens.
Mais de nombreux Libanais des classes moyennes, qui ont travaillé dur pour la renaissance économique, sont fatigués de la guerre et reprochent au Hezbollah le kidnapping des deux soldats Israéliens et l’assassinat de huit autres, ce qui a allumé la mèche le 12 juillet. Quelle folie que de réveiller tout cela. Le Hezbollah savait exactement ce qui allait se passer, mais l’a fait quand même“, me dit Issam Saleh, un ingénieur chiite laïque.
“Les divisions ont toujours été le lot du Liban. Dans les années ’70 et ’80, les différents groupes religieux du pays se sont affrontés dans une guerre civile d’une incroyable sauvagerie. De nombreux chrétiens ont alors accueilli les Israéliens comme des libérateurs. Mais le conflit actuel est plus troublant, en partie parce que ses racines sont plus profondes. Au lieu de tenter de chasser un groupe étranger, l’OLP, Israël s’est engagé dans une guerre avec le Hezbollah, un groupe né au Liban ! Le Hezbollah a plongé avec impatience dans la bataille tant espérée, la définissant avec son langage intégriste, difficile à désamorcer avec des négociations. La division a éclaté au grand jour en 2005, lorsque des centaines de milliers de manifestants, chrétiens et musulmans ont défilé en soutien au gouvernement après l’assassinat du premier Ministre Rafik Hariri, qui avait conduit la transformation du Beyrouth d’après-guerre, de zone morte en destination de vacances. Au même moment, le Hezbollah et des milliers de ses supporters chiites organisaient une contre-manifestation de soutien aux forces Syriennes que le gouvernement tentait d’expulser du Liban et qui avaient organisé l’assassinat d’Hariri. De nombreux Libanais ne le pardonneront pas au Hezbollah… A ce point, que le Hezbollah aille au diable“, me déclare Sukhum Mourhad, un journaliste Libanais.
Un autre journaliste Libanais s’approche alors de moi et me demande si je suis bien Patrick Henderickx, la personne qui a pour vocation de sauver les enfants enlevés, ou victimes de pédophilie…
“Qu’est ce que vous êtes venu faire dans NOTRE galère ?“… me demande t’il…
Je lui explique ma mission, il écoute puis se met à rire…
“Votre visite au Liban n’aura pas été vaine, vous aurez fait plaisir à cette maman qui aura pu embrasser ses enfants, mais sachez qu’ils ne sont pas plus ici qu’à Bruxelles en insécurité. Comment peut-on prendre les Libanais pour des demeurés qui ont besoin de médicaments et dont les enfants devraient être envoyés loin de leur patrie, en belgique ? Pour être parqués comme des bètes dans des centres fermés en attente d’être renvoyés ? Nous avons notre dignité Monsieur Henderickx, laissez-nous progresser de par nous-même, comme les belges l’ont fait en 1830… De plus, ces enfants sont Libanais ! Avez vous un enregistreur portable ? Je voudrais que vous publiez mon témoignage en europe et il risque d’être assez long…“.
Je lui dis que oui…
Il me demande alors de le mettre en marche…
“L’ancien Président du Liban, Bechir Gemayel, a déclaré que depuis le retrait syrien, le gouvernement est le maillon faible. La Syrie a toujours des ramifications au Liban. Le président de la République, Emile Lahoud, est inféodé à Damas et, sur le terrain, son allié est le Hezbollah. Il est clair que le Hezbollah a engagé le pays dans un duel qui dépasse le cadre libanais. Il s’agit d’une confrontation de la Syrie et de l’Iran avec le reste du monde
Les politiques, les journalistes et les intellectuels du Liban ont connu, ces jours, le choc de leur vie. Ils savaient bien que le Hezbollah avait constitué un Etat indépendant dans notre pays, un Etat incluant tous les ministères et les institutions parallèles, en double de ceux du Liban. Ce qu’ils ignoraient, qu’ils découvrent à la faveur de cette guerre, et qui les paralyse de surprise et d’effroi, ce sont les dimensions de cette phagocytose.
De fait, notre pays était devenu une extension de l’Iran, et notre soi-disant pouvoir politique servait, de surcroît, de paravent politique et militaire aux islamistes de Téhéran. Nous avons découvert soudain que Téhéran avait stocké plus de 12.000 missiles, de tous types et de tous calibres, sur notre territoire et qu’il avait patiemment, systématiquement, organisé une force supplétive, avec le concours des Syriens, qui s’appropriaient davantage jour après jour, toutes les chambres de la Maison-Liban. Figurez-vous que nous hébergeons des missiles sol-sol sur notre territoire, les Zilzal, et que le tir de tels engins à notre insu a le pouvoir de déclencher un conflit stratégique régional et, potentiellement, l’anéantissement du Liban.
Nous savions que l’Iran, par l’intermédiaire du Hezbollah, construisait une véritable ligne Maginot au Sud mais ce sont les images de Maroun el-Ras et de Bint J’bail qui nous ont révélé l’ampleur de ces travaux. Une dimension qui nous a fait comprendre plusieurs choses d’un seul coup : que nous n’étions plus maîtres de notre sort. Que nous ne possédions pas le commencement des moyens nécessaires à inverser le cours de cet état de fait, et que ceux qui avaient fait de notre pays la base avancée du combat de leur doctrine islamique contre Israël n’avaient pas la moindre intention de renoncer volontairement à leur emprise.
Les discussions de salut national concernant l’application de la résolution 1559 et réunissant la plupart des courants politiques libanais n’étaient donc que de la poudre aux yeux. L’Iran et la Syrie n’avaient pas investi des milliards de dollars pour militariser le Liban afin d’y mener leur bataille, dans l’objectif d’accéder au désir des Libanais et de la communauté internationale qu’ils prennent leur quincaillerie et qu’ils partent la réinstaller chez eux.
Et puis l’indécision, la lâcheté, la division et l’irresponsabilité de nos dirigeants sont telles, qu’ils n’ont même pas eu à forcer leur talent. Pas eu besoin d’engager un bras de fer avec les autres composantes politiques du pays des cèdres. Ces dernières se sont montrées et continuent de se montrer inconsistantes.
Certes, notre armée, réformée durant des années par l’occupant syrien pour ne plus jamais pouvoir remplir son rôle de protectrice de la nation, n’avait pas la capacité à se mesurer aux miliciens du Hezb. Notre armée à qui il est plus dangereux de faire appel, en raison des équilibres explosifs qui constituent chacune de ses brigades, que de l’enfermer à double tour dans ses casernes. Une force encore largement inféodée à ses anciens maîtres étrangers, au point d’être incontrôlable ; au point d’avoir collaboré avec les Iraniens pour mettre NOS radars côtiers à disposition de leurs missiles, qui ont bien failli couler un bâtiment Israélien en face de Beyrouth. Les éléments non-Hezbollah du gouvernement ignoraient, quant à eux, et jusqu’à l’existence de missiles sol-mer sur notre territoire… Cela a valu la destruction ultra justifiée de tous NOS radars par l’armée des Hébreux. Et encore nous en tirons-nous à bon compte dans cette embrouille. On a beau jeu désormais de pleurnicher et de jouer hypocritement le rôle des victimes. Nous nous y entendons à nous faire plaindre et à prétendre que nous ne sommes jamais responsables des horreurs qui se déroulent à intervalles réguliers sur notre sol. Bien sûr cela n’est que foutaise ! La résolution 1559 du Conseil de Sécurité, exigeant de NOTRE gouvernement qu’il déploie NOTRE armée sur NOTRE territoire souverain, le long de NOTRE frontière internationale avec Israël et qu’il désarme toutes les milices évoluant sur NOTRE sol, a été votée le 2 septembre 2004.
Nous disposions de deux ans pour mettre en œuvre cette résolution et pour garantir ainsi un avenir paisible à nos enfants et nous n’avons strictement rien fait pour cela. Notre plus grand crime, mais ça n’est pas le seul, encore, n’est pas de ne pas y être parvenus, mais de n’avoir rien tenté ni rien entrepris. Et cela, ce n’est la faute de personne d’autre que celle des minables politiciens libanais. Notre gouvernement, même depuis le départ de l’occupant syrien, a laissé les bateaux et les camions d’armes se déverser chez nous. Sans même se préoccuper de regarder leur chargement. Il a hypothéqué les chances de renaissance de ce pays en confondant le Printemps de Beyrouth avec la libération de Beyrouth. En fait, nous venions d’obtenir une occasion, une sorte de moratoire inespéré, pour nous permettre de prendre notre avenir en mains, rien de plus. Dire que nous n’avons même pas été capables de nous entendre pour “pendre” Emile Lahoud, le pantin des Al-Assad, sur la Place des Martyrs et qu’il est toujours président de ce que certains s’entêtent à appeler notre république… Il n’y pas à chercher beaucoup plus loin : nous sommes ce que nous sommes, c’est-à-dire pas grand-chose. Toutes les personnes assumant des responsabilités publiques et informationnelles dans ce pays sont responsables de la catastrophe. Sauf ceux de mes confrères, journalistes et éditeurs, qui sont morts, assassinés par les barbouzes syriens, parce qu’ils étaient nettement moins lâches que ceux qui ont leur ont survécu. Et Lahoud est resté à Baabdé, le palais du président de la République du Liban. Et lorsque je parle de catastrophe, je n’entends pas l’action menée par Israël pour répondre à l’agression de ses civils et de son armée, qui s’est produite depuis notre sol et que nous n’avons strictement rien fait pour éviter, et dont nous sommes conséquemment responsables. Toute dérobade à cette responsabilité, certains, ici, n’ont pas les notions du droit des nations minimales nécessaires à le comprendre, signifie que le Liban, en sa qualité d’Etat, n’existe pas.
L’hypocrisie se poursuit : même certains éditorialistes du respectable, mettent dos à dos la sauvagerie du Hezbollah et celle des Israéliens. Honte ! Veulerie ! Et nous serions qui, dans cette fable ? Les pauvres victimes ad aeternam des ambitions des autres ? Les hommes politiques soit soutiennent cette thèse insensée, soit se taisent. Ceux dont on attendait qu’ils parlent, qu’ils sauvent notre image, se taisent comme les autres. Et je fais précisément allusion au général Aoun, qui aurait pu passer l’épaule en clamant la vérité. Même son ennemi, Walid Joumblatt, le chef des Druzes s’est montré moins… vague. Victime ? Le Liban ? Quelle plaisanterie ! Avant l’attaque israélienne, il n’y avait plus de Liban, ce n’était plus qu’un hologramme. A Beyrouth, des citoyens innocents comme moi se voyaient interdire l’accès de certaines zones de leur propre capitale. Mais notre police, notre armée et nos juges aussi en avaient été exclus. C’était le cas, par exemple, du périmètre de commandement du Hezbollah et des Syriens dans le quartier de Haret Hreïk, en rouge sur les cartes satellites américaines. Un carré d’un kilomètre de côté, une capitale dans la capitale, gardé en permanence par une armée de Horla, possédant ses institutions, ses écoles, ses crèches, ses tribunaux, sa radio, sa télévision et surtout… son gouvernement. Un “gouvernement” qui a décidé seul, à la place des potiches de celui du Liban, dans lequel le Hezbollah a également ses ministères, d’agresser un Etat voisin, avec lequel nous n’entretenons aucun différent substantiel ou fondé, et de NOUS plonger ainsi dans un conflit sanglant. Et si attaquer un Etat souverain sur son territoire, assassiner huit de ses soldats, en kidnapper deux autres et, simultanément, lancer des roquettes sur neuf de ses villes ne constitue pas un casus belli, il faudra alors revoir sérieusement la définition de ce principe juridique. Alors ils en sont presque tous, ces politiciens lâches, y compris de nombreux leaders et religieux chiites eux-mêmes, à bénir chaque bombe qui se détache d’un F-16 juif et qui vient réduire à l’état lunaire l’insulte à notre souveraineté que constituait Haret Hreïk, en plein cœur de Beyrouth. Sans les Israéliens, comment aurions-nous fait pour recevoir une nouvelle chance, que nous ne méritons en aucune façon, de reconstruire notre pays ? Chaque fortin irano-syrien que Jérusalem détruit, chaque combattant islamique qu’elle élimine, et c’est le Liban qui se remet proportionnellement à revivre ! Les soldats d’Israël font, une nouvelle fois, notre travail. A nouveau, comme en 82, nous assistons, lâches, terrés, minables et en les insultant, en plus, à leur sacrifice héroïque qui nous permet de conserver l’espoir. De ne pas être engloutis dans les entrailles de la terre. Car, bien évidemment, à force de nous être souciés du Liban-Sud comme de notre dernière chemise, d’avoir laissé l’étranger se saisir des privilèges qui nous appartenaient, nous n’avions plus la capacité de recouvrer notre indépendance et notre souveraineté. Si, à l’issue de cette guerre, l’armée libanaise reprend le contrôle de son territoire et se débarrasse de l’Etat dans son Etat, qui œuvrait à la mort par asphyxie du dernier cité, ce sera uniquement grâce à Tsahal, et cela, tous ces poltrons de politiciens, de l’escroc Fouad Siniora, à Saad Hariri, le fils du pilleur du Liban, et au général Aoun-le-droit, le savent parfaitement.
Quant aux destructions causées par les Israéliens…, que voilà une autre imposture : regardez la carte satellite que je vous donne, Monsieur Patrick ! J’ai positionné, tant bien que mal, MAIS DANS DES PROPORTIONS CORRECTES, les parties de ma capitale qui ont été détruites par Israël. Il s’agit de Haret Hreïk – en totalité – et des demeures des chefs du Hezbollah, situées dans la grande banlieue chiite de Daya et que j’ai encadrée en bleu. En plus de ces deux zones, Tsahal a fait sauter un immeuble de commandement du Hezbollah de 9 étages, dans la city de Beyrouth, plus haut sur la carte que Haret Hreïk et légèrement à gauche (au nord-ouest). Il s’agissait du “perchoir” de Nasrallah à l’intérieur de la cité, par lequel il affirmait sa présence-prédominance sur nous. Un entrepôt d’armes syriennes dans le port, deux radars de l’armée, que des officiers chiites avaient mis à la disposition du Hezb, et un camion suspecté de transporter des armes, dans le quartier chrétien d’Achrafieh. De plus, les infrastructures routières et aéroportuaires ont été mises hors d’état de fonctionner : elles servaient à nourrir le Hezbollah en armes et en munitions. Hors ceci, Tsahal n’a rien touché, rien abîmé, et tous ceux qui parlent de la “destruction de Beyrouth” sont soit des menteurs, soit des Iraniens, soit des antisémites, soit des absents. Même les maisons situées à une ruelle des objectifs que j’ai mentionnés n’ont pas été touchées, pas même n’ont-elles subi une égratignure ; c’est, en regardant ce travail, que l’on comprend la signification du concept de “frappes chirurgicales” et que l’on peut s’extasier devant la dextérité des pilotes juifs.
Le quartier rasé, celui où les demeures appartenant aux huiles de l’organisation terroriste ont été détruites.
Beyrouth, tout le reste de Beyrouth, 95 % de Beyrouth, vit et respire mieux qu’il y a deux semaines. Tous ceux qui n’ont pas fait cause commune avec le terrorisme savent qu’ils n’ont strictement rien à craindre des avions d’Israël, bien au contraire ! A titre d’exemple, hier soir, le restaurant où je suis allé manger était plein à craquer et j’ai dû attendre 21h 30 pour pouvoir m’attabler. Les gens sont tout sourire, détendus, mais personne ne les filme : drôle de destruction de Beyrouth, n’est-il pas ? Bien sûr, il y a les quelques 500.000 réfugiés du Sud, qui vivent une véritable tragédie et qui ne sourient pas, eux. Mais Jean Tsadik, qui a les yeux rivés sur Kfar Kileh, et dont j’ai appris que l’on pouvait croire chaque parole, m’assure que la quasi-totalité des maisons desdits réfugiés sont intactes. Ils pourront donc y revenir dès que le Hezbollah aura été vaincu. La défaite des intégristes chiites d’obédience iranienne est imminente. Les bilans communiqués par les séides de Nasrallah et par la Croix-Rouge libanaise sont trompeurs : premièrement, sur les 400 morts déclarés par le Liban, seuls 150 sont de vraies victimes civiles collatérales de la guerre, les autres étaient des miliciens sans uniforme au service de l’Iran. Le reportage photographique de Stéphane Juffa “Les civils des bilans libanais”… pour notre agence constitue à ce jour la preuve tangible unique de ce gigantesque bidouillage morbide. Ce qui rend ce document éminemment important.
De plus, l’organisation de Hassan Nasrallah n’a pas perdu 200 combattants, comme l’affirme Tsahal. Ce chiffre ne concerne que les combats s’étant déroulés à la frontière, encore est-il sous-évalué par les Israéliens, pour une raison que j’ignore, d’une centaine de miliciens éliminés. Le bilan réel des pertes du Hezbollah, celui qui inclut les morts de Beyrouth, de la Bekaa, de Baalbek et de ses autres camps, bases de lancement de roquettes et de missiles et dépôts d’armes et de munitions s’élève à 1.100 Hezbollani supplémentaires qui ont définitivement cessé de terroriser et d’humilier mon pays. Comme l’immense majorité des Libanais, je prie pour que personne ne mette fin à l’attaque israélienne avant qu’elle n’ait fini de désosser les terroristes. Je prie pour que les soldats hébreux pénètrent dans tous les recoins du Sud-Liban et en chassent, à notre place, la vermine qui s’y accroche. Comme l’immense majorité des Libanais, j’ai mis le Champagne au frais pour fêter la victoire des Israéliens. Mais, au contraire d’eux, je sais admettre, pour paraphraser Michel Sardou, qu’ils combattent également pour notre liberté, une autre bataille “où toi tu n’étais pas” ! Et, au nom de mon peuple, je veux exprimer ma reconnaissance infinie aux parents des victimes israéliennes, civiles et militaires, dont les êtres aimés sont aussi tombés pour que je puisse vivre debout dans mon identité. Qu’ils sachent que je les pleure avec eux. Quant à la clique de minables qui fait florès à la tête de mon pays, il est temps qu’ils comprennent qu’après cette guerre, après que nos alliés naturels nous auront débarrassé de ceux qui nous empêchaient de reconstituer un Etat, un cessez-le-feu ou un armistice ne suffiront pas. Pour assurer l’avenir du Liban, il faudra qu’ils comprennent qu’il est temps de faire la paix avec ceux contre qui nous n’avons aucune raison de faire la guerre. Il n’y a, en effet, que la paix qui assure la paix. Il faut bien que quelqu’un le leur dise, car dans ce pays, on n’a pas appris ce qu’étaient les lapalissades“…
Il me tends sa carte de visite.
Je l’enfoui dans une de mes poches…
5 heures du matin, je réveille tout mon monde.
De retour devant l’ambassade belge, on m’informe que nous ne pouvons embarquer sur l’aéroport de Beyrouth totalement détruit, ni dans le port…
Il faut repartir en Syrie.
Les 3 autocars, qui vont nous faire traverser le Liban en convoi jusqu’à Alep, le second aéroport Syrien situé dans le nord à près de 600 Kms, se remplissent déjà des 90 derniers Belges évacués.
Des scènes d’adieux déchirants se font entendre et chacun essaye d’être aussi fort que possible.
Soudain, des larmes dans les yeux de Jo me font hésiter sur mon départ, l’impression de l’abandonner me déstabilise… et durant quelques secondes, la culpabilité remets en cause mon départ.
Comprenant mes doutes il pause sa main sur mon épaule et me dit : “Tu ne peux rien faire de plus…, va et reviens quand tu veux“…
Ma lucidité reprend le dessus et je suis le dernier à embarquer dans le bus après avoir dis à Jo : “Tu as entendu et compris ce qu’a dit ce second journaliste Libanais, cela m’a perturbé, ce que je croyais blanc s’avère noir et inversément…” !
Debout et fier, Jo observe l’embarquement du dernier civil dans le bus.
C’est a ce moment précis que nos regards ce croisent et que je remarque des larmes dans ces yeux…
Jamais je n’oublierai l’image de MON ami, seul sur ce bout de trottoir.
Pour rejoindre la frontière notre convoi longe le bord de mer, croise un convoi du Hezbollah et finalement 10 heures plus tard on embarque dans un hercule C-130 de l’armée belge venu nous exfiltrer.
Il est 3 heures du matin à Melsbroek, l’aéroport militaire de Bruxelles, quand nous touchons le sol belge …
Alors que des cris de joies se mélangent à des pleurs de bonheur, je croise Nancy, la maman qui m’a attiré dans ce guépier…
Je marque un temps d’arrêt et applique mes fameuses 3 règles :
– Pas de merci…
– Pas d’au revoir…
– Pas d’argent…
Au moment de mettre tout ceci en ligne sur le web, je me rend compte que j’ai perdu la carte de visite du journaliste Libanais !
Régulièrement je reçois des nouvelles de Jo…, il est toujours vivant…
Patrick Henderickx
Fondation MILA
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